Petite introduction morale aux « Anneaux de pouvoir » d’Amazon

Le royaume de Númenor décrit par Tolkien a encore des choses à nous apprendre.

Christianity Today September 16, 2022
Copyright Amazon Studios/Photo par Ben Rothstein/Prime Video

Un démagogue charismatique séduit un puissant empire, prenant le pouvoir en promettant de restaurer la gloire passée. Un peuple trahit ses principes fondateurs, délaissant la foi de ses pères pour poursuivre des rêves d’immortalité. Leur capitale vacille jusqu’au bord de la guerre civile. Les fidèles restants sont traqués comme des traîtres par une foule déterminée à les anéantir.

Il ne s’agit pas d’un résumé des prophètes de l’Ancien Testament ou du journal d’hier, mais de quelques-unes des histoires contenues dans le Silmarillion de J. R. R. Tolkien, la bible des traditions de la Terre du Milieu. Longtemps négligées, ces histoires ont enfin trouvé leur place sous les feux de la rampe.

Amazon vient de lancer sa série Le Seigneur des Anneaux : Les Anneaux du Pouvoir.

Réputée série télévisée la plus chère jamais produite, ce projet d’un milliard de dollars est une adaptation d’une toute petite partie de l’œuvre de Tolkien. Dans la chronologie fictive de l’auteur, l’histoire de la Terre du Milieu se déroule sur trois âges. La plupart du Silmarillion concerne le Premier Âge. La trilogie de livres et de films la plus célèbre et la plus appréciée, Le Seigneur des Anneaux, couvre la fin du Troisième Âge. La nouvelle série télévisée d’Amazon se situe entre les deux.

Tolkien n’a presque rien écrit sur cette période. Pourtant, le peu qu’il a élaboré fourmille de résonances politiques. Dans les 23 courtes pages d’« Akallabêth », un chapitre du Silmarillion, Tolkien raconte la gloire du royaume de Númenor, mais aussi son orgueil démesuré et sa folie.

Dans la moitié du chapitre suivant, « Les anneaux de pouvoir », Tolkien évoque ces fameux anneaux et décrit ce qui ressemble fondamentalement à la troisième guerre mondiale — un conflit cataclysmique si destructeur que le monde ne s’en est jamais remis, bien que les bons aient remporté la victoire.

C’est un récit extraordinaire (et extraordinairement pertinent), fait de passion, d’ambition, de manipulation et de tromperie politiques, d’intrigues géopolitiques, de guerre religieuse, de théodicée et d’apocalypse. C’est l’histoire de personnes qui parviennent à s’imposer par l’honneur, la tromperie ou la conquête, et une mise en garde contre les destructions que des hommes et des femmes ambitieux peuvent engendrer lorsqu’ils disposent d’un pouvoir considérable.

Si vous vous intéressez à cette série, voici ce que vous devriez savoir sur l’histoire dont elle s’inspire et, si vous le permettez, les leçons à en tirer.

Le royaume de Númenor

Dans le texte original de Tolkien, les Númenoréens étaient « sages et glorieux », de grande taille et de grande longévité, de célèbres marins. Ils ont appris à parler l’elfique, la langue du savoir, et ont « produit des lettres, des parchemins et des livres » dans lesquels ils ont écrit « de nombreuses œuvres de sagesse et d’émerveillement à l’apogée de leur royaume »

Númenor est le royaume originel dont le Gondor — bien connu des lecteurs et spectateurs du Seigneur des Anneaux — est la copie. C’est la métropole dont le Gondor est le royaume en exil.

Les hommes et les femmes à l’origine de Númenor étaient réputés pour leur fidélité aux dieux. En récompense, ils bénéficièrent d’un foyer — un royaume insulaire au large de la Terre du Milieu — ainsi que d’un âge d’or de prospérité et de sagesse.

Dans leur grandeur, les Númenoréens visitent la Terre du Milieu. Voyant la pauvreté et l’ignorance du « monde oublié », ils offrirent à ces humains de moindre grandeur le cadeau de la tutelle bienveillante de Númenor — une intervention humanitaire destinée à améliorer leur condition et à les aider à « l’organisation de leur vie ».

Númenor est donc une vision idéalisée d’une grande puissance utilisant sa grandeur pour faire la justice.

Mais la grandeur du royaume devient la source de sa tentation. Après des milliers d’années de bonheur et de gloire, certains Númenoréens commencent à désirer la seule chose qu’ils n’ont pas : « Le désir de la vie éternelle, d’échapper à la mort et à la fin des plaisirs, s’affermit en eux ; et plus leur puissance et leur gloire augmentaient, plus leur inquiétude augmentait ».

Ils furent en proie au péché classique de l’hubris.

Le peuple se divise alors. La majorité des Númenoréens et leurs dirigeants s’éloignent des dieux, mais un petit reste demeure fidèle. Le plus grand de leurs rois est alors décrit comme « rempli du désir d’un pouvoir sans limites et de la domination exclusive de sa volonté ».

Ici, le récit de Tolkien suit le modèle de 1 et 2 Rois, où le peuple tombe parce que ses dirigeants tombent.

Númenor commence à dilapider ses richesses et son pouvoir : « ceux qui vivaient se tournaient avec plus d’ardeur vers le plaisir et les réjouissances ». Dans leur orgueil et leur hédonisme, l’empire devient rapace, écrit Tolkien, « et ils désiraient à présent la richesse et la domination » — puisque la vie éternelle leur était refusée — et « apparaissaient dès lors plutôt comme des seigneurs, maîtres et collecteurs de tribut que comme des appuis et des enseignants ».

Il n’est pas difficile de voir l’intention de Tolkien dans cette mise en scène politique. Le Royaume-Uni, comme Númenor, était un royaume insulaire se voyant comme un empire bienveillant. Mais lorsque Tolkien rédige le Silmarillion au 20e siècle, l’empire s’affaiblit de jour en jour et la société occidentale semble de plus en plus matérialiste et séculière.

C’était une époque de pessimisme pour les élites occidentales comme Tolkien, qui voyait émerger un monde de plus en plus hostile à l’héritage culturel avec lequel il avait grandi. Une nostalgie de la gloire passée imprègne son travail.

L’histoire de Sauron

S’il n’y avait que cela, l’« Akallabêth » n’aurait rien de très remarquable, inadapté pour une adaptation télévisée à un milliard de dollars et indigne des autres œuvres de Tolkien. Mais l’imagination catholique de Tolkien lui donnait plus de perspicacité psychologique et d’ambition spirituelle.

Cette histoire n’est pas un appel néo-réactionnaire au renouveau de la civilisation occidentale ou de l’impérialisme britannique. Il s’agit de quelque chose de beaucoup plus pessimiste que cela. Tolkien a bien dans son récit un personnage qui appelle au renouveau de la grandeur de la nation. Cependant — peut-être avec le souvenir encore frais de la Seconde Guerre mondiale — il place cet appel dans la bouche de son méchant.

Dans l’histoire du déclin culturel et spirituel de Númenor intervient un fourbe démagogue : nul autre que Sauron lui-même. S’il apparaît dans le Seigneur des Anneaux sous la forme d’un œil flamboyant au sommet de sa tour, dans ce conte plus ancien, c’est un personnage qui marche et parle, « rusé d’esprit et de parole », avec « toujours sur la langue des flatteries douces comme le miel ».

En d’autres termes, Sauron est un influenceur professionnel. Avec l’aide des anneaux de pouvoir, il se fraie un chemin dans les conseils entourant le roi en promettant « des richesses innombrables […] de sorte que leur pouvoir augmentera sans fin ».

Sauron joue habilement sur la peur de la mort des Númenoréens, leur promettant des sommets de pouvoir toujours plus élevés en prenant aux dieux ce qui leur revient de droit. Le roi númenoréen se détourne « totalement de l’allégeance de ses pères » et traite les fidèles númenoréens comme des rebelles, les offrant en sacrifices humains dans le temple nouvellement construit par Sauron. L’empire númenoréen, déjà rapace, se fait brutal et violent.

Dans cette partie de l’histoire, Tolkien semble établir un lien naturel entre le pouvoir, la démagogie et la violence. Un grand pouvoir attire naturellement l’escroc, qui gagne en influence en flattant la foule et en faisant appel à ses bas instincts. Et au bout du compte, le pouvoir allié à la démagogie conduit toujours à un bain de sang — dans son pays et à l’étranger.

Les leçons de Númenor

Le final d’« Akallabêth » est choquant et apocalyptique — raconté plus comme une parabole ou un mythe que comme une simple fiction. Sauron persuade le roi de Númenor de faire la guerre aux dieux, d’envahir leur demeure et de leur arracher la vie éternelle par la force des armes.

Le roi, devenu fou de vieillesse et d’orgueil, mène son armada à travers la mer. En réponse, les dieux fendent la mer en deux et noient l’armada, Númenor elle-même et la moitié de la Terre du Milieu. C’est l’apocalypse racontée par les damnés. (Je mets Amazon au défi de porter ça à l’écran.)

La combinaison d’allusions païennes et bibliques — Atlantide et Pharaon, l’Empire romain et les royaumes d’Israël et de Juda — est typique de Tolkien. En puisant dans des sources diverses du canon occidental, il donne à son texte un poids historique et une importance quasi religieuse. Il peint également sur une toile si vaste que l’histoire paraît cruciale et d’une tragédie saisissante.

Dans ce sombre paysage, Tolkien offre une lueur d’espoir. Dans « Les anneaux de pouvoir » (le dernier chapitre du Silmarillion), les fidèles restés fuient Númenor avant sa destruction, fondent le Gondor et mènent la dernière alliance des elfes et des hommes dans une ultime guerre désespérée contre Sauron. (Pour référence, il s’agit de la grande bataille du prologue de la version cinématographique du Seigneur des Anneaux et il est probable qu’on la retrouvera comme scène finale des Anneaux de Pouvoir, dans cinq saisons)

Les gentils gagnent, mais il est trop tard pour que la victoire soit digne de ce nom. Sauron est renversé, mais presque tous les héros sont tués, le monde est dévasté et l’anneau de Sauron survit.

Les efforts étaient-ils vains ? Nous connaissons la fin du conte — après bien des péripéties, Sauron et son anneau seront finalement vaincus, même si les fidèles de Númenor ne le verront jamais.

Voici donc la dernière leçon de Tolkien, et celle qu’il faut garder à l’esprit lorsque nous regardons Les Anneaux du Pouvoir dans le contexte de l’Église contemporaine :

Dans toute époque d’hédonisme, de démagogie, de rapacité et de violence (y compris la nôtre), ceux qui font partie du reste fidèle risquent de ne jamais voir leur victoire finale ou les fruits de leur sacrifice. Mais ils luttent quand même, car ils savent qu’au bout du compte, la providence leur donnera raison. À cette lumière, ce qu’il nous faut savoir est si nous serons parmi le reste ou parmi les damnés.

« C’est un conte juste, bien qu’il soit triste, comme le sont tous les contes de la Terre du Milieu », dit Aragorn aux hobbits dans La Communauté de l’Anneau.

En tant que vétéran de la Première Guerre mondiale, Tolkien a si bien compris la déchéance du monde, l’orgueil des hommes et des femmes et les tentations du pouvoir qu’il savait qu’il ne fallait pas donner une fin heureuse à ses récits.

Le génie de Peter Jackson a été de rester fidèle à Tolkien et de terminer sa trilogie du Seigneur des Anneaux plus comme une tragédie que comme un récit fantastique. Quand la plupart des divertissements commerciaux répondent à la demande de résolutions complètes, il faut de l’audace pour raconter une histoire mature sur un monde brisé et jugé, où tous les héros sont imparfaits et où chaque victoire terrestre reste conditionnelle.

Cette histoire est une source d’inspiration parce qu’elle est réaliste, même si elle est peuplée d’elfes et de sorciers. Plus Les Anneaux de pouvoir d’Amazon sera fidèles à ces vérités, plus importante sera sa contribution, non seulement à notre divertissement, mais aussi à notre édification.

Paul D. Miller est professeur à l’université de Georgetown et chargé de recherche à l’Ethics & Religious Liberty Commission.

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Books

Elizabeth II, une reine qui plaçait sa confiance en Dieu

Au cours de ses sept décennies de règne, elle parla régulièrement de l’importance de sa foi personnelle.

Christianity Today September 9, 2022
Joe Giddens - par WPA Pool/Getty Images / édition par Mallory Rentsch

La reine Elizabeth II, le monarque ayant régné le plus longtemps dans l’histoire britannique, est décédée à l’âge de 96 ans.

Tout au long de ce règne sans précédent, la reine Elizabeth II a fréquemment parlé de sa foi chrétienne personnelle. Dès son premier discours de Noël en 1952, une tradition lancée par son grand-père, le roi George V, la Reine sollicitait la prière pour son prochain couronnement.

« Je veux vous demander à tous, quelle que soit votre religion, de prier pour moi ce jour-là », « de prier pour que Dieu me donne la sagesse et la force d’accomplir les promesses solennelles que je vais faire, et que je puisse fidèlement servir Lui et vous, tous les jours de ma vie. »

En tant que l’un des dirigeants les plus reconnus et appréciés au monde pendant plus de sept décennies depuis ce Noël, la Reine a illustré comment peut être vécue une foi chrétienne personnelle, privée, inclusive et compatissante tout en servant dans un rôle public international soumis à un examen intense de presque toutes parts.

La reine Elizabeth II avait hérité de responsabilités religieuses en tant que Défenseur de la foi et Gouverneur suprême de l’Église d’Angleterre, titres dévolus au monarque britannique régnant depuis que Henri VIII renonça à la papauté en 1534. Lors de son couronnement en 1953, Sa Majesté prêta serment de « maintenir et préserver inviolablement l’établissement de l’Église d’Angleterre, ainsi que la doctrine, le culte, la discipline et le gouvernement de celle-ci, tels qu’ils sont établis par la loi en Angleterre ».

Elle était notamment chargée de nommer les archevêques, les évêques et les doyens de l’Église d’Angleterre sur les conseils du Premier ministre. En 1970, elle devint la première souveraine à ouvrir le Synode général de l’Église et à s’y adresser en personne, une pratique qu’elle maintint tous les cinq ans après les élections diocésaines.

Trois semaines après son couronnement, la Reine suivit le précédent historique et jura de préserver l’Église d’Écosse, honorant ainsi son devoir de « préserver l’implantation de la véritable religion protestante telle qu’établie par les lois faites en Écosse. » L’Église d’Écosse est presbytérienne et ne reconnaît que Jésus-Christ comme « roi et chef de l’Église », ce qui explique l’absence de titre officiel et de participation de Sa Majesté en tant que membre régulier.

Plus que de la tradition

Mais la foi de la reine était plus que le produit d’une respectueuse politesse envers la tradition historique. Tout au long de son règne, elle a exprimé l’importance de sa foi et l’a recommandée à ses sujets.

« Pour moi, les enseignements du Christ et ma propre responsabilité personnelle devant Dieu fournissent le cadre dans lequel j’essaie de mener ma vie », expliquait-elle en 2000. « Comme beaucoup d’entre vous, dans les moments difficiles, j’ai puisé un grand réconfort dans les paroles et l’exemple du Christ. »

En 2002, la Reine endura une année douloureuse de deuils personnels avec les décès de sa sœur, la Princesse Margaret, et de la Reine Mère. Cette année-là, dans son discours annuel de Noël, elle témoigna de la manière dont sa foi l’avait soutenue.

« Je sais à quel point je compte sur ma propre foi pour me guider dans les bons et les mauvais moments. » « Chaque jour est un nouveau départ. Je sais que la seule façon de vivre ma vie est d’essayer de faire ce qui est juste, de regarder à long terme, de donner le meilleur de moi-même dans tout ce que la journée apporte, et de mettre ma confiance en Dieu. »

La Reine a constamment étendu son rayonnement en reconnaissant et en célébrant la diversité et la tolérance religieuses au Royaume-Uni, dans le Commonwealth et dans le monde entier. Ses messages de Noël et du Jour du Commonwealth ont souvent abordé les thèmes de l’harmonie interconfessionnelle et de la tolérance respectueuse. À l’invitation de la Reine et de son mari, le Duc d’Édimbourg, des dirigeants de diverses croyances et confessions ont régulièrement assisté à des cérémonies royales, notamment des mariages et des services d’action de grâce.

Lors de la célébration de son jubilé de diamant en 2012, la Reine assista à une réception multiconfessionnelle au Palais de Lambeth, organisée par l’archevêque de Canterbury, à laquelle participèrent les dirigeants de huit religions du Royaume-Uni, dont le bouddhisme, le judaïsme, l’islam et l’hindouisme. Lors de cet événement, la Reine déclara : « La foi joue un rôle clé dans l’identité de millions de personnes, fournissant non seulement un système de croyances, mais aussi un sentiment d’appartenance. Elle peut servir d’aiguillon à l’action sociale. En effet, les groupes religieux ont une fière réputation en matière d’aide aux personnes les plus démunies, notamment les malades, les personnes âgées, les personnes seules et les personnes défavorisées. Ils nous rappellent les responsabilités que nous avons au-delà de nous-mêmes. »

Les efforts de la Reine furent salués en 2007 par le Three-Faiths Forum, une organisation qui se consacre à l’établissement d’une compréhension et de relations durables entre les personnes de toutes croyances et confessions. Cette organisation remit à Sa Majesté la Médaille d’or interconfessionnelle Sternberg, décernée aux personnes qui ont contribué à promouvoir la paix et la tolérance entre les personnes de croyances différentes.

L’héritière présomptive

Née le 21 avril 1926, Elizabeth Alexandra Mary Windsor était l’aînée du duc et de la duchesse d’York et la première petite-fille du monarque régnant, le roi George V, qui, dit-on, appréciait grandement cette enfant réfléchie et équilibrée que la famille appelait Lilibet. Le père d’Elizabeth accéda au trône en 1936 en tant que George VI lorsque son frère, le roi Edward VIII, abdiqua pour épouser la divorcée Wallis Simpson.

En tant qu’héritière présomptive, Elizabeth reçut une éducation spécifique et servit dans le service territorial auxiliaire pendant la Seconde Guerre mondiale. En 1947, elle épouse Philip Mountbatten, de lignée royale grecque et danoise. Leur union dura 73 ans jusqu’à sa mort en 2021 et donna naissance à quatre enfants : Charles, prince de Galles et héritier présomptif ; Anne, princesse royale ; Andrew, duc d’York ; et Edward, comte de Wessex. En plus de ses enfants, la Reine laisse derrière elle huit petits-enfants et 12 arrière-petits-enfants.

Dès le début de son règne, la Reine a toujours cité des références de l’Écriture, notamment dans ses retransmissions annuelles de Noël.

« Vers quelle plus grande inspiration et vers quel meilleur conseil pouvons-nous nous tourner », demandait-elle, « que vers la vérité impérissable que l’on trouve dans cette chambre aux trésors qu’est la Bible ? »

Dans son discours de 2016, Sa Majesté expliquait : « Des milliards de personnes suivent aujourd’hui l’enseignement du Christ et trouvent en lui la lumière qui guide leur vie. Je suis l’une d’entre elles parce que l’exemple du Christ m’aide à voir l’importance de faire les petites choses avec beaucoup d’amour, quelle que soit la personne qui les fait et quelle que soit sa propre croyance ».

Ses relations avec Billy Graham

Dans Tel que je suis, son autobiographie, son ami et confident Billy Graham témoignait de l’amour de la Reine pour la Bible, ainsi que de la force et de la profondeur de sa foi chrétienne.

« Personne en Grande-Bretagne ne fut plus cordial à notre égard que Sa Majesté la reine Elizabeth II », écrit Graham. « Presque toutes les rencontres que j’ai eues avec elle se sont déroulées dans un cadre chaleureux et informel, comme un déjeuner ou un dîner, soit seul à seul, soit avec quelques membres de la famille ou d’autres amis proches. »

Ils rendaient rarement leurs rencontres publiques et n’exploitaient pas leur relation dans leurs autres engagements, mais les deux entretenaient une amitié qui perdura pendant plus de 60 ans, jusqu’au décès de Graham en 2018. Il écrivit : « Je l’ai toujours trouvée très intéressée par la Bible et son message. »

L’amour de la Reine pour la Bible et son message évangélique l’a conduite à participer à la publication d’un livre spécial pour célébrer son 90e anniversaire. Intitulé The Servant Queen and the King She Serves (« La Reine servante et le Roi qu’elle sert »), cet aperçu de la foi chrétienne de Sa Majesté, coécrit par Catherine Butcher et Mark Greene, a été publié par la Société biblique du Royaume-Uni, dont la Reine était la marraine, ainsi que par HOPE et le London Institute for Contemporary Christianity.

Sa Majesté en écrivit personnellement l’avant-propos, remerciant les lecteurs pour leurs prières et leurs bons vœux. « J’ai été — et je reste — très reconnaissante envers […] Dieu pour son amour indéfectible. J’ai véritablement vu Sa fidélité. »

Le livre fut distribué à des milliers d’Églises au Royaume-Uni et dans de nombreux pays du Commonwealth avant l’anniversaire de la Reine en 2016. Il s’est avéré si populaire que la Société biblique a dû imprimer 150 000 exemplaires supplémentaires pour répondre à la demande.

Accomplir ses vœux

À la fois princesse et pape, gardienne et arrière-grand-mère, diplomate et disciple, Sa Majesté la reine a offert à sa nation et au Commonwealth, au cours de périodes tumultueuses de changements historiques et d’avancées technologiques, le calme et la stabilité.

« En fin de compte, la monarchie attire le regard au-delà d’elle-même, vers la majesté de Dieu » écrit Ian Bradley, professeur à l’école de théologie de l’Université de St Andrews. « Elle encourage les qualités humaines données par Dieu que sont la révérence, la loyauté et la dévotion. Elle tire sa véritable consécration et son autorité d’en haut plutôt que d’en bas. »

La reine Elizabeth II était un monarque de ce genre. Traversant les 20e et 21e siècles, la modernité et la postmodernité, Sa Majesté a fait de sa foi personnelle en Dieu et de sa croyance en Christ son ancre au milieu des nombreuses tempêtes, tant publiques que privées, qu’elle a endurées. Jusqu’à la fin, elle a rempli les vœux sacrés de son couronnement envers Dieu, en vivant fidèlement et en servant ceux qui lui avaient été confiés.

Dudley Delffs est l’auteur de The Faith of Queen Elizabeth.

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Books

Une organisation missionnaire achète un yacht de luxe

Et autres nouvelles des chrétiens à travers le monde.

Christianity Today August 31, 2022
Yacht image courtesy of GBA Ships

La première compagnie de croisière moderne centrée sur l’Asie a fermé ses portes suite aux difficultés financières engendrées par le COVID-19 et a vendu le dernier de ses bateaux de luxe à une organisation missionnaire allemande. Les autres navires de Genting Hong Kong’s Star Cruises ont été vendus pour la casse, mais le Taipan, amarré en Malaisie, a été acquis par GBA Ships (anciennement Gute Bücher für Alle), qui travaille en partenariat avec Opération Mobilisation. GBA Ships visite 15 à 18 villes portuaires par an, fournissant de l’aide humanitaire et un accès à des livres chrétiens. La restauration du yacht de 31 ans et de 85,5 mètres devrait prendre de 12 à 18 mois. Il sera rebaptisé Doulos Hope.

Chine : Un chrétien rescapé de l’internement

Un chrétien de 43 ans détenu dans les camps d’internement du Xinjiang aux côtés d’une vingtaine de Ouïghours musulmans s’est échappé du pays et est parvenu aux États-Unis avec sa femme et son fils. Ovalbek Turdakun, un Kirghize de souche qui travaillait comme traducteur kirghiz-mandarin, est devenu la cible du programme d’assimilation brutal du gouvernement chinois après avoir épousé une native du Kirghizistan. Il a été détenu pendant 10 mois puis soudainement libéré. La famille s’est enfuie aux États-Unis avec l’aide d'un chercheur de la Victims of Communism Memorial Foundation, d’un expert canadien en surveillance, d’un analyste du groupe McKinsey, d’une famille de chrétiens américains et du fondateur de China Aid, Bob Fu. Des avocats spécialisés dans les droits de l’homme vont soumettre son récit de première main de la répression pratiquée par le gouvernement chinois à la Cour pénale internationale.

Australie : De nombreux baptêmes lors d’un lever de croix

Un nombre record de 130 aborigènes ont été baptisés par des anciens de leurs familles et des chefs de tribus lors d’une cérémonie de lever de croix sur la Terre d’Arnhem Ouest, dans le quart nord-est du Territoire du Nord de l’Australie. Les levers de croix sont devenus importants pour les chrétiens des Premières nations, car ils sont l’occasion de renouveler une alliance entre la terre et Dieu et de préparer les individus au baptême. La pratique remonte au mouvement de retour vers les homelands dans les années 1970, lorsque de nombreuses familles aborigènes sont retournées sur leurs terres ancestrales.

Ghana : Les Églises plantent des arbres

L'’organisation chrétienne d’aide humanitaire Compassion International et 17 Églises se sont unies pour planter 4 000 arbres afin de lutter contre les effets du changement climatique. Le groupe espère planter 15 000 autres acacias, moringas, avocatiers et autres espèces d'arbres dans 20 endroits du pays. Abraham Satunia, un responsable des Assemblées de Dieu, explique que la combustion de matières fossiles a perturbé l’ordre environnemental, devenant une menace pour la vie humaine. Selon la Banque mondiale, la température annuelle moyenne au Ghana a augmenté d’un degré Celsius depuis 1960, et il y a maintenant environ 48 jours plus chauds et 12 jours plus froids chaque année. La poursuite du changement climatique devrait voir augmenter la température annuelle moyenne d’un à trois degrés d’ici 2060, entraînant une diminution de 20 % des précipitations et provoquant des sécheresses cycliques.

Nigeria : Contestations autour du décès d’une chanteuse de Gospel

La chanteuse gospel Osinachi Nwachukwu est décédée subitement à l’âge de 42 ans, et sa famille ne reconnaît pas la cause du décès. Son mari et manager, Peter Nwachukwu, affirme qu’elle souffrait secrètement d’un cancer de la gorge. Ses quatre enfants, cependant, ont indiqué à la police qu’elle était victime de violences domestiques. Peter Nwachukwu est maintenant en prison, faisant face à 23 accusations de violence domestique et d’homicide. L’interprétation du titre « Ekwueme » par Osinachi Nwachukwu, qui était une des chanteuses de gospel les plus connues du Nigeria, compte 77 millions de vues sur YouTube.

Norvège : Querelle de voisinage autour d’une croix illuminée

Un homme de 72 ans affirme que la croix illuminée d’une église évangélique luthérienne constitue un risque pour la santé, car elle pourrait « rouvrir d’anciennes blessures » pour les personnes ayant fréquenté les écoles tenues par cette dénomination entre 1955 et 1990. La Société ecclésiale évangélique luthérienne, une petite dénomination comptant environ 3 300 membres, a présenté ses excuses pour les châtiments corporels pratiqués dans ses écoles, mais affirme que cela n’a rien à voir avec cette croix placée sur l’église de Skien, construite en 2021.

Italie : Andy Warhol attire les Romains à l’église

Une Église évangélique italienne a attiré des centaines de visiteurs en exposant une œuvre mineure de l’artiste pop décédé Andy Warhol. L’Église, la Chiesa Evangelica Breccia di Roma, a ouvert ses locaux à une exposition d’art intitulée Grafica Internazionale e Multipli d’Autore comme une manière d’aimer ses voisins et de leur permettre de faire connaissance avec cette communauté évangélique active au cœur de Rome. La sérigraphie de fleurs de Warhol – signée au dos avec un tampon indiquant « Inscrivez votre propre signature », suivi d’une ligne vierge – s’est vendue aux enchères pour environ 10 000 euros.

République dominicaine : Un évêque pentecôtiste souhaite que l’Église examine la loi sur la protection de la vie privée

Le président des Églises pentecôtistes de la République dominicaine a demandé au législateur que des experts de sa congrégation examinent une proposition de loi sur le droit à la vie privée, à l’honneur, à la bonne réputation et à l’image. L’évêque Reynaldo Franco Aquino estime que le projet de loi n’a pas fait l’objet d’un examen public approprié, « ce qui explique le déclenchement d’une controverse qui paraît sans fin ». La proposition de loi, à laquelle s’opposent les défenseurs de la liberté de la presse, faciliterait les poursuites pour diffamation. Il n’est pas clair si elle s’appliquerait également aux utilisateurs et aux plateformes de médias sociaux.

États-Unis : Peu de femmes à la tête des Églises baptistes égalitariennes

Seuls environ 7 % des Églises de la Cooperative Baptist Fellowship, qui s’est séparée des Baptistes du Sud en 2002 autour de la question des femmes dans le ministère, sont dirigées par des femmes ordonnées. Une étude présentée lors de l’assemblée générale de 2022 a montré que le nombre total de femmes occupant des postes de pasteur principal ou de copasteur dans les 1 400 assemblées de la dénomination a en fait diminué depuis 2015. Les femmes ayant participé à l’étude ont déclaré qu’elles étaient confrontées à des obstacles, notamment des attentes plus élevées, des salaires plus bas, du harcèlement sexuel, des questions d’entretien inappropriées et l’attribution à des hommes du mérite de leur travail. « Après ma première prédication », raconte l’une d’entre elles, « un paroissien a demandé à mon mari si c’était lui qui l’avait écrite ».

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Books

Kallistos Ware : théologien de la voie orthodoxe pour les autres chrétiens

L’évêque anglais et universitaire d’Oxford a approfondi le respect, l’unité et le dialogue entre l’antique confession et les évangéliques.

Kallistos Ware

Kallistos Ware

Christianity Today August 31, 2022
Courtesy of Bradley Nassif

Les chrétiens orthodoxes commémorent l’archevêque métropolitain Kallistos Ware, qui s’est endormi dans le Seigneur à l’aube du mercredi 24 août dernier en Angleterre à l’âge de 88 ans. En tant qu’évangéliques, nous avons également là une perte à déplorer et une raison de prier — comme le font les orthodoxes lors des funérailles — « Que sa mémoire soit éternelle ».

Né Timothy Ware en 1934 et élevé dans une famille anglicane, Kallistos Ware s’était converti à l’âge de 24 ans et était devenu l’un des théologiens orthodoxes orientaux les plus influents du monde anglophone au 20e et au début du 21e siècle.

Les livres les plus célèbres de l’évêque Kallistos, qui a également été édité en français, sont The Orthodox Church, un manuel d’introduction de référence depuis près de 60 ans, The Orthodox Way et sa contribution à la traduction en anglais de la Philocalie, un texte classique de spiritualité orthodoxe. Il fut Spalding Lecturer en études orthodoxes orientales à l’Université d’Oxford pendant 35 ans, jusqu’à sa retraite en 2001, et nombre de ses doctorants sont parvenus à des postes influents.

Après Oxford, il continua à publier, mais consacra les dernières années de sa vie à un renforcement de la vie interne de l’Église orthodoxe et à la construction de ponts avec les chrétiens non orthodoxes, notamment les catholiques, les anglicans et les évangéliques. Les personnalités comme lui sont rares.

Le travail de l’évêque Kallistos a changé le paysage entre l’orthodoxie et l’évangélisme. On comprendra mieux sa contribution en la situant dans une période où les évangéliques ont commencé à s’intéresser à la foi ancienne.

Dans le contexte anglophone, cet intérêt se développa indirectement dans les années 1970 avec Robert Webber, professeur de théologie au Wheaton College. Ses écrits rendirent l’Église primitive attrayante pour les évangéliques en soulignant le rôle positif de la tradition de l’Église et des formes liturgiques de culte. Il décrivit également un mouvement important d’évangéliques vers l’anglicanisme dans son livre Evangelicals on the Canterbury Trail : Why Evangelicals are Attracted to the Liturgical Church (« Les évangéliques sur le chemin de Canterbury : Pourquoi les évangéliques sont attirés par l’Église liturgique »). De là, il n’y avait qu’un petit pas à faire pour que certains évangéliques passent de l’anglicanisme à l’orthodoxie.

Vers cette époque, Billy Graham organisait des campagnes d’évangélisation dans des pays orthodoxes communistes tels que la Russie et la Roumanie. Les patriarches orthodoxes accueillirent favorablement Graham parce que sa politique d’« évangélisation coopérative » permettait que les personnes qui s’avançaient dans ses réunions soient confiées à leur propre clergé pour la formation de disciples. Puis, en 1988, un ancien dirigeant de Campus Crusade for Christ, Peter Gillquist, fit entrer sa dénomination de 1800 membres dans l’Église orthodoxe d’Antioche. Au cours des 15 années suivantes, des Églises évangéliques et charismatiques entières rejoignirent des paroisses orthodoxes locales à travers tous les États-Unis.

Le théologien méthodiste Thomas Oden commença à écrire sérieusement sur le christianisme historique au cours des mille premières années de la foi. Sa série monumentale, Ancient Christian Commentary on Scripture (ACCS), a suscité chez les évangéliques une passion théologique pour les premiers pères de l’Église qui n’a cessé de croître au fil des ans. En 2005 fut inauguré le Wheaton Center for Early Christian Studies, financé par un donateur orthodoxe. Et en 2013, la Lausanne-Orthodox Initiative (LOI) initiait la plateforme internationale la plus ambitieuse jamais développée entre dirigeants orthodoxes et évangéliques. Sa première convention, intitulée « On the Mission of God » (« Sur la mission de Dieu »), rassembla en Albanie plus de 60 leaders orthodoxes et évangéliques du monde entier. Depuis, la LOI organise régulièrement des conférences internationales et reste le carrefour du dialogue entre orthodoxes et évangéliques.

C’est dans le contexte de cet intérêt florissant pour le christianisme primitif que l’évêque Kallistos a eu un impact sur les relations orthodoxes-évangéliques, plus que n’importe qui d’autre ne l’aurait pu. Le poids de son influence ne tenait pas seulement à sa renommée de professeur et d’érudit à l’Université d’Oxford ni à sa position officielle d’évêque dans l’Église orthodoxe. Ces éléments ont sans aucun doute joué un rôle important. Cependant, c’est leur présence chez un érudit dont la vie spirituelle était intégrée de façon si étonnante à la théologie qui a réellement eu un effet transformateur sur les orthodoxes et les évangéliques.

Les paroles d’un court hommage comme celui-ci ne peuvent communiquer ce que l’on ne peut vivre qu’en personne. L’évêque Kallistos avait quelque chose de semblable au grand moine saint Antoine d’Égypte (251-356 apr. J.-C.). On raconte une histoire célèbre sur trois frères qui venaient chaque année voir Antoine pour discuter de l’état de leur âme. L’un d’eux, cependant, ne lui demandait jamais rien. Antoine prit finalement la parole : « Tu viens me voir chaque année ici dans le désert, mais tu ne me demandes rien. Pourquoi cela ? » Le frère répondit : « Il me suffit de te voir, Abba (père) ». Les mots n’étaient pas nécessaires. La seule force de la présence d’Antoine suffisait à provoquer une transformation spirituelle chez le frère.

Il en fut de même pour ceux d’entre nous qui ont passé du temps avec l’évêque Kallistos. Sa vie sainte donnait à ses paroles un pouvoir transformateur qui pouvait changer le cœur de ceux avec qui il parlait, qu’ils soient orthodoxes ou évangéliques. Sa seule présence remodelait les relations.

Son premier soutien écrit au dialogue orthodoxe-évangélique date de 1991, lorsqu’il appuya le travail de la toute nouvelle Society for the Study of Eastern Orthodoxy and Evangelicalism (« Société pour l’étude de l’orthodoxie orientale et du mouvement évangélique »). Il s’agissait d’une organisation novatrice de théologiens orthodoxes et évangéliques qui se réunissaient chaque année au Billy Graham Center avec le soutien de James Stamoolis, doyen de la Wheaton College Graduate School. L’évêque Kallistos élargit son implication dans le monde évangélique en 1997, lorsqu’il donna une présentation au Centre européen de recherche pentecôtiste/charismatique à Prague sur « L’expérience personnelle du Saint-Esprit chez les Pères grecs ».

J’ai eu la chance d’accueillir l’évêque Kallistos chez nous à deux reprises avant son décès. En 2011, je m’étais organisé pour que le métropolite donne une conférence au Wheaton College et à l’Université North Park intitulée « Dialogue entre orthodoxes et évangéliques : Qu’avons-nous à apprendre les uns des autres ? ». Dans cette conférence, il soulignait la nécessité de s’aimer les uns les autres ; mais pour cela, nous devons d’abord nous comprendre. Il croyait en un dialogue fondé sur la vérité, et non sur les faux-fuyants ou les compromis. Pour être humains, nous avons besoin les uns des autres, car les humains sont dialogiques par nature, tout comme la Trinité est dialogique.

Pour l’évêque Kallistos, les orthodoxes et les évangéliques semblent à première vue très différents, mais ont en fait beaucoup plus en commun que la plupart des gens ne le pensent. Nos différences ne sont pas aussi grandes que nous pourrions le supposer. Il considérait que les orthodoxes et les évangéliques partagent une foi commune dans les saintes Écritures comme pleinement véridiques, en la Trinité, en Jésus-Christ comme pleinement humain et pleinement divin, et en la naissance virginale, les miracles, la mort sacrificielle du Christ sur la croix, sa résurrection corporelle et sa seconde venue. L’évêque estimait que nous partageons également une foi commune dans l’institution divine du mariage et une approche commune des problèmes de l’homosexualité, de la bioéthique et de l’euthanasie.

Lors de ce voyage de 2011, Kallistos offrit également l’une des meilleures interviews sur l’orthodoxie et l’évangélisme avec le rédacteur en chef d’alors du magazine Christianity Today. Intitulé « The Fullness and the Center » (« La plénitude et le centre ») l’article tournait autour de l’Évangile, de l’évangélisation, de la justice sociale et de la tradition..

Il y déclarait :

« Nous, les orthodoxes, sommes certainement encore trop repliés sur nous-mêmes ; nous avons besoin de nous rendre compte que nous avons un message que beaucoup de gens écouteront avec plaisir. […] Pour moi, le témoignage missionnaire le plus important que nous ayons est la Divine Liturgie, le culte eucharistique de l’Église orthodoxe. C’est la source vivifiante d’où procède tout le reste. C’est pourquoi, à ceux qui manifestent un intérêt pour l’orthodoxie, je dis : “Venez et voyez. Participez à la liturgie”. La première chose, c’est de faire l’expérience de l’orthodoxie — ou, d’ailleurs, du christianisme — en tant que communauté de culte. Nous partons de la prière, pas d’une idéologie abstraite, pas de règles morales, mais d’un lien vivant avec le Christ exprimé à travers la prière. »

La somme de l’œuvre de l’évêque Kallistos a changé la donne pour les chrétiens orthodoxes et évangéliques. Il a construit un pont pour un témoignage chrétien uni, aussi loin que possible de chaque côté ; son engagement orthodoxe auprès de la communauté évangélique a légitimé un dialogue qui était auparavant absent ; et il a encouragé la communauté orthodoxe à considérer les évangéliques comme de véritables frères et sœurs en Christ. Même si notre unité est imparfaite, nous avons besoin les uns des autres et nous nous appartenons mutuellement en tant que membres du corps du Christ. Son respect pour l’héritage intellectuel du mouvement évangélique a donné au mouvement une crédibilité qui n’était pas toujours évidente aux yeux des orthodoxes.

Il a également fait découvrir aux évangéliques une orthodoxie généreuse, éprouvée par le temps et enracinée dans des siècles de tradition apostolique. Lorsque CT lui demanda ce qui empêchait l’Église orthodoxe de dérailler, l’évêque Kallistos répondit : « L’Écriture sainte telle qu’elle a été comprise dans l’Église et par l’Église à travers les siècles. […] Mais la tradition est vivante. L’âge des pères ne s’est pas arrêté au cinquième ou au septième siècle. Nous pourrions avoir encore aujourd’hui, au 21e siècle, des saints pères égaux aux anciens pères ».

Pour moi, Kallistos Ware était un exemple vivant de Père de l’Église pour le 21e siècle. Que sa mémoire soit éternelle.

Bradley Nassif est l’auteur de The Evangelical Theology of the Orthodox Church (St. Vladimir’s Seminary Press, 2021).

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Je suis entré en prison « protestant ». J’en suis sorti chrétien.

Comment un violent loyaliste d’Irlande du Nord est devenu pasteur et évangéliste.

Christianity Today August 29, 2022
Rob Durston

J’ai grandi à Belfast, en Irlande du Nord, à une époque de conflits âpres et violents entre protestants et catholiques. Les protestants voulaient que l’Irlande du Nord reste au sein du Royaume-Uni, tandis que les catholiques voulaient unifier l’Irlande en une seule république indépendante.

A Cause Worth Living For: The Story of Former Terrorist David Hamilton

A Cause Worth Living For: The Story of Former Terrorist David Hamilton

10Publishing

100 pages

$9.50

C’est à 14 ans que j’ai pris conscience pour la première fois des différences politiques entre protestants et catholiques. Ce jour-là, je séchais les cours avec un groupe de garçons, tous catholiques. Nous étions dans un vallon, parmi les arbres, où se trouvait une balançoire de corde attachée à une branche surplombant la rivière. Je me tenais là, à écouter ces garçons catholiques discuter de ce qu’ils allaient me faire. Ils décidèrent de me frapper et me jetèrent dans la rivière.

En sortant de l’eau, j’essayais de comprendre ce que j’avais fait pour mériter ça. Lorsque je leur posai la question, un des garçons me fit cette réponse : ils s’en étaient pris à moi parce que j’étais protestant. Jusque-là, je ne savais pas ce que signifiait être loyaliste ou républicain, pas plus que protestant ou catholique.

Ce jour marqua un tournant dans ma vie, et il me mit sur une voie destructrice. Je décidai que je n’aurais plus jamais d’amis catholiques. Et, encore adolescent, je pris la décision fatidique de devenir terroriste politique en entrant dans une organisation paramilitaire illégale appelée Ulster Volunteer Force (UVF). Je me voyais en militant vertueux luttant pour une juste cause : la loyauté envers la reine et le pays.

Le temps du changement

En tant que membre de l’UVF, j’ai commis plusieurs crimes dont un attentat à la bombe, un braquage de banque et plusieurs autres vols à main armée dont un m’a valu la prison à l’âge de 17 ans. Après ma libération un an plus tard, je me suis à nouveau impliqué, ce qui a abouti à une autre arrestation et à une peine de 12 ans.

J’étais en prison depuis quelques années quand quelque chose d’inhabituel se produisit. J’assistais à un service religieux juste avant Noël. Comme presque tout le monde, je n’étais pas là par conviction religieuse, mais seulement pour avoir l’occasion de sortir de ma cellule, de voir des prisonniers d’autres ailes de la prison et d’échanger de la contrebande et des potins. L’aumônier de la prison demanda tout à coup : « Un volontaire pour lire le passage de la Bible ce matin ? ». Alors que personne ne se manifestait, quelqu’un assis devant moi se retourna et dit : « Davey a dit qu’il le ferait ! ».

Mon premier réflexe fut de nier. Mais je savais que tout le monde se moquerait de moi. Alors je pris la bible et je lus le passage du récit de la Nativité dans l’Évangile de Luc. Quand j’eus fini, je me mis à sourire ! En un sens, ça faisait du bien. J’écrivis même une lettre à ma mère ce soir-là, expliquant ce qui s’était passé. Mais rien ne changea. Noël vint et repartit.

Début janvier, j’eus une autre expérience incroyable. Un soir, peu de temps avant de regagner ma cellule, je m’étais préparé une tasse de thé. Puis, une fois à l’intérieur, je remarquai un petit morceau de papier plié posé sur l’oreiller : un tract évangélique intitulé « Jésus-Christ revient bientôt ». Cela m’amusa. J’en fis une boulette pour la jeter par la fenêtre.

Mais une pensée soudaine me vint à l’esprit : « Il est temps pour toi de changer, de devenir chrétien ». C’était surprenant. Mais quelques instants plus tard, la pensée me revint à l’esprit.

Au début, j’en ris, pensant que Dieu ne s’intéresserait jamais à quelqu’un comme moi. J’étais un homme mauvais, coupable de bien des méfaits. L’UVF avait tué beaucoup de gens. Certains de mes amis étaient des meurtriers. Heureusement, je n’avais pris la vie de personne, mais ce n’était pas faute d’avoir essayé.

Je me ressaisis, quittant mes pensées pour revenir à la réalité, et posai ma tasse sur l’étagère, à côté d’une bible Gédéon. (Chaque prisonnier en gardait une dans sa cellule, non pas pour la lire, mais comme réserve de papier à cigarette.) Je feuilletai les pages par curiosité, lisant quelques lignes ici et là. N’y comprenant rien, je la remis sur l’étagère. Quelques minutes plus tard, j’essayai de lire une nouvelle fois. Cela n’avait toujours aucun sens pour moi.

Allongé sur mon lit, je pensais à ces moments où j’avais côtoyé la mort. Comme la nuit où l’Armée républicaine d’Irlande tenta de me tuer alors que j’étais au restaurant avec ma fiancée. Ou la fois où je posai une bombe qui explosa prématurément avant que je ne quitte le bâtiment. Bien que ma veste fût en lambeaux, je survécus sans une égratignure. Ou quand, dans la rue, quelqu’un posa un pistolet sur ma tempe et appuya sur la gâchette, et que le pistolet s’enrailla.

Peu de gens survivent pour raconter de telles histoires alors pourquoi étais-je encore en vie ? Soudain, une pensée me traversa l’esprit : « C’est Dieu qui m’a gardé en vie ! » Plus j’y réfléchissais, plus j’étais convaincu.

Tout d’un coup, je sus que je voulais devenir chrétien, même si je ne savais pas trop comment. Heureusement, le lendemain matin, je rencontrai le même homme qui avait mis le tract sur mon lit. À ma grande surprise, je me mis à confesser mon désir de devenir chrétien. Je pensais qu’il se moquerait de moi parce que je m’étais tant de fois moqué de lui à cause de sa foi. Au lieu de cela, il me prit simplement dans ses bras. Il me donna aussi plusieurs autres dépliants, de quoi lire pour un mois entier.

L’un des dépliants affichait une simple prière au verso :

Viens dans mon cœur, Seigneur Jésus, viens aujourd’hui dans mon cœur.
Viens dans mon cœur, Seigneur Jésus, viens y faire ta demeure.

Je fis cette prière six fois, juste pour m’assurer que Dieu me prenait au sérieux. Lorsque la porte de la cellule s’ouvrit pour que nous retournions au travail, je décidai d’en parler à la première personne que je verrai. À ma grande consternation, je l’entendis aussitôt crier : « Davey est chrétien maintenant ! Il a rejoint la brigade de Dieu ! »

Quand j’eus repéré l’aumônier de la prison, je criai : « Je suis chrétien maintenant ! ». Il s’arrêta et s’avança. « Quand est-ce arrivé ? », me demanda-t-il. Il m’invita à venir dans son bureau, où il s’assit et sourit pendant que je racontai mon histoire. Quand j’eus terminé, il ouvrit un placard et me donna la première bible que j’aie considérée comme la mienne, un petit nouveau testament Gédéon rouge. Quand il eut prié pour moi, je me sentais fort comme un bœuf.

L’espérance pour les désespérés

À l’époque, je n’avais pas imaginé que quelqu’un d’autre priait en coulisses : la belle-mère de mon oncle, une femme âgée nommée Mme Beggs. Le jour de ma condamnation, alors que ma mère pleurait son fils qu’elle croyait perdu, Mme Beggs secoua la tête et dit : « Si Dieu a pu changer le cœur de John Newton » — le capitaine du navire négrier qui a écrit « Amazing Grace » après sa conversion — « il peut changer le cœur de ton fils. Je prierai pour lui tous les jours. »

En fait, lorsque ma mère lui annonça la bonne nouvelle, Mme Beggs répondit qu’elle le savait déjà, parce que Dieu avait « enlevé le fardeau de son cœur ». Elle ajouta : « Dieu m’a dit que je devais prier pour son futur ministère, car il deviendra serviteur de Dieu ! » Maman pouvait à peine y croire, mais Mme Beggs avait raison.

Après ma libération, j’ai travaillé comme évangéliste pour Prison Fellowship Ministries, dont le fondateur Charles Colson m’avait rendu visite après ma conversion. Cinq ans plus tard, j’ai commencé à voyager à travers l’Europe comme évangéliste itinérant. Pour 12 autres années, je reçus un appel pour devenir pasteur d’une Église en Angleterre, ce que j’ai fait jusqu’à ma retraite. Aujourd’hui, de retour en Irlande, je continue à évangéliser à travers le pays.

Vraiment, il n’y a pas de cas si désespéré que Dieu ne puisse le sauver !

David Hamilton est pasteur à la retraite et vit en Irlande du Nord. Il est l’auteur de A Cause Worth Living For : The Story of Former Terrorist David Hamilton (« Une cause digne que l’on vive pour elle : l’histoire de l’ex-terroriste David Hamilton »).

Traduit par Philippe Kaminski

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Books
Review

L’autisme vu de l’intérieur

Dans un récit authentique de sa vie dans le spectre de l’autisme, un professeur de l’Université Taylor nous invite à aborder ses « déficiences » comme des dons.

Christianity Today August 16, 2022
Illustration by Jianan Liu

Les mots sont puissants, mais souvent de manière subtile. Les étiquettes, par exemple, nous aident à distinguer les choses, et une part importante de la science consiste à trouver des étiquettes appropriées pour caractériser les éléments de la réalité que l’on découvre. Mais l’étiquetage se complique dans le domaine des sciences humaines, notamment lorsque l’on a affaire à différents types de personnes.

On the Spectrum: Autism, Faith, and the Gifts of Neurodiversity

On the Spectrum: Autism, Faith, and the Gifts of Neurodiversity

Brazos Press

256 pages

$12.59

Je n’oublierai jamais le conseil prodigué par un de mes professeurs dans le cadre de mon programme de doctorat en psychologie : nous ne devrions jamais appeler les personnes atteintes de schizophrénie des « schizophrènes », disait-il, car cela les déshumanise en tendant à les réduire à leur trouble. Voilà qui résonnait avec ma conviction chrétienne que les personnes atteintes de schizophrénie sont aussi créées à l’image de Dieu.

Dans le monde d’aujourd’hui, les étiquettes semblent être devenues plus importantes. Pour beaucoup, elles servent de marqueurs d’identité dans un paysage politique et culturel de plus en plus fluide. Daniel Bowman Jr., poète et professeur d’anglais de l’Université Taylor, illustre cette dynamique dans son ouvrage intitulé On the Spectrum: Autism, Faith, and the Gifts of Neurodiversity (« Dans le spectre : L’autisme, la foi et les dons de la neurodiversité »). Ce livre fascinant et émouvant, un « mémoire sous forme d’essais » écrit par un évangélique exceptionnellement réfléchi et transparent, vise à recadrer notre réflexion sur l’autisme en suggérant de nouvelles étiquettes pour en parler.

Bowman défie plusieurs stéréotypes que de nombreuses personnes associent à l’autisme, ce qui rend le livre exceptionnellement convaincant, même si cela pourrait rendre discutable son rôle de porte-parole de la communauté autiste. Néanmoins, c’est précisément son degré remarquable de conscience de soi qui lui permet de donner des descriptions étonnantes de ce que signifie être autiste.

Bowman parle honnêtement d’anxiété sociale, de « troubles des fonctions exécutives », d’une tendance à repousser les autres, de crises de nerfs périodiques et d’une profonde honte. Ce qu’il décrit offre un précieux aperçu des types particuliers de souffrance endurées par au moins certaines personnes atteintes d’autisme.

Porter l’étiquette

L’ensemble des chapitres de l’ouvrage de Bowman tournent autour de quelques thèmes communs. Être dans le spectre autistique, soutient-il, est une façon légitime d’être un humain, mais cette condition est tragiquement pathologisée et incomprise par la « majorité neurotypique » (les personnes sans autisme). Le livre invite les lecteurs à écouter la voix des personnes autistes elles-mêmes afin de vraiment les comprendre, ainsi que l’autisme, « de l’intérieur ».

Bowman défend l’idée que la beauté, l’art et la littérature contribuent de manière significative à l’épanouissement humain, en particulier lorsqu’ils émergent de sources inattendues, comme les personnes marginalisées. Le livre, qui met en valeur sa propre façon de manier les mots, expérimente différents genres, y compris quelques entretiens et une lettre qu’il a écrite à deux mentors bien-aimés (bien que malheureusement, il n’y ait pas de poèmes !). Mais Bowman nous envoûte par ses histoires, et celles-ci forment la majeure partie du livre.

Le récit qu’il fait de sa prise de conscience progressive qu’il pourrait être autiste (un diagnostic qui n’a été confirmé professionnellement qu’en 2015) est particulièrement touchant. Découvrir la vérité fut un réel soulagement pour Bowman. Cela donnait un sens aux schémas de souffrance qu’il avait connus tout au long de sa vie. Depuis son diagnostic, il a adopté l’autisme comme partie intégrante de son identité.

Il dirait vraisemblablement que cela lui a permis de voir le bon côté de sa condition et de réaliser aussi pleinement que possible le potentiel que Dieu lui a donné. La joie qu’il dégage aujourd’hui quand il parle de l’autisme est contagieuse et devrait encourager d’autres personnes comme lui à partager leurs propres histoires.

Cela conduit à l’une des plus grandes surprises du livre, du moins de mon point de vue : Bowman se réjouit ouvertement de l’étiquette « autiste ». En fait, il préfère même parler d’« autistes » au lieu d’employer l’appellation plus générale (et, à mes yeux, plus respectueuse) de « personnes atteintes d’autisme ». Il apprécie profondément que ses amis tiennent compte de son autisme, car cela signifie à ses yeux qu’ils le soutiennent en tant qu’autiste.

Selon Bowman, ce genre de reconnaissance franche va à l’encontre de notre approche dominante de l’autisme aujourd’hui, qu’il appelle le « paradigme de la pathologie ». Selon lui, nous sommes trop enclins à voir les personnes autistes à travers une lentille réductrice, un prisme objectif et scientifique qui glorifie les capacités physiques, sociales et émotionnelles qui ont tendance à leur faire défaut. Cela, soutient-il, reflète les préjugés de la majorité neurotypique, qui considère simplement l’autisme comme un trouble psychologique.

Dans cette perspective, l’autisme implique un ensemble de symptômes négatifs, souvent définis et évalués par des observateurs non autistes insensibles qui ressentent une gêne lorsqu’ils y sont exposés. On pourrait aussi appeler cela le « paradigme scientifique », étant donné ses origines dans l’étude empirique et le traitement de l’autisme.

Selon toute vraisemblance, une certaine variante de ce paradigme scientifique prévaut encore aujourd’hui chez bon nombre de ceux qui travaillent avec des personnes autistes (comme cela aurait été le cas pour la plupart de mes professeurs de psychologie). Mais Bowman pense que cette approche ne fait qu’exacerber l’aliénation que les autistes ressentent déjà souvent. Se concentrer sur les problèmes de l’autisme plutôt que sur les personnes autistes et s’efforcer simplement de gérer et de minimiser les symptômes ressemble à un stratagème visant à contrôler les autistes au profit de la majorité neurotypique.

Bowman, lui, préfère le « paradigme de la neurodiversité », qui part du point de vue des autistes et considère l’autisme comme une question de différence neurologique et non d’anomalie. Pour prendre un exemple, les partisans de la neurodiversité interprètent plutôt les comportements de balancements (« stimming », ou stéréotypies) comme un mécanisme d’adaptation apaisant et utile. Bowman déplore le manque de curiosité et d’empathie de la majorité neurotypique envers les membres de la communauté autiste.

De nombreuses suggestions de Bowman permettent de lutter efficacement contre des schémas bien ancrés faits de préjugés et d’ignorance. Mais d’autres reposent sur des bases plus fragiles. Un professeur contemporain cité par Bowman affirme que « le comportement des personnes [autistes] n’est pas imprévisible, inadapté ou bizarre ». Selon un autre, « Le concept de “cerveau normal” ou de “personne normale” n’a pas plus de validité scientifique objective — et n’a pas de meilleure utilité — que le concept de “race supérieure” ».

Si l’on aborde de telles déclarations de manière charitable, elles peuvent être interprétées comme de bons efforts pour saper la stigmatisation de l’autisme et contrer les sentiments de honte chez les personnes autistes. Mais elles semblent aussi manifestement trompeuses, surtout en ce qui concerne les formes plus sévères d’autisme. Et Bowman lui-même doit se donner beaucoup de mal pour aider les lecteurs à comprendre les défis uniques auxquels il est confronté.

Il est important de se rappeler que les troubles du spectre de l’autisme, tels que l’Association psychiatrique américaine les définit dans son manuel de diagnostic de référence, varient considérablement dans leurs manifestations.

À une extrémité du spectre, on trouve des personnes « au fonctionnement accru » ayant des « besoins de soutien moins importants ». À l’autre extrémité se trouvent les personnes « fonctionnant moins bien » ayant « des besoins de soutien plus élevés », une catégorie englobant des déficiences intellectuelles graves (par exemple, des adultes dont l’âge mental est de moins de quatre ans), de graves difficultés de langage et de communication et des comportements d’automutilation (morsures, coups à la tête, arrachage de cheveux) qui peuvent causer des dommages corporels durables.

La plupart des parents d’enfants qui souffrent de la sorte resteront probablement perplexes face à un appel à une simple « neurodiversité ». Ces personnes sont reconnaissantes des avancées thérapeutiques et n’ont aucun mal à qualifier l’autisme de trouble. Mais il ne s’agit vraisemblablement pas d’une question qui pourrait être tranchée en donnant raison ou tort à un camp ou l’autre. Compte tenu de la grande diversité parmi les personnes dans le spectre de l’autisme, il semble naturel que certains de leurs défenseurs se concentrent sur l’obtention de diagnostics précis et de traitements efficaces pour les troubles graves, tandis que d’autres se concentrent sur la lutte contre les stéréotypes et la stigmatisation qui affectent et limitent certains.

Une faiblesse perfectionnée

La foi chrétienne joue un rôle central (sinon exclusif) dans l’histoire de Bowman. Même s’il rapporte de nombreux épisodes où il s’est senti stigmatisé dans l’Église à cause de son autisme, il affirme volontiers, avec Paul, que « la puissance de Dieu s’accomplit dans la faiblesse » (2 Corinthiens 12.9).

Pourtant, le regard chrétien sur la souffrance et la faiblesse humaines contient des richesses que ni les approches neurotypiques ni les approches axée l’idée de neurodiversité ne peuvent égaler à elles seuls. Les Écritures nous disent que Christ est venu « non pour les bien-portants », mais pour « les malades » (Luc 5.31). Il a promis du repos à « vous tous qui êtes fatigués et chargés » (Matthieu 11. 28). Il a déclaré que les « pauvres en esprit » sont bénis (Matthieu 5.3), car dans son royaume « beaucoup de premiers seront les derniers, et les derniers seront les premiers » (Marc 10.31).

Ce renversement des valeurs est crucial pour l’idée chrétienne de la rédemption. En Christ, toutes nos faiblesses deviennent des occasions pour que sa gloire brille d’autant plus, et nous sommes invités à les réinterpréter à la lumière de sa mort et de sa résurrection. Cela signifie qu’en tant que chrétiens nous ne nions pas la réalité de la faiblesse et admettons l’idée d’une normalité incluant certaines capacités physiques, mentales et émotionnelles. Cependant, nous sommes également appelés à agir lorsque des personnes présentant ces traits sont privilégiées par rapport à d’autres, en particulier lorsque ce type de hiérarchie apparaît au sein de l’Église. Nous avons à suivre l’exemple de Dieu en élevant les humbles et les délaissés. Comme Paul nous le rappelle, « Dieu a choisi les choses folles du monde pour confondre les sages ; Dieu a choisi les choses faibles du monde pour confondre les forts » (1 Corinthiens 1.27).

Il est aisé de comprendre pourquoi certains sont tentés de nier leurs handicaps et leurs troubles, ou de vouloir à tout prix les présenter sous l’apparence d’un bien. Mais les voir du point de vue de Dieu nous aide à apprécier à la fois les fardeaux réels qu’ils imposent et la gloire qu’ils révèlent.

Accepter nos handicaps et nos troubles prend du temps, peut-être même toute une vie. Et cela nécessite amour et soutien en abondance de la part des autres. Pour moi, c’est là que le livre de Bowman vient me bousculer. Ce n’est pas parce que je crois que nous sommes tous créés à l’image de Dieu que je traite tout le monde en conséquence, ou que j’entretiens toutes mes relations avec cette vérité à l’esprit. Je dois donc bien avouer que malgré ma formation psychologique (ou peut-être à cause de celle-ci), je n’avais jamais vraiment pris en compte l’intérêt de comprendre le monde dans lequel vivent les autistes.

Je suis donc reconnaissant envers Bowman qui a attiré le lecteur neurotypique que je suis dans son monde et défié certaines de mes idées préconçues. Grâce à son livre, j’espère que la prochaine fois que je rencontrerai un autiste, je serai un peu plus curieux, connecté et aimant.

Eric L. Johnson est professeur de psychologie chrétienne à l’Université baptiste de Houston.

Traduit par Valérie Doerrzapf

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Comment prier quand nous souffrons ?

Ce qui passe pour confiance et calme en Dieu peut masquer une forme de résignation.

Christianity Today August 11, 2022
Image source : Massimo Pizzotti/Getty

Lorsque nous souffrons, nous pouvons donner l’impression d’un certain repos en Dieu, acceptant simplement tout ce qu’il nous donne. Mais ce semblant de calme peut en réalité cacher une résignation spirituelle dangereuse et mortelle. La vérité est parfois que nous avons perdu espoir et avons apposé un autocollant « Jésus » sur le visage de notre désespoir.

Après la mort de mon bébé Paul, ce qui semblait être un repos en Dieu pour les autres n’était qu’un masque de résignation. J’avais supplié Dieu d’épargner la vie de mon bébé, et pourtant il est mort alors même que je priais. Dans les jours qui ont suivi sa disparition, j’ai planifié ses funérailles, parlé de la bonté de Dieu et prononcé des paroles de saine théologie, une théologie à laquelle je croyais. J’ai dit que je me reposais sur les promesses de Dieu, que j’avais confiance en elles et que je me tenais debout grâce à elles, mais intérieurement, je détournais mon visage de Dieu.

J’avais trop honte pour admettre aux autres, et même à moi-même, à quel point j’étais déçue par Dieu, alors j’ai étouffé ma douleur avec des platitudes auxquelles je voulais croire tout en détournant mon cœur du Seigneur. Ma foi autrefois vibrante s’est rapidement transformée en apathie et en absence de prière, car j’avais perdu tout espoir que Dieu soit à mon écoute.

Des mois plus tard, en désespoir de cause, j’ai fini par recommencer à implorer Dieu. Je n’avais nulle part où aller. Il m’a rencontrée dans mon découragement et m’a ramenée à lui. J’ai ressenti une liberté retrouvée en étant complètement ouverte à lui, alors j’ai commencé à exprimer mes peurs, à noter mes questions dans un journal et à prier à partir des Psaumes pendant que je digérais mon chagrin. Cette saison de lutte dans la prière avec Dieu a finalement réactivé mon cœur. Plutôt que des réponses, j’ai trouvé le repos en Dieu lui-même et une paix qui dépassait mon entendement. Mon parcours de lutte dans la prière au cœur de la souffrance est ce qui m’a finalement fait sortir de ma résignation désespérée pour aboutir à une véritable confiance.

La raison pour laquelle nous luttons

Lutter dans la prière, c’est crier vers Dieu, demander ce dont nous avons besoin, ne rien retenir. Ce n’est pas lutter contre Dieu, mais c’est s’accrocher à lui, s’attendre à ce qu’il réponde et refuser de lâcher prise ou de détourner le regard. Saint-Augustin a écrit dans ses Confessions : « La meilleure disposition pour prier est de se sentir désolé, abandonné, dépouillé de tout ». Plus nous sommes désespérés, plus nous prions avec ardeur et de manière spécifique. Quand nous constatons que Dieu seul peut changer la situation à laquelle nous sommes confrontés, nous tombons à genoux, déterminés à ne pas abandonner jusqu’à ce qu’il nous réponde.

Quand mon premier mari a quitté notre famille, j’ai imploré Dieu jour et nuit pour qu’il se repente. Quand on m’a diagnostiqué un syndrome post-poliomyélite, j’ai imploré Dieu de prolonger et augmenter ma force. Quand ma fille est devenue de plus en plus rebelle à l’adolescence, j’ai demandé à Dieu de changer son cœur. Je n’ai pas simplement demandé ces choses. J’ai supplié, parfois le visage à terre, souvent en larmes, plusieurs fois par jour. Personne n’a eu à me le rappeler. J’avais désespérément besoin que Dieu m’aide.

Les Écritures nous dirigent constamment vers ce genre de prière acharnée, déterminée, de lutte. Jacob a lutté toute la nuit avec Dieu, déclarant : « Je ne te laisserai pas partir à moins que tu ne me bénisses », et sa ténacité lui a valu un nouveau nom : Israël, qui signifie « il lutte avec Dieu » (Gn 32.26-28). Anne a supplié amèrement le Seigneur pour avoir un enfant ; après de nombreuses années d’infertilité, Dieu lui a donné un fils (1 S 1.9-20). David a souvent lutté avec Dieu dans la prière, et ses psaumes regorgent de demandes urgentes et souvent frénétiques auxquelles Dieu a répondu (Ps 6, 22, 69).

Jésus a fait l’éloge de la prière incessante dans sa parabole de la veuve insistante qui s’est obstiné à implorer un juge injuste pour que justice soit faite contre son adversaire (Lc 18.1-8). En raison de ses demandes continuelles — sa volonté de s’acharner jusqu’à l’agacement — elle a été récompensée. Jésus conclut sa parabole en disant : « Et Dieu ne fera-t-il pas justice à ses élus, qui crient vers lui jour et nuit ? Continuera-t-il à les repousser ? Je vous le dis, il veillera à ce qu’ils obtiennent justice, et ce rapidement ». Dieu ne nous repousse jamais. Dieu ne se lasse jamais de nos demandes et n’ignorera jamais nos supplications. Nos cris accomplissent toujours quelque chose.

Considérez ce que les pleurs signifient pour les nourrissons. C’est une réponse naturelle face au besoin. Les bébés qui ne crient pas quand ils ont faim ou quand ils sont mouillés ont généralement été négligés ; ils ont appris que leurs sanglots étaient inutiles et ne changeraient rien. Mais quand un bébé pleure, ces pleurs sont une affirmation instinctive que quelqu’un répondra à ses besoins. C’est là le cœur de la lutte dans la prière. Lorsque nous luttons — dans notre douleur et nos besoins — nous reconnaissons que nous faisons confiance à Dieu pour qu’il nous entende et réponde à nos cris.

Comment les choses peuvent mal tourner

La lutte dans la prière et le repos dans la prière peuvent comporter des dangers inhérents. Le problème réside dans la lutte sans confiance et dans le repos sans lutte. Lorsque nous luttons sans confiance, nous sommes honnêtes à notre sujet sans reconnaître la vérité sur Dieu. Et lorsque nous nous reposons sans lutter, nous sommes véridiques à propos de Dieu sans être véridiques à propos de nous-mêmes. Les deux peuvent conduire à la dureté du cœur.

Alors que le Seigneur nous invite à lutter dans la prière, cela ne nous autorise pas à exiger la réponse que nous voulons, comme si Dieu nous était redevable et devait obéir à nos ordres. Lorsque les gens prient avec ce genre d’état d’esprit, une prière sans réponse peut les amener à se détourner de Dieu avec colère et hostilité, mettant en doute la bonté, la puissance ou même l’existence de Dieu. Leur lutte leur a semblé inutile et ils s’en vont désabusés.

Inversement, le refus de lutter avec Dieu dans la souffrance — quand on se contente à la place d’offrir des paroles pieuses, des platitudes religieuses et une fausse joie extérieure — peut souvent masquer un cœur qui a perdu tout espoir et est loin de Dieu. Ce soi-disant repos dans la prière peut aussi être une excuse pour la paresse spirituelle, en priant des prières brèves et détachées, sans cœur ni vitalité. C’est ce que Charles Spurgeon appelait les « prières du bout des doigts » dans The Power of Prayer in a Believer’s Life (« La puissance de la prière dans la vie du croyant »), des prières qu’il décrit comme « ces petits coups délicats toqués à la sauvette à la porte de la miséricorde », des demandes qui se font plus pour les apparences ou par obligation, sans aucune attente de réponse.

Ce que nous attendons de Dieu peut être la clé pour discerner le vrai repos dans la prière du faux repos. Notre repos nous éloigne-t-il passivement de Dieu parce que nous avons abandonné tout espoir qu’il réponde ? Ou notre repos nous rapproche-t-il activement de lui parce qu’au fond nous savons qu’il répond toujours au mieux, même si nous ne le comprenons pas ? J’ai fait l’expérience de ces deux choses. Après la mort de Paul, mon « repos » était une façade de méfiance passive et de désespoir ; mais après le départ de mon premier mari, mon repos en Dieu a jailli né d’une confiance active et d’un espoir éternel.

La raison de notre repos

Alors que le genre de faux repos que j’ai décrit nous éloigne de Dieu, le vrai repos nous en rapproche. Esaïe 26.3 nous rappelle : « À celui qui est ferme dans ses dispositions, tu assures une paix profonde, parce qu’il se confie en toi ». Le repos exige une confiance active en Dieu, en gardant nos pensées fixées sur lui.

Le vrai repos vient de Dieu et se trouve en lui seul. « En vérité, mon âme trouve du repos en Dieu », déclarait David (Ps 62.1). Jésus nous exhorte à venir à lui et à trouver le vrai repos pour nos âmes (Mt 11.28-29). Se reposer en Dieu dans la prière apporte une paix surnaturelle et un calme intérieur, car nous reposons nos âmes devant Dieu comme un enfant sevré en sa présence (Ps 131.2).

La présence de Dieu est notre repos. Le Seigneur l’a dit à Moïse quand il s’inquiétait pour l’avenir : « Je marcherai moi-même avec toi, pour te rassurer, je te donnerai du repos » (Ex 33.14). Lorsque nous savons que le Seigneur est avec nous, nous pouvons cesser de nous inquiéter du présent ou de l’avenir et entrer dans son repos, certains qu’il nous protégera et pourvoira à nos besoins. Cette paix dans la présence du Seigneur est active et non passive. Elle est le résultat du choix de faire confiance, de s’approcher de Dieu dans la prière et de s’abandonner à sa volonté.

Le vrai repos vient après la lutte

Les Écritures soulignent que le vrai repos et la paix au beau milieu de la souffrance sont souvent le fruit de la prière et de la lutte dans la prière. Dans Philippiens 4.6-7, Paul nous exhorte à ne pas être anxieux, mais plutôt à prier pour tout. Ce n’est qu’après avoir déversé nos requêtes devant le Seigneur que sa paix surnaturelle nous enveloppera. Paul le savait de par son expérience personnelle de la souffrance ; dans 2 Corinthiens 12.7-10, il raconte avoir supplié le Seigneur à trois reprises d’enlever son écharde dans la chair. Dieu n’a pas enlevé l’écharde, mais a montré à Paul comment sa faiblesse était une opportunité de se reposer et de se glorifier dans la force de Dieu.

Dans Lamentations 3, Jérémie crie vers Dieu avec un sentiment de désolation, d’amertume et de désespoir. Il formule quelques-unes des plaintes les plus angoissées et les plus désespérées de toutes les Écritures, en disant : « Il m’a assiégé d’amertume et de difficultés. […] j’ai beau crier et implorer, il n’écoute pas ma prière. […] Il m’a fait sortir du chemin, m’a mis en pièces et m’a laissé sans aide » (v. 5, 8, 11). Mais alors que Jérémie se remémore le caractère de Dieu, il ose espérer que l’amour et la miséricorde de Dieu le délivreront. Il déclare : « À cause du grand amour du Seigneur, nous ne sommes pas consumés, car ses tendresses ne sont pas épuisées, chaque matin elles se renouvellent ; grande est ta fidélité. Je me dis : “Le Seigneur est ma part ; c’est pourquoi je compte sur lui” » (v. 22-24). Après s’être lamenté et avoir a lutté dans la prière, Jérémie s’est reposé.

Lorsque nous luttons dans la prière avec foi, nous découvrons les trésors cachés de la grâce de Dieu. Ce n’est pas une foi faible qui nous pousse à lutter et à passer des nuits blanches dans la prière, mais une foi suffisamment forte pour croire que Dieu lui-même viendra à notre rencontre et nous répondra, qu’il n’est pas indifférent à nos cris, mais qu’il remue au contraire ciel et terre pour répondre à nos supplications. À Gethsémané, les disciples se sont endormis, inconscients de ce qui allait se passer. Leur repos est né de l’ignorance et de la faiblesse. Pendant ce temps, Jésus luttait avec Dieu, priant dans une telle « angoisse » que « sa sueur était comme des gouttes de sang qui tombaient à terre » (Lc 22.44) alors qu’il demandait à son Père d’écarter la souffrance imminente. Après avoir demandé, le Christ a volontairement accepté la réponse du Père, confiant que Dieu ferait ce qui serait le mieux.

Le repos biblique dans la souffrance commence par la lutte. Nous ne pouvons pas pleinement nous abandonner à Dieu dans la prière, en nous reposant en lui, sans d’abord nous engager dans le combat de la foi. Lorsque nous luttons dans la prière, nous avons confiance que Dieu accomplit quelque chose à travers nos prières, qu’il nous change en cours de route et nous invite à une rencontre avec lui qui changera notre vie. Nous luttons pour que nos prières soient exaucées, et nous luttons lorsque nos demandes semblent rester sans réponse, et ces deux situations finissent par laisser place à un véritable repos dans le Seigneur. Ce repos actif est ce à quoi aspire notre cœur ; comme l’a dit Augustin : « Tu nous as faits pour toi, ô Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne repose pas en toi.

Vaneetha Rendall Risner est écrivaine et conférencière. Son dernier livre est Walking Through Fire : A Memoir of Loss and Redemption.

Traduit par Valérie Dörrzapf

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Nous serions-nous trompés à propos de Matthieu 18 ?

Plus que de discipline dans l’Église, il y est question d’épanouissement de la communauté.

Christianity Today August 11, 2022
Illustration by Duncan Robertson

Un pasteur apprend qu’un homme marié a une liaison avec une femme mariée participant au même groupe d’étude biblique. Les conséquences ne font que s’amorcer. Selon les Écritures, comment le pasteur devrait-il réagir ?

Ou imaginez cette situation : l’un des deux pasteurs conduisant une implantation d’Église est de plus en plus imprévisible. Il montre des signes classiques de narcissisme, laissant derrière lui une série de personnes blessées après s’être opposées à son leadership autoritaire. Comment son copasteur devrait-il gérer cette situation ?

Descendons d’un cran : deux lycéens du groupe de jeunes ont une attirance l’un pour l’autre. Les parents du garçon, inquiets de la situation, se démènent alors pour y mettre fin. Les parents de la fille en sont blessés et en colère. Depuis, la tension monte entre les parents et les accusations fusent des deux côtés. Le pasteur est amené à s’interposer. Quelle devrait être la marche à suivre ?

Ceux qui ont été dans le ministère n’ont pas besoin d’avoir beaucoup d’imagination pour reconnaître ces scénarios ; la plupart des pasteurs ont connu des situations similaires. Les manifestations du péché sont infinies, mais aussi prévisibles. Il n’y a pas que les pauvres que nous aurons toujours avec nous, comme le disait Jésus, mais aussi les mauvaises actions des humains, y compris des chrétiens.

Une question de discipline ?

Au cours des 25 dernières années, j’ai eu le privilège d’être à la fois pasteur et professeur, et actuellement les deux à la fois. Selon mon expérience, il est beaucoup plus difficile d’être pasteur que d’être professeur, et ce en grande partie à cause de la complexité des relations au sein de l’Église.

Si les conflits vont et viennent dans une congrégation, ils ne disparaissent jamais pour toujours. Au cours de la dernière année seulement, je me souviens de multiples cas de blessures, de malentendus, d’anxiété agressive et de conflits entre chrétiens dans mon Église, y compris au sein du personnel engagé. J’ai été amené à aider dans certaines situations, j’ai simplement eu connaissance d’autres et j’ai été personnellement impliqué et affecté par certaines autres encore.

Je ne devrais pas être surpris. Nous ne devrions pas être surpris. C’est la vie réelle courante dans l’Église du Christ. Nos vies en communauté sont conflictuelles parce que nous sommes des humains limités et moralement abîmés, mais vivre ensemble est notre destinée.

Tout au long de l’histoire, l’Église a utilisé plusieurs approches pour faire face à ce genre de situations, allant de l’excommunication aux processus de restauration, ou usant de dissimulation. Dans de nombreuses Églises américaines aujourd’hui, l’accent est mis sur le besoin de « discipline dans l’Église » pour traiter le péché et ses conséquences. Pour protéger la pureté de la communauté, on établit des procédures disciplinaires pour les cas de péchés choquants ou persistants.

Au cœur de la plupart des enseignements sur la discipline dans l'Église, on retrouve un passage clé : Matthieu 18.15-20. Ces quelques versets sont devenus le texte de référence pour le sujet. Ils servent d’étoile polaire et de carte pour guider les pasteurs dans les étapes nécessaires pour faire face au désordre moral. Cela est compréhensible, et pas complètement dénué de bon sens.

Mais une lecture attentive de Matthieu 18 donne une vision différente de ce que Jésus enseigne dans ces quelques versets. Plutôt que de considérer ce passage en simples termes de discipline, celui-ci peut être vu comme un ensemble d’instructions pratiques et constructives que Jésus donne à la communauté chrétienne pour le cours normal et conflictuel de la vie d’Église. Matthieu 18 parle bien plus de créer des communautés florissantes que de gérer les problèmes d’Église.

Le grand livre du discipulat

« Le contexte est roi, mais Jésus est Seigneur », voilà ce que mon fils se plaît à rappeler en citant un peu sarcastiquement l’un de ses professeurs. La vieille rengaine selon laquelle « il faut tenir compte du contexte littéraire » reste vraie lorsqu’il s’agit de comprendre Matthieu 18. Ce chapitre bien connu n’est pas isolé. Ce n’est qu’une partie de ce que de nombreux biblistes considèrent comme le livre le plus structuré de toute la Bible : l’Évangile selon Matthieu.

L’une des nombreuses raisons qui ont de longue date conduit à placer l’Évangile de Matthieu en tête du canon du Nouveau Testament est qu’il propose un programme clair et puissant pour transformer toute personne en disciple de Jésus. Matthieu est le grand livre du discipulat, et ceci grâce à une structure littéraire remarquablement agencée et clairement conçue au regard de son objectif : faire des disciples.

Dans le monde antique, les gens écrivaient des biographies de grands maîtres et philosophes pour faire l’éloge de leurs enseignements et de leur mode de vie. C’est essentiellement ce que sont nos Évangiles : des récits émaillés de discours d’enseignements, invitant les gens à devenir des disciples de Jésus.

Pour accomplir son objectif de faire des disciples, Matthieu regroupe l’essentiel de l’enseignement de Jésus en cinq grandes parties (chapitres 5-7, 10, 13, 18 et 23-25). Chacun de ces discours célèbres s’articule autour d’un thème, exposant des leçons facilement mémorisables pour devenir disciple. Le but de Jésus à travers ses enseignements est de réorienter les sensibilités, les amours, les habitudes, les comportements et les pensées de ses disciples, en accord avec le royaume de Dieu à venir, tel qu’il se révèle à travers lui. C’est ce que signifie être disciple : prendre sur soi le joug de la sagesse de Jésus et apprendre sa manière très différente d’habiter le monde (11.25-30).

Lorsque l’on reconnaît que Matthieu 18 n’est qu’une partie d’une sorte de manuel du disciple composé des enseignements de l’Évangile et que l’objectif primordial du livre est la formation des disciples, il est possible alors de lire les paroles de Jésus au chapitre 18 avec plus de justesse. Bien qu’exercer la discipline envers des membres d’Église égarés puisse être une application des instructions de Jésus, cette interprétation est au mieux étroite, et pourrait être porteuse d’erreurs. La chose la plus importante à comprendre à propos de Matthieu 18.15-20 est qu'il ne s'agit pas principalement d'un manuel de discipline pour l’Église, mais plutôt d'une petite partie d'un programme plus vaste et constructif afin que les disciples chrétiens sachent comment vivre en communauté.

Un code de vie en communauté

Mon oncle, à la fois instruit et sympathique, plaisantait toujours en disant qu’une journée n’est jamais perdue quand on peut utiliser un mot allemand. En voici un bon, transmis par Martin Luther lui-même, qui décrit avec justesse le but de Matthieu dans les chapitres 18 à 20 : haustafel, « table ou code domestique ». Un code domestique donne des instructions sur la manière de se comporter entre membres d’une unité familiale élargie et sur les attitudes à pratiquer et à mettre en valeur. On trouve d’autres exemples bibliques de code domestique en Éphésiens 5.22-6.9 et Colossiens 3.18-4.1.

Matthieu 18-20 sert le même objectif pour le « foyer » ou la « famille » qu’est l’Église, pour le peuple de Dieu nouvellement formé en Jésus-Christ. Il explore une variété de situations relationnelles pour instruire les disciples du Christ et savoir qui et quoi honorer. Cette section met en valeur les enfants et les personnes vulnérables (18.1-14 ; 19.13-15), souligne l’importance du pardon mutuel entre frères et sœurs en Christ (18.15-35) et la haute considération de Dieu pour le mariage (19.1-12), et privilégie ceux qui suivent la voie de la souffrance de Christ, face aux riches et à ceux qui se font passer pour justes (19.16-30).

Pris en commun, ces chapitres offrent une vision d’une nouvelle façon d’habiter le monde ensemble, illustrant ce que nos relations devraient être. C'est ce contexte global de Matthieu 18.15-20 qui passe inaperçu si l’on s’en tient seulement à ces quelques versets. L’enseignement de Jésus, ici, n’est qu’un exemple de la saveur particulière que les relations au sein de l’Église du Christ sont appelées à avoir.

La marque fondamentale

Ce texte supposé traiter de « discipline ecclésiastique » s’inscrit en réalité dans le grand thème du pardon comme marque fondamentale de la communauté chrétienne. L’exhortation éthique centrale de Matthieu est l’appel à être miséricordieux. En donnant des exemples d’actes de bonté (avec par exemple l’attitude de Joseph envers Marie, sa fiancée, en 1.19) et à travers les enseignements de Jésus, Matthieu met l’accent sur l’appel constant de Jésus à ce que ses disciples soient des êtres de pardon.

Faire preuve de miséricorde est une vertu à double face : la compassion miséricordieuse envers ceux qui sont dans le besoin (6.2-4 ; 9.12-13 ; 12.7) et le pardon miséricordieux envers ceux qui nous ont fait du tort (5:7,9 ; 6:14–15 ; 18:21–35). Et ce sentiment de miséricorde qui conduit à pardonner aux autres est le principal marqueur qui distingue les véritables disciples de Christ. En fait, le manque de pardon est l'une des raisons pour laquelle certains pourraient être exclus de l'Église selon les étapes décrites dans 18.15-20 — parce que ceux-ci ne veulent pas se réconcilier avec un autre membre, malgré l'exhortation à le faire adressée à chacun dans la communauté.

Ce thème de la miséricorde au travers du pardon est encore souligné par la longue parabole que Jésus raconte immédiatement après 18.15-20. Cette parabole du serviteur impitoyable (aux v. 21-35) est l’un des enseignements de Jésus les plus dérangeants et les plus forts. Il illustre et fait comprendre son propos : les chrétiens doivent se pardonner l’un l’autre.

Ce n'est pas que Matthieu 18.15-20 n'aborde pas les moyens pratiques de traiter le péché dans la communauté chrétienne. Le texte le fait effectivement. Mais lorsque l’on élargit la lecture pour prendre en compte le contexte dans sa globalité, on s’aperçoit que la discipline n’est pas l’élément moteur. Ce qui est au cœur du texte, c’est la croissance de la communauté caractérisée par la miséricorde et la grâce de Christ.

Un travail de longue haleine

Tout au long de Matthieu 18 à 20 se manifeste également la réalité persistante et inévitable du conflit au sein de la communauté chrétienne. Ce passage nous aide à avoir des attentes réalistes à propos de notre vie communautaire et de ses conflits. Les instructions de Jésus sont nécessaires parce que les humains font le mal : ne pas tenir compte des enfants, causer du tort aux personnes vulnérables, divorcer sans raison, se battre pour savoir qui est le plus grand et, surtout, pécher les uns contre les autres et ne pas se pardonner.

Il est important de noter que Jésus ne montre ni indignation ni surprise face à ces situations. Il ne s’attend pas non plus à ce qu’elles ne se produisent pas. Au contraire, Jésus sait que c’est l’expérience humaine normale et, par conséquent, l’expérience chrétienne normale dans la communauté.

Une communauté florissante n’est pas une communauté exempte de conflits, mais une communauté où les chrétiens valorisent et pratiquent la manière très différente d’être au monde apprise de Jésus. Et c'est le but principal et l'objectif de la formation de disciples dans Matthieu 18.15-20.

La santé de l’Église n’implique pas l’absence de conflits. La santé de l’Église peut se voir quand les chrétiens traitent collectivement les conflits comme une affaire communautaire sérieuse dans le but d’arriver à la réconciliation. C’est la voie de Christ.

Ainsi, les pasteurs peuvent apprendre à considérer le conflit comme une réalité inévitable. Comme nous le savons tous bien, tôt ou tard, des situations ayant besoin de la sagesse de Matthieu 18-20 se produiront. La fonction de ces textes est de normaliser de telles expériences au sein d’une communauté ecclésiale et de donner des instructions pratiques pour vivre ensemble dans la voie de l’amour. Ce principe directeur s’applique au cas d’adultère, au pasteur narcissique et aux parents qui se querellent.

En tant que pasteurs, nous sommes appelés à jouer longtemps le jeu d’enseigner au peuple de Christ ce qu’il met en valeur dans Matthieu 18-20. Lorsque des conflits et des fautes morales de toutes sortes se produisent — ​​et ils se produiront —, nul besoin d’être surpris. Au lieu de cela, ces situations se présentent comme une occasion d’enseigner la voie du Christ.

Un pasteur pourra s’inspirer des étapes que Jésus a données à l’Église pour rechercher la réconciliation dans les relations. Ce faisant, il aide sa communauté à grandir comme une communauté alternative et belle. En agissant ainsi, nous manifestons sa manière d’être dans le monde, servant de lumière brillant dans les ténèbres.

Jonathan T. Pennington est professeur de Nouveau Testament au Southern Seminary et pasteur pour la formation spirituelle à la Sojourn East Church de Louisville, dans l’État américain du Kentucky. Il est l’auteur de plusieurs livres, dont Jesus the Great Philosopher.

Traduit par Philippe Kaminski

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Russell Moore, nouveau rédacteur en chef de Christianity Today

Joy Allmond, responsable de longue date de l’édition, rejoint également le conseil pour mettre en œuvre la vision du ministère.

Christianity Today August 11, 2022
Eric Brown

Ce qui fait la grandeur de quelqu’un dans ce monde, ce n’est pas la possession d’un talent extraordinaire, mais une mise en œuvre résolue et persévérante de ce talent, menée avec courage et tempérament, en vue d’un objectif valable. Ce qui fait la grandeur de quelqu’un dans le royaume de Dieu, selon Jésus, c’est un esprit d’humilité et de service (Mt 20.26).

C’est pour ces raisons que je suis profondément heureux d’annoncer que Russell Moore reprendra le rôle de rédacteur en chef de Christianity Today à partir du 1er septembre.

Que Russell Moore soit une personnalité dotée de talents extraordinaires est incontestable. Il a été nommé doyen de l’école de théologie du Southern Baptist Theological Seminary, l’un des séminaires de formation des baptistes du Sud, alors qu’il n’avait que 32 ans. Par le biais de ses livres, de ses articles et podcasts, de ses interventions publiques et de sa direction de la Commission pour l’éthique et la liberté religieuse, il a sans doute été la voix chrétienne évangélique la plus importante dans le public aux États-Unis au cours de la dernière décennie. Quiconque a lu ses écrits ou entendu ses discours pourra témoigner des prodigieux dons qui lui ont été confiés.

Mais le talent seul n’est pas la raison de notre enthousiasme. Russell Moore a fait preuve, à maintes reprises, de son courage d’exprimer ses convictions et de son intégrité pour vivre selon celles-ci. Cela a parfois signifié défendre des vérités bibliques et théologiques essentielles sur la place publique. Parfois, cela l’a conduit à mettre l’Église face à des vérités qui nous interpellent et nous confondent.

Russell Moore a travaillé sans relâche pour aider les hommes et les femmes de conviction évangélique à s’attaquer au péché dans nos propres rangs, qu’il s’agisse d’idolâtrie et de préjugés ou d’abus et de négligence. Il s’est attaqué à certaines des problématiques les plus importantes et les plus urgentes de notre époque, même lorsque cela signifiait subir les foudres des critiques provenant tant de l’extérieur que de son propre camp.

Ce qui m’enthousiasme le plus, cependant, c’est la façon dont il n’a jamais perdu de vue l’appel fondamental des chrétiens à servir les plus petits et à partir à la recherche de ceux qui se perdent. Qu’il s’agisse de conseiller des pasteurs en crise, d’accueillir chez lui des victimes d’abus ou de partager l’Évangile avec des étudiants, notre nouveau rédacteur en chef n’est pas un académicien dans sa tour d’ivoire ou un poseur de bombes sur Twitter, mais quelqu’un qui est profondément engagé dans la vie de l’Église et dans le partage de l’amour de Dieu avec les autres. Pasteur baptiste ordonné ayant occupé de multiples responsabilités pastorales (et en occupant encore une aujourd’hui), Russell Moore a servi l’Église et le royaume sans relâche tout au long de sa carrière.

Au sein de Christianity Today, nous aspirons à mettre en avant les histoires et les idées du royaume de Dieu. La question fondamentale qui anime notre travail est la suivante : à quoi ressemble un disciple fidèle de Jésus-Christ à notre époque ? Nous espérons offrir à une nouvelle génération ce qu’a trouvé Russell Moore lui-même lorsqu’il a découvert Christianity Today à l’âge de 15 ans : une vision à la fois large et convaincante de la vie chrétienne qui ouvre un chemin au sein d’un monde déchu et en direction du royaume de Dieu.

C’est pour cela que cette nomination à ce poste est si importante. En tant que président et directeur général, j’ai occupé brièvement le poste de rédacteur en chef à l’intérim, mais nous avons besoin de quelqu’un pour l’habiter pleinement, et Russell Moore incarne cette façon de suivre Jésus profondément enracinée, magnifiquement orthodoxe, réfléchie et empreinte de compassion, et engagée à servir le royaume, même au risque d’en payer le prix.

Fait important, nous accueillons également dans notre équipe Joy Allmond, vétérane de longue date de la communication et de l’édition, qui occupera le poste de chef d’équipe rédactionnelle. L’une des principales charges de Russell Moore sera de continuer à faire avancer notre programme de théologie publique. Joy Allmond travaillera à ses côtés pour voir ce projet s’épanouir. Forte d’une longue expérience au sein de la Billy Graham Evangelistic Association, du magazine Decision et de Lifeway, elle offrira l’apport de dons remarquables en matière de rédaction, de direction et de relations interpersonnelles pour le bon fonctionnement de notre travail d’édition ainsi que pour les événements et programmes à venir.

Nous vivons une époque de grands périls et de grandes promesses pour l’Église. Nous sommes déterminés, à Christianity Today, à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour servir l’Église dans une période de turbulences et de divisions, et pour aimer le monde que Dieu a façonné. Nous avons été honorés d’accueillir Russell Moore dans notre équipe il y a un peu plus d’un an. Nous attendons maintenant avec impatience ce que lui, Joy Allmond et notre extraordinaire équipe éditoriale pourront accomplir dans les années à venir.

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Le banquet le plus nourrissant qui soit

Comment l’amour du luxe à la française m’a conduite à savourer les Écritures

Christianity Today August 8, 2022
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