Les yeux fixés sur le prix du service fidèle

Cinquième dimanche du carême – Une ferme discipline nous prépare à la récompense.

Christianity Today February 12, 2024
Intersection, par Curtis Newkirk. Acrylique sur panneau de bois. 24 x 24″. 2021.

Tous les athlètes à l’entraînement s’imposent une discipline sévère. Ils le font pour gagner une couronne qui se fane vite ; mais nous, nous le faisons pour gagner une couronne qui ne se fanera jamais. (1 Corinthiens 9.25 – NFC)

Lecture proposée : 1 Corinthiens 9.24-27

La ville de Corinthe était l’hôte des Jeux isthmiques. Organisés tous les deux ans (et non tous les quatre ans, comme les Jeux olympiques), ils célébraient Poséidon, le dieu de la mer. Les athlètes s’entraînaient pendant des mois pour se préparer à la compétition et pouvoir accomplir leurs prouesses devant un public avide d’exploits.

Lorsque l’apôtre Paul met l’église de Corinthe au défi de « courir de manière à remporter le prix » (1 Co 9.24), il utilise une image familière pour eux : celle de l’athlète. Celui-ci s’entraîne « pour obtenir une couronne qui va se détruire », écrit Paul. « Mais nous, c’est pour une couronne indestructible. » (v. 25) Paul exhorte ses lecteurs à considérer leur vie chrétienne comme un accomplissement sportif : s’entraîner, courir, se battre et bien finir.

Nous aimons souligner la réalité du salut comme cadeau. Un cadeau et un prix sont deux choses bien différentes. Un don est offert gratuitement ; un prix se mérite et se gagne. Le prix auquel Paul fait référence en 1 Corinthiens 9 n’est pas le salut, mais la récompense des œuvres que nous accomplissons en tant que peuple de Dieu sauvé. La façon dont nous vivons notre salut sur terre a des répercussions réelles, à la fois dans le présent et dans l’éternité. Plus tôt dans sa lettre à l’église de Corinthe, Paul l’exprime par la métaphore de la construction d’une maison :

« personne ne peut poser un autre fondement que celui qui a été posé, à savoir Jésus-Christ. Que l’on construise sur ce fondement avec de l’or, de l’argent, des pierres précieuses, du bois, du foin ou de la paille, l’œuvre de chacun sera dévoilée : le jour du jugement la fera connaître, car elle se révélera dans le feu et l’épreuve du feu indiquera ce que vaut l’œuvre de chacun. » (1 Co 3.11-13)

Toute personne qui suit le Christ reçoit le don gratuit du salut par la grâce de Dieu (Ep 2.8). La façon dont nous bâtissons à partir de ce don constituera la mise en œuvre de notre salut (Ph 2.12). Si nous construisons avec du foin et de la paille — des choses sans valeur et temporaires — notre vécu de foi ici-bas n’aura pas grand-chose à mettre en avant. Mais lorsque nous construisons avec l’or, l’argent et les joyaux coûteux d’une vie chrétienne mûre, de bonnes œuvres accomplies pour ce monde, la qualité de notre œuvre sera finalement révélée.

Pour construire de cette manière, nous devons être forts. Comme un athlète qui s’entraîne pour les jeux, nous devons discipliner notre corps et le garder sous contrôle (1 Co 27), non pas par légalisme, par honte ou par peur, mais par amour pour le Dieu qui nous a sauvés. La discipline — vivre une vie intégrant certaines limites — apporte la liberté. En disant non aux impulsions malsaines et en écoutant l’Esprit saint, nous sommes libérés pour développer des relations plus profondes, une meilleure santé, une foi plus forte et un témoignage plus parlant. Une vie disciplinée n’est pas sans but, mais recentrée. Nous avons fixé nos yeux sur le prix que représentera le « C’est bien, bon et fidèle serviteur » (Mt 25.21) de notre maître et pouvons courir en gardant à l’esprit le désir de son approbation.

Nous ne choisissons pas la discipline pour mériter le salut, nous la choisissons parce que nous sommes sauvés. Parce que nous sommes en Christ, une nouvelle création, nous devons choisir de dire « non » à certaines choses et de dire « oui » à ce qui est meilleur — en matière de gestion du temps, de repos, de connexion, de discipulat, de santé ou encore de croissance. La saison du carême peut nous permettre de dire un « non » temporaire à certaines choses afin de faire l’expérience d’un « oui » à Dieu beaucoup plus profond et plus satisfaisant. Tout domaine dans lequel nous apprenons à retarder notre satisfaction par amour pour Dieu (et non par légalisme) nous conduit à une expérience plus profonde de son affection et de la force d’une vie guidée par l’Esprit.

La couronne des Jeux isthmiques était en pin. Dans la culture grecque et romaine, le pin représentait la vie éternelle. Pourtant, la couronne reçue par l’athlète vainqueur se décomposait en quelques semaines. Ces couronnes ne duraient pas, mais notre prix durera toujours (1 Co 9.24-25). La récompense que nous recevons pour une vie chrétienne fidèle et disciplinée est éternelle et immuable. Les chemins que nous parcourons pour faire fructifier notre salut sont vus et honorés par notre Dieu, et lorsque nous nous trouvons face à lui, nous pouvons savoir que chaque effort invisible, chaque épreuve durement endurée, chaque renoncement douloureux en valait la peine. Puissions-nous dire avec Paul : « J’ai combattu le bon combat, j’ai terminé la course, j’ai gardé la foi. » (2 Tm 4.7)

À méditer



Comment la période du carême peut-elle être le moment de certains « non » temporaires pour un « oui » plus profond à Dieu ?

Comment Paul utilise-t-il la métaphore de l’athlète pour transmettre une vérité spirituelle plus profonde ? Auriez-vous dans votre propre vie des exemples de ces réalités ?

Phylicia Masonheimer est la fondatrice de Every Woman a Theologian, l’autrice de deux livres et l’animatrice du podcast Verity.

Cet article fait partie de Pâques au quotidien, notre série de méditations pour vous accompagner personnellement, en petit groupe ou en famille durant le carême et les fêtes de Pâques 2024.

Pour être informé de nos nouvelles traductions en français, abonnez-vous à notre newsletter et suivez-nous sur Facebook ou Twitter.

Pourquoi les tempêtes sont-elles nécessaires à la survie ?

Quatrième dimanche du carême – Le carême nous aide à voir les épreuves de la vie d’une manière nouvelle.

Christianity Today February 12, 2024
The Storm, par Joel Sheesley. 40 x 50″. 2002.

Mes frères et sœurs, considérez comme un sujet de joie complète les diverses épreuves auxquelles vous pouvez être exposés, sachant que la mise à l’épreuve de votre foi produit la persévérance. (Jacques 1.2-3)

Lecture proposée : Jacques 1.2-4

« Tu as failli mourir, petit frère. »

Il avait à peine prononcé ces mots que mon frère aîné s’affaissait sur une chaise à côté de mon lit d’hôpital.

J’avais souffert pendant des jours après qu’une intervention chirurgicale relativement banale se soit transformée en une épuisante infection postopératoire de tout le corps. Mon frère, chirurgien généraliste, n’était pas du genre à mâcher ses mots. Son épuisement montrait bien qu’il n’exagérait pas.

Il avait passé des jours à étudier mes dossiers médicaux, demandant test sur test dans une quête désespérée pour diagnostiquer la bactérie qui essayait de me tuer. Bien que son humeur du moment ait été résolument maussade, c’est lui qui m’avait sauvé la vie grâce à une dernière intervention chirurgicale corrective. « Tu vas t’en sortir, mon frère. Tu vas t’en sortir. »

Ce soir-là, alors que j’étais allongé sur mon lit d’hôpital, un orage s’est abattu sur la ville. Le bruit apaisant de la pluie m’a tiré de mon lit pour la première fois depuis des jours, et je me suis traîné comme un vieillard jusqu’à une chaise près de la fenêtre, écoutant les gouttes de pluie tomber puis couler en petits ruisseaux sur le rebord de la fenêtre. En fermant les yeux, j’ai réfléchi au mystère des épreuves, tandis qu’un verset de la Bible résonnait dans ma tête :

« Mes frères et sœurs, considérez comme un sujet de joie complète les diverses épreuves auxquelles vous pouvez être exposés, sachant que la mise à l’épreuve de votre foi produit la persévérance. Mais il faut que la persévérance accomplisse parfaitement sa tâche afin que vous soyez parfaitement qualifiés, sans défaut, et qu’il ne vous manque rien. » (Jc1.2-4)

Pour moi, ce passage a souvent résonné comme une aspiration sadique à la souffrance. Pour quelqu’un qui a passé une grande partie de sa vie à vouloir éviter l’inconfort, l’idée de joie dans la lutte a quelque chose de blasphématoire. Le fait d’être croyant ne conduit-il pas à la bénédiction ? Comment la douleur et la souffrance des épreuves pourraient-elles être considérées comme « un sujet de joie complète » ?

Dans les années 1980, un centre de recherche appelé Biosphère II a construit un écosystème fermé pour tester ce qui serait nécessaire pour coloniser l’espace. Tout a été soigneusement choisi et prévu, et les arbres plantés à l’intérieur ont poussé et ont semblé prospérer. Puis ils ont commencé à tomber.

J’imagine que les botanistes ont dû observer la chose avec étonnement, ne trouvant aucune trace de maladie, d’acarien ou d’autre parasite. Il n’y avait rien pour faire chuter les arbres. Les conditions étaient parfaites. C’est alors qu’ils se sont rendu compte de ce qui manquait, quelque chose de très simple et pourtant absent de la structure qu’ils avaient mise en place : le vent.

L’air était trop calme, trop serein, une facilité qui garantissait que les arbres étaient condamnés. Ce sont la pression et les variations du vent naturel qui permettent aux arbres de se renforcer et à leurs racines de se développer. Bien que les arbres de Biosphère II aient eu tout le soleil, la terre et l’eau dont ils avaient besoin, en l’absence de vents changeants, ils ne développaient aucune résilience et finissaient par tomber sous le poids de leur propre abondance.

Se pourrait-il que ce soient nos difficultés, plus que nos joies, qui nous rapprochent de Dieu ? Elles nous rappellent notre désespoir et nous ramènent à la seule source de vie abondante. Romains 5.3-5 nous encourage ainsi :

Bien plus, nous sommes fiers même de nos détresses, sachant que la détresse produit la persévérance, la persévérance la victoire dans l’épreuve, et la victoire dans l’épreuve l’espérance. Or cette espérance ne trompe pas, parce que l’amour de Dieu est déversé dans notre cœur par le Saint-Esprit qui nous a été donné.

J’ai passé la plus grande partie de cette nuit près de la fenêtre tandis que la pluie continuait à tomber. Alors que mon corps se remettait lentement, j’ai ressenti la paix de Dieu comme une étreinte chaleureuse, me rappelant qu’il avait été avec moi à chaque étape de mon voyage aux portes de la mort, guidant les mains de mon frère alors qu’il me sauvait la vie, remplissant cette chambre d’hôpital de son Esprit.

Pendant que nous traversons cette période de carême avec nos diverses luttes, puissions-nous commencer à voir les épreuves et les tempêtes d’une nouvelle manière. Même si la douleur continue naturellement à nous rebuter, nous pouvons voir la main de Dieu lorsque les vents de l’épreuve s’abattent sur nous, et nous pourrons nous consoler en constatant que nos racines sont de plus en plus profondes.

À méditer



Il est souvent difficile de percevoir les épreuves de manière positive lorsque nous les subissons. En réfléchissant à votre vie, comment les expériences difficiles que vous avez vécues vous ont-elles transformé pour le mieux ? Qu’avez-vous appris ?

Dans vos moments les plus sombres, qu’est-ce que Dieu vous a appris sur lui-même ? Comment vous a-t-il réconforté et aidé ? Y a-t-il quelqu’un autour de vie, qu’il s’agisse d’un ami ou d’un membre de votre famille, que vous pourriez encourager aujourd’hui en partageant votre histoire ?

Robert L. Fuller est écrivain et cinéaste. Il vit à Waco, au Texas, avec sa femme et ses trois enfants adolescents. Il est l’auteur d’un roman de science-fiction pour adolescents à paraître.

Cet article fait partie de Pâques au quotidien, notre série de méditations pour vous accompagner personnellement, en petit groupe ou en famille durant le carême et les fêtes de Pâques 2024.

Pour être informé de nos nouvelles traductions en français, abonnez-vous à notre newsletter et suivez-nous sur Facebook ou Twitter.

À travers une saison sans réponses

Troisième dimanche du carême – Apprendre à vivre d’une espérance sereine au milieu du chagrin

Christianity Today February 12, 2024
Evening Romance par Cherith Lundin. Huile sur panneau. 30 x 48″. 2010.

L’Éternel a de la bonté pour celui qui compte sur lui, pour celui qui le recherche. Il est bon d’attendre en silence le secours de l’Éternel. (Lamentations 3.25-26)

Lecture proposée : Lamentations 3.22-26

Cette année, je tente d’apprendre à vivre d’une espérance sereine. Ma fille de huit ans est atteinte du syndrome de Down. Son parcours déjà sinueux a pris un tournant inattendu à l’âge de six mois, lorsqu’une tempête incessante de crises d’épilepsie a semé le chaos dans son cerveau et son corps. Les handicaps et les retards laissés par ces crises ont touché tous les aspects de sa vie.

Au fur et à mesure que mon mari et moi avancions dans les diagnostics, le voyage de notre famille s’est transformé en un pèlerinage lent et constant vers l’inconnu. Semaine après semaine, nous nous sommes installés sur la table de kinésithérapie avec notre fille, espérant que ses muscles sortent de leur sommeil, priant pour que l’électricité statique dans son cerveau s’apaise. Au milieu de ses luttes, nous entendions des questions d’amis et de membres de la famille bien intentionnés qui nous demandaient quand elle ferait ses premiers pas ou prononcerait ses premiers mots. Nous n’avions pas de réponses.

Les progrès ont été terriblement lents et nos efforts ont parfois été perçus comme une cause perdue. Pendant la pandémie, nous sommes passés à des séances de thérapie virtuelle et nous nous sommes accrochés à l’écran de notre ordinateur qui préservait l’espoir d’un meilleur développement de notre fille. Alors que l’isolement s’aggravait et que nos cœurs devenaient lourds d’incertitude, j’ai atteint un point où cet espoir me semblait aussi fragile que le corps de ma fille, prêt à s’abîmer au moindre contact. Mon mari a persévéré alors que je n’y arrivais pas. Alors que j’avais brusquement refermé l’ordinateur, avec le sentiment que son frémissement d’espoir s’était tu, il a continué à se présenter à ces séances de thérapie virtuelle. Il a entretenu cette lueur d’espérance même lorsque j’avais presque sombré dans le désespoir.

Le temps passant et le monde sortant de son sommeil, nous avons repris nos pèlerinages hebdomadaires vers les hôpitaux et les cliniques, garant notre monospace encombré sur les places réservées aux personnes handicapées. Aujourd’hui, notre fille est en deuxième année, toujours incapable de se lever seule, mais capable de prendre appui sur ses pieds avec l’aide d’une main secourable ou d’un déambulateur. Avec un peu d’aide et d’assurance, elle s’avance, l’espoir s’épanouissant au rythme de ses pas.

Des amis, des membres de la famille et même des connaissances ont fait des rêves récurrents où elle marchait. La première fois que j’ai fait ce rêve, je me suis réveillée en me sentant stupide d’avoir imaginé quelque chose d’aussi audacieux. Ce tendre espoir se heurtait aux couches d’autoprotection que je m’étais bâties. Pourtant, les remparts que j’ai soigneusement entretenus pendant si longtemps sont récemment tombés : je tenais les mains de ma fille debout devant moi, se balançant au rythme du groupe de louange. Pendant que nous chantions, elle s’est propulsée en avant, m’entraînant derrière ses jambières et ses baskets roses et se dirigeant de plus en plus vite vers l’avant du sanctuaire. Je l’ai prise dans mes bras et j’ai alors pu voir quelque chose je n’avais pas vu auparavant : cette profonde vérité qu’elle voulait se précipiter dans les bras aimants du Sauveur qui se soucie d’elle.

Celui qui comprend les abîmes de notre humanité — qui connaît bien nos os fatigués et nos cœurs endoloris — l’appelle sa bien-aimée, la chérit et, par un mystérieux retournement, me chérit aussi , moi, la sceptique, la cynique, la mère qui, parfois, ne peut que murmurer le mot « espoir ».

Dieu ne rejette pas les désirs que nous chérissons dans les coins tranquilles de nos cœurs. Le Dieu qui a parlé à Élie dans le silence et la tempête prend soin de nos fragiles espoirs et, comme nous le voyons dans Lamentations 3, qualifie de bonnes notre patience et notre persévérance.

Je ne sais pas si ma fille courra en toute liberté de ce côté-ci du ciel, mais je sais ceci : le Seigneur est bon pour ceux qui espèrent en lui (v. 25). Le carême nous invite à contempler notre fragilité. Rappelez-vous en cette période de méditation, alors que nous habitons encore ce monde fatigué, que même l’attente de notre espérance est un cadeau précieux. Lorsque vous ne voyez que des prières sans réponse, ne méprisez pas les signes d’espérance au long du chemin.

Lorsque vous vous demanderez si vos appels à l’aide, même les plus faibles, ne servent à rien, rappelez-vous ceci : « Il est bon d’espérer tranquillement, d’espérer tranquillement le secours de Dieu » (Lm 3.25-26, d’après The Message). Que nos cœurs soient remplis d’une espérance tranquille, comme un don sacré. Que les faibles échos de cette espérance nous soutiennent alors que nous faisons avec Dieu nos pas hésitants et chancelants dans l’attente, l’obscurité et l’inconnu.

À méditer



Quand l’espérance s’est-elle réduite à un simple murmure dans votre vie ? Que s’est-il passé ?

Comment votre définition de l’espérance change-t-elle lorsque vous considérez non seulement la divinité, mais aussi l’humanité de Jésus ?

Kayla Craig est autrice et fondatrice de Liturgies for Parents. Elle vit dans l’Iowa avec son mari et ses quatre enfants.

Cet article fait partie de Pâques au quotidien, notre série de méditations pour vous accompagner personnellement, en petit groupe ou en famille durant le carême et les fêtes de Pâques 2024.

Pour être informé de nos nouvelles traductions en français, abonnez-vous à notre newsletter et suivez-nous sur Facebook ou Twitter.

Rester calme au milieu de la bataille

Deuxième dimanche du carême – Les enjeux sont tels,comment pouvons-nous suivre les instructions du psalmiste ?

Christianity Today February 12, 2024
Hometown Hills par Caroline Greb. Huile sur panneau. 5x7’’. 2021.

« Arrêtez ! dit-il, reconnaissez-moi pour Dieu. Je serai glorifié par les peuples, je serai glorifié sur la terre. » (Psaume 46.11 – BDS)

Lecture proposée : Psaume 46.7-11

L’été dernier, par une nuit humide, je me suis retrouvée assise dans l’obscurité sous mon porche à regarder fixement un étrange cactus en pot. Cet Epiphyllum oxypetalum, souvent appelé « belle de nuit », m’a été offert par un vieil ami jardinier. Il m’a promis qu’il produirait des fleurs nocturnes aussi spectaculaires qu’éphémères. « Et il est très facile à entretenir », a-t-il assuré. « J’ai sept ou huit fleurs à la fois sur mon autre plant. » Et pourtant, cinq ans plus tard, je n’avais vu qu’une seule fleur fanée, pendant entre les tiges aplaties comme un ballon dégonflé. Ce n’est pas faute d’avoir essayé. J’ai arrosé le cactus régulièrement, mais pas trop souvent. J’ai ajusté sa position pour qu’il soit exposé à la lumière indirecte du soleil. J’ai fertilisé et j’ai taillé. Je l’ai rentré fidèlement à l’intérieur avant que les températures extérieures ne chutent. Ses tiges tentaculaires poussent rapidement dans toutes les directions. Mais les bourgeons promis pour la fin de l’été ne sont jamais apparus.

Puis, au printemps dernier, alors que ma famille se débattait dans une vague de pertes traumatisantes, j’ai délaissé la plante sur le coin du porche d’entrée et je me suis tournée vers d’autres besoins plus urgents. En cette soirée de fin d’été, c’est donc à ma grande surprise que j’ai trouvé deux bourgeons gonflés, enveloppés de sépales roses et courbés et prêts à fleurir.

L’appel du Psaume 46.11, « Arrêtez, et sachez que je suis Dieu ! » (NBS), est devenu un refrain populaire. Autour de moi, je peux le voir sur des autocollants de pare-chocs, des panneaux lettrés à la main et toutes sortes de contenus prêts à partager sur les médias sociaux. Nous l’invoquons pour nous encourager à ralentir notre rythme effréné et à faire confiance à Dieu pour prendre soin de nous. Mais la traduction de la TOB offre une perspective légèrement différente : « Lâchez les armes ! reconnaissez que je suis Dieu ! ».

Le Psaume 46 commence par décrire un contexte de bouleversement cataclysmique. Déclarant que Dieu est notre refuge, notre force et notre aide, le psalmiste s’en tient à cette vérité même « quand la terre est bouleversée, quand les montagnes sont ébranlées au cœur des mers et que les flots de la mer mugissent, écument, se soulèvent jusqu’à faire trembler les montagnes » (v. 3-4). Le texte présente des images de destructions et de conflits violents à l’échelle mondiale, qu’il s’agisse de catastrophes naturelles ou de chaos politique.

Dans la troisième et dernière partie du psaume, le psalmiste décrit l’intervention de Dieu en utilisant des images guerrières : « C’est lui qui a fait cesser les combats jusqu’aux extrémités de la terre ; il a brisé l’arc et rompu la lance, il a détruit par le feu les chars de guerre. » (v. 10) Au vu de l’ensemble du psaume, il semble que le verset 11 ne nous dise pas simplement de faire une pause dans l’agitation de notre vie. Il s’agit plutôt d’une injonction contre-intuitive à cesser de lutter désespérément pour notre propre sécurité et notre survie.

L’année dernière, le monde de ma famille a effectivement donné l’impression de basculer dans les profondeurs de la mer. Tout dans nos vies a été bouleversé par la mort soudaine de deux jeunes amis et les conséquences de ce traumatisme. Chaque jour, j’ai lutté désespérément pour trouver la sécurité et pour protéger mes enfants des ténèbres qui menaçaient de les engloutir. Je tremblais, j’étais en colère et je sentais que j’avais besoin d’un refuge. Avec de tels enjeux, comment pouvais-je suivre l’injonction du psalmiste et lâcher les armes ? Pourtant, le Psaume 46.11 souligne que le milieu d’une bataille est précisément le moment de se tenir tranquille. Le commandement s’accompagne d’un appel à la contemplation : « Sachez que je suis Dieu ! »

Dieu ne s’engage pas à éloigner de nous les tragédies et les épreuves — si c’était le cas, nous n’aurions pas besoin d’une forteresse. Au contraire, il s’engage à être le donjon qui nous garde en sécurité au milieu des batailles enflammées et des eaux déchaînées. Forts de cette assurance, nous n’avons plus besoin de nous battre seuls.

Le carême ne nie pas les réalités qui nous brisent le cœur, nous fatiguent les os et nous oppressent la poitrine. Cette période nous appelle à cesser notre lutte, non pas parce que nous abandonnons, mais parce que nous choisissons de rendre témoignage à la promesse que Dieu fait à ses enfants.

En cette moite nuit d’été, je me suis assise tranquillement et j’ai regardé les sépales rougeâtres du cactus s’enrouler en arc de cercle, puis s’étirer comme des rayons de soleil autour des pétales souples qui se déployaient. Dans l’obscurité, ses fleurs pâles brillaient comme des étoiles, me guidant vers le Dieu qui me dit « Sois tranquille ».

À méditer



Dans quels contextes avez-vous déjà entendu le Psaume 46.10 et son appel à « rester tranquille » ? En quoi la traduction de la TOB — « lâchez les armes » — modifie-t-elle votre compréhension de ce verset ?

Quel est le domaine de votre vie où vous avez l’impression de vous battre ? À quoi ressemblerait le fait de cesser de lutter seul ? Quelles sont les promesses de Dieu qui pourraient vous inciter à plus de tranquillité ?

Elissa Yukiko Weichbrodt est autrice et professeure associée d’art et d’histoire de l’art au Covenant College de Lookout Mountain, dans l’État américain de Géorgie.

Cet article fait partie de Pâques au quotidien, notre série de méditations pour vous accompagner personnellement, en petit groupe ou en famille durant le carême et les fêtes de Pâques 2024.

Pour être informé de nos nouvelles traductions en français, abonnez-vous à notre newsletter et suivez-nous sur Facebook ou Twitter.

Un chemin pour des cœurs hardis

Premier dimanche du carême – Le prix de la Croix dans un monde passionné de plaisir

Christianity Today February 11, 2024
Table Assemblage par Michelle Chun. Huile sur toile, 60x50’’. 2020-2021.

Alors Jésus dit à ses disciples : « Si quelqu’un veut être mon disciple, qu’il renonce à lui-même, qu’il se charge de sa croix et qu’il me suive ! » (Matthieu 16.24)

Lecture proposée : Matthieu 16.24-27

Dans une des paroles les plus saisissantes de l’Écriture, le Christ dit à ses disciples : « Si quelqu’un veut être mon disciple, qu’il renonce à lui-même, qu’il se charge de sa croix et qu’il me suive ! » (Mt 16.24) À ce stade du récit de la Passion, les disciples ne connaissent pas encore la force de ces paroles de Jésus. Ils comprenaient certes ce qu’était une croix et connaissaient les horreurs de la crucifixion, mais ils ne savaient pas encore que le Christ lui-même mourrait sur cet instrument de torture romain ni les diverses formes de souffrance auxquelles ils seraient eux-mêmes confrontés.

Au cœur du christianisme se trouve l’impératif de renoncer à nous-mêmes. Dans une culture qui tourne autour de l’affirmation de soi, il devient naturellement de plus en plus difficile de bien faire comprendre cet aspect de notre foi. L’idée que nous nous reniions nous-mêmes comme un acte de spiritualité est aujourd’hui contre-intuitive. Dans son livre L’âge séculier, Charles Taylor aborde le défi du renoncement à soi-même à l’ère moderne : « Pour de nombreuses personnes aujourd’hui, mettre de côté leur propre chemin pour se conformer à une autorité extérieure ne semble pas être une forme de vie spirituelle intelligible. »

Le renoncement à soi n’est pas seulement difficile. À notre époque, où l’épanouissement personnel est la pierre angulaire d’une vie réussie, il paraît incompréhensible. Pourtant, notre foi ne nous demande pas de négliger l’épanouissement personnel : elle en redéfinit simplement les termes. Selon le récit biblique, nous avons en fait été créés pour renoncer à nous-mêmes, et c’est en le faisant que nous devenons pleinement ce que nous sommes.

Le monde définit l’épanouissement comme quelque chose qui se développe à partir de la sincérité du cœur de l’individu, sans aucune contrainte extérieure. Le christianisme enseigne que nos cœurs sont méchants et peu fiables, que nous désirons des choses qui ne sont pas seulement mauvaises selon quelque principe externe, mais mauvaises pour nous.

Jésus enseigne ce paradoxe selon lequel le renoncement à soi est accomplissement de soi (Mt 16.25). Ce qui fait la différence, c’est que le « moi » qui s’accomplit est défini par Dieu, et non par nos caprices humains. Ce que nous sommes (enfants de Dieu) et ce que signifie une vie accomplie (l’union avec le Christ) ne dépendent pas de nous. Être avec le Christ, c’est être dégagé de nos désirs égoïstes.

Que signifie donc concrètement le renoncement à soi-même ? Il consiste à nous détourner du péché. Tout péché revient à choisir notre propre voie contre la volonté de Dieu pour nous. C’est une forme d’affirmation perverse du moi qui fait passer ses désirs avant le bien de son prochain et même avant Dieu.

L’obéissance est une croix que nous portons ; il y a là une forme de souffrance, même s’il s’agit d’une souffrance qui apporte la guérison, la paix et la restauration. Nous aimons imaginer que l’obéissance à Dieu se ferait sans douleur, sauf peut-être en cas de persécution. Mais même lorsque le monde ne nous sanctionne pas pour notre foi, le simple fait de choisir de ne pas pécher implique de la souffrance. Dans le cas de péchés persistants et profondément enracinés, la repentance exige que l’on s’extirpe des mauvaises habitudes, que l’on rompe avec les rituels familiers, que l’on s’arrache à la désobéissance. Et cela peut faire mal.

Par exemple (et nous ne le reconnaissons pas assez), choisir d’être fidèle dans le mariage exige que nous nous privions du plaisir de l’intimité avec d’autres personnes. Pour certaines personnes la chose semble facile, mais pour d’autres, cela peut être un réel défi. Après tout, le monde est rempli de personnes belles, intéressantes et charmantes. Le « oui » que l’on dit à son conjoint est aussi renoncement à tous les autres. Pour le vivre pleinement, je me prive de la possibilité d’être avec quelqu’un d’autre.

En cette période de carême, nous nous souvenons que cette forme de renoncement est un modèle pour la vie chrétienne. Alors que le monde nous rappelle constamment à quel point ses plaisirs sont délicieux — à quel point nous les « méritons » et pourquoi honorer nos désirs reviendrait à nous aimer nous-mêmes — nous nous engageons au contraire à marcher selon le Christ. L’avarice, l’orgueil, l’envie, la luxure, la gourmandise : tous ces péchés dont les plaisirs nous aguichent, notre suivance du Christ nous oblige à les renier. Ces plaisirs nous nuisent, mais au départ, comme le pain mangé en cachette, ils sont agréables (Pr 9.17).

La voie chrétienne nécessite un cœur hardi. Elle exige beaucoup de courage, d’humilité et d’abnégation. Mais nous avons un Sauveur fidèle qui nous a montré le chemin, qui connaît le coût du renoncement et la beauté de la fidélité. Et la fidélité est belle. Le même Christ qui a souffert sur la croix a été glorifié dans son corps. De même, lorsque nous renonçons à nous-mêmes, nous sommes glorifiés aux yeux de Dieu. Nous recevons une paix qui ne peut venir que du renoncement à nos désirs pécheurs et de la jouissance de Dieu.

À méditer



Comment le christianisme redéfinit-il l’épanouissement par rapport à la vision séculière de l’épanouissement personnel ?

Pendant ce carême, quels sont les défis spécifiques qui pourraient se trouver devant vous en matière de renoncement ? Comment pourriez-vous les aborder avec courage ?

O. Alan Noble est professeur agrégé d’anglais à l’Université baptiste de l’Oklahoma, conseiller de Christ and Pop Culture et auteur de trois livres.

Cet article fait partie de Pâques au quotidien, notre série de méditations pour vous accompagner personnellement, en petit groupe ou en famille durant le carême et les fêtes de Pâques 2024.

Pour être informé de nos nouvelles traductions en français, abonnez-vous à notre newsletter et suivez-nous sur Facebook ou Twitter.

La vie comme une fleur qui fane

Le mercredi des Cendres brise nos illusions d’invincibilité.

Christianity Today February 11, 2024
Poppies & Dogwood par Elizabeth Bowman. Huile sur toile. 2023.

L’être humain né de la femme ! Sa vie est courte, mais pleine d’agitation. Il pousse comme une fleur, puis il se flétrit ; il s’enfuit comme une ombre, sans résister. (Job 14.1-2)

Lecture proposée : Job 14.1-6

Chaque année, aux alentours du mercredi des Cendres, une colline située près de notre maison dans les montagnes de l’ouest de la Caroline du Nord se couvre du jaune des jonquilles naissantes. Ces fleurs sont les premières à fleurir au printemps et leur teinte dorée contraste vivement avec les gris et les bruns de l’hiver encore bien présent.

Aussi brillantes que soient ces fleurs, elles sont éphémères. Dans les jours qui suivent leur émergence, ces jonquilles sont balayées par le froid rigoureux de la montagne qui persiste toujours plus longtemps qu’on ne l’espère. Une gelée tardive ou une chute de neige s’accrochera inévitablement aux pétales frémissants, coupant court à leurs élans de beauté. Au bout de quelques semaines, les fleurs qui restent se flétrissent et brunissent, tombant finalement sur la terre durcie par la glace et frustrant notre optimisme quant à l’arrivée prochaine de jours plus chauds.

Il n’est pas étonnant que Job, un homme dont la souffrance occupe une place importante dans le récit biblique, ait comparé la fragilité de sa vie éphémère à celle d’une fleur délicate. Même s’il possédait des richesses extraordinaires, même s’il comptait parmi les justes, il était vulnérable. Il était droit, avisé, et tout aussi susceptible que n’importe qui d’autre de subir des catastrophes. Ses biens ont été détruits par le feu et les pillards, ses enfants ont été tués dans une catastrophe naturelle et sa bonne santé s’est évanouie dans une douloureuse maladie. À la suite de ces catastrophes, Job a pleinement réalisé ce qui est atrocement vrai pour chacun d’entre nous : nos jours sont balayés par le vent, éphémères, vécus dans le sillage de la rupture avec Dieu.

Les privilégiés que sont beaucoup d’entre nous ont souvent l’impression de contrôler la situation. Dans mon pays, notre génération dispose d’un accès sans précédent à la nourriture, à l’eau, à un toit et aux soins médicaux. Notre capacité à choisir ce que nous ferons comme travail, qui nous épouserons, quelles communautés nous rejoindrons est sans précédent dans l’histoire.

Parallèlement, l’industrie du bien-être et du développement personnel nous a inculqué l’idée que nous sommes en mesure de contourner toute sensation ou expérience inconfortable. L’épuisement peut être atténué par la bonne recette de smoothie ou le bon mélange d’huiles essentielles, le chaos peut être contrôlé par la bonne application de gestion du temps, la tristesse peut être apaisée par la pleine conscience ou la méditation, et l’ennui peut être atténué par un service de vidéos en ligne ou une plateforme de réseaux sociaux.

En outre, en tant que chrétiens, nous pourrions être tentés de croire qu’une théologie solide et un engagement constant dans les disciplines spirituelles pourront nous servir de rempart contre les chocs de la vie. Les amis de Job pourraient bien avoir supposé la même chose à propos de leur juste compagnon.

Peu à peu, le mensonge s’installe : Je peux contrôler mes résultats. Je peux éviter la souffrance.

Cette illusion d’invincibilité explique pourquoi tant d’entre nous se sentent déboussolés — voire lésés — lorsque les difficultés surviennent inévitablement. C’est une leçon d’humilité que de réaliser que la souffrance et la mort font partie de notre condition humaine, quels que soient nos vertus, notre vigilance ou nos privilèges. Nos vies ressemblent moins à des forteresses bien construites qu’à des fleurs éphémères. Nous sommes tous douloureusement exposés, aussi vulnérables que ces jonquilles qui éclosent dans le froid brutal.

Jésus nous rappelle une réalité potentiellement troublante : Dieu « fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes » (Mt 5.45). Mais dans le même sermon, Jésus nous dit aussi de ne pas nous inquiéter, de ne pas craindre pour ce que nous mangerons, boirons ou porterons. « Étudiez comment poussent les plus belles fleurs des champs », nous dit-il (6.28).

Les fleurs sont revêtues de leur beauté sans qu’elles y soient pour quoi que ce soit. Elles « ne travaillent pas et ne tissent pas ». Dieu est l’artiste qui veille à leur floraison et à leur fanaison. Et ce même Dieu sait ce dont nous avons besoin. L’humiliation que constitue notre impuissance peut conduire à une forme inattendue de repos, un recul quant à nos efforts pour contrôler nos résultats, un répit de nos propres travaux.

Je vise intentionnellement à me concentrer sur la manière dont ces jonquilles poussent et à admirer leur éclat plutôt que de déplorer la brièveté de leur floraison. Même si la vie de ces fleurs est brève, elles sont une lueur d’espoir, un rappel concret que les saisons changent, que la chaleur revient toujours et que la beauté reste possible même dans les environnements les plus rudes. C’est Dieu, et lui seul, qui fait tout cela.

Il n’y a jamais eu d’hiver où cette colline n’a pas été ainsi ravivée de beauté. Ces jonquilles ressemblent à un miracle, un avant-goût d’une plus grande résurrection à venir. Et sous les soins bienveillants de Dieu, même les espoirs les plus fragiles peuvent s’épanouir en une joie éternelle.

À méditer



En quoi est-il troublant que notre vie soit comparée à celle des fleurs ? En quoi cela peut-il être réconfortant ?

Comment notre illusion de contrôle est-elle amplifiée par les privilèges dont nous bénéficions ?

Comment l’abandon de cette illusion de contrôle peut-il conduire au repos ?

Amanda Held Opelt est autrice, conférencière et compositrice. Elle écrit sur la foi, le deuil et la créativité et a publié deux livres.

Cet article fait partie de Pâques au quotidien, notre série de méditations pour vous accompagner personnellement, en petit groupe ou en famille durant le carême et les fêtes de Pâques 2024.

Pour être informé de nos nouvelles traductions en français, abonnez-vous à notre newsletter et suivez-nous sur Facebook ou Twitter.

Pâques au quotidien

Notre série de méditations en chemin vers Pâques 2024

Christianity Today February 11, 2024
Zatelepina / Getty

Ensemble nous voulons vous inviter à nous préparer pendant cette période qui nous mène à Pâques, et au-delà. Les événements survenus il y a plus de 2 000 ans se répercutent encore aujourd’hui dans notre chair et notre cœur.

La mort et la résurrection de Jésus sont la réalité la plus grandiose et la plus marquante de l’histoire, et cette vérité est appelée à trouver sa place dans notre vie quotidienne. Pour cette raison, nous voulons prendre le temps de nous souvenir et de méditer ces choses pour marcher jour après jour selon l’amour du Christ pour nous, révélé dans l’humilité et la puissance, la crise et la victoire, le désespoir et une joie débordante. Il est mort et il est ressuscité, et cela change tout, même les choses les plus ordinaires. Pour y méditer, cette série de textes vous invite à un voyage à travers les différentes étapes et émotions du carême et de Pâques, à la redécouverte des vérités théologiques liées à la mort, à la vie et à tout ce qui se trouve entre les deux.

Première partie – Carême
L’humilité de l’humanité
– Mercredi des Cendres (14 février)
– Dimanche de carême 1 (18 février)
– Dimanche de carême 2 (25 février)
– Dimanche de carême 3 (3 mars)
– Dimanche de carême 4 (10 mars)
– Dimanche de carême 5 (17 mars)

Deuxième partie – Semaine sainte
L’attente de notre espérance
– Dimanche des Rameaux (24 mars)
– Mardi saint (26 mars)
– Mercredi saint (27 mars)
– Jeudi saint (28 mars)

Troisième partie – Pâques
Les passions de l’amour
– Vendredi saint (29 mars)
– Samedi saint (30 mars)
– Dimanche de Pâques (31 mars)
– Lundi de Pâques (1er avril)
– Ascension (9 mai)

Pâques au quotidien est divisé en trois parties, chacune s’arrêtant sur une facette différente du chemin menant à Pâques. La première partie nous conduit à travers la période du carême, où nous nous confrontons à l’humilité de notre condition humaine, contemplons les limites de notre état charnel et embrassons l’appel à une vie sacrificielle, au jeûne et au renoncement à soi. La deuxième partie nous conduira à travers la Semaine sainte et nous préparera à Pâques, en nous plongeant dans l’attente de l’accomplissement de notre espérance. Enfin, nous nous immergerons dans les turbulences et les émotions de la trahison de Jésus, de sa crucifixion, de sa résurrection et de ses retrouvailles avec les siens. C’est tout au long de ce parcours que l’amour et l’adoration ont triomphé de la douleur et de la mort sur la scène éternelle, ainsi que pour nos petites vies qui seront un jour emportées dans la gloire.

Première partie : Carême – L’humilité de l’humanité

Deuxième partie : Semaine sainte – L’attente de notre espérance

Troisième partie : Pâques – Les passions de l’amour

Cet article fait partie de Pâques au quotidien, notre série de méditations pour vous accompagner personnellement, en petit groupe ou en famille durant le carême et les fêtes de Pâques 2024.

Pour être informé de nos nouvelles traductions en français, abonnez-vous à notre newsletter et suivez-nous sur Facebook ou Twitter.

Être aimants auprès de ceux qui meurent

Les décisions concernant la fin de vie sont déchirantes et médicalement de plus en plus complexes. Comment honorer à la fois Dieu et nos proches ?

Christianity Today February 9, 2024
Illustration de Mallory Rentsch/Images sources : Unsplash/Getty

Lorsque Roger, un homme de plus de 80 ans, est arrivé à l’unité de soins intensifs, il souffrait déjà des effets de plusieurs affections en phase terminale. Sa santé s’était tellement dégradée que même la lecture de la Bible lui était devenue difficile. Déjà épuisé par la maladie, il avait accepté une tentative de résection de son cancer pour faire plaisir à sa famille, mais avait insisté auprès de sa femme pour qu’elle n’autorise pas une réanimation cardio-pulmonaire ou la mise en place d’un respirateur si son état s’aggravait après l’opération. « Je veux que tu me laisses être avec Dieu quand il m’appellera », lui avait-il dit.

Après l’opération, ses poumons ont tragiquement défailli. Conformément à ses souhaits, plutôt que d’installer un respirateur, ses soins ont été axés sur le confort. Sa femme a passé la soirée à ses côtés, lui caressant la main, priant pour lui et chantant doucement à ses côtés.

Mais plus tard dans la nuit, le fils du couple, qui était éloigné d’eux, est entré en trombe dans l’unité de soins intensifs. « Vous n’allez pas tuer mon père ! », criait-il au personnel. « Je connais mon père. C’était un homme craignant Dieu qui, jusqu’à il y a six mois, allait à l’église tous les dimanches. Il ne serait pas d’accord avec ça ! »

La situation déchirante de cette famille est terriblement commune. Les technologies médicales disponibles confrontent de plus en plus les familles à de terribles dilemmes au sujet des soins à apporter à leurs proches mourants. Jusqu’à 70 % des personnes ne peuvent s’exprimer elles-mêmes en fin de vie. La charge de la décision incombe alors aux proches, dont beaucoup sont déjà sous le coup de la peur et du chagrin. Le tribut payé par les familles est lourd : les proches souffrent souvent de dépression, d’anxiété, voire de syndromes de stress post-traumatique pendant une période pouvant aller jusqu’à un an après avoir pris ces décisions liées à la fin de vie.

Aux États-Unis, seul un tiers des Américains ont établi des directives préalables. La plupart des familles traversent donc ces épreuves sans direction claire. Ceux d’entre nous qui suivent le Christ s’appuient instinctivement sur leur foi pour trouver leur chemin dans de telles tempêtes, mais le paysage de la mort à l’hôpital nous est souvent si étranger que, comme pour la famille de Roger, nous pouvons avoir du mal à appliquer les vérités que nous proclamons chaque dimanche aux dures réalités du chevet du malade.

Comment honorer à la fois Dieu et nos proches dans les décisions de fin de vie, lorsque chaque chemin semble semé d’embûches ?

La Bible ne mentionne pas les respirateurs ou la réanimation cardio-pulmonaire, mais elle reste une lampe à nos pieds et une lumière sur notre sentier (Ps 119 105). Penser les soins en fin de vie dans une optique chrétienne nécessite à mes yeux de prendre en compte les principes clés suivants :

1. Le caractère sacré de la vie humaine

En tant qu’êtres créés à l’image de Dieu, nous possédons tous une valeur irrévocable. Le Seigneur nous confie la vie et nous ordonne de la chérir (Ge 1.26-28 ; Ex 20.13 ; 1 Co 6.19-20). Le caractère sacré de la vie humaine nécessite que nous défendions les enfants à naître et que nous nous opposions au suicide médicalement assisté. Lorsque nous sommes confrontés à une série de décisions concernant les mesures de maintien en vie, nous devrions, par souci de la vie, prendre au sérieux tous les traitements susceptibles d’apporter la guérison.

2. L’autorité de Dieu sur la vie et la mort

La mort persiste ici-bas comme salaire de notre péché (Rm 6.23). Jusqu’au retour du Christ, elle nous rattrapera tous (Es 40.6-8 ; Rm 5.12). Lorsque nous nous aveuglons sur notre propre mortalité, nous risquons d’ignorer pour notre vie la puissance de la grâce de Dieu manifestée à la résurrection de Christ. Le caractère sacré de notre vie humaine n’empêche pas le caractère inéluctable de la mort ni l’action de Dieu à travers elle et son autorité sur elle.

3. La miséricorde et la compassion

En tant que chrétiens qui s’appuient sur la grâce de Dieu envers nous en Christ, nous devons faire preuve de miséricorde envers les opprimés et les affligés (Jn 13.34 ; 1 Jn 3.16-17 ; Lc 6.36). Si les respirateurs et la réanimation cardio-pulmonaire peuvent sauver des personnes atteintes d’une maladie réversible, en fin de vie, ces mesures risquent aussi de prolonger des souffrances sans pour autant restaurer la vie. La miséricorde ne justifie pas l’euthanasie active ou le suicide médicalement assisté, mais elle nous conduira à éviter des interventions invasives et douloureuses si ces mesures sont inutiles.

4. Notre espérance en Christ

L’amour de Dieu pour nous en Christ est si grand que rien — pas même la mort — ne peut nous arracher à lui. Même dans la souffrance, nous trouvons appui sur la promesse de la résurrection du corps et l’espérance d’une union éternelle avec Dieu (Jn 11.25-26 ; 1 Th 4.14). En Christ, plutôt que le dernier ennemi à craindre à tout prix, la mort est la fin de notre vie dans le péché et notre entrée dans l’éternité. Même si nous mourons, nous restons vivants en Christ.

En résumé, dans les dilemmes de fin de vie, la Bible nous exhorte à :

  1. chercher à guérir lorsque la guérison est possible,
  2. accepter la mort quand elle arrive,
  3. nous préoccuper de ceux qui souffrent,
  4. tout cela en restant attachés à notre espérance en Christ, qui transforme la mort.

Ces principes peuvent paraître assez clairs sur le papier, mais les choses se compliquent cependant souvent au chevet du patient. Une question clé me semble pouvoir nous aider : Le processus menaçant la vie de cet être cher est-il réversible ? En d’autres termes, le traitement laisse-t-il espérer la préservation de la vie ou la prolongation de la souffrance pour aboutir à la mort ?

Il est essentiel de préciser que les mesures de maintien en vie sont des mesures de soutien et non des mesures curatives. Les respirateurs, la réanimation cardio-pulmonaire et autres interventions similaires ne guérissent pas les maladies, mais permettent de gagner du temps en soutenant le fonctionnement des organes pendant que les médecins s’efforcent de traiter le problème. Pour permettre de discerner et déterminer si les mesures envisagées sont plus susceptibles de sauver la vie ou de prolonger sa fin, posez les questions suivantes à l’équipe médicale :

  • Quelle est la maladie qui menace la vie de ce proche ?
  • Comment menace-t-elle sa vie ?
  • Quelles sont les chances de rétablissement ?
  • Qu’est-ce qui, dans les antécédents médicaux de mon proche, influe sur ses chances de guérison ?
  • Les traitements disponibles peuvent-ils apporter la guérison ?
  • Les traitements disponibles risquent-ils d’aggraver la souffrance sans grand espoir de réel bénéfice ?

Lorsque la guérison est possible, il convient de poursuivre le traitement. En revanche, lorsqu’une maladie ne peut être guérie ou même atténuée, certaines mesures invasives peuvent prolonger l’agonie et infliger des souffrances inutiles.

Lorsque l’efficacité du traitement est ambiguë, la tâche est encore plus difficile. La question clé à se poser est peut-être la suivante : que dirait mon proche des options proposées ? Une telle approche exige que nous considérions la personne aimée comme Dieu la voit : chérie, pardonnée, merveilleusement faite et unique, sans véritable équivalent sur terre (Ps 139.13-14 ; Ep 1.7). Avec cette responsabilité en tête, une autre série de questions pourrait nous aider :

  • Qu’est-ce qui compte le plus pour cette personne que j’aime ? Qu’est-ce qui la motive dans la vie ?
  • S’est-elle exprimée par le passé à propos de ses soins en fin de vie ?
  • Quels sont ses objectifs à court terme ? Pour sa vie en général ?
  • Qu’est-elle prête à endurer pour atteindre ces objectifs ? Qu’est-ce qu’elle ne voudrait pas affronter ?
  • Dans quelle mesure mon proche a-t-il supporté la douleur par le passé ? La dépendance ? Le handicap ? La peur ?
  • S’il pouvait parler pour lui-même, que dirait-il de la situation actuelle ?

Ces questions visent à aider à remettre en lumière la personnalité, les expériences et les valeurs de l’être cher afin de pouvoir davantage parler en son nom qu’en votre nom propre lorsque vous devrez prendre de lourdes décisions.

Même si vous êtes aux prises avec le chagrin et l’incertitude, en donnant la parole à votre proche mourant, vous lui offrez un cadeau de départ. Vous l’honorez comme étant digne d’amour et, ce faisant, vous êtes aussi un instrument entre les mains du Christ auprès de lui (Jn 13.34-35). Rappelez-vous que vous servez celui qui a déjà englouti la mort dans la victoire (1 Co 15.54). Et bien que nous gémissions encore pour l’instant (Rm 8.22), lui est en train de renouveler toutes choses (Ap 21.4-5).

Kathryn Butler, docteure en médecine, a interrompu sa carrière de chirurgienne en traumatologie pour faire l’école à la maison pour ses enfants. Elle est l’autrice de plusieurs livres, dont Between Life and Death: A Gospel-Centered Guide to End-of-Life Medical Care et Glimmers of Grace: A Doctor’s Reflections on Faith, Suffering, and the Goodness of God.

Pour être informé de nos nouvelles traductions en français, abonnez-vous à notre newsletter et suivez-nous par Facebook ou Twitter.

Le sabbat n’est pas un produit de luxe.

Dieu a sanctifié le repos hebdomadaire pour tous, et pas seulement pour les plus économiquement stables.

Christianity Today February 9, 2024
Deutsche Fotothek/WikiMedia Commons/Edits by CT

Où que nous regardions, le paysage est envahi de gens qui se poussent eux-mêmes — leur corps, leur esprit et leur capacité à persévérer et à porter du fruit — jusqu’à leurs limites. D’une manière générale, la société encourage ce mode de vie « à la limite » : si vous voulez progresser, c’est le prix à payer.

Mais il y a certaines circonstances où elle fait plus que l’encourager : elle l’exige. Les personnes situées au bas de l’échelle socio-économique le ressentent de la manière la plus aiguë, mais personne n’est à l’abri. Quelle qu’en soit la raison, nous sommes piégés par nos systèmes de productivité et nous investissons tout ce que nous pouvons de nous-mêmes, brûlant la proverbiale chandelle par les deux bouts.

Si vous vous êtes déjà dit « ça suffit », protestant silencieusement contre des exigences auxquelles votre corps ne peut plus répondre, vous n’êtes assurément pas seul. Je me débats régulièrement avec ces sentiments, tentant de faire le tri dans mes valeurs et mes priorités, me demandant si je ne suis pas en train de délaisser une vie heureuse et équilibrée pour les aspirations superficielles d’une implacable société de consommation.

C’est pour cela que je suis reconnaissant pour le don du sabbat. Le sabbat est la façon dont Dieu dit : « Ça suffit. »

Cette pratique est une invitation à orienter notre vie vers un rythme différent, reconnaissant une limite morale à ce que nous devons attendre de notre corps et de notre vie et au potentiel profit que nous serions censés tirer de nous-mêmes et des autres.

Le théologien Walter Brueggemann nous rappelle que le sabbat est façonné par les récits de la Création et de l’Exode. Les Écritures décrivent d’abord le septième jour comme celui où Dieu se repose de son travail de création (Ge 1). Est-ce parce que Dieu n’a pas la capacité de continuer ? Certainement pas. Dieu exprime ainsi pour toute la création l’idée qu’il existe une limite morale aux exigences de productivité. Dieu invite les êtres humains à se joindre à son repos pour se réjouir de la création. Ce septième jour se veut un rappel régulier de la générosité de Dieu. Il s’agit d’une invitation à la fête.

Les Écritures présentent également le sabbat comme une réponse directe à la libération du peuple esclave en Égypte par Dieu (Dt 5). Dans le contexte de générations d’exploitation économique, où les membres du peuple de Dieu étaient comptés comme des unités de production au service de l’entreposage de la richesse du Pharaon, le sabbat est également l’invitation de Dieu à faire l’expérience de la liberté et de la restauration des effets d’une utilisation immorale des ressources et de l’exploitation injuste des personnes.

Le sabbat trouve son sens dans le pouvoir libérateur et restaurateur de Dieu. C’est peut-être la raison pour laquelle le commandement d’Exode 20.8 dit : « Souviens-toi de faire du jour du repos un jour saint. » Le caractère sacré du sabbat vise à offrir un rappel constant de la grande histoire de Dieu et de l’invitation qu’il nous adresse à y participer.

Pratiquer le sabbat induit des modes de vie fondés sur la joie de la générosité de Dieu et nous replace dans le grand courant de la restauration divine. Cette pratique spirituelle du sabbat un jour sur sept nous aide à nous éloigner des exigences de la productivité et à favoriser une vie de célébration et de restauration.

Mais ce n’est pas tout, car le sabbat n’est pas seulement pour les personnes ; le sabbat est pour le peuple.

Le sabbat n’a pas été conçu par Dieu pour des individus isolés, mais comme une forme de remise à zéro pour l’ensemble de la communauté. Au-delà des lois régissant le jour de repos hebdomadaire, la pratique scripturaire du sabbat incluait un rythme régulier de réparation des injustices économiques à l’échelle de la société.

Tous les sept ans, Dieu exigeait que les dettes soient remises, afin de s’assurer que les pauvres ne soient pas exploités. Plus encore, Dieu exigeait que les dettes ne soient pas seulement effacées, mais, puisque celles-ci étaient souvent le fait d’une catastrophe économique personnelle, qu’on ajoute de riches dons aux anciens débiteurs. Ces dons étaient des célébrations de l’abondance (il y en a plus qu’assez pour tout le monde) et des moyens simples de s’assurer que les personnes économiquement vulnérables soient rétablies pour prendre pleinement part à la vie économique de la société.

Au-delà des dettes, les personnes asservies devaient aussi être libérées, ce qui limitait le profit que l’on pouvait tirer d’elles. Enfin, la terre devait bénéficier d’un repos d’un an : un rappel que Dieu donne plus qu’il n’en faut dans la création et une saison pour que la terre se remette de sa mauvaise utilisation et de la surexploitation accumulée au cours des six années précédentes. Face à toutes les façons dont une société peut tirer profit des nécessités économiques des pauvres et des personnes vulnérables, le sabbat était la manière dont Dieu donnait la priorité à la liberté et à la restauration pour tous les membres de la société.

Je me demande dans quelle mesure cette nature communautaire du sabbat se retrouve dans notre pratique contemporaine. Certes, certains de nos principaux guides sur la nature et la pratique du sabbat, comme Walter Brueggemann, Dorothy Bass et bien d’autres, sont désireux de souligner les implications communautaires du sabbat et la manière dont le sabbat appelle à rendre des comptes quant à l’injustice dans notre société (et dans l’Église).

Mais à moins que notre pratique ne s’étende au-delà de l’aspect personnel et n’imagine, puis ose mettre en œuvre, des moyens d’étendre la générosité et la restauration de Dieu aux personnes les plus vulnérables sur le plan économique — et les plus facilement exploitées — dans nos sociétés, je crains que nous ne passions à côté de la plénitude des intentions de Dieu pour le sabbat.

Nous avons beaucoup à apprendre de ceux qui, par leur travail, éveillent notre conscience collective à l’expérience des plus pauvres et à la nature interdépendante de nos vies dans une société commune. Comme l’écrivait Martin Luther King, « notre destinée commune est un vêtement sans couture ». Ou comme le formule l’autrice Melba Padilla Maggay, « les privations d’une personne sont une marque de culpabilité et d’humiliation pour tous ». On retrouve là les propos du prophète Jérémie au peuple de Dieu en exil à Babylone : l’épanouissement humain est une responsabilité partagée (Jr 29.7). La souffrance de certains s’étend à nous tous, en particulier lorsque cette souffrance est due à la participation à une société qui exploite et abuse.

Le sabbat est un moyen pour tout le peuple de se délecter de l’abondance divine. Il ne s’agit pas simplement d’un « non » à des pratiques injustes et malsaines, mais d’une réorientation de la manière dont nous disons « oui » et de ce à quoi nous disons « oui ».

Qu’est-ce qui changerait dans notre témoignage et notre pratique chrétienne si nous nous orientions vers un mode de vie fondé sur la générosité de Dieu et l’expérience de la restauration, en prêtant particulièrement attention à ceux qui se trouvent aux marges économiques de notre société ? Comment notre pratique du repos du sabbat pourrait-elle favoriser une sorte de sainte agitation face à l’exploitation des personnes et des lieux et aux obstacles qui empêchent tant de gens de faire l’expérience de l’abondance de Dieu dans leur vie ?

Prendre le sabbat suffisamment au sérieux pour tenir compte de ses implications économiques dans notre vie et notre témoignage en tant que chrétiens pourrait impliquer de se demander ce que signifie le fait que Jésus soit « Seigneur du sabbat » (Lc 6.5). Jésus semble faire ici ce qu’il fait avec d’autres thèmes de l’Ancien Testament : non pas abolir la loi, mais l’accomplir (Mt 5.17). Il ne prétend pas supprimer ces anciennes pratiques. Au contraire, Jésus les habite d’une manière nouvelle. Au lieu de simplement mettre en œuvre une pratique rituelle, Jésus incarne l’éthique du sabbat et inaugure un nouveau type de royaume marqué par l’esprit et l’objectif du sabbat.

Jésus crée un monde où les intentions originelles du sabbat prennent corps : une joie perpétuelle dans l’abondance de Dieu, la restauration durable des exploités et l’inclusion des marginaux dans la pleine participation à la communauté. Telles sont censées être les caractéristiques du mode de vie du peuple de Dieu dans le monde.

Nous voyons des exemples positifs de cette éthique du sabbat mise en œuvre concrètement dans le livre des Actes des Apôtres et à d’autres endroits de l’Écriture. Les premiers chrétiens créent des réserves communes de ressources afin que tous puissent avoir part à leur abondance collective (Ac 2.42-47). Ils adaptent les systèmes et les structures pour prendre en compte les soins et l’épanouissement des pauvres et des personnes économiquement plus vulnérables (Ac 6.1-7). Ils prennent en compte comment, dans le cas de Philémon, la réalité du Christ fait que l’esclavage d’Onésime est en contradiction avec l’éthique du royaume établi par Jésus.

À l’opposé, Paul a des mots très durs pour l’église de Corinthe concernant la corruption de leur communauté par l’exclusion des pauvres et des membres de la classe ouvrière alors que les riches festoient dans l’abondance (1 Co 11.17-22). Cette communauté mettait en œuvre une version de l’éthique du sabbat qui sapait la nouvelle réalité de la vie que Jésus avait inaugurée.

Le monde que Jésus met en œuvre ici-bas vaut la peine que nous nous y investissions de tout notre cœur, et les bénéfices sont abondants. L’éthique économique du sabbat est une invitation à contribuer à la création d’une communauté où chacun, en particulier les plus vulnérables, peut goûter et voir cette abondance et faire l’expérience de l’œuvre réparatrice de Dieu.

L’invitation au repos hebdomadaire ne consiste pas seulement à s’arrêter et se reposer. Il s’agit d’habiter notre terre avec une imagination de sabbat, en osant construire un monde où, comme le dit la théologienne Dorothy Bass, « l’injustice n’existerait pas ». Quels que soient les rythmes et pratiques que nous mettons en place pour notre propre vie, Jésus veut que de ceux-ci jaillisse un sabbat à travers lequel nous soyons capables, avec Dieu, de dire « Ça suffit ».

Adam Gustine est l’auteur de Becoming a Just Church: Cultivating Communities of God’s Shalom et co-auteur de Ecosystems of Jubilee: Economic Ethics for the Neighborhood. Il travaille à l’Institute for Advanced Study de l’Université de Notre Dame, où il se consacre à l’étude de l’éthique et à la promotion de l’épanouissement humain et du bien commun.

Pour être informé de nos nouvelles traductions en français, abonnez-vous à notre newsletter et suivez-nous sur Facebook ou Twitter.

History

Nos demi-vérités à propos de Martin Luther King

Dans les années 60, les évangéliques blancs désavouaient Martin Luther King Jr. Dans les années 80, tout le monde le portait aux nues. Comment finalement nous souvenir de lui aujourd’hui ?

Christianity Today January 30, 2024
Illustration par Elizabeth Kaye/Source Images : Wikimedia Commons

À l’été 1964, les éditeurs blancs de CT ne semblaient pas fort impressionnés par la désobéissance civile non violente initiée par Martin Luther King Jr au nom des droits civiques. « Les prédicateurs qui affirment que la “désobéissance civile” est justifiée contribuent à encourager ceux qui pourraient avoir recours à la violence », déclaraient-ils en août de cette année-là.

Un demi-siècle plus tard, CT présentait des excuses officielles pour son opposition à King et au mouvement des droits civiques. Entre-temps, le magazine avait publié de nombreux articles faisant l’apologie de King comme un exemple d’amour chrétien. Ses paroles et actions étaient alors considérées comme un appel à la repentance pour les évangéliques blancs.

Mais King a gardé quelque chose d’un peu embarrassant pour ceux d’entre nous qui sont à la fois blancs et évangéliques, deux caractéristiques que King ne partageait pas. Beaucoup d’entre nous aimeraient voir en lui un prophète. Mais ce faisant, nous risquons de le récupérer à nos propres fins plutôt que de le comprendre tel qu’il était réellement.

Les évangéliques blancs américains ont généralement réagi de trois manières différentes à l’égard de King : (1) en traitant sa pratique chrétienne d’hérétique ou hypocrite ; (2) en le présentant comme un prophète de l’amour dont les enseignements pourraient guérir nos divisions raciales et nous purifier du racisme ; (3) en soulignant son engagement en faveur de la non-violence et d’un supposé idéal américain d’absence de distinction entre les couleurs comme alternative à des formes plus militantes de nationalisme noir.

Il y a au moins une part de vérité dans chacune de ces trois réactions à l’égard de King, mais dans chaque cas de figure, les évangéliques blancs sont allés trop loin. Trop souvent, ils ont essayé de faire correspondre King à leurs critères évangéliques au lieu de le comprendre selon les siens.

La théologie chrétienne non évangélique de King

King n’était pas un évangélique. Les évangéliques ont toujours considéré que la réponse au problème du péché résidait principalement dans la conversion individuelle. Tel était le message des revivalistes des 18e et 19e siècles, et tel était le message de Billy Graham au 20e siècle.

Mais King comprenait le péché principalement en termes structurels. Depuis sa prise de conscience du monde qui l’entourait jusqu’au jour de sa mort, la vie de King a été façonnée par la réalité structurelle de la ségrégation raciale — un système juridique, social et culturel qui refusait de reconnaître sa pleine dignité humaine, simplement en raison de la couleur de sa peau. King considérait son appel au ministère non pas comme un appel à sauver des âmes pour l’au-delà, mais comme un appel à mettre en pratique le royaume de Dieu pour évincer le mal d’une société qui ne traitait pas tous les individus comme des personnes.

Le moyen ultime de vaincre ce mal était le pouvoir de la croix — pas la croix de l’expiation par le Christ, comme le croyaient les évangéliques blancs, mais la croix de la « souffrance (collective) imméritée ». L’activisme non violent avait, selon King, le pouvoir d’exposer l’injustice structurelle et de provoquer une repentance nationale. Car le grand public ne pouvait pas ne pas s’émouvoir face aux opprimés manifestant de l’amour à l’égard de leurs oppresseurs.

King n’était ni le premier ni le dernier à prêcher ce message, mais il a été plus efficace que la plupart des autres, en partie parce que sa vision du christianisme et de la démocratie américaine plaisait non seulement aux chrétiens afro-américains, mais aussi à de nombreux libéraux blancs. Contrairement à Marcus Garvey, nationaliste noir du début du 20e siècle, ou au contemporain de King, Malcolm X, King fondait ses appels à la justice raciale sur les documents fondateurs de la nation, à savoir l’affirmation de la Déclaration d’indépendance selon laquelle « tous les hommes sont créés égaux » et les droits garantis par la Constitution.

Ses principes d’égalité raciale, de dignité humaine et d’activisme non violent contre l’injustice, King les fondait aussi sur les parties de la Bible les plus appréciées par les protestants libéraux blancs : le Sermon sur la montagne, la parabole du bon Samaritain, la règle d’or et la tradition prophétique biblique.

Pour nombre de ces chrétiens-là, le message d’amour et de justice de King — particulièrement appuyé par son courage de faire face à la prison et de risquer sa vie pour ses convictions — apparaissait comme le reflet parfait de la version de l’évangile social et des principes de la démocratie américaine auxquels ils croyaient déjà. Même si, de leur côté, ils manquaient de cohérence dans l’application de ces principes quant aux questions raciales, ils faisaient l’éloge de King comme d’un prophète moderne. Le pasteur fut même nommé parmi les contributeurs réguliers du Christian Century, qui était à l’époque le principal magazine protestant libéral.

En revanche, pour beaucoup de chrétiens évangéliques blancs, le message de King était choquant. Son approche de la Bible, de la conversion et de l’expiation ne correspondait pas à leur théologie. Ses opinions politiques ne coïncidaient pas non plus avec les leurs. Pour la plupart des évangéliques blancs, le communisme international était l’une des plus grandes menaces pour la liberté religieuse. Ils soutenaient donc la guerre du Vietnam et l’engagement de leur pays dans la guerre froide.

En tant que pacifiste et socialiste chrétien souvent critique à l’égard du gouvernement américain, King, lui, s’est opposé à la guerre du Vietnam et s’est engagé dans une campagne de désobéissance civile non violente. À l’époque, celle-ci fut dénoncée par notre magazine et Billy Graham. Pour eux, elle risquait de compromettre la mission anticommuniste de l’Amérique et elle violait l’obligation donnée aux chrétiens dans le Nouveau Testament de se soumettre aux autorités dirigeantes.

Le repentir des évangéliques blancs

Il a fallu beaucoup de temps après la mort de King pour que la plupart des évangéliques blancs fassent pleinement la paix avec lui. À la fin des années 1960 et dans les années 1970, certains jeunes progressistes évangéliques, qui désiraient faire de la réconciliation raciale une priorité du mouvement évangélique, vénéraient King. Mais de nombreux évangéliques conservateurs l’ignoraient. Ce n’est qu’à la fin des années 1980 que Christianity Today commença à publier régulièrement des rétrospectives hagiographiques sur lui.

Et vers la fin du 20e siècle, les chrétiens conservateurs commencèrent à utiliser le souvenir historique de King pour appeler les évangéliques blancs à se repentir du péché de racisme individuel. Selon eux, si les évangéliques blancs (y compris eux-mêmes) s’étaient opposés à King dans les années 1960, c’est parce qu’ils étaient racistes. À présent, ils avaient compris et réalisé que King était le vrai chrétien alors qu’eux-mêmes avaient agi comme des pécheurs pharisiens.

Cette repentance était sans aucun doute sincère et cruellement nécessaire, mais elle reposait également sur une incompréhension au moins partielle du message de King. Celui-ci était avant tout social plutôt qu’individuel. L’objectif de King était de transformer la démocratie américaine et de conduire les Afro-Américains vers la terre promise. Sa mission ne consistait donc pas simplement à guérir les cœurs des chrétiens blancs pour qu’ils pratiquent un jour leur culte dans des églises multiraciales.

Certains des chrétiens blancs qui, à cette période, portaient King aux nues — comme Jerry Falwell qui, en 1988, l’avait qualifié de « héros américain de tout un chacun » — soutenaient également le renforcement de l’arsenal nucléaire de la guerre froide mené par le président Reagan et s’opposaient à la campagne présidentielle de Jesse Jackson, leader des droits civiques et ancien associé de King. Il est très peu probable que King aurait approuvé les positions politiques de ces évangéliques blancs s’il avait vécu assez longtemps pour les entendre. Et les évangéliques blancs auraient probablement beaucoup moins approuvé King s’il avait encore été en vie à la fin des années 1980 et avait défendu des causes similaires à celles soutenues par Jackson.

En attribuant leur rejet antérieur du pasteur militant à des péchés racistes passés dont ils s’étaient maintenant repentis, certains évangéliques blancs, voyant en lui un héros prophétique, n’ont pas réussi à saisir pleinement la distance théologique entre son message et le leur.

Ce n’est pas seulement la haine des noirs ou l’opposition à l’intégration raciale qui avait poussé les évangéliques des années 1960 à répudier King, mais de profondes différences d’orientation théologique et politique. Ces différences étaient toujours aussi importantes dans les années 1980 et 1990. Mais King était mort et il était plus facile pour les évangéliques blancs de les ignorer.

Le King qu’ils promouvaient désormais était un King mythique, bien plus évangélique et conservateur qu’il ne l’avait jamais été dans la vie réelle.

King, héros conservateur

Mais au moment même où les évangéliques blancs commençaient à redécouvrir King, de nombreux jeunes afro-américains et libéraux blancs prenaient leurs distances par rapport à lui. C’est la période où la sortie du film Malcom X de Spike Lee déclencha la ferveur de la jeune génération d’Afro-Américains envers son nationalisme noir. Tous ces jeunes étaient fatigués de voir comment les blancs s’appropriaient King comme représentant de la passivité non violente des noirs.

Le point culminant des représentations hagiographiques de King par les historiens américains fut d’une part la série documentaire historique Eyes on the Prize (1987) de la télévision publique PBS et d’autre part le livre de Taylor Branch, Parting the Waters: America in the King Years, 1954-63 (1988) qui remporta le prix Pulitzer.

Après la fin des années 1980, les historiens devinrent plus critiques envers le pasteur. Ils tendaient plus à relever sa condescendance (voire ses comportements abusifs) envers les femmes et ses conflits avec les jeunes militants. Ces nouveaux récits suggéraient que les personnes les plus courageuses dans la lutte étaient en fait des activistes locaux tels que Fannie Lou Hamer et Bob Moses ou des défenseurs du Black Power comme Stokely Carmichael.

Dans ce contexte, les évangéliques conservateurs blancs redoublèrent d’efforts pour s’approprier King, le célébrant non seulement comme chrétien engagé (contrairement aux radicaux du Black Power qui ne l’étaient pas), mais aussi comme promoteur conservateur d’une forme de cécité raciale. Son rêve d'un monde où les gens « ne seront pas jugés sur la couleur de leur peau mais sur la réalité de leur caractère » était employé comme une critique implicite de la discrimination positive. Le fait que King ait soutenu celle-ci ainsi que le socialisme démocratique au cours des dernières années de sa vie échappa à ceux qui le réduisirent à son « I Have a Dream ».

Comprendre King aujourd’hui

Lorsque je réfléchis à King en tant que chrétien évangélique blanc et historien, je suis confronté à trois questions : (1) Comment dois-je comprendre King en tant que personnage historique, dans le contexte de son époque et de son lieu ? (2) Comment ma compréhension de King devrait-elle affecter ma propre compréhension de la théologie chrétienne et de la Bible ? (3) Comment ma compréhension de King et de la théologie chrétienne devrait-elle affecter ma réponse aux questions de justice raciale aujourd’hui ?

La première question est celle à laquelle il est le plus facile de répondre : King était un personnage complexe, mais il semble évident que ses opinions théologiques et politiques différaient considérablement de celles des évangéliques blancs, tant à son époque qu’aujourd’hui. Pour comprendre les positions de King, nous devons notamment comprendre l’histoire de l’évangile social noir, comme l’affirme Gary Dorrien, historien de la théologie.

La seconde question est plus inconfortable : la résistance de l’évangélisme blanc à l’éthique de King montre-t-elle que nous nous sommes trompés dans notre théologie et que nous devrions donc nous convertir à l’évangile social noir ?

Notre théologie chrétienne doit être établie en fonction de notre compréhension de la vérité biblique et non pas simplement en fonction de notre attirance pour un mode de vie particulier ou de notre admiration pour un principe chrétien mis en œuvre. Mais chaque fois que nous constatons que notre propre tradition théologique n’a pas rejeté de manière adéquate un péché donné, comme le racisme, nous sommes appelés à identifier les angles morts théologiques qui l’ont empêchée de voir ce mal. Nous devrions donc adopter un correctif théologique partant de notre propre compréhension de la Bible, mais y incluant aussi toutes les vérités bibliques que nous trouvons dans d’autres traditions chrétiennes, y compris la théologie de King et celle d’autres chrétiens noirs.

Quelle que soit notre compréhension de King, nous devons finalement également répondre à la question de savoir comment réagir face à l’injustice raciale aujourd’hui. Il faut aussi déterminer si, pour ce faire, nous devrions en appeler aux paroles de King. Il est facile de le citer de manière sélective ou hors contexte. Nous devons donc être prudents lorsque nous l’utilisons pour peser sur les débats politiques actuels, en particulier si nous sommes tentés d’utiliser ses discours pour argumenter contre une forme particulière d’activisme noir.

En même temps, l’exemple de résistance active au mal par l’amour non violent qu’a donné King est toujours aussi inspirant qu’il l’était de son vivant. King peut toujours nous convaincre et nous inspirer, même si nous ne rejoignons pas toutes ses opinions théologiques. J’apprécie sincèrement l’humilité des chrétiens blancs de la fin du 20e siècle qui ont reconnu que les attitudes de King étaient bien plus proches de celles du Christ que les leurs et qui ont trouvé en King un encouragement à se repentir. Leur compréhension historique de King était peut-être incomplète à certains égards, mais leur humilité était estimable.

95 ans après sa naissance, je pense que nous devrions aborder King avec la même humilité. Son histoire n’est pas la nôtre et sa conception de la foi chrétienne était probablement aussi différente. C’était un homme qui avait à la fois de gros défauts et de profondes intuitions. Il n’était pas le seul héros des droits civiques, ni même le meilleur.

Mais il était profondément engagé dans la poursuite chrétienne de la justice et de la réconciliation. Nous avons encore beaucoup à apprendre de sa vie telle qu’elle était, et pas telle que nous pourrions l’imaginer ou la souhaiter.

Daniel K. Williams enseigne l’histoire américaine à l’Ashland University et est l’auteur de The Politics of the Cross: A Christian Alternative to Partisanship.

Traduit par Anne Haumont

Pour être informé de nos nouvelles traductions en français, abonnez-vous à notre newsletter et suivez-nous sur Facebook ou Twitter.

Apple PodcastsDown ArrowDown ArrowDown Arrowarrow_left_altLeft ArrowLeft ArrowRight ArrowRight ArrowRight Arrowarrow_up_altUp ArrowUp ArrowAvailable at Amazoncaret-downCloseCloseEmailEmailExpandExpandExternalExternalFacebookfacebook-squareGiftGiftGooglegoogleGoogle KeephamburgerInstagraminstagram-squareLinkLinklinkedin-squareListenListenListenChristianity TodayCT Creative Studio Logologo_orgMegaphoneMenuMenupausePinterestPlayPlayPocketPodcastRSSRSSSaveSaveSaveSearchSearchsearchSpotifyStitcherTelegramTable of ContentsTable of Contentstwitter-squareWhatsAppXYouTubeYouTube