La mission du Messie

Méditation de l’Avent pour le 16 décembre

Christianity Today December 16, 2021

Sacrifice et salut


Introduction à la troisième semaine de l’Avent


Par l’intermédiaire des prophètes de l’Ancien Testament, Dieu décrit l’espérance du salut dans un langage et au moyen d’images poétiques. Cette semaine, nous méditons les prophéties annonçant le Messie : le serviteur, la lumière, celui que Dieu avait promis à son peuple languissant.

Lecture dans Ésaïe 61.1-4, 8-11

La mission de l’Église fait souvent l’objet de débats. Sommes-nous censés évangéliser ou œuvrer pour la justice ? Les chrétiens doivent-ils donner la priorité au pardon des péchés ou au soin des malades ? Ces débats trouvent leurs racines dans un vieux clivage en matière de théologie et de mission. Pour le dire très schématiquement, les uns pourraient être inflexibles sur la nécessité de nourrir les affamés, mais indifférents à la naissance virginale, tandis que les autres s’orienteraient dans le sens inverse. Les uns se consacrent à l’amélioration du monde et les autres à la promesse d’un au-delà céleste.

Les deux camps auraient été réprouvés par Jésus. En se rendant à la synagogue et en lisant un passage d’Ésaïe 61, il annonçait sa mission : l’Esprit du Seigneur l’avait oint pour apporter « une bonne nouvelle aux pauvres […] pour proclamer aux captifs la libération et aux aveugles le recouvrement de la vue, pour renvoyer en liberté les opprimés, pour proclamer une année de grâce du Seigneur » (Luc 4.18-19). Jésus a montré comment le royaume de Dieu apporte le pardon et la libération, la guérison et l’espérance, comme autant de signes du renouveau de la création à venir.

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Ésaïe lui-même attendait le jour où Dieu ferait naître de nouveaux cieux et une nouvelle terre où « toute chair » viendrait l’adorer (Ésaïe 66, 22-23). Bien qu’Ésaïe, et Israël avec lui, aient pu imaginer que cela se produirait d’un seul coup, Dieu en Christ — l’Oint — inaugurait en fait un règne qui culminera un jour dans la refonte complète du monde. Il commencera par nous : par la relation entre Dieu et l’être humain qui était au cœur de la création. Et il travaillera par le biais de ceux qu’il a justifiés pour apporter la justice. Le peuple restauré se joint à Dieu dans son œuvre de restauration du monde.

Mais en annonçant l’accomplissement de la prophétie d’Ésaïe, Jésus se désignait aussi comme le porteur du Royaume. Il ne s’agit pas d’un simple projet d’amélioration sociale. La refonte totale du monde et de ses systèmes commence par une graine qui tombe en terre et meurt (Jean 12.24). C’est le Messie seul qui inaugure le royaume.

La mission du Messie, l’Oint de l’Esprit, se poursuit à travers le peuple du Messie, les petits oints. Luc fait un parallèle avec ce récit dans son deuxième livre, le livre des Actes, en parlant de l’Esprit qui oint les disciples de Jésus dans la chambre haute. Dans un sens très réel, la mission de l’Église n’est pas la mission de l’Église, mais celle du Messie. C’est Jésus qui l’a commencée ; Jésus qui, par l’Esprit, nous donne le pouvoir d’y participer ; et Jésus qui reviendra dans la gloire pour porter son règne à son apogée.

Lisez Ésaïe 61.1-4, 8-11.


(Option : lisez aussi Luc 4.14-21.)


Songez au public d’origine d’Ésaïe : quel espoir cette promesse lui offrait-elle ? Que soulignait-elle sur le caractère et les projets de Dieu ? Qu’est-ce qui vous frappe aujourd’hui lorsque vous lisez cette promesse à la lumière de Jésus et de l’Évangile ?

GLENN PACKIAM est pasteur senior associé à la New Life Church de Colorado Springs. Il a notamment écrit Worship and the World to Come et The Resilient Pastor (février 2022).

Traduit par Léo Lehmann

Espoir véritable

Méditation de l’Avent pour le 15 décembre

Christianity Today December 15, 2021

Sacrifice et salut


Introduction à la troisième semaine de l’Avent


Par l’intermédiaire des prophètes de l’Ancien Testament, Dieu décrit l’espérance du salut dans un langage et au moyen d’images poétiques. Cette semaine, nous méditons les prophéties annonçant le Messie : le serviteur, la lumière, celui que Dieu avait promis à son peuple languissant.

Lecture dans Ésaïe 42.1-7

Nous oublions parfois que nous nous nous fabriquons sans cesse des idoles. Nous nous attachons aux idoles du pouvoir, de la richesse, de l’honneur, des autres, des institutions, de la désinformation, de la tradition. Et parfois nous oublions aussi que Dieu ne se tait pas face à l’idolâtrie et au mal. Il dévoile la vanité de leurs promesses et révèle Christ comme le remède à nos tendances à nous construire des idoles.

Dans Ésaïe 42, en réponse à l’idolâtrie sans substance et aux faux dieux dénués de sens, auxquels il s’est adressé dans le chapitre précédent, Dieu annonce la venue de son serviteur en qui il se plaît, qu’il a choisi, et en qui son Esprit habitera. Alors que les idoles sont faibles et impuissantes, le serviteur fidèle promis par Dieu apportera la justice au monde entier. Il ne piétinera pas ceux qui sont vulnérables et ne s’enflera pas d’orgueil. Au lieu de cela, sa tendre compassion se manifestera envers ceux qui sont faibles, blessés ou dont la foi vacille.

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Tant de choses dans notre monde aujourd’hui peuvent nous amener à nous demander où est Dieu : lorsque l’attrait des idoles trompe même les plus fidèles d’entre nous, lorsque l’injustice enveloppe notre monde comme un nuage noir, et lorsque les faibles peuvent à peine respirer parce que leurs supplications les ont épuisés. Ce passage nous rappelle que le serviteur promis prendra un jour tout ce qui ne va pas dans le monde et le réparera. Il est choisi par Dieu pour apporter la justice dans l’humilité et l’amour. Il est appelé par Dieu à offrir une alliance à son peuple, à être l’agent irréprochable qui accomplira sa parole et sa volonté.

Dans Matthieu 12.15-21, après que Jésus ait guéri de nombreuses personnes dans une grande foule qui le suivait, la Parole nous dit qu’ainsi « devait s’accomplir cette parole du prophète Esaïe », faisant justement référence à Ésaïe 42.1-4. Toutes les promesses de Dieu résident en Jésus et ont leur accomplissement en lui (Matthieu 5.17 ; 2 Corinthiens 1.20). Jésus incarne la vérité, la justice, la droiture, la fidélité, l’humilité, la douceur et tous les fruits de l’Esprit. Et pour tous ceux qui l’appellent « Seigneur », à travers notre union avec lui, nos vies doivent refléter la même chose, bien qu’imparfaitement. Car seul Jésus a le pouvoir de faire sortir les nations des ténèbres pour connaître sa merveilleuse lumière. Seul Jésus peut libérer les prisonniers du péché et de l’obscurité.

Alors que nous réfléchissons en ce temps de l’Avent à la fidélité de Dieu qui a envoyé son serviteur, souvenons-nous que si la justice a ultimement été rendue à la Croix, c’est aussi une réalité future à laquelle nous aspirons en attendant sa seconde venue.

Méditez sur Ésaïe 42.1-7.


(Option : lire aussi Ésaïe 41.)


Qu’est-ce qui attire votre attention dans cette description du serviteur ? Comment Jésus a-t-il accompli ces promesses et comment le fera-t-il encore ? Dans la prière, confessez les manières dont vous avez placé votre espoir dans les idoles contemporaines. Demandez à Dieu de vous aider à placer véritablement tout votre confiance en lui.

KRISTIE ANYABWILE a dirigé la rédaction de His Testimonies, My Heritage et est l’autrice de Literarily: How Understanding Bible Genres Transforms Bible Study (mars 2022).

Traduit par Teodora Haiducu

Commérage ou dénonciation d’abus ?

Nos langues seraient-elles parfois trop retenues ? Dans la lutte contre certains abus, des chrétiens s’emploient à retrouver une distinction biblique entre commérages malfaisants et saine critique.

Christianity Today December 14, 2021
Illustration by Andrea Ucini

Heather Fulk ne parvient pas à se souvenir si elle avait entendu parler de la politique de non-dénigrement mise en place par Dave Ramsey avant que son mari, Jon, ne soit licencié de la société dirigée par le gourou chrétien de la finance en mai 2020.

Mais ceux qui travaillent pour Ramsey Solutions et les millions de personnes qui suivent les enseignements de son fondateur sur le leadership savent qu’il est peu tolérant pour la négativité dans les rangs. Ramsey définit le commérage comme le fait de « discuter de quelque chose de négatif avec quelqu’un qui ne peut pas aider à résoudre le problème ». Les critiques doivent être adressées directement au responsable ; se plaindre à ses collègues est considéré comme « déloyal ».

Il arrive bien sûr que les employés de Ramsey aient des critiques à formuler, qu’il s’agisse de petites choses comme leur avis sur un invité de la méditation hebdomadaire animée par leur patron, ou de préoccupations plus importantes quant à leur place dans l’entreprise, mais ils doivent veiller à ne pas les partager avec des collègues qui pourraient les dénoncer.

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« Il faut être prudent avec les nouvelles relations avant de savoir si une personne est sûre », déclare un ancien employé qui a quitté l’entreprise il y a quelques mois et a souhaité conserver l’anonymat par crainte de représailles.

Pour certains, les réticences s’étendent bien au-delà de l’entreprise. « Ils ont l’impression que de parler à leur conjoint ou à leurs amis relève déjà du commérage », rapporte un autre employé.

Ils savent qu’il ne faut pas faire comme Heather Fulk. Dans les premiers mois de la pandémie, l’année dernière, elle a partagé sur sa page Facebook ses inquiétudes quant à la réouverture du bureau de « l’entreprise de Jon ». Un collègue a rapporté le message de trois phrases à Ramsey Solutions et le mari de Heather a été licencié dans le mois qui a suivi.

Lors de l’entretien de licenciement, selon un enregistrement, le directeur des ressources humaines de Ramsey a confirmé que le message sur les médias sociaux était la raison de cette décision. « Nous ne sommes manifestement pas d’accord sur la définition du commérage » a fait remarquer son mari.

Après le licenciement de son mari, Heather a reçu une lettre de mise en demeure de la part de l’entreprise. Elle a donc été très évasive dans les informations partagées à ses amis sur Facebook, en leur précisant qu’ils pouvaient lui envoyer un message s’ils voulaient savoir avec plus de précisions pourquoi son mari n’était plus employé chez Ramsey.

Elle était encore en train de gérer sa culpabilité pour ce qui s’était passé quand une femme, responsable dans son Église, a pris contact avec elle. Heather pensait qu’elle venait lui apporter son soutien dans l’épreuve et les deux femmes se sont rencontrées devant chez elle. Au lieu de cela, il s’agissait de critiquer son récent message sur Facebook : « Ça donnait l’impression que tu voulais juste agiter des rumeurs ».

C’est à juste titre que les chrétiens tiennent compte des avertissements scripturaires concernant les médisances, les choses dites en secret et les ragots mensongers. Cependant il arrive aussi que certains responsables se réfèrent à ces enseignements pour faire taire et discréditer les victimes de harcèlement et les lanceurs d’alerte.

L’un des plus anciens équipiers de l’association fondée par Ravi Zacharias avait soulevé en interne ses préoccupations concernant le comportement du fondateur à l’étranger, et a été mis en difficulté pour avoir « répandu des rumeurs ». Les femmes qui ont porté des accusations d’inconduite sexuelle contre le fondateur de la Willow Creek Community Church, Bill Hybels, ont été accusées de mener une campagne visant à faire tomber l’Église par des « allégations mensongères ».

Au cours de la décennie qui a suivi la publication de son livre Resisting Gossip (« Résister au commérage »), le pasteur Matthew Mitchell a également remarqué la répétition de ce type de schéma. Il y a deux ans, Mitchell écrivait sur son blog qu’il craignait que des responsables en place n’utilisent son travail pour étouffer les critiques au sein de leurs Églises.

Alors que les mouvements #MeToo et #ChurchToo ont mis en avant la parole des victimes, Mitchell rapportait qu’il avait eu de nombreuses occasions de constater « à quel point il était difficile de parler et de le faire ouvertement lorsque vous avez été maltraité par une personne en position d’autorité, et d’avoir ensuite la pression supplémentaire d’être accusé de médisance ». Le réflexe de discréditer ceux qui font état de préoccupations au sein d’un groupe peut constituer un signal d’alerte sur une possible culture de l’abus.

La réponse à apporter, Mitchell et d’autres experts sont d’accord là-dessus, n’est pas que l’Église cesse d’enseigner contre les dangers de la médisance. Mais elle doit commencer par établir une bonne compréhension de ce que constitue véritablement celle-ci.

William Vanderbloemen, dont la société conseille les employeurs chrétiens en matière d’embauche et de culture d’entreprise, explique que ses clients sont de plus en plus nombreux à ajouter des clauses d’interdiction des commérages dans leurs manuels du salarié, d’autant plus que les médias sociaux permettent aux gens de diffuser largement des informations potentiellement préjudiciables. Pour faire respecter ces règles, ils doivent naviguer autour de la frontière subjective de ce qui peut être considéré comme « médisance » ou établir des paramètres définissant le terme dès le départ.

Le fait d’appeler cela « sujet de prière » n’empêche pas que cela soit un ragot. Mais c’est ainsi qu’on le dissimule parfois », explique Vanderbloemen, ancien pasteur à Houston.

La médisance et Matthieu 18

La Bible ne nous offre pas une définition unique et utilise plusieurs mots pour désigner ce que nous appellerions commérages ou médisance. Selon Karen Ehman, une conférencière de Proverbs 31 Ministries et autrice de Keep It Shut (« Bouclez-la »), dans l’Ancien Testament, les termes font généralement référence à une personne — un « conteur » ou un « trafiquant d’informations » — plutôt qu’à une action. Les termes du Nouveau Testament pour désigner le commérage, dit-elle, font référence à de vains bavardages (1 Tm 6.20) et aux chuchotements (2 Co 12.20).

« Nous avons hérité de cette idée selon laquelle “parler dans le dos de quelqu’un” relève du commérage. Peut-être en est-il ainsi. Mais peut-être pas », expose Ehman, qui a passé cinq ans à étudier les recommandations de l’Écriture sur l’expression verbale afin de lutter contre sa tendance à se mettre en difficulté par ses paroles. « Si c’est vrai, et que je ne le fais pas de manière calomnieuse ou malveillante, ce n’est pas vraiment de la médisance. C’est juste parler de quelqu’un quand il n’est pas dans la pièce ».

Pour les chrétiens, la médisance n’est pas tant un type de discours qu’une motivation à parler. Parfois, les ragots sont alimentés par notre propre égoïsme ou une volonté de se mettre en valeur : nous voulons attirer l’attention et être considérés comme faisant partie de ceux qui savent. Parfois, il s’agit d’une motivation peu amène envers les autres, d’un désir de les caricaturer ou de révéler un secret qui pourrait nuire à leur réputation.

Qualifier de « médisance » toute information négative ou sensible, c’est passer à côté de l’essentiel.

« Parfois, nous devons dire quelque chose de négatif que nous savons être vrai sur une personne absente, pour mettre notre interlocuteur en garde contre les agissements de cette personne, car il risque d’être blessé de la même manière », explique Mitchell, citant Paul dans 2 Timothée 4.15 à propos du mal commis par Alexandre l’orfèvre. Paul écrit ainsi : « Toi aussi, garde-toi de lui, car il s’est opposé avec acharnement à notre prédication ».

En vue d’une évolution vers plus de transparence, de confiance et de redevabilité, des institutions chrétiennes examinent plus attentivement si elles offrent des possibilités de s’exprimer librement à ceux qui veulent à juste titre prendre la parole pour dire la vérité, dénoncer le péché et protéger d’autres personnes du danger.

D’une certaine manière, le travail à distance pendant le COVID-19 a obligé les employeurs chrétiens à communiquer plus clairement et à instaurer une plus grande confiance, selon Al Lopus, PDG du Best Christian Workplaces Institute.

Les Églises, les œuvres et les entreprises chrétiennes veulent créer une culture de travail positive dans laquelle il est attendu des employés qu’ils manifestent les fruits de l’Esprit, mais cela ne signifie pas qu’il faille taire tout élément négatif.

« Nous encourageons nos partenaires à créer un environnement dans lequel les gens se sentent libres d’exprimer leurs opinions », dit Lopus, ajoutant qu’une communication ouverte rend également les organisations plus innovantes. « Il y a une forme saine de conflit lorsque les gens ne sont pas d’accord sur des questions ou des idées ».

Sur base de Matthieu 18, les chrétiens peuvent couramment être qualifiés de médisants pour avoir parlé des mauvais comportements de quelqu’un sans s’être d’abord adressés directement à la personne en question.

« J’ai beaucoup réfléchi à cette accusation de médisance », rapporte Sandra Glahn, qui a accompagné une Église pour prendre soin d’un groupe de femmes rapportant des faits d’abus et de harcèlement sexuels de la part de diacres. « Lorsqu’une différence de pouvoir entre en ligne de compte, on trouve un mode opératoire plus directement applicable dans la première épître à Timothée, lorsque l’apôtre dit à son jeune collaborateur : “N’accepte pas d’accusation contre un responsable d’Église si elle n’est pas appuyée par deux ou trois témoins. Ceux qui ont péché, tu dois les reprendre devant tous, afin que cela inspire de la crainte aux autres” (1 Tm 5.19-20). »

Affronter les abus commis par des responsables d’Église devrait ainsi impliquer des tierces personnes plutôt que d’obliger la victime à rencontrer son agresseur présumé dans un tête-à-tête déséquilibré.

« Les deux ou trois personnes doivent avoir un échange avant la dénonciation. Cette conversation n’est pas de la médisance », précise Glahn. « Les deux ou trois peuvent aussi avoir besoin de consulter un conseiller spirituel. Cela élargit encore le cercle. Cette conversation n’est pas non plus de la médisance. »

Non seulement ces conversations sont permises, mais elles contribuent aussi à une forme de redevabilité.

« Nous avons vu, en particulier ces dernières années, des personnes puissantes capables de nuire à d’autres personnes — parfois pendant de nombreuses années — et s’en tirer, en partie parce que les victimes étaient isolées et ne se connaissaient pas entre elles, en partie parce que l’organisation protégeait ses dirigeants de critiques justifiées », déclare Stephen Witmer, un pasteur du Massachusetts qui a écrit sur la médisance dans l’Église.

Il est important de savoir qui est introduit dans le cercle. Qu’il s’agisse de préoccupations majeures ou de petites critiques, les chrétiens devraient chercher un interlocuteur qui puisse faire plus qu’entendre leurs doléances.

« Lorsque nous parlons à une tierce personne d’un problème que nous percevons chez quelqu’un, nous devrions considérer cette tierce personne comme un participant impliqué, et non comme un destinataire passif, et, en conséquence, la choisir avec soin », estime Witmer. « Peut-être nous aidera-t-elle à réfléchir à ce que nous allons dire lorsque nous approcherons la personne. Elle pourra peut-être nous accompagner pour parler à la personne. Elle ne devrait pas être un simple récepteur de notre besoin de nous épancher. »

Pour des victimes qui par peur ont gardé le silence sur leurs expériences, qui ont ruminé, se sont inquiétées et se sont blâmées elles-mêmes au point d’être spirituellement au bout du rouleau, ce petit groupe d’auditeurs de confiance peut être une bouée de sauvetage. Il peut également mettre en évidence un système abusif et permettre une prise de conscience à la fois déchirante et réconfortante que, malgré l’isolement qu’elles ont ressenti en silence, les victimes ne sont pas seules.

« Quand ils appellent cela du commérage, quand ils ne permettent pas de discuter et de mettre les choses sur la table, il n’y a aucune chance que quelqu’un comprenne ce qui lui arrive », déclare Melissa Hogan, l’une des plus de douze anciens employés et conjoints d’employés de Ramsey Solutions qui ont répondu à nos questions. « Nous en avons besoin. Nous avons besoin de personnes pour nous entourer ».

En d’autres termes, le patron ou les ressources humaines ne sont pas les seuls à pouvoir vous aider à faire face à vos préoccupations ; il y a aussi la personne à côté de vous qui peut vous écouter et peut-être vous dire « moi aussi ».

L’ex-mari de Hogan, Chris, était l’un des cadres dirigeants de Ramsey Solutions et l’entreprise a supervisé un « processus de restauration » lorsque le couple a eu des difficultés conjugales découlant des aventures amoureuses du mari. En 2019, Dave Ramsey a dit à son personnel que Melissa Hogan était venue le voir et avait violemment « accusé Chris de faire toutes sortes de choses ». L’entreprise a ensuite soutenu Chris au travers de ce que Ramsey a décrit comme un « divorce houleux ». Chris Hogan a quitté l’entreprise en mars dernier en raison « d’actions et de comportements » qui n’étaient pas « en accord avec les valeurs fondamentales de Ramsey Solutions ».

Melissa Hogan dit que c’est entièrement grâce à Dieu qu’elle est entrée en contact, il y a cinq ans, avec un cercle de femmes par le biais du club des épouses rattaché à l’entreprise. Au moment de son divorce, Hogan avait l’impression qu’elle ne pouvait pas s’ouvrir à elles à cause du bâillon imposé par Ramsey. Aujourd’hui, elles constituent son groupe de soutien : elles échangent des messages sur l’application Voxer, étudient ensemble les abus spirituels et sensibilisent les gens dans l’espoir que d’autres puissent échapper à des environnements manipulateurs.

Wade Mullen, auteur de Something's Not Right : Decoding the Hidden Tactics of Abuse–and Freeing Yourself from Its Power (« Quelque chose ne tourne pas rond : décoder les tactiques abusives cachées et se libérer de leur emprise »), décrit comment des organisations abusives et toxiques craignent l’élan collectif qui peut se produire lorsqu’une personne raconte à une autre ce qui lui est arrivé et réalise qu’elle n’est pas la seule.

« L’une des formes de représailles consiste pour les dirigeants à réagir à la mise en lumière de la vérité par la déformation les raisons morales et éthiques qui poussent la personne à parler aux autres, la faisant passer pour une personne amère et revancharde qui ne fait que répandre des rumeurs », explique-t-il. « Dans certains cas, j’ai vu des responsables religieux attribuer les révélations d’abus à des efforts sataniques pour détruire l’œuvre de Dieu. Ils qualifient ces révélations de ragots et affirment ensuite que les ragots, et par extension le porteur de ragots, sont utilisés par le Diable lui-même pour attaquer l’Église ou leur ministère. »

Lopus, de Best Christian Workplaces, affirme qu’un environnement chrétien « est le seul endroit où les gens peuvent apporter tout leur être au travail. » En conséquence, les employés peuvent développer des liens plus profonds avec les personnes avec lesquelles ils travaillent et avoir des attentes plus élevées envers les dirigeants.

Dans un tel cadre, le mauvais management de l’équipe de travail va avoir des ramifications spirituelles, incitant les gens à se blâmer eux-mêmes ou à en vouloir aux dirigeants chrétiens qui ne représenteraient pas à leurs yeux l’attitude de Jésus.

Parler au nom de la vérité, de l’amour et de la justice

Certaines ressources chrétiennes ont pour but d’aider les pasteurs à se protéger, eux et leurs Églises, contre les ragots et les calomnies, qui selon Vanderbloemen deviennent une menace importante à l’ère de la « cancel culture » (« culture de l’annulation ») et des histoires sordides rendues virales sur les médias sociaux. « Maintenant que tout le monde a son propre réseau de diffusion […], cela pourrait creuser encore le sillon, car les ragots sont un vieux phénomène »,

Si l’Écriture pouvait inciter les gens à dénoncer les péchés des responsables devant l’Église, il n’y avait jusque-là aucun moyen de le faire instantanément devant des foules dépassant largement sa propre communauté (et les dirigeants d’alors n’avaient pas non plus la portée mondiale de certains pasteurs, auteurs et responsables de ministères populaires d’aujourd’hui).

« Je sais qu’il y a de tragiques cas d’école où “Cette personne n’a pas pu s’exprimer parce qu’elle pensait qu’elle perdrait son emploi, et le gars a pu agir pendant des années et des années comme une sorte de prédateur sexuel”. Je sais que ces histoires existent, et je ne veux pas les minimiser », déclare-t-il. « Mais je sais aussi que le pouvoir des ragots est également plus grand que jamais. Vous pouvez ruiner la vie d’une personne sans la moindre once de vérité. »

Vanderbloemen expose qu’au cours des cinq dernières années les clauses de non-dénigrement, qui faisaient généralement partie des accords de licenciement, se sont étendues pour s’appliquer également aux membres de la famille, comme un moyen de parer aux médisances, aux commérages et aux insultes sur les médias sociaux.

Selon lui, dans la plupart des cas, des erreurs ont été commises de part et d’autre et ces accords permettent aux Églises de tourner la page sans avoir à régler le conflit en public. D’un point de vue juridique, ces accords visent à protéger les deux parties de toute conséquence de la rupture : un ancien employeur ne pourra pas critiquer l’ancien salarié sur les conditions de son départ si le salarié et sa famille acceptent de faire de même.

Mais l’attention portée à l’utilisation de clauses de non-dénigrement et d’accords de confidentialité par les Églises et les ministères chrétiens soulève des inquiétudes quant à la dissimulation de fautes importantes. Vanderbloemen précise qu’« un bon accord de confidentialité comprendra toujours une clause stipulant que si quelque chose de criminel est survenu, vous avez pleinement le droit de le signaler », ce qui doit permettre de dénoncer la mauvaise gestion des fonds, les mauvais traitements ou le harcèlement sexuel.

Des Églises ont aussi été réduites au silence par des politiques de non-dénigrement ; il a fallu une nouvelle loi au Texas, adoptée à la suite d’abus chez les baptistes du Sud, pour que les Églises puissent divulguer à des employeurs potentiels, sans risquer d’être poursuivies, les raisons du départ d’un salarié ou d’un bénévole.

Karen Ehman déclare : « Donner son opinion honnête lorsqu’on vous demande des références sur quelqu’un au travail » ne relève pas de la médisance, mais plutôt d’une information utile destinée à quelqu’un qui devrait la connaître.

Mais qu’en est-il de la révélation d’informations potentiellement préjudiciables à la vue de tous vos contacts sur les médias sociaux, ou même de tout Internet ?

Certains affirment que les dirigeants qui ont abusé de leur pouvoir sont tenus à une exigence plus élevée et qu’en raison de leur influence ils doivent être interpellés en public, même s’ils se sont repentis. Glahn rappelle l’enseignement de 1 Timothée, qui recommande de dénoncer les responsables d’Église qui ont péché « devant tout le monde », en guise d’avertissement.

Mais nos motivations et nos dispositions intérieures sont des facteurs déterminants pour savoir si nous nous laissons aller à des commérages dans ce domaine. Mitchell met en garde chacun — victimes comme spectateurs — contre le fait de considérer comme une source d’amusement les feuilletons auxquels donnent lieu de telles polémiques face à un responsable.

« Les personnes vulnérables doivent continuer à faire attention à la façon dont elles parlent des puissants ; il n’y a pas là d’excuse pour agir avec bassesse », souligne-t-il. « Même les personnes abusées doivent parler en quête de vérité, d’amour et de justice, et non dans un désir de vengeance, par besoin de râler, ou même de se défouler. »

Pour avoir beaucoup étudié le fonctionnement des ragots, Mitchell entend effectivement des pasteurs dont les Églises ont été divisées par des commérages. Mais la raison pour laquelle vous avez besoin de débarrasser votre Église des ragots est d’en faire un endroit sain pour les fidèles, dit-il, et non pas pour que le pasteur n’ait pas à faire face aux critiques.

« C’est le revers du leadership chrétien. Celui qui est placé plus haut est appelé à s’abaisser davantage, et cela peut signifier prendre plus de coups que vous ne le souhaiteriez sans vous défendre, mais c’est la joie de ce leadership chrétien », dit Mitchell, qui a été pasteur de l’Église évangélique libre de Lanse en Pennsylvanie au cours des 23 dernières années.

Les pasteurs sont inévitablement confrontés à des réactions négatives et à des murmures sur les bancs d’église — une année d’exigences en matière de masques et de restrictions litigieuses sur les rassemblements l’a démontré — mais ils doivent décider quand laisser passer une remarque et quand y donner suite.

« Au cours de mes années de pastorat, j’ai entendu des critiques à mon sujet qui relevaient du commérage. J’ai généralement suivi le conseil de Charles Spurgeon selon lequel les pasteurs devraient avoir un œil aveugle et une oreille sourde, et devraient tourner cet œil aveugle et cette oreille sourde vers les personnes s’adonnant au commérage », raconte Witmer, pasteur principal de la Pepperell Christian Fellowship. « J’ai ignoré les reproches rapportés de manière anonyme ou j’ai demandé au rapporteur d’orienter les personnes à l’origine des critiques vers une conversation directe avec moi. »

Pour Heather Fulk, dans le Tennessee, la suggestion d’une ex-responsable d’Église et amie qu’elle voulait attiser les ragots sur Ramsey est encore douloureuse.

« Je réalise tout juste à quel point cela nous a fait du tort », déclarait-elle à l’approche de l’anniversaire du licenciement de son mari. Elle en est venue à se considérer comme une victime de traumatisme, encore sous le choc du licenciement brutal de son mari et dans la crainte de nouvelles représailles lorsqu’elle s’exprime sur le sujet.

Les Fulk fréquentent maintenant une nouvelle Église, après en avoir intégré un groupe de maison pour suivre ensemble le culte en ligne pendant la pandémie. Elle a pu avoir des échanges réguliers avec les pasteurs et l’équipe dirigeante sur la nécessité d’être attentifs à une bonne prise en charge des victimes d’abus.

« Nous sommes tellement habitués à utiliser un langage spirituel pour couvrir des comportements abusifs », exprime-t-elle. « C’est joli parce qu’on y a mis un verset biblique, mais maintenant je me dis : “Non, je ne pense pas que cela signifie vraiment ça”. »

Traduit par Denis Schultz

Révisé par Léo Lehmann

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Nous ramener à la maison

Méditation de l’Avent pour le 14 décembre

Christianity Today December 14, 2021

Sacrifice et salut


Introduction à la troisième semaine de l’Avent


Par l’intermédiaire des prophètes de l’Ancien Testament, Dieu décrit l’espérance du salut dans un langage et au moyen d’images poétiques. Cette semaine, nous méditons les prophéties annonçant le Messie : le serviteur, la lumière, celui que Dieu avait promis à son peuple languissant.

Lecture dans Ésaïe 12.2-6 ; 52.7-10 et Sophonie 3.14-20

Quand vous entendez l’expression « à la maison », qu’est-ce qui vous vient à l’esprit ? Pour certains, cette expression ravive des traumatismes. D’autres se sentent partagés quant à leur expérience et leurs souvenirs de la « maison ». Certains ont hâte de s’éloigner de ce lieu. D’autres ne se sont jamais sentis chez eux. Et, bien sûr, beaucoup aiment profondément leur foyer, ont hâte de rentrer chez eux. Les casaniers sont nombreux.

Avoir envie d’un chez-soi, d’un endroit auquel nous appartenons, fait partie de la condition humaine. Un endroit où l’on peut être soi-même, où l’on est connu et aimé, et où l’on se sent bien chez soi. La maison doit être un lieu de paix, où nous sommes à l’aise au lieu d’être sur nos gardes. La maison est un lieu de sécurité. En fin de compte, dans un certain sens, nous aspirons tous à être des casaniers : vivre sans connaître le fait d’être étranger.

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Dans Sophonie 3.20, le Seigneur dit : « En ce temps-là, je vous rassemblerai ; à ce moment-là, je vous ramènerai à la maison ». Dieu promet de ramener un jour à la maison son peuple dispersé à travers le monde. Cette maison est une maison de festins et de chants, à cause de tout ce que représente le salut accompli par Dieu (Ésaïe 52.9, 10). C’est une maison pleine de célébrations spontanées et ouvertes à tous. C’est une fête pour tous les âges parce que ce qui est trop beau pour être vrai est vrai (Sophonie 3.14-15). Elle est pleine de joie et de louanges. C’est un lieu de refuge, où Dieu est notre « force et notre défense » (Ésaïe 12.2). Cette maison, est un lieu sans discrimination, où les humbles, les opprimés et les exilés peuvent retrouver la place à laquelle ils se sentent le plus eux-mêmes (Sophonie 3.19-20).

Dans chacun de ces passages, Dieu parlait à un peuple particulier à un moment et à un endroit particuliers. Mais ces prophéties s’étendent également au-delà de leur contexte immédiat, car ce retour « à la maison » fait partie intégrante du salut lui-même.

Jésus fait écho à ces aspirations à un véritable foyer lorsqu’il proclame : « Si quelqu’un m’aime, il obéira à ma parole. Mon Père aussi l’aimera : nous viendrons à lui et nous établirons notre demeure chez lui » (Jean 14.23). Et plus tôt, en Jean 14.3, Jésus annonce qu’il nous prépare un lieu, une maison, juste pour nous.

Nous sommes une maison pour Dieu, une maison en Dieu, et Dieu prépare une maison pour nous. Mais cela ne concerne pas seulement un jour futur ; dès ici et maintenant, nous pouvons trouver quelque chose d’un chez-nous et être pour d’autres la maison de Dieu. Nous pouvons « annoncer de bonnes nouvelles » et inviter d’autres à se joindre à nous (Ésaïe 52.7). Qui ne voudrait pas habiter une telle maison ?

Méditez sur Ésaïe 12.2-6 ; 52.7-10 et Sophonie 3.14-20.


Comment ces prophéties élargissent-elles votre vision du salut, de ce qu’il signifie, et de ce que Jésus est venu offrir ? Comment désireriez-vous apporter cette bonne nouvelle de la possibilité d’un retour « à la maison » à d’autres ? Dans la prière, exprimez votre reconnaissance et votre adoration envers Dieu.

MARLENA GRAVES est doctorante et professeur auxiliaire en séminaire. Elle est l’autrice de plusieurs livres, dont The Way Up Is Down: Becoming Yourself by Forgetting Yourself.

Traduit par Teodora Haiducu

À quoi ressemble l’espoir

Méditation de l’Avent pour le 13 décembre

Christianity Today December 13, 2021

Sacrifice et salut


Introduction à la troisième semaine de l’Avent


Par l’intermédiaire des prophètes de l’Ancien Testament, Dieu décrit l’espérance du salut dans un langage et au moyen d’images poétiques. Cette semaine, nous méditons les prophéties annonçant le Messie : le serviteur, la lumière, celui que Dieu avait promis à son peuple languissant.

Lecture dans Ésaïe 11.1-5 et Jérémie 33.14-16

J’ai trois filles, et je les considère souvent avec émerveillement. Je ne peux tout simplement pas comprendre comment des univers entiers — la vie, l’identité et l’avenir de mes filles — sont générés à partir de la fécondation d’un ovule microscopique. Comment le miracle et le mystère de la vie humaine sont-ils possibles ? Seul Dieu le sait.

De l’époque du prophète Ésaïe à celle de Jérémie, des générations d’Israélites dans les royaumes du nord et du sud ont subi la destruction de leur terre, de leurs vies, de leurs familles et de leurs moyens de subsistance, le jugement de Dieu pour leurs péchés. Tout espoir d’une issue heureuse était perdu. Trop de générations avaient vécu la mort de mille manières différentes pour croire que la situation de leur descendants déboucherait sur autre chose. Et pourtant, ils soupiraient toujours après un sauveur pour les secourir, un messie pour les arracher aux griffes de leurs ennemis.

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Alors que l’espoir s’évanouissait, qu’ils vivaient comme des étrangers opprimés dans des empires destructeurs, le prophète Ésaïe puis le prophète Jérémie ont tous deux parlé d’espoir. À travers eux, Dieu a communiqué cette promesse d’espérance, décrite comme une petite pousse surgissant « du tronc d’Isaï », comme un « germe juste » jaillissant de « la dynastie de David » (Ésaïe 11.1 ; Jérémie 33.15).

Bien des générations ont passé avant que l’espérance promise par Dieu ne voie le jour. Et pourtant, il a accompli sa promesse, par l’avènement de notre Seigneur Jésus-Christ. Alors que des générations du peuple de Dieu se demandaient si Dieu se montrerait un jour, Jésus est venu, juste au bon moment. Jésus, qui est « notre juste Sauveur » (Jérémie 33.16), celui sur qui repose l’Esprit, plein de justice et de droiture.

Dans son humanité, Jésus est né de la semence divine confiée à Joseph et à Marie. Jésus : une petite pousse jaillissant du tronc d’Isaï qui contient tous les mondes présents et à venir, car « rien de ce qui a été créé n’a été créé sans lui » et « tout subsiste en lui » (Jean 1.3 ; Colossiens 1.17). Encore une fois, je contemple dans l’émerveillement, l’admiration,.

Tout comme je ne peux sonder la nature de l’existence miraculeuse de mes filles, je ne peux pas comprendre les mystères du salut de Dieu ou le qui, le quoi, le où ou le pourquoi du temps de Dieu. Mais je sais que Dieu tient ses promesses, dans l’histoire, envers son peuple et envers les individus. Dieu se manifeste toujours. Toujours. Il intervient au moment où nous nous y attendons le moins et d’une manière inattendue, lorsque tout espoir semble perdu. Imaginez : notre Dieu se présente comme une petite pousse verte dans une forêt entièrement ravagée. Prêtez-y attention.

Contemplez Ésaïe 11.1-5 et Jérémie 33.14-16.


Quel espoir ces passages offrent-ils ? Qu’est-ce que les destinataires originaux de ces prophéties ont pu penser ou se demander ? Priez en pensant au rameau de l’espérance et du salut que Dieu a promis à son peuple.

MARLENA GRAVES est doctorante et professeur auxiliaire en séminaire. Elle est l’autrice de plusieurs livres, dont The Way Up Is Down: Becoming Yourself by Forgetting Yourself.

Traduit par Teodora Haiducu

Le Dieu qui souffre

Méditation de l’Avent pour le 12 décembre.

Christianity Today December 12, 2021

Sacrifice et salut


Introduction à la troisième semaine de l’Avent


Par l’intermédiaire des prophètes de l’Ancien Testament, Dieu décrit l’espérance du salut dans un langage et au moyen d’images poétiques. Cette semaine, nous méditons les prophéties annonçant le Messie : le serviteur, la lumière, celui que Dieu avait promis à son peuple languissant.

Lecture dans Ésaïe 52.13-53.12

Il peut être facile de faire du sentimentalisme autour de l’Incarnation. Nous imaginons l’homme-Dieu comme un bébé avec sa mère ; nous anticipons son ministère en tant que « Merveilleux Conseiller » et « Prince de la Paix » (Ésaïe 9.6). Ce sont véritablement des aspects de l’identité et de l’humanité de Jésus, et ce sont certainement des thèmes scripturaires importants pour cette période de l’année. Mais les paroles prophétiques d’Ésaïe dans ce dernier de ses chants du Serviteur, qui décrivent un futur serviteur du Seigneur qui sera trouvé fidèle pour diriger les nations, précisent notre compréhension de la vie incarnée du Christ : Jésus est né pour souffrir et mourir.

Le chemin de Jésus vers la gloire n’avait rien d’aisé. Au lieu d’être accepté par le monde, il a été méprisé et rejeté (53.3). Au lieu d’être exalté comme roi, il a été torturé et assassiné (53.5, 9). Ce n’est pas une simple tragédie humaine : cela fait mystérieusement partie du plan divin (53.10). La souffrance volontaire du Christ révèle sa disposition à devenir non seulement notre souverain sacrificateur, mais aussi l’agneau du sacrifice.

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Cette réalité est plus qu’un concept théologique. Jésus a souffert en tant qu’être humain dans un corps physique, prenant part aux aspects les plus douloureux et les plus sombres de l’expérience humaine. Il sait ce que c’est que d’être brutalisé et humilié (52.14), opprimé et abandonné (53:8). Dans l’Incarnation, Jésus s’identifie à nous même dans nos pires formes de souffrance. La période de Noël est parfois douloureuse ou solitaire pour certains. Mais pour tous, cet aspect de la vie de Jésus peut être singulièrement réconfortant. Aucune tragédie humaine ne dépasse sa compréhension ou sa solidarité.

Mais Ésaïe précise également que l’histoire de Jésus ne se termine pas par la souffrance et la mort. Son affliction est le moyen par lequel il obtient sa victoire : « Après avoir souffert, il verra la lumière de la vie et sera satisfait » (53.11). Il y a là plus qu’une justification personnelle. En tant que serviteur juste de Dieu, Jésus établit la justice et la rédemption pour toutes les nations de la terre. En d’autres termes, Jésus prend part à notre souffrance pour que nous puissions prendre part à sa résurrection. Ses blessures rachètent les nôtres et deviennent la source même de notre guérison (53.5).

Alors que nous contemplons l’Incarnation dans toute sa beauté, nous pouvons aussi être reconnaissants pour ce qu’elle a de rugueux. Jésus est descendu du ciel, mais il est ensuite allé plus loin encore : au plus profond de la honte et de la souffrance humaines. Il a fait cela pour notre bien. Et lorsque nous le rencontrons dans nos propres souffrances, nos péchés et notre honte, nous pouvons être sûrs qu’il ne nous laissera pas là, car par ses blessures nous sommes guéris.

Méditez sur Ésaïe 52.13-53.12.


Qu’est-ce qui attire le plus votre attention dans ce passage ? Comment cette prophétie pleine de poésie approfondit-elle votre interaction avec l’Évangile ? Priez en réfléchissant à la façon dont ces sombres descriptions de ce que le serviteur souffrirait sont cruciales dans la manière dont nous célébrons l’Avent.

Quelques suggestions pour méditer en famille cette semaine

Utilisez un télescope ou des jumelles pour observer des objets lointains. Discutez de la façon dont Dieu a permis aux prophètes de l’Ancien Testament de voir ce qu’il allait faire dans le futur. Parlez de certaines des vérités que les prophètes ont annoncées au sujet de Jésus.

Éteignez les lumières de votre maison pour jouer au loup ou à cache-cache avec des lampes de poche. Amusez-vous ensemble, puis discutez d’Ésaïe 9.2 et de Jean 1.4-5, 9 et de l’identité du Christ en tant que lumière promise dans Ésaïe 9.

Quelques suggestions pour un groupe de partage ou d’étude biblique

Écoutez ensemble des extraits du « Messie » de Haendel tout en méditant les prophéties de l’Ancien Testament annonçant la venue de Jésus.

Si votre groupe se réunit le soir, sortez pour regarder les étoiles dans le ciel nocturne. Lisez Ésaïe 9.2 et Jean 1.5, puis prenez le temps de prier tout particulièrement pour ceux qui ne connaissent pas Jésus. Demandez à Dieu d’aider votre groupe à partager l’Évangile de la lumière avec ceux qui sont encore dans les ténèbres.

HANNAH KING est prêtresse et écrivaine dans l'Église anglicane d'Amérique du Nord. Elle est pasteure associée à la Village Church de Greenville, en Caroline du Sud.

Traduit par Teodora Haiducu et Valérie Dörrzapf

Voici l’Agneau

Méditation de l’Avent pour le 11 décembre

Christianity Today December 11, 2021

Péché et repentance


Introduction à la deuxième semaine de l’Avent


Jean-Baptiste a joué un rôle crucial pour préparer les croyants à la venue du Messie. Cette semaine, nous méditons ce que l'Écriture dit de la mission de Jean. Et nous réfléchissons à la manière dont ses enseignements sur le péché et la repentance peuvent s'appliquer à notre propre vie de disciples chrétiens.

Lecture dans Jean 1.29-34

L’Ancien Testament regorge de bergers. Abraham était berger, tout comme Jacob et Rachel, ou encore Moïse, le roi David ou le prophète Amos. Ce travail de berger était important parce que la communauté du peuple de Dieu dans l’Ancien Testament avait besoin de moutons. Afin d’offrir à Dieu les sacrifices prescrits, ils avaient besoin d’agneaux, de beaucoup d’agneaux.

La pensée de cet abattage d’agneaux apparemment sans fin peut être choquante pour nous. Imaginez à quel point cela devait être troublant pour ceux qui participaient à ces offrandes sanglantes ! Pourtant, à cause du péché, Dieu exigeait un sacrifice, un agneau. Mais pas n’importe quel agneau. L’agneau devait être immaculé, sans tache ni défaut (Lévitique 22.21-22). En d’autres termes, il devait être parfait.

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Même si le peuple de Dieu avait pour mission de choisir les agneaux les plus parfaits, ces agneaux n’étaient jamais assez parfaits. Leur sacrifice couvrait le péché, mais ils ne pouvaient jamais l’enlever (Hébreux 10.4). Chaque cri d’agneau sacrifié dans l’Ancien Testament était en quelque sorte un cri de langueur dans l’attente de l’Agneau parfait de Dieu.

Ce cri a perduré de génération en génération, et retentissait encore le jour où Jean-Baptiste a vu Jésus marcher vers lui et a déclaré : « Voici l’Agneau de Dieu, qui ôte le péché du monde ! » (Jean 1.29). Jean-Baptiste offrait ici une réponse à la question poignante qu’Isaac avait posée à son père Abraham bien longtemps auparavant, et qui résonnait à travers les siècles : « Où est l’agneau ? » Abraham avait répondu à Isaac : « Dieu pourvoira lui-même à l’agneau pour l’holocauste » (Genèse 22.7-8).

Là, près de la rivière, Jean-Baptiste déclare que Jésus est l’agneau auquel Dieu avait promis de pourvoir. Voici, l’Agneau de Dieu parfait, immaculé et sans tache (voir 1 Pierre 1.18-19).

Nous ne cherchons plus l’Agneau. Il est venu. Jésus-Christ est cet agneau qui a été sacrifié —crucifié— à notre place (1 Corinthiens 5.7). Il est l’agneau « transpercé pour nos transgressions » et « brisé pour nos iniquités » (Ésaïe 53.5). Jésus est l’Agneau, l’unique Agneau, qui a accompli une fois pour toutes le sacrifice pour nos péchés (Hébreux 10.12).

Jean a témoigné du fait que Jésus était « l’élu de Dieu » (Jean 1.34). Cet enfant qui est né, et que Jean a proclamé, était aussi « l’Agneau qui a été immolé » (Apocalypse 13.8). Aujourd’hui, lorsque nous adorerons le Seigneur, puissions-nous faire écho aux paroles prophétiques de Jean : Voici l’agneau ! Le précieux Agneau de Dieu !

Lisez Jean 1.29-34.


(Option : réfléchissez aussi à Jean 1.6-8 ; 1 Corinthiens 5.7 ; 1 Pierre 1.18-19.)


Comment les enseignements de Jean sur le péché et la repentance sont-ils liés à son témoignage sur Jésus ? Comment souhaitez-vous répondre à Jésus alors que vous contemplez son identité d’Agneau de Dieu ?

ANTHONY J. CARTER est le pasteur principal de l’East Point Church à East Point, dans l’état de Géorgie. Il est l’auteur de plusieurs livres, notamment Dying to Speak et Running from Mercy.

Traduit par Valérie Dörrzapf

Grâce merveilleuse et purificatrice

Méditation de l’Avent pour le 10 décembre

Christianity Today December 10, 2021

Péché et repentance


Introduction à la deuxième semaine de l’Avent


Jean-Baptiste a joué un rôle crucial pour préparer les croyants à la venue du Messie. Cette semaine, nous méditons ce que l'Écriture dit de la mission de Jean. Et nous réfléchissons à la manière dont ses enseignements sur le péché et la repentance peuvent s'appliquer à notre propre vie de disciples chrétiens.

Lecture dans Matthieu 3.1-12

L’évangéliste Matthieu situe le cadre historique du ministère de Jean-Baptiste avec ce simple marqueur temporel : « En ces temps-là » (v. 1). Il suffit de lire le chapitre précédent (ainsi que Luc 3) pour comprendre qu’il s’agit d’une époque de dirigeants mégalomanes, à l’image d’Hérode le Grand qui, dans une rage sanguinaire, fit assassiner les petits garçons de Bethléem. Après la mort d’Hérode et l’accession de son fis au pouvoir, Joseph craint toujours pour sa famille et déménage à Nazareth. « Ainsi s’accomplit cette parole des prophètes : on l’appellera le Nazaréen » (2.23).

L’Évangile de Matthieu insiste sur l’accomplissement des promesses de Dieu transmises par les prophètes. « Dieu a dit — et cela s’est accompli », souligne-t-il à maintes reprises. Cela ne va pourtant pas de soi quand la réalité visible suggère que le mal l’emporte. Quand des bébés sont assassinés des mains d’un roi mauvais, par exemple, pouvons-nous vraiment croire que le royaume des cieux s’est approché, comme le prêche Jean (3.2) ?

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Jean-Baptiste évoque la figure d’Élie dans l’Ancien Testament, vêtu de poils de chameau, mangeant des sauterelles et du miel sauvage. Elie exerçait aussi son ministère prophétique dans le contexte d’un régime politique corrompu. Le roi Achab, comme Hérode, était prêt à tuer pour son ambition. Après la victoire spectaculaire d’Elie sur les prophètes de Baal, la reine Jézabel mit à prix la tête d’Elie.

Repentez-vous, car le royaume des cieux est proche. Il y a là l’essentiel de la parole prêchée par tous les prophètes de Dieu. Et par sa grâce, cette parole nous parvient même dans les ténèbres. C’est une parole de bonne nouvelle : il se prépare un changement de régime. Cette proclamation, prêchée à la fois par Jean et par Jésus, annonce qu’un autre roi montera sur le trône. Comme le prophète Ésaïe lui-même l’a déclaré des centaines d’années plus tôt, le règne de ce roi, contrairement à celui du roi Achab ou du roi Hérode, sera un règne de paix (Ésaïe 9.6-7).

Suivre le roi Jésus, ce n’est pas simplement être sauvé par lui ; c’est être changé par lui. Selon Paul, l’Évangile affirme que Jésus « s’est livré pour nous afin de nous délivrer de toute désobéissance et de faire de nous, en nous purifiant ainsi, un peuple qui lui appartienne et qui mette toute son ardeur à accomplir des œuvres bonnes » (Tite 2:14).

Nous connaissons l’action de la grâce merveilleuse, salvatrice, purificatrice, lorsque le peuple de Dieu se détourne du péché et s’abandonne entièrement à Dieu. Si l’Avent marque l’avènement de de la lumière, la repentance est l’habitude quotidienne qui nous permettra de marcher dans cette lumière.

Méditez Matthieu 3.1-12.


Qu’apporte le contexte de la proximité du royaume des cieux (v. 2) à l’appel à la repentance proclamé par Jean ? Que révèle cette déclaration au sujet de Jésus ? Comment cela enrichit-il votre compréhension de l’Évangile ? Et de la grâce purificatrice ?

JEN POLLOCK MICHEL est une écrivaine, une animatrice de podcasts et une conférencière basée à Toronto. Elle est l’autrice de quatre livres, dont A Habit Called Faith et Surprised by Paradox.

Traduit par Valérie Dörrzapf

De sévères bonnes nouvelles

Méditation de l’Avent pour le 9 décembre

Christianity Today December 9, 2021

Péché et repentance


Introduction à la deuxième semaine de l’Avent


Jean-Baptiste a joué un rôle crucial pour préparer les croyants à la venue du Messie. Cette semaine, nous méditons ce que l'Écriture dit de la mission de Jean. Et nous réfléchissons à la manière dont ses enseignements sur le péché et la repentance peuvent s'appliquer à notre propre vie de disciples chrétiens.

Lecture dans Luc 3.7-18

Le sermon enflammé de Jean-Baptiste sur la repentance n’est pas « l’ABC de l’Évangile » que l’on peut entendre dans beaucoup de nos Églises évangéliques. Jean ne veut pas simplement que les gens admettent leurs péchés, croient en Jésus et confessent leur foi en lui. Selon le baptiseur, la repentance initie un changement de vie. Aimer les pauvres ! Être honnête ! Mener ses affaires avec intégrité ! Il n’y a pas de place ici pour la religiosité à bon marché. Recevoir le baptême de Jean, c’est se soumettre à une purification spirituelle et morale. Et selon Luc, ce sont là des paroles de « bonne nouvelle » (v. 18) !

Obéir à Dieu a toujours été au cœur de la vocation d’Israël. Leur statut ne dépendait pas de leurs performances religieuses. Mais à l’inverse, leur identité en tant que possession chérie de Dieu constituait le fondement de leur vocation à l’obéissance. À travers la famille d’Abraham, le peuple de Dieu devait représenter Dieu dans le monde : sa sainteté, sa miséricorde, son amour inébranlable et sa fidélité. « Vous serez pour moi un royaume de prêtres et une nation sainte », dit Dieu à Moïse avant de lui donner les dix commandements (Ex 19.6). Mais Israël a failli à cette vocation, est tombé dans l’idolâtrie et a été chassé de la Terre Promise.

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Bien que le peuple de Dieu ait fini par retourner dans son pays, l’occupation romaine était toujours synonyme d’exil. Ainsi, lorsque Jean parlait de repentance, de retour, cela évoquait pour Israël les bénédictions de Dieu et sa vocation — et des foules affluaient pour l’écouter.

La réponse enthousiaste au langage caustique de Jean semble surprenante. Le baptiseur n’est pas un télévangéliste de pacotille. Sa prédication ne consiste pas à apaiser ses auditeurs par des platitudes. Il ne colporte pas une morale facile et ne joue pas avec la « colère à venir » de Dieu (Luc 3.7). Il parle clairement : chacun de vous est coupable de péchés, et les péchés seront jugés. Dans notre culture imbue d’amour propre, on peut se demander qui accepterait ce franc-parler spirituel. Mais si le cancer vous ronge les poumons, vous voulez qu’il soit trouvé et enlevé. Pour reprendre les mots de Jean-Baptiste, la santé spirituelle n’est pas possible sans « hache » (v. 9).

Il y a de l’amour dans cet avertissement, de la compassion dans cette sévérité. Il y a aussi de l’espoir au-delà des efforts personnels. Dieu allait envoyer un autre baptiseur (v. 16) qui rendrait possible la véritable repentance. « Si on me dit encore et encore de me repentir, de changer, d’orienter ma vie vers Dieu, rien ne se passera jamais », écrit Fleming Rutledge dans le livre Advent. « Je n’ai pas besoin d’entendre des exhortations à me repentir. J’ai besoin d’une puissance extérieure à moi-même pour me rendre différent ». Quand le Messie viendra, il baptisera ses disciples par son Esprit et ne laissera aucun d’eux inchangé.

Méditez Luc 3.7-18.


En quoi le message confrontant de Jean est-il une « bonne nouvelle » ? Que pourriez-vous avoir besoin d’entendre dans les paroles de Jean ? Priez et demandez au Saint-Esprit d’agir en vous et de produire des fruits dans votre vie qui reflètent votre repentance.

JEN POLLOCK MICHEL est une écrivaine, une animatrice de podcasts et une conférencière basée à Toronto. Elle est l’autrice de quatre livres, dont A Habit Called Faith et Surprised by Paradox.

Traduit par Valérie Dörrzapf

Books

Les chrétiens d’Haïti inquiets autour de la libération des missionnaires kidnappés

La façon dont l’ensemble des 17 missionnaires de Christian Aid Ministries seront finalement libérés pourrait augmenter les risques encourus par les croyants locaux et les travailleurs étrangers.

Des Haïtiens s’agenouillent devant le ministère de la Justice pour exiger la démission du ministre Liszt Quitel pour protester contre les enlèvements à Port-au-Prince, Haïti, le 26 octobre 2021.

Des Haïtiens s’agenouillent devant le ministère de la Justice pour exiger la démission du ministre Liszt Quitel pour protester contre les enlèvements à Port-au-Prince, Haïti, le 26 octobre 2021.

Christianity Today December 8, 2021
Odelyn Joseph / AP Photo

Trois des missionnaires enlevés le 16 octobre viennent d’être libérés ce dimanche 5 décembre. La libération de deux autres avait déjà été annoncée le 21 novembre dernier. Douze d’entre eux restent donc entre les mains de leurs ravisseurs.

Alors que des mois de violence et d’enlèvements quotidiens continuent à ravager Haïti, les habitants tentent de garder le moral : « La personne moyenne vit dans la crainte et les tremblements », rapporte Edner Jeanty, directeur exécutif du Barnabas Christian Leadership Center dans la capitale, Port-au-Prince. « Beaucoup plaisantent en disant que l’espérance de vie des Haïtiens est désormais de 24 heures, renouvelée chaque matin. »

La formule prête à sourire, mais elle est malheureusement très réelle pour beaucoup. Un mois et demi après que l’enlèvement de 17 missionnaires américains et canadiens a attiré une fois de plus l’attention internationale sur la nation insulaire des Caraïbes, peu de choses ont changé pour les résidents de la grande région de Port-au-Prince. Une pénurie de carburant causée par les gangs a rendu la vie quotidienne presque impossible. Ceux qui sortent sont victimes d’enlèvements et de violences, qu’ils en fassent directement l’objet ou en soient témoins.

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Au milieu des crises de sécurité et d’approvisionnement en carburant qui s’entremêlent, la fréquentation a chuté dans les Églises haïtiennes et certaines communautés ont cessé les services du soir. Il y a quelques semaines, un débat a éclaté après que plusieurs pasteurs ont encouragé les participants à apporter des machettes avec eux à l’église.

« C’est un drame haïtien, mais en réalité, c’est l’aboutissement d’années de négligence, d’abus et de pillage de la part d’un petit groupe de dirigeants nationaux avec la complaisance de la communauté internationale », estime Edouard Lassegue, vice-président de Compassion International pour les régions d’Amérique latine et des Caraïbes.

« Bien que je ne veuille pas cautionner ces actes de violence, je ne veux pas non plus les voir comme des événements isolés. Il s’agit d’une réaction brutale à des décennies d’abus », affirme-t-il. « Ces gangsters étaient autrefois payés par des personnes clés des secteurs économiques et politiques de la société haïtienne. Ils ont maintenant retourné leurs armes contre leurs bailleurs de fonds. »

« Un paysage sécuritaire qui se dégrade »

Bien que l’attaque du gang 400 Mawozo contre les employés de Christian Aid Ministries (CAM), détenus depuis mi-octobre avec des demandes de rançon d’un million de dollars par personne, ait attiré l’attention du monde, elle fait partie d’une escalade plus large de violences et d’enlèvements qui ne sont pas médiatisés.

Le Séminaire Théologique Évangélique de Port-au-Prince (STEP) a été contraint de quitter son campus il y a un an après que des gangs ont commencé à occuper son tout nouveau bâtiment qui a remplacé celui perdu lors du tremblement de terre de 2010. En septembre dernier, un diacre a été tué et sa femme enlevée alors qu’ils se rendaient le dimanche à la Première Église Baptiste de Port-au-Prince. Plus récemment, un coordinateur étudiant du STEP conduisait sa famille à la maison lorsque des membres d’un gang ont ouvert le feu sur sa voiture, tuant son fils de sept ans. Il y a quelques semaines encore, un gang a détourné un bus avec au moins 50 personnes à bord et a exigé un demi-million de dollars pour chaque passager.

« Les Haïtiens sont des gens résilients. Ils ont vécu des catastrophes naturelles et ont des conditions de vie difficiles. Mais les enlèvements et l’extorsion [qui] s’ensuit pèsent d’un poids très lourd lorsqu’une rançon va [de dizaines à des centaines] de milliers de dollars », explique David Shedd, ancien agent de la CIA et conseiller exécutif de VDI, un cabinet de conseil en sécurité régionale respecté par les missionnaires américains. « Pour ceux qui vivent en dessous du seuil de pauvreté, [une rançon] bouleverse la vie. Ils ne se remettront jamais du paiement. »

La situation sécuritaire en Haïti a commencé à s’effondrer lorsque les Casques bleus de l’ONU sont partis en 2019, dit Shedd. Peu de temps après, un grand nombre d’officiers de la police nationale haïtienne ont fait défection et de riches Haïtiens ont commencé à s’entendre avec des gangs, embauchant leurs membres pour les protéger.

Aujourd’hui, les gangs de la région de Port-au-Prince travaillent ensemble de manière informelle pour délimiter le territoire afin d’éviter de s’entretuer. Ils aident également leurs membres à éviter les points de contrôle de la police nationale et à se déplacer facilement dans la ville d’environ un million d’habitants. Les gangs continuent souvent à enlever des personnes dans des quartiers de la ville qui échappent au contrôle des autorités.

« Je ne pense pas qu’il y ait une prise de conscience suffisante du pouvoir énorme et vicieux que ces gangs exercent », déclare Shedd.

Au-delà de la dégradation de la sécurité dans le pays, les gangs ont également provoqué une crise du carburant. Pendant des semaines, des hommes armés ont empêché les camions de faire des livraisons de diesel aux stations-service, avant qu’un chef de gang bien connu, surnommé Barbecue, n’autorise la distribution de carburant tout en exigeant la démission du Premier ministre Ariel Henry. Dépourvus de réseau électrique stable et largement tributaires de générateurs, les hôpitaux ont été contraints de refuser des patients, les banques ont fermé leurs portes, les écoles n’ont ouvert que quelques jours par semaine et le service Internet est devenu instable. D’autres ressources vitales étaient également menacées, car les pompes à eau potable du pays fonctionnent grâce au carburant alors bloqué.

Il y a des années, de nombreux gangs finançaient principalement leurs opérations en détournant l’aide internationale. Bien que les enlèvements n’aient pas été rares avant 2021, il y a eu 20 fois plus d’enlèvements cette année qu’en 2018, déclare Jonathan D. VerHoeven, directeur de l’analyse pour Concilium, une organisation qui aide les ministères chrétiens internationaux à évaluer les risques.

« Réaliser un enlèvement de masse de 17 personnes indique qu’un gang se sent très à l’aise », développe VerHoeven. « L’environnement sécuritaire ne peut que se dégrader lorsque l’on peut s’en tirer ainsi ».

Ce que retiendront les Haïtiens ordinaires et ceux qui s’en prennent à eux, c’est que les criminels ne subissent aucune conséquence pour leurs actes.

« Ce climat de terreur traumatise les gens qui ne peuvent pas obtenir leurs médicaments, ne peuvent pas aller à l’école, ne peuvent pas quitter la région », rapporte Jeanty. « Les personnes liées aux victimes sont sous pression. Les familles et les amis sont obligés d’emprunter pour payer la rançon. »

Au-delà des prouesses militaires des gangs — dont la puissance de feu surpasse celle de la police — la crise constitutionnelle toujours en cours suite à l’assassinat du président Jovenel Moïse en juillet fait qu’il n’y a pas de véritable gouvernement en place pour soutenir les forces de l’ordre.

Ainsi, de douloureuses conséquences pourraient accompagner la libération des missionnaires kidnappés, soulignant la complexité et la fragilité de la situation sécuritaire en Haïti.

« Si l’argent de la rançon est payé, [alors] le gang devient plus puissant et notre économie devient encore plus malsaine. Si la police nationale mène une opération, elle pourrait échouer (comme d’autres auparavant) et le gang sera [alors] perçu comme plus puissant encore qu’avant », expose Jeanty. « Si une opération spéciale libère avec succès les otages [mais que] les principaux dirigeants du gang ne sont pas traduits en justice, la nation pourrait manquer une occasion de connaître la vérité sur la source de notre insécurité. »

Professeur de théologie au STEP, Andrikson Descollines estime que « l’inefficacité de la police nationale à apporter une réponse appropriée aux activités des gangs » augmentera le risque pour les Haïtiens plus que la future libération des missionnaires eux-mêmes. « Si le gouvernement n’est pas en mesure d’empêcher les armes à feu et les munitions d’entrer dans le pays, ne peut pas sécuriser nos frontières et nos douanes, fournir du matériel et des équipements appropriés à la police, les choses vont empirer pour tous les groupes sociaux en Haïti. »

Le paiement des rançons réclamées enverrait un message clair aux gangs : le crime paie. « Si la rançon est payée, la peur que personne ne soit en sécurité augmentera de façon exponentielle », déclare Shedd. « Si au lieu de cela des mesures de sécurité sont appliquées pour éliminer le gang et sauver tous les otages (ou la majorité d’entre eux), cela enverrait un message très différent selon lequel, en réalité, le monde se soucie de ce qui se passe [et] il y a un moyen de sortir de ce qui semble être un gouffre sans fond de criminalité. »

Mais le message d’impunité semble déjà être diffusé çà et là. Alors que les derniers enlèvements paraissent avoir finalement attiré l’attention du gouvernement américain, on ne sait pas si cela durera au-delà de la fin de cette affaire en particulier. L’enlèvement d’un pasteur américain de 79 ans début octobre avait été peu médiatisé. (Jean Pierre Ferrer Michel et un fidèle ont finalement été libérés après qu’au moins 300 000 $ de rançon aient été payés.)

Shedd pense qu’aucun changement systémique ne se produira à moins que les États-Unis ne s’engagent à former la police nationale pour répondre efficacement aux enlèvements.

« Je pense que les gangs criminels comptent sur les États-Unis pour répondre [à l’enlèvement des missionnaires de CAM], mais ne s’attendent pas vraiment à un engagement à long terme pour faire régner l’ordre ou donner au gouvernement haïtien les moyens de fonctionner ».

Qui reste, qui part…

Les enlèvements de ces missionnaires ont rappelé cette vérité au monde entier : les responsables d’Église et les employés des organisations confessionnelles ne sont pas intouchables. L’instabilité persistante a déjà conduit de nombreux expatriés à quitter le pays. World Vision, par exemple, a évacué tout son personnel international d’Haïti.

Concilium utilise une question primordiale pour les ONG chrétiennes qui se demandent s’il faut ou non continuer à travailler dans un pays donné : pouvez-vous y exercer un ministère efficace ? « Que croyez-vous que Dieu vous a appelé à faire en Haïti ? Votre présence ajoute-t-elle du stress à vos partenaires locaux ou les aide-t-elle ? » explique VerHoeven.

À l’heure actuelle, pour de nombreux ministères chrétiens expatriés, la réponse à la première question est non. Concilium travaille actuellement avec ceux qui tentent de quitter le pays pour l’instant, mais envisagent d’y retourner dans un avenir proche. Mais tout le monde ne le fera pas.

Luke Perkins, un missionnaire américain qui travaille au STEP, estime que 85 % des missionnaires en Haïti sont partis au cours des trois dernières années.

« Certains missionnaires voient la douleur que subissent les enfants haïtiens innocents comme un plus grand danger que la menace à laquelle ils sont exposés lorsqu’ils sont ici avec nous pour nous aider. Cet acte horrible ne dissuadera donc pas ce genre de missionnaires de poursuivre leur appel pour nous aider », déclare Guenson Charlot, président de l’Université Emmaüs à Acul du Nord, près de la côte nord. « D’autres missionnaires et agences missionnaires ont leur sécurité personnelle pour principale préoccupation. Ceux-là ne sont là que lorsque les choses sont calmes et sûres et se mettront en sécurité au premier signe de menace potentielle pour leur propre vie. »

Après plus d’une décennie de ministère en Haïti, David Vanderpool, missionnaire dans le domaine médical, connaît de première main la brutalité et la violence des gangs. En 2015, des membres d’un gang ont violemment battu sa femme lors d’une tentative d’enlèvement, et il y a quelques années, des membres d’un gang ont assassiné le gestionnaire de sa base. Le gang des 400 Mawozo a également kidnappé deux membres de l’équipe de Vanderpool, des ressortissants étrangers, et les a détenus contre rançon. Ces hommes ont enduré quatre jours de torture, sans nourriture et avec peu d’eau, avant d’être finalement libérés.

Au cours des dernières années, les gangs laissaient en grande partie les Américains tranquilles. Ce n’est plus le cas.

« Cela a vraiment représenté un tournant que [400 Mawozo] se montre aussi audacieux, kidnappant des femmes et des enfants en plein jour. Ces missionnaires sont dans une situation critique, avec un gang très agressif, violent et malfaisant », affirme Vanderpool, fondateur et PDG de LiveBeyond.

À la fin du mois de novembre, le département d’État américain a exhorté avec véhémence Vanderpool et d’autres Américains à quitter Haïti, ce qu’il a accepté de faire.

« Il n’y a absolument aucune raison pour qu’un Américain ait besoin d’être en Haïti en ce moment. Le département d’État a beaucoup plus d’informations que nous, donc s’ils disent que ça va empirer, ça va probablement empirer », explique Vanderpool. « Les ministères doivent être dirigés par des gens du pays. C’est tout simplement trop dangereux pour les étrangers d’être là en ce moment. »

Les efforts de LiveBeyond pour répondre aux besoins médicaux, éducatifs et spirituels se poursuivront via son personnel haïtien, dans la mesure des stocks disponibles. On peut toutefois se demander si la situation est plus sûre pour les travailleurs locaux.

Compassion International, dont le ministère en Haïti n’emploie que des Haïtiens, a délocalisé une grande partie de son personnel en dehors de la région de la capitale. Les augmentations des prix du gaz et des denrées alimentaires ont augmenté les coûts d’exploitation. Même avant la récente flambée d’enlèvements, la pandémie a éloigné du pays de nombreuses équipes de mission à court terme, dont les frais de voyage aident souvent à financer le travail des ministères locaux.

En plus du stress auquel ils font face en raison de leurs ministères, de nombreux habitants sont confrontés à des choix difficiles dans la vie quotidienne, comme pour leur utilisation de leur carburant, avec par exemple la décision de savoir s’il vaut mieux aller faire les courses ou se rendre à l’église.

« La façon dont on vit chaque jour est complètement folle. Vous commencez à perdre toute vision du monde à long terme parce que n’importe quel jour pourrait être le dernier », explique Anna Hampton, autrice de Facing Danger : A Guide Through Risk (« Faire face au danger : un guide pour gérer le risque »), sur la base de ses décennies de ministère en Afghanistan et dans d’autres pays d’Asie centrale et du Moyen-Orient.

« Le risque est qu’ils pourraient renoncer à la vie. Lorsque vous vous sentez isolé, résigné à tout ce qui vous arrive et n’avez pas d’espoir en Jésus, alors vous abandonnez ou vous adoptez une mentalité de “Je peux faire ce que je veux” », développe-t-elle. « Alors vous faites des choses à d’autres gens au nom de la survie. On prie que le Seigneur soit là… mais cela ne veut pas dire que vous aurez du pain pour la journée ».

L’Église haïtienne a longtemps lutté avec une certaine passivité envers les événements sociaux et politiques en raison d’un enseignement théologique qui définissait étroitement ce qui relève du spirituel et à cause d’un gouvernement longtemps hostile aux évangéliques, relate Lassegue. Mais depuis le tremblement de terre de 2010, les chrétiens haïtiens réfléchissent de plus en plus à leur responsabilité envers la société.

« Alors que la Bible était utilisée auparavant pour justifier une position isolationniste, on entend aujourd’hui de nombreux sermons sur la nécessité d’être sel et lumière dans ce monde. Des passages comme Jérémie 29.7 et Matthieu 5.13 sont souvent cités et prêchés », rapporte-t-il. « J’espère que cela entraînera un changement tangible dans le pays. Priez pour que l’Église haïtienne et les chrétiens haïtiens prennent conscience des possibilités et de la responsabilité que nous avons devant nous. »

Traduit par Kervenly Calasse

Révisé par Léo Lehmann

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