« Maudis donc Dieu et meurs ! » Pourrions-nous aussi comprendre la femme de Job ?

Ses paroles lui ont valu bien des condamnations, mais elles nous encouragent à prêter plus d’attention aux proches de ceux qui souffrent, comme à ces derniers.

Christianity Today January 26, 2023
Illustration by Mallory Rentsch / Source Images: WikiMedia Commons / Getty / Unsplash

Après une première en 2021 (retrouvez ici l'article gagnant), a eu lieu en 2022 la seconde édition de notre concours d'écriture destiné aux chrétiens francophones du monde entier.

Un grand merci à tous les participants qui ont nourri ce concours de leurs précieuses idées ! Nous avons soigneusement examiné les textes reçus et les avons fait évaluer anonymement par une équipe de trois nouveaux juges :

• Lesly Jules, États-Unis/Haïti : Apologète, auteur de « Objections Rejetées : Une Approche Apologétique Classique » et spécialiste en management.

• Marjorie Legendre, France : Pasteur en région parisienne et professeur d'éthique à la Faculté libre de théologie évangélique de Vaux-sur-Seine (FLTE).

• Fara Daniel Tolno, Guinée : Pasteur et professeur d’apologétique et de missiologie à l’Institut de théologie évangélique de Conakry (ITEC)

Nous remercions chaleureusement chacun d'eux pour leur précieuse contribution !

Aujourd'hui, nous sommes ravis de présenter l'article vainqueur à nos lecteurs, et nous adressons toutes nos félicitations à la gagnante, Mélodie Kauffmann, qui nous écrit de France !

Vous pouvez retrouver toutes les informations sur la possibilité d'écrire pour nous sur notre page dédiée.

Morgan Lee, CT Global managing editor, États-Unis (Hawaï)
Léo Lehmann, directeur éditorial pour le français, Belgique

Après avoir vu son mari perdre sa fortune, sa famille et sa santé, Madame Job est à bout. « Tu restes ferme dans ton intégrité », dit-elle à son mari. « Maudis donc Dieu et meurs ! »

Madame Job… Elle en a choqué plus d’un ! Certains commentateurs et prédicateurs ne sont pas tendres avec elle : une femme faible, amère, aigrie, qui pousse son mari à blasphémer, voire carrément un « instrument de Satan », comme le dit Calvin dans l’un de ses sermons sur le livre de Job.

Pourtant, du fait de ma profession d’infirmière, son cri m’évoque une autre souffrance bien réelle, même si elle aussi peine parfois à être entendue : la profonde souffrance des proches du malade.

« Tu demeures ferme dans ton intégrité ! Maudis donc Dieu et meurs ! » (Job 2.9) Replaçons un peu les paroles de Madame Job dans leur contexte.

Ces quelques mots sont la seule intervention de la femme de Job qui nous soit rapportée. C’est la seule fois qu’elle apparaît dans ce livre, plutôt long par ailleurs. On ne sait pas grand-chose sur elle. Même son prénom nous est inconnu.

On sait pourtant que c’est la femme du « héros ». Un homme décrit comme « intègre et droit », qui « craignait Dieu et s’écartait du mal » (1.1). Très (très) riche, une dizaine d’enfants, il était « le plus grand de tous les fils de l’Orient » (1.3).

Au moment où commence l’histoire, le narrateur nous le présente clairement comme un homme à la fois respectable et respecté.

On peut donc en déduire que Madame Job est une femme de la haute société, probablement aussi influente que son riche mari. Mère de famille nombreuse, gérante de la maisonnée, elle est habituée à un certain style de vie. On ne connait pas son degré de foi, mais rien ne laisse à penser qu’elle ne respecte pas le Dieu de son mari, et ne suit pas ses pratiques religieuses.

Et soudain, en quelques versets, son mari va perdre coup sur coup ses troupeaux et ses richesses (et avec ça son statut social et son pouvoir), ses enfants, ses serviteurs, et enfin sa santé :

« Alors Satan infligea à Job une douloureuse maladie de peau qui s’étendit de la plante des pieds jusqu’au crâne. Job prit un morceau de poterie pour se gratter, et resta assis au milieu de la cendre. » (Job 2.7-8)

Pour lui, l’expression « pauvre comme Job » ne se limite pas à sa situation financière. Sa souffrance est totale : physique, morale et spirituelle.

Et son épouse est à ses côtés. Au même titre que son mari, elle a sa part de perte à gérer, et un long processus de deuil à parcourir. Elle aussi a perdu ses enfants ! Rien d’étonnant donc à ce qu’elle puisse être révoltée et en colère contre Dieu, comme d’ailleurs Job le sera aussi quelques chapitres plus loin.

Le « détail » qui la différencie de Job, c’est la maladie. Job souffre dans sa chair. Pas elle. Mais cet élément change beaucoup de choses. Il lui épargne bien sûr certaines souffrances physiques, mais il la place aussi dans une situation similaire à celle de ceux qu’en France nous appelons « aidants » : un membre de la famille (souvent le conjoint ou l’un des enfants) qui devient à la fois infirmier(e), assistant(e) social(e), auxiliaire de vie, accompagnateur, etc.

La chose est en réalité universelle, et on retrouve bien dans la Bible cette culture du soutien familial. Dans le Nouveau Testament par exemple, ce sera chez sa fille et son beau-fils que la belle-mère de Pierre trouvera les soins dont elle a besoin (Lc 4.38-39). Face à de lourdes pathologies, ce genre de situation peut se transformer en un job à temps plein, sans temps mort, 24 h/24 h.

Comme si le tsunami qui vient de heurter sa vie et son couple ne suffisait pas, la femme de Job doit gérer le fait de voir son mari souffrir le martyr, probablement sans rien pouvoir faire pour le soulager. Cette impuissance qui tord les boyaux face à un proche atteint d’une pathologie longue, douloureuse, invalidante, est terrible elle aussi. Elle donne la rage. Contre le monde entier.

« Tu demeures ferme dans ton intégrité ! Maudis donc Dieu et meurs ! » Quel désespoir, quelle colère derrière ces deux phrases !

Je suis révoltée par le cynisme de certains qui, comme l’original anglais du commentaire biblique de Matthew Henry, ne seraient pas loin de penser que si Satan a tout ôté à Job sauf sa femme, c’est pour lui laisser un tourment supplémentaire. On pourrait de nos jours également soupçonner un intérêt financier de la part de quelqu’un évoquant trop ouvertement la mort d’un proche : la chose est évidemment impossible dans le cas de Madame Job. Son mari a tout perdu. Elle n’a aucun intérêt économique à ce qu’il meure. Elle n’aurait plus aucune perspective.

Dans ses mots terribles, peut-être est-elle simplement une femme impuissante, qui ne supporte pas de voir son mari souffrir autant. Et ça, c’est de l’amour. Maladroit, mal placé, sans recul… Peut-être. Mais de l’amour. Ou au moins de la compassion. Elle le pousserait à mettre fin à ses jours rapidement plutôt que d’agoniser pendant longtemps. Histoire d’en finir.

Par sa réaction, même difficile à entendre, Madame Job nous pousse à nous pencher sur la question des proches du malade, qui souffrent aussi, mais autrement. Son « mets fin à tes souffrances » exprimerait-il, même maladroitement, quelque chose des émotions complexes qui peuvent parfois les traverser ? Sans préjuger d’un quelconque passage à l’action, pourrions-nous l’entendre ? Il est précieux que les proches du malade puissent aussi être entendus par ceux qui les entourent. Que leurs propos soient ou non aussi radicaux que ceux de Madame Job, eux aussi ont besoin d’être accompagnés.

Ce « mets fin à tes souffrances » m’évoque aussi la question contemporaine de l’euthanasie. Il ne s’agit pas ici de justifier le geste, ni d’en tirer une éventuelle législation (l’euthanasie est interdite en France), mais plutôt d’entendre et comprendre l’émotion qui se cache derrière.

Madame Job est profondément humaine et, à ce titre, ses émotions devraient être entendables.

Job réagit vivement à ce que dit sa femme, comme nous peut-être, mais Dieu, lui, ne fera aucun commentaire à son propos. Dans tout cela, « Job ne pécha pas dans ses paroles », nous dit le texte (v. 10). Dieu ne condamne pas non plus les propos de sa femme, alors qu’il réprimandera sévèrement les amis de Job pour leurs discours (Job 42.7-9).

Je crois possible de discerner dans ce silence et ce non-jugement de Dieu qu’il entend et respecte la douleur de l’aidante principale. Il accueille ses émotions, son humanité et ses limites. Il offre par là peut-être simplement un espace pour la réflexion et ouvre à un autre éclairage sur cette question sensible de la souffrance et de la fin de vie.

Nombreuses sont les questions d’éthique qui suscitent en nous de vives réactions, voire d’immédiates condamnations. Quel que soit le sujet, avant de monter au créneau en brandissant farouchement des interdits et des jugements, ne faudrait-il pas prendre un peu de recul, et essayer de comprendre les émotions qui habitent ceux que nous jugeons si facilement ?

L’exemple de Dieu dans ce passage a de quoi nous inspirer. Il vaut souvent mieux se taire dans un premier temps plutôt que d’envenimer conversations et relations ; prendre le temps de discerner ce qui se cache derrière certaines positions.

Dans mon travail, je me rends bien compte que lorsque les gens évoquent pour eux-mêmes la possibilité de l’euthanasie, ce n’est que rarement parce qu’ils ont envie de mourir, pas plus que leurs proches n’ont envie de les voir partir.

Ils ont souvent plutôt peur : peur de souffrir, de vieillir, etc. Ou ils souffrent déjà et ont envie que cela s’arrête. La mort apparaît comme la seule solution. Si cette réalité peut être verbalisée, la conversation peut s’orienter autrement, et s’enrichir. On quitte la binarité d’un débat qui ne connaîtrait que « c’est bien » et « c’est mal » pour entrer véritablement dans le vécu de ceux avec qui nous voulons cheminer. Le patient, les proches et le personnel médical ont alors la possibilité d’envisager ensemble d’autres options dans la diversité des formes d’accompagnement de la souffrance et de la fin de vie.

De nombreux textes bibliques, que cela soit dans les Psaumes ou les écrits des prophètes, nous laissent voir que Dieu est prêt à entendre bien des choses, alors même qu’elles titillent nos oreilles et nous dérangent. La souffrance s’exprime parfois violemment, ou dans des termes qui nous heurtent. Qu’il s’agisse des malades ou de ceux qui les entourent, quelle oreille offrons-nous à ceux qui souffrent ? Écouter vraiment, pour essayer de comprendre, ne nous engage pas à cautionner les choix qui pourraient être posés.

Cette brève intervention de Madame Job, la révolte qu’elle exprime, a quelque chose de très humain qu’il nous serait dommageable de rejeter d’emblée. Quoi que l’on en fasse au bout du compte, nous avons besoin de l’entendre, pour mieux comprendre nos propres histoires, et celles de ceux qui nous entourent. Ce livre de Job nous parle de crise, de perte, de deuil, de maladie, des réactions qui s’ensuivent, mais aussi de l’accompagnement par les proches, l’épouse ou les amis dans les moments les plus difficiles.

Et Dieu ? Malgré son long silence, il est là dans sa grâce, prêt à entendre notre tristesse, notre colère, notre impuissance et notre souffrance.

Mélodie Kauffmann est infirmière en soins intensifs de cardiologie à Strasbourg. Elle suit en parallèle des cours à la Faculté libre de théologie évangélique de Vaux-sur-Seine (FLTE)

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Books

Attaque terroriste contre une Église congolaise et appel au soutien des chrétiens

Dans un Congo en proie à de nombreux troubles, un groupe rattaché à l’État islamique frappe des chrétiens pentecôtistes dans la ville de Kasindi.

Conséquences d’une attaque terroriste des ADF contre une Église pentecôtiste à Kasindi, dans la province du Nord-Kivu de la République démocratique du Congo (RDC), le 16 janvier 2023.

Conséquences d’une attaque terroriste des ADF contre une Église pentecôtiste à Kasindi, dans la province du Nord-Kivu de la République démocratique du Congo (RDC), le 16 janvier 2023.

Christianity Today January 23, 2023
Zanem Nety Zaidi/Xinhua/Getty Images

Des chrétiens congolais lancent un appel à l’aide.

Dans une nouvelle attaque contre des civils en République démocratique du Congo (RDC), un attentat terroriste a tué 14 personnes et en a blessé 63 autres lors d’un culte de baptêmes dans une Église pentecôtiste à Kasindi. Située dans la province montagneuse du Nord-Kivu, à la frontière avec l’Ouganda, la région du nord-est est déjà officiellement en « état de siège », statut similaire à l’état d’urgence, depuis 2021.

« L’est du Congo est devenu un théâtre de l’extrémisme violent », rapporte Eale Bosela, directeur régional de l’Association pour l’éducation théologique chrétienne en Afrique. « Les gens sont massacrés comme des animaux. »

L’attentat à la bombe a été imputé aux Forces démocratiques alliées (ADF), un groupe affilié à la province d’Afrique centrale de l’État islamique, qui en a revendiqué la responsabilité. Formé à son origine en 1995 de rebelles djihadistes et d’insurgés, il s’agit de l’un des plus de 120 groupes armés du Nord-Kivu.

De nombreux Congolais étaient confus et troublés.

« Comment une telle situation peut-elle se produire », demande Kiza Kivua, un agriculteur de 50 ans qui a perdu son frère dans l’attaque, « alors que Kasindi est remplie de soldats ? »

Avec un nombre de combattants estimé à 500 ou plus, les ADF étaient autrefois principalement motivées par leur opposition à Yoweri Museveni, président de l’Ouganda depuis 1986. Poussé au-delà de la frontière, le groupe armé compte désormais une majorité de membres congolais et de nombreuses recrues étrangères.

Un ressortissant kenyan a été arrêté par la RDC dans l’enquête sur cet attentat.

« Comme tant d’autres groupes, les ADF ont trouvé refuge dans la région », explique Scott Morgan, président du groupe de travail Afrique de l’International Religious Freedom Roundtable. « Mais à présent, ils ont adopté pour principe de s’attaquer aux chrétiens. »

Ils ne sont pas les seuls.

D’autres groupes armés comme le M23 et la CODECO ont attaqué des Églises, rapporte Scott Morgan, également analyste pour Militant Wire. Mais les ADF ont été parmi les plus belliqueux. La Conférence épiscopale nationale du Congo a comptabilisé 6 000 civils tués, 7 500 kidnappings et 3 millions de déplacés depuis 2013. Un rapport des Nations Unies dénombrait 370 civils tués depuis avril dernier.

La violence freine le témoignage chrétien. Une dénomination congolaise qui comptait autrefois 54 Églises dans la région en est aujourd’hui réduite à onze. Un autre comptait 25 Églises, et n’en a plus que huit.

Le département d’État américain a qualifié les ADF d’organisation terroriste étrangère en 2021. Mais Scott Morgan appelle à ce qu’elles soient à nouveau désignées comme « entité particulièrement préoccupante », une étiquette appliquée aux États-Unis en vertu de l’International Religious Freedom Act aux groupes qui se livrent à des persécutions religieuses.

L’Église du Christ au Congo (ECC) a lancé un appel à Dieu.

« Seigneur, jusqu’à quand nous oublieras-tu ? » commence son communiqué, citant le psaume 13. Ce groupe de coordination est celui dont fait partie la Communauté des Églises Pentecôtistes d’Afrique Centrale (CEPAC), et réunit plus de 60 dénominations protestantes. L’ECC a dénoncé un acte « lâche et méprisable », demandant au gouvernement de « redoubler » ses efforts dans la zone déjà déclarée en état de siège.

Le Congo est connu comme une zone de conflit minier depuis au moins 2003.

Un rapport cartographique des Nations unies a répertorié les riches ressources naturelles du pays, qui produit 10 % du cuivre et 17 % des diamants du monde. Mais l’industrie électronique dépend encore plus du Congo. Les ordinateurs et les téléphones portables dépendent du cobalt, dont 34 % de la production mondiale est extraite dans la région. Et un pourcentage stupéfiant de 60 à 80 % des réserves de coltan se trouve au Nord et au Sud-Kivu.

Le rapport énumère également 125 entreprises et individus impliqués dans ces conflits.

« Que le Seigneur nous aide à réfléchir en profondeur sur la conspiration qui pèse contre notre nation », conclut le communiqué de l’ECC.

De nombreux chrétiens locaux jugent la situation de manière analogue, voire plus sévère.

« C’en est trop », déclare Fohle Lygunda, responsable de la théologie et de l’engagement du réseau Tearfund pour l’Afrique. « La communauté internationale doit rompre son silence coupable et cesser de soutenir un plan diabolique de balkanisation de la RDC. »

Fohle Lygunda appelle les chrétiens à agir aujourd’hui comme les missionnaires protestants qui amenèrent les Anglais et les Américains à s’élever contre le roi colonisateur Léopold II de Belgique au début du 20e siècle.

Certaines organisations chrétiennes attirent l’attention sur la tragédie en cours.

Voice of the Martyrs a récemment qualifié la RDC de nation « hostile » dans son guide de prière 2023, publié début janvier. En décembre, l’association Aide à l’Église en détresse a souligné le meurtre de prêtres et de religieuses congolais dans son rapport sur l’année 2022. Et la semaine dernière, Portes Ouvertes a classé le pays au 37e rang de son Index mondial 2023 des 50 pays où les chrétiens sont le plus persécutés.

Le pape François, qui se rendra en RDC à partir du 31 janvier, a présenté ses condoléances.

« Christ, Seigneur de la vie », a-t-il prié, « que les personnes concernées trouvent consolation et confiance en Dieu ».

En préparation de sa visite, François a rencontré en décembre Denis Mukwege, le prix Nobel de la paix congolais, gynécologue célèbre pour son travail médical auprès des victimes de viols et son combat contre les violences sexuelles.

En tant que pentecôtiste, son hôpital du Sud-Kivu est affilié à la CEPAC.

« [Cette attaque] ne peut en aucun cas être traitée comme un simple fait divers », a déclaré Mukwege, « et doit entraîner une réaction forte de l’État afin que chacun puisse exercer sa foi en toute sérénité ».

La population du Congo, qui compte 105 millions d’habitants, est composée d’environ 48 % de protestants, 47 % de catholiques et 5 % de musulmans. Ainsi, des sources nous ont déclaré qu’elles espéraient que le corps du Christ serait sensible à cet appel à l’aide.

« Commencez à faire pression sur la communauté internationale pour éradiquer les groupes armés dans l’est du Congo », dit Eale Bosela. « Les terroristes des ADF abattent les gens comme ils abattent les chèvres. »

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Books

Les 50 pays où il est le plus difficile de suivre Jésus en 2023

Les derniers rapports montrent le Nigeria et l’Afrique subsaharienne à l’épicentre de la violence djihadiste, et la Chine en tête des efforts visant à redéfinir les droits religieux.

Christianity Today January 17, 2023
Image: Illustration by Mallory Rentsch / Source Image: Benne Ochs / Getty Images

Plus de 5 600 chrétiens ont été tués pour leur foi l’année dernière. Plus de 2 100 églises ont été attaquées ou fermées.

Plus de 124 000 chrétiens ont été déplacés de force de leurs foyers en raison de leur foi, et près de 15 000 sont devenus réfugiés.

L’Afrique subsaharienne — l’épicentre du christianisme mondial — est désormais aussi l’épicentre de la violence contre les chrétiens, l’extrémisme islamiste s’étant répandu bien au-delà du Nigeria.

La Corée du Nord, elle, est de retour à la première place de l’Index Mondial de Persécution 2023, le dernier classement annuel de Portes Ouvertes des 50 pays où il est le plus dangereux et difficile d’être chrétien.

Le nombre de martyrs et d’attaques d’églises est inférieur à celui du rapport de l’année dernière. Portes Ouvertes souligne cependant le fait qu’il s’agit d’un « nombre minimum absolu » et s’empresse de noter que la diminution des données disponibles ne suggère pas de réelles améliorations en matière de liberté religieuse.

Par exemple, la diminution en Chine est « due en grande partie » au fait que les autorités chinoises ont fermé près de 7 000 Églises au cours des deux années précédentes. Et la « progression » de l’Afghanistan, qui est passé de la première place l’année dernière à la neuvième cette année, « ne donne pas de quoi se réjouir », car elle s’explique par le fait que la plupart des chrétiens afghans « se sont cachés ou ont fui à l’étranger » après la prise du pouvoir par les talibans.

Dans l’ensemble, et comme l’année dernière, 360 millions de chrétiens vivent dans des pays où les niveaux de persécution ou de discrimination sont élevés. Cela représente un chrétien sur sept dans le monde, un sur cinq en Afrique, deux sur cinq en Asie et un sur quinze en Amérique latine.

Et pour la troisième fois seulement en trois décennies de suivi, les 50 pays ont tous obtenu des résultats suffisamment préoccupants pour être classés comme présentant un niveau « très élevé » de persécution dans le classement de Portes Ouvertes établi sur la base de 84 questions. Il en va de même pour cinq autres nations classées juste au-delà de la limite.

L’extrémisme islamique continue de causer le plus de persécutions (31 pays), notamment en Afrique subsaharienne où Portes Ouvertes craint que le Nigeria ne déclenche bientôt « une vaste catastrophe humanitaire » pour tout le continent. Les chercheurs notent également que la Chine a renforcé les restrictions et la surveillance numériques et « forge un réseau de nations cherchant à redéfinir les droits humains — loin des normes universelles et des libertés religieuses ». Un troisième pays d’Amérique latine, le Nicaragua, fait son entrée dans la liste alors que les gouvernements autoritaires considèrent de plus en plus les chrétiens comme des voix d’opposition.

L’objectif des classements annuels de Portes Ouvertes — qui ont montré comment la Corée du Nord commence à trouver des compétiteurs tandis que la persécution devient de plus en plus forte — est de guider les prières et de susciter une indignation qui conduise à l’action tout en montrant aux croyants persécutés qu’ils ne sont pas oubliés.

La version 2023 couvre la période du 1er octobre 2021 au 30 septembre 2022 et a été compilée à partir des rapports de plus de 4 000 collaborateurs de Portes Ouvertes dans plus de 60 pays.

Le rapport publié aujourd’hui marque également les 30 ans de la liste, créée pour la première fois en 1993 après la chute du rideau de fer. Quelles leçons Portes Ouvertes en a appris ?

Premièrement, il est clair que la persécution continue de s’aggraver. Le nombre de pays atteignant le seuil pour être suivis dans le cadre de l’Index est passé de 40 en 1993 à 76 aujourd’hui, et le score moyen des pays a augmenté de 25 %.

Pourtant, la plus grande menace pour l’Église n’est pas externe, mais interne, conclut Frans Veerman, directeur général de la recherche pour Portes Ouvertes. Et 1 Corinthiens 12 rappelle qu’aucun croyant ne devrait souffrir seul.

« La plus grande menace pour le christianisme », estime-t-il, « est que la persécution entraîne l’isolement, et lorsqu’elle est continue, elle peut entraîner la perte de l’espoir ».

Si la violence et la pression entraînent des traumatismes et des dégâts considérables, Veerman note que « de façon remarquable, de nombreux répondants à nos questionnaires continuent de dire que la plus grande menace ne vient pas de l’extérieur, mais de l’intérieur de l’Église : “La prochaine génération sera-t-elle préparée au type de persécution dont nous sommes témoins ? Sont-ils forts dans leur foi et dans la connaissance du Christ et de l’Évangile ?” »

« Cela montre que le niveau de résilience de l’Église est aussi déterminant pour son avenir dans un pays que le niveau de persécution », analyse-t-il. « Ainsi, la plus grande menace pour l’Église dans les pays où la persécution est présente est la diminution de la résilience en raison du caractère incessant de la persécution et du sentiment d’être abandonné par le reste du corps du Christ. »

Après trois décennies de recherche, Portes Ouvertes a appris que cette indispensable résilience se trouve dans « l’ancrage dans la Parole de Dieu et dans la prière », continue Veerman. Et aussi dans le courage, car l’Église persécutée est le plus souvent « active dans la diffusion de l’Évangile », « vigoureuse et en croissance contre toute attente ».

En somme, l’Église persécutée a rappelé à Portes Ouvertes la vérité de 1 Corinthiens 12.26 : « Si une partie du corps souffre, toutes les autres souffrent avec elle ; si une partie du corps est glorifiée, toutes les autres se réjouissent avec elle ».

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Où les chrétiens sont-ils le plus persécutés aujourd’hui ?

L’Afghanistan n’est pas le seul à connaître un changement substantiel dans le classement de cette année. Cuba est passé de la 37e à la 27e place, en raison de l’intensification des manœuvres répressives à l’encontre des responsables et militants chrétiens opposés aux principes communistes. Avant les manifestations généralisées de 2021, le pays n’apparaissait même pas dans le classement. Le Burkina Faso est passé de la 32e à la 23e place en raison de l’augmentation de l’activité djihadiste, exacerbée par une instabilité analogue dans les pays voisins du Sahel. Le Mozambique est passé de la 41e à la 32e place, à cause du militantisme islamique dans sa région nord. Et la Colombie est passée de la 30e à la 22e place, du fait de la violence ciblée exercée par des bandes criminelles contre les chrétiens.

Les Comores ont rejoint la liste à la 42e place, gagnant 11 rangs en raison de la paranoïa accrue du gouvernement (seuls les étrangers y bénéficient de la liberté de religion). Et le Nicaragua intègre la liste pour la première fois, gagnant 11 rangs pour atteindre la 50e place en raison d’une répression dictatoriale croissante, en particulier contre l’Église catholique romaine.

Pays où il est le plus difficile de suivre Jésus :


1. Corée du Nord
2. Somalie
3. Yémen
4. Érythrée
5. Libye
6. Nigeria
7. Pakistan
8. Iran
9. Afghanistan
10. Soudan
11. Inde

Dans l’ensemble, à l’exception de l’Afghanistan qui perd huit places, les dix premières nations n’ont fait qu’échanger leurs positions de l’année dernière (voir encadré). Le Soudan a rejoint le groupe à la dixième place, devançant l’Inde qui, à la onzième place, se situe toujours à un niveau de persécution « extrême » selon Portes Ouvertes.

Étonnamment retiré en 2021 de la liste annuelle des pays particulièrement préoccupants du département d’État américain après y avoir été ajouté en 2020, le Nigeria fait de nouveau l’objet d’une attention particulière dans le rapport de Portes Ouvertes, qui note :

La violence à l’encontre des chrétiens […] est des plus extrêmes au Nigeria, où des militants peuls, de Boko Haram, de la province de l’État islamique en Afrique de l’Ouest de l’État islamique (ISWAP) et d’autres groupes mènent des raids contre les communautés chrétiennes, tuant, mutilant, violant et kidnappant pour obtenir une rançon ou des esclaves sexuels.

Cette année, cette violence s’est également étendue au sud du pays, à majorité chrétienne. […] Le gouvernement nigérian continue de nier qu’il s’agit d’une persécution religieuse, de sorte que les violations des droits des chrétiens se poursuivent en toute impunité.

Comme l’année dernière, la nation la plus peuplée d’Afrique s’est classée au premier rang dans les sous-catégories de l’Index concernant les chrétiens tués, enlevés, agressés ou harcelés sexuellement, mariés de force ou victimes d’abus physiques ou mentaux, ainsi qu’au premier rang pour les maisons et les entreprises attaquées pour des raisons religieuses. Le Nigeria s’est à nouveau classé deuxième dans les sous-catégories des attaques d’églises et des déplacements internes.

Les violations de la liberté religieuse au Nigeria sont emblématiques d’une présence islamiste en pleine expansion en Afrique subsaharienne. Le Mali est passé de la 24e à la 17e place. Le Burkina Faso est passé de la 32e à la 23e place, et le Niger de la 33e à la 28e place. Plus au sud, la République centrafricaine (RCA) est passée de la 31e à la 24e place, le Mozambique de la 41e à la 32e et la RDC de la 40e à la 37e.

Les pays à majorité chrétienne se classent relativement bas dans le top 50, et comprennent la Colombie (22), la République centrafricaine (24), Cuba (27), l’Éthiopie (39), la République démocratique du Congo ou RDC (37), le Mozambique (32), le Mexique (38), le Cameroun (45) et le Nicaragua (50). Le Kenya et la Tanzanie sont tout près de figurer dans l’Index 2023

Concernant l’Amérique latine, Portes Ouvertes note :

L’oppression directe du gouvernement contre les chrétiens considérés comme des voix de l’opposition est courante au Nicaragua (50), au Venezuela (64) et à Cuba (27), où des dirigeants chrétiens ont été emprisonnés sans procès pour leur participation aux manifestations de l’année dernière. Dans de nombreux pays d’Amérique latine, le crime organisé contribue de manière importante à la persécution, notamment dans les zones rurales face à des chrétiens qui dénoncent les activités des cartels.

Parmi les 50 premières nations :

  • 11 ont des niveaux de persécution « extrêmes » et 39 des niveaux « très élevés ». Cinq autres pays ne figurant pas parmi les 50 premiers atteignent des niveaux « très élevés » : le Kenya, le Koweït, la Tanzanie, les Émirats arabes unis et le Népal. À leur suite, Portes Ouvertes recense 21 autres pays où le niveau de persécution est considéré comme « élevé ». Les seules nations dont le niveau a augmenté sont le Nicaragua et le Soudan, tandis que l’Arabie saoudite et le Sri Lanka sont les seules nations dont le niveau a baissé.
  • Dix-neuf des 50 premiers pays sont en Afrique, 27 en Asie et quatre en Amérique latine.
  • 34 ont l’islam comme religion principale, quatre le bouddhisme, un l’hindouisme, un l’athéisme, un l’agnosticisme — et dix le christianisme. (Le Nigeria est composé à parts égales de musulmans et de chrétiens.)

Pour les raisons mentionnées plus haut, la liste 2023 comprend deux nouveaux pays : les Comores et le Nicaragua. Deux autres pays ont donc quitté le top 50 : le Koweït et le Népal.

Pays où les chrétiens sont confrontés à la plus grande violence :


1. Nigeria
2. Pakistan
3. Cameroun
4. Inde
5. Burkina Faso
6. République Centrafricaine
7. Mozambique
8. République Démocratique du Congo (RDC)
9. Tanzanie
10. Myanmar
11. Colombie
12. Niger

Période de référence de Portes Ouvertes : 1er octobre 2021 – 30 septembre 2022

Parmi les autres augmentations notables, citons le Mali, qui passe de la 24e à la 17e place, en raison des menaces que représentent les combattants djihadistes et mercenaires dans le contexte d’un gouvernement faible qui établit un lien entre certains chrétiens et les intérêts occidentaux. De même, le Niger, autre pays du Sahel, est passé de la 33e à la 28e place, en raison des attaques continues des militants islamistes. En Amérique du Nord, le Mexique est passé de la 43e à la 38e place, en raison de la violence criminelle à l’encontre des chrétiens perçus comme une menace pour les activités illégales, ainsi que des pressions sociales auxquelles sont confrontés les croyants indigènes qui refusent de suivre les coutumes ancestrales.

Tous les mouvements importants n’ont pas été négatifs. Portes Ouvertes note la « promotion d’une plus grande tolérance » dans un certain nombre de pays du Moyen-Orient, dont Bahreïn et les Émirats arabes unis. Le Qatar a perdu 16 places, passant du 18e au 34e rang, dans la mesure où aucune église n’a été fermée l’année dernière. (Cependant, de nombreuses communautés de maison précédemment fermées le sont restées.) L’Égypte a perdu quinze places, passant du 20e au 35e rang, en raison de la diminution du nombre d’attaques signalées contre des propriétés chrétiennes. Oman a chuté pour des raisons similaires, passant de la 36e à la 47e place, et la Jordanie est passée de la 39e à la 49e place en raison de l’absence de signalements de chrétiens chassés de leurs maisons.

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De quelles manières les chrétiens sont-ils persécutés dans ces pays ?

Portes Ouvertes suit la persécution dans six catégories, notamment la pression sociale et gouvernementale sur les individus, les familles et les communautés, et s’intéresse aussi particulièrement aux femmes. De nombreuses catégories ont connu des baisses cette année, mais certaines ont atteint des sommets.

Lorsque la violence est isolée en tant que catégorie, les dix premiers persécuteurs changent radicalement — seuls le Nigeria, le Pakistan et l’Inde demeurent (voir encadré). En fait, quinze nations sont plus meurtrières pour les chrétiens que la Corée du Nord. L’Ouganda a connu la plus forte augmentation de la violence, soit 3,1 points de plus que le Honduras, mais ces deux pays ne figurent pas parmi les 50 premiers. Après la baisse de 10 points enregistrée par l’Afghanistan, le Qatar a connu la plus forte diminution de la violence, suivi du Sri Lanka et de l’Égypte. Parmi l’ensemble des nations suivies, 12 n’ont vu aucun changement dans leur degré de violence, 27 l’ont vu diminuer et 37 l’ont vu augmenter.

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Le nombre de martyrs a diminué de plus de 275 par rapport à l’année précédente, puisque Portes Ouvertes a recensé 5 621 chrétiens tués pour leur foi au cours de la période considérée. Représentant une baisse de 5 %, ce bilan reste le deuxième plus élevé depuis le record de 2016, qui était de 7 106 décès. Le Nigeria représentait 89 % du total.

Pays où le plus grand nombre de chrétiens ont été martyrisés :


1. Nigeria : 5,014
2. Nom non divulgué : 100*
3. Mozambique : 100*
4. République démocratique du Congo : 100*
5. République centrafricaine : 61
6. Myanmar : 42
7. Colombie : 21
8. Inde : 17
9. Mexique : 14
10. Honduras : 14

*Estimation
Période de référence de Portes Ouvertes : 1er octobre 2021 – 30 septembre 2022

Portes Ouvertes est connu pour favoriser une estimation plus prudente que d’autres organisations, qui évaluent souvent le nombre de martyrs à 100 000 par an.

Lorsque les chiffres ne peuvent être vérifiés, les estimations sont données en chiffres ronds de 10, 100, 1 000 ou 10 000, supposés être plus élevés en réalité. Et les données nationales peuvent ne pas être fournies pour des raisons de sécurité, ce qui entraîne l’emploi de la désignation « NN » pour l’Afghanistan, les Maldives, la Corée du Nord, la Somalie et le Yémen.

Dans cette rubrique, une nation non nommée, le Mozambique et la RDC suivent tous le Nigeria avec un décompte symbolique de 100 martyrs. Viennent ensuite la République centrafricaine avec 61 meurtres enregistrés, le Myanmar avec 42, la Colombie avec 21, et l’Inde avec 17.

Une deuxième catégorie recense les attaques contre les églises et autres bâtiments chrétiens tels que les hôpitaux, les écoles et les cimetières, qu’ils soient détruits, fermés ou confisqués. Le chiffre de 2 110 constitue une baisse de 59 % par rapport à l’année dernière, et ne représente qu’un cinquième du chiffre record de 9 488 du rapport 2020.

La Chine (16), qui a rejoint le top 20 en 2021 pour la première fois en dix ans, a pris la tête du classement avec la moitié des attaques d’églises signalées — bien que le chiffre de 1 000 qui lui a été attribué ne soit que symbolique. Le Nigeria, le Myanmar, le Mozambique, la RDC, le Rwanda et l’Angola se sont vu attribuer une centaine d’attaques à titre symbolique. Vient ensuite l’Inde qui a enregistré 67 incidents spécifiques, suivie du Mexique avec 42, de la Colombie avec 37 et du Nicaragua avec 31.

Pays où les églises ont été le plus attaquées ou fermées :


1. Chine : 1 000*
2. Nigeria : 100*
3. Myanmar: 100*
4. Mozambique : 100*
5. République démocratique du Congo : 100*
6. Rwanda : 100*
7. Angola : 100*
8. Inde : 67
9. Mexique : 42
10. Colombie : 37

*Estimation
Période de référence de Portes Ouvertes : 1er octobre 2021 – 30 septembre 2022

La catégorie des chrétiens détenus sans procès, arrêtés, condamnés et emprisonnés est passée à 4 542 cas, ce qui représente une baisse d’un quart par rapport au chiffre record de 6 175 enregistré dans le rapport de l’année dernière, mais reste le deuxième chiffre le plus élevé depuis que cette catégorie fait l’objet d’un suivi.

Portes Ouvertes divise ce chiffre en deux sous-catégories, avec 3 154 croyants détenus, soit une diminution de 34 %. L’Inde était en tête avec 1 711 cas et représentait 54 % du total. Elle était suivie de l’Érythrée, avec 244 cas, et de la Russie, avec 200 cas ; puis d’une nation non nommée, du Myanmar, de la Chine et du Rwanda, avec 100 cas symboliques chacun ; viennent ensuite Cuba avec 80 cas, le Salvador avec 63 cas, et le Nigeria avec 54 cas.

Le chiffre de 1 388 croyants emprisonnés est toutefois resté stable par rapport aux 1 410 cas déclarés au cours de la période précédente. Une nation non nommée, l’Érythrée, la Chine et l’Inde représentaient près de 90 % du total.

Le nombre de chrétiens enlevés a atteint un nouveau record, avec un total de 5 259, soit une augmentation de 37 % par rapport à la période précédente. Le Nigeria est à l’origine de 90 % du total, soit 4 726 enlèvements, suivi du Mozambique et de la RDC avec une centaine symbolique d’incidents chacun, puis de l’Irak avec 63, de la République centrafricaine avec 35 et du Cameroun avec 25.

La catégorie la plus nombreuse, et de loin, est celle des déplacés, avec 124 310 chrétiens contraints de quitter leur foyer ou de se cacher pour des raisons liées à leur foi, soit 43 % de moins que les 218 709 de l’année dernière. En outre, 14 997 chrétiens ont été contraints de quitter leur pays, contre 25 038 l’année dernière. Le Myanmar comptait quatre déplacements internes sur cinq (suivi du Nigeria et du Burkina Faso) et deux réfugiés sur trois (suivi de l’Iran).

Portes Ouvertes explique que plusieurs catégories sont particulièrement difficiles à décompter avec précision, la plus notable étant les 29 411 cas d’abus physiques et mentaux, y compris les coups et les menaces de mort. Le décompte de l’année dernière était de 24 678 incidents. Sur les 72 nations évaluées, 45 se sont vu attribuer un chiffre symbolique. Le Nigeria et l’Inde sont en tête (deux tiers du total), suivis par un pays non divulgué, le Myanmar, le Mozambique, l’Indonésie, la RDC et le Rwanda.

On estime que 4 547 maisons et propriétés chrétiennes ont été attaquées en 2022, ainsi que 2 210 magasins et entreprises. Dans cette dernière catégorie, 27 des 42 pays se sont vus attribuer des chiffres symboliques, le chiffre de 1 000 du Nigeria dépassant celui des neuf nations suivantes réunies (compte tenu de leurs totaux de 100 chacune). Le Nigeria, le Myanmar et la République centrafricaine ont enregistré les chiffres les plus élevés dans la première catégorie (un millier symbolique chacun), seuls l’Indonésie et l’Inde ayant pu enregistrer des cas réels (211 contre 180). L’Érythrée, la Syrie, l’Irak, le Burkina Faso, le Niger, le Mozambique, la RDC et le Cameroun complètent le top 10 et au-delà, avec chacun un total symbolique de 100 attaques.

Les catégories spécifiques aux femmes sont également difficiles à établir avec précision pour les chercheurs de Portes Ouvertes. Les cas de viols et de harcèlement sexuel ont diminué, passant de 3 147 à 2 126, avec en tête le Nigeria qui a enregistré près de la moitié du total, 34 des 47 pays ayant obtenu un score symbolique. Les mariages forcés avec des non-chrétiens ont diminué, passant de 1 588 à 717. Le Nigeria est le pays qui a obtenu le score le plus élevé dans cette catégorie où 22 pays sur 34 ayant reçu un chiffre symbolique.

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Pourquoi les chrétiens sont-ils persécutés dans ces pays ?

La principale motivation varie d’un pays à l’autre, et une meilleure compréhension des différences peut aider les chrétiens d’autres pays à prier et à soutenir plus efficacement leurs frères et sœurs en Christ malmenés.

Portes Ouvertes classe les principales sources de persécution contre les chrétiens en huit groupes :

Oppression islamique (31 pays) : Il s’agit de la principale source de persécution à laquelle les chrétiens sont confrontés dans plus de la moitié des pays figurant sur l’Index, dont huit des dix premiers au total. La plupart de ces 31 pays sont officiellement des nations musulmanes ou à majorité musulmane ; toutefois, cinq d’entre elles sont en fait à majorité chrétienne : le Nigeria, la République centrafricaine (24), la RDC (37), le Mozambique (32) et le Cameroun (45). En outre, il s’agit du principal moteur dans 15 pays où la persécution est suffisante pour être suivie par Portes Ouvertes, mais qui se classent en dessous du seuil de l’Index, notamment le Kenya et la Tanzanie à majorité chrétienne.

Paranoïa dictatoriale (9 pays) : C’est la principale source de persécution à laquelle les chrétiens sont confrontés dans neuf pays, principalement dans des nations à majorité musulmane — la Syrie (12), l’Ouzbékistan (21), le Turkménistan (26), le Bangladesh (30), le Tadjikistan (44) et le Kazakhstan (48) — mais aussi l’Érythrée (4), Cuba (27) et le Nicaragua (50). Il en va de même dans six autres nations hors Index suivies : Angola, Azerbaïdjan, Biélorussie, Burundi, Rwanda et Venezuela.

Oppression communiste et postcommuniste (4 pays) : Il y a là la principale source de persécution à laquelle les chrétiens sont confrontés dans quatre pays, tous situés en Asie : La Corée du Nord (1), la Chine (16), le Vietnam (25) et le Laos (31).

Nationalisme religieux (3 pays) : C’est la principale source de persécution à laquelle les chrétiens sont confrontés dans trois pays, tous situés en Asie. Les chrétiens sont principalement visés par les nationalistes hindous en Inde (11) et par les nationalistes bouddhistes au Myanmar (14) et au Bhoutan (40). Même chose dans trois autres nations hors Index suivies : Israël, le Népal et le Sri Lanka.

Crime organisé et corruption (2 pays) : La principale source de persécution à laquelle les chrétiens sont confrontés en Colombie (22) et au Mexique (38). Il en va de même dans trois autres nations suivies : Salvador, Honduras et Soudan du Sud.

Exclusivisme confessionnel chrétien (1 pays) : Il s’agit de la principale source de persécution à laquelle les chrétiens sont confrontés en Éthiopie (39).

Intolérance séculière (0 pays) et oppression clanique (0 pays) : Portes Ouvertes analyse ces sources de persécution, mais aucune n’est la source principale dans l’un des 50 pays de l’Index 2023.

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Comment l’Index de Portes Ouvertes se situe-t-il par rapport aux autres rapports sur la persécution religieuse ?

Portes Ouvertes estime qu’il est raisonnable de qualifier le christianisme de religion la plus sévèrement persécutée au monde. Dans le même temps, l’association note qu’il n’existe pas de suivi comparable pour la population musulmane à travers le monde.

D’autres évaluations de la liberté de religion dans le monde corroborent bon nombre des conclusions de Portes Ouvertes. Par exemple, la dernière analyse du Pew Research Center sur les oppositions gouvernementales et sociétales à l’égard de la religion a révélé que les chrétiens ont subi du harcèlement dans 155 pays en 2020, soit plus que tout autre groupe religieux. Les musulmans ont subi du harcèlement dans 145 pays, suivis par les juifs dans 94 pays.

La répartition correspond aux données de Portes Ouvertes. La Chine, l’Érythrée et l’Iran se sont classés dans le top 10 des pays où Pew observe un harcèlement gouvernemental, tandis que l’Inde, le Nigeria et le Pakistan se classent dans le top 10 des pays où règne une hostilité de la société à l’égard des chrétiens. L’Afghanistan et l’Égypte sont listés dans les deux catégories.

La plupart des pays figurant sur la liste de Portes Ouvertes figurent également sur la liste annuelle du département d’État américain, qui nomme et dénonce les gouvernements qui ont « commis ou toléré des violations systématiques, continues et flagrantes de la liberté de religion ».

Sa liste des pays particulièrement préoccupants (PPP) comprend le Myanmar (n° 14 dans l’Index 2023), la Chine (16), Cuba (27), l’Érythrée (4), l’Iran (8), la Corée du Nord (1), le Nicaragua (50), le Pakistan (7), la Russie (qui a quitté l’Index l’an dernier), l’Arabie saoudite (13), le Tadjikistan (44) et le Turkménistan (26). Sa liste de surveillance spéciale de deuxième niveau intègre l’Algérie (19), la République centrafricaine (24), les Comores (42) et le Vietnam (25).

Le département d’État américain dresse également la liste des entités particulièrement préoccupantes, ou acteurs non gouvernementaux à l’origine de persécutions, qui sont tous actifs dans les pays figurant sur la liste de Portes Ouvertes. Il s’agit notamment de Boko Haram et d’ISWAP au Nigeria (n° 6 dans l’Index), des talibans en Afghanistan (9), des shebabs en Somalie (2), de Hayat Tahrir al-Sham en Syrie (12), des houthis au Yémen (3), du Groupe Wagner pour ses activités en République centrafricaine (24) et, au Sahel, de l’État islamique dans le Grand Sahara et du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans.

Parallèlement, la Commission américaine pour la liberté religieuse internationale (USCIRF), dans son rapport 2022, a recommandé les mêmes nations pour la liste des pays particulièrement préoccupants, avec l’ajout du Nigeria (6), de l’Inde (11), de la Syrie (12) et du Vietnam (25). Pour la liste de surveillance du Département d’État, l’USCIRF a recommandé les mêmes nations à l’exception des Comores, avec l’ajout de l’Azerbaïdjan (non classé, mais suivi par Portes Ouvertes), l’Égypte (35), l’Indonésie (33), l’Irak (18), le Kazakhstan (48), la Malaisie (43), la Turquie (41) et l’Ouzbékistan (21).

Toutes les nations du monde sont suivies par les chercheurs et le personnel de terrain de Portes Ouvertes, mais une attention approfondie est accordée à 100 nations et une attention toute particulière est accordée aux 76 qui enregistrent des niveaux « élevés » de persécution (scores de plus de 40 sur l’échelle de 100 points de Portes Ouvertes).

Pour poursuivre sur le sujet, vous retrouverez sur notre site nos reportages sur les Index de 2022 (en français), 2021 (en français), 2020, 2019, 2018, 2017, 2016, 2015, 2014, 2013 et 2012, ainsi qu’un coup de projecteur en 2010 sur les endroits où il est le plus difficile de croire. Nous avions également demandé en 2017 à des experts si les États-Unis auraient leur place sur les listes de persécution, et compilé les articles sur l’Église persécutée les plus lus en 2019, 2018, 2017, 2016 et 2015.

Toutes les informations de Portes ouvertes sur l’Index Mondial de Persécution 2023 peuvent être retrouvées en français sur les sites de Portes Ouvertes France ou Suisse.

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Books

Une forêt enfouie : comment un missionnaire australien redonne vie au Sahel africain

Le « faiseur de forêts » dont ont parlé de nombreux médias autour de la COP27 poursuit un projet où « tout ce qui est nécessaire, Dieu l’a déjà fourni ».

Régénération naturelle gérée par les agriculteurs au Niger

Régénération naturelle gérée par les agriculteurs au Niger

Christianity Today January 16, 2023
Silas Koch / World Vision

Après 18 mois éreintants de lutte contre la désertification au Niger, Tony Rinaudo était au bord du désespoir. En tant que responsable d’un petit projet de reforestation pour la SIM en 1983, il savait que peu des 6 000 arbres que l’agence missionnaire avait plantés chaque année depuis 1977 avaient survécu au climat aride du Sahel.

Les habitants l’avaient surnommé le « fermier blanc fou » et se montraient peu enclins à gaspiller de précieuses terres agricoles pour d’autres tentatives apparemment hasardeuses. Mais, persévérant, il chargea un autre lot de jeunes arbres dans sa camionnette, s’efforçant de réaliser sa prière d’enfant.

Des années plus tôt, dans la vallée de l’Ovens, dans le sud-est de l’Australie, Rinaudo déplorait la destruction au bulldozer de la brousse vallonnée et la mort des poissons empoisonnés par les insecticides pulvérisés sur les cultures de tabac — alors qu’ailleurs des enfants se couchaient le ventre vide.

« Seigneur », s’est-il écrié, « utilise-moi d’une manière ou d’une autre, quelque part, pour faire la différence. »

Peu après, il tomba sur I Planted Trees de Richard St. Barbe Baker. Une ligne marqua Rinaudo et fonda l’œuvre de sa vie.

« Quand les forêts s’en vont, les eaux s’en vont, les poissons et le gibier s’en vont, les troupeaux s’en vont, la fertilité s’en va », lut-il dans le livre du botaniste anglais du 19e siècle. (Cette citation a été attribuée ailleurs au journaliste scientifique écossais Robert Chambers.) « Puis les fantômes séculaires apparaissent furtivement, l’un après l’autre : inondation, sécheresse, incendie, famine, peste. »

En 1981, Tony Rinaudo s’installa à Maradi, à environ 650 km à l’est de Niamey, la capitale du Niger. Le centre économique de la nation ouest-africaine, à la frontière sud avec le Nigeria, accueillait un projet agricole de SIM, un hôpital et une école biblique locale. Présente depuis 1924, la mission — avec les catholiques — a établi la plus grande concentration de chrétiens du Niger, bien qu’ils représentent moins de 1 % de la population totale.

Les colons français et, plus tard, les projets de développement internationaux contribuèrent à la dégradation de l’environnement en pratiquant l’agriculture à grande échelle, en défrichant les arbres pour maximiser le rendement. Les fermiers locaux les abattaient, par pauvreté et par faim, pour vendre le bois, tandis que les femmes faisaient des kilomètres pour trouver du bois d’allumage pour leurs feux de cuisson.

Alors que Rinaudo s’arrêtait pour dégonfler ses pneus afin de traverser le paysage sablonneux pour une livraison, il soupira et invoqua encore Dieu.

« Pardonne-nous d’avoir détruit le don de la création ». « Montre-nous ce qu’il faut faire, ouvre nos yeux. »

En relevant la tête, il aperçut un buisson.

Dans n’importe quelle autre randonnée dans le désert, nous raconte Tony Rinaudo, il serait passé à côté d’arbustes à l’aspect similaire sans y prêter attention. Ceux-ci seraient bientôt consommés par des chèvres errantes. Mais cette fois, en l’examinant de près, il reconnut la petite pousse comme un Philostigma reticulata, un arbre qui peut atteindre plus de 10 mètres de haut. Aujourd’hui, la communauté scientifique reconnaît sa capacité à redistribuer l’humidité du sol en profondeur aux racines des cultures en surface — ce qui fait souvent la différence entre la survie et la disparition des terres asséchées.

Soudain, la ligne de front bougea.

« Tout ce qui est nécessaire, Dieu l’a déjà fourni », s’écria Tony. « De nombreux déserts sont des paysages altérés avec une forêt souterraine qui a juste besoin d’une chance de repousser. »

Les arbres plantés n’ont pas un système racinaire assez développé pour survivre à des températures au sol qui peuvent atteindre 70 degrés au soleil et à des vents de plus de 50 km/h. Mais en taillant doucement la trentaine de pousses qui émergent d’une souche, l’eau est concentrée dans les quelques plus fortes qui se développent ensuite rapidement.

Pionnier de la « régénération naturelle assistée », Rinaudo a ensuite dû convaincre la communauté. Il fallut une famine pour y parvenir.

En 1983, le Niger fut dévasté par la sécheresse, et la SIM lança un projet de « nourriture contre travail » avec des agriculteurs qui accepteraient d’essayer la régénération naturelle sur une partie de leurs terres. Tony Rinaudo raconte que les 12 villages initiaux passèrent à 100, mais qu’après le paiement et la récolte, 75 % des bénéficiaires coupèrent les nouvelles pousses, revenant ainsi à leur pratique traditionnelle.

« Nous en avons fini avec Tony et ses “stupides arbres” ».

Mais les 2 000 agriculteurs qui continuèrent furent suffisants pour former une masse critique de praticiens, qui en influencèrent d’autres. Au cours des 20 années suivantes, le projet de la SIM a permis de régénérer 200 millions d’arbres et de décupler la densité pour atteindre 40 arbres par hectare. Les rendements des cultures se sont améliorés de 30 %, car l’ombre a fait baisser la température de l’air de 10 degrés et celle du sol de 36 degrés.

Les animaux et les oiseaux sont revenus dans les champs, et le fumier et l’urine se sont joints aux feuilles mortes pour nourrir le sol. À l’inverse, chaque augmentation de 1 degré de la température au-dessus de 35 degrés entraîne une perte de 10 % du rendement des cultures.

En 1999, le Niger a décerné à Tony Rinaudo son Ordre du mérite agricole pour avoir lancé la technique qui allait toucher 50 % des terres agricoles nationales. Et aujourd’hui, la régénération naturelle assistée est pratiquée dans 29 pays du monde entier, ayant restauré des forêts sur 17 millions d’hectares.

Deux milliards de plus pourraient être régénérés, soit la taille de l’Amérique du Sud. D’ici 2045, 135 millions de personnes risquent d’être déplacées par la désertification.

« La nature est l’échafaudage dont dépend toute vie sur terre », explique Rinaudo. « Nous jouons au Jenga… en sortant les blocs de construction, un par un. Si nous continuons, la tour va s’effondrer. »

Tony Rinaudo, auteur de The Forest Underground.Silas Koch/World Vision
Tony Rinaudo, auteur de The Forest Underground.

En novembre dernier, les dirigeants mondiaux étaient réunis en Égypte pour consolider les fondations. La ville de Sharm el-Sheikh, sur la mer Rouge, a accueilli la 27e session de la Conférence des parties (COP27) à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques.

Tony Rinaudo était là, offrant les conseils qu’il pouvait

Il travaille aujourd’hui pour World Vision en tant que principal conseiller en matière d’action climatique et a offert une présentation lors d’un événement parallèle avec l’agence de développement allemande GIZ et le DFAT (ministère australien des Affaires étrangères et du Commerce). Il cherche à démontrer que la régénération naturelle assistée est une technique bien plus efficace que de dépenser des millions en reboisement.

Une étude portant sur les programmes forestiers de 1975 à 1982 a fait état d’une somme de 8 000 dollars dépensée par hectare pour des arbres jugés en fin de compte « peu performants ». Une autre étude a ramené les dépenses à 400 dollars par hectare. Un projet typique de régénération assistée ne coûte que 40-50 dollars, et parfois même seulement 4 dollars par hectare.

Après la mise en œuvre, le revenu des exploitations associées au Niger a augmenté de 68 dollars par hectare. Des études menées au Ghana et au Sénégal ont respectivement montré des augmentations de 78 % et 84 %.

La valeur d’une âme humaine est bien plus grande, mais Rinaudo rejette toute dichotomie.

« Des gens sont venus au Seigneur, mais j’aimerais réorienter la question. » « Je considère que réparer et prendre soin de la création de Dieu est une œuvre de Dieu à part entière, un acte d’amour. »

La SIM cherche à servir tout le monde, quelle que soit la réponse. Les personnes engagées ont témoigné avec à-propos, et quelques petites Églises ont émergé. Un des amis de Tony, Sule, un musulman fervent, est devenu un employé clé et a souvent engagé le personnel dans des conversations sur la religion, auxquelles son superviseur nigérien a tranquillement répondu. Cependant, respecté dans sa foi, il n’a jamais été pressé d’assister aux temps de méditation ou aux réunions de prière. C’est un simple acte d’hospitalité envers son père — l’héberger alors qu’il devait subir une opération — qui lui a fait la plus forte impression. Sule a prié pour connaître la vérité, et Dieu lui a donné une vision de Jésus.

Comme il était déjà un leader respecté dans la communauté, le changement de vie de Sule a attiré l’attention de beaucoup, y compris celle de Jadi, l’ivrogne du village : Sule était-il sincère, ou s’agissait-il simplement de garder son travail ?

Sule a témoigné de son expérience et a dit à Jadi de chercher Dieu lui-même. Jadi a prié, et a reçu une autre vision : lui-même dans une fosse, entouré de serpents. Il s’est repenti, a cru, et est aujourd’hui un homme transformé.

« Lorsque vous êtes missionnaire avec la SIM, les gens s’attendent à ce que vous soyez un évangéliste », explique Illia Djadi, analyste principal de Portes Ouvertes pour la liberté de religion ou de croyance en Afrique, qui fréquentait la même Église que Tony Rinaudo à Maradi. « Tony n’a pas apporté de bibles ni fondé d’Église, mais il a réellement laissé un héritage. »

Illia Djadi salue l’accent mis sur « l’Évangile tout entier » qui a conduit Tony Rinaudo à vivre dans la ville avec les gens, contrairement à de nombreux missionnaires qui restent dans l’enceinte de la SIM. Il parlait couramment le haoussa et avait inventé un proverbe qu’il répétait constamment : « Celui qui prend soin des arbres n’aura jamais faim. »

Illia Djadi compare Rinaudo à Jean-Baptiste, avec son amour, sa compassion et sa préévangélisation nécessaire pour amener les musulmans à Jésus. Mais l’impact a été plus profond encore.

Dans les années 1990, le fondamentalisme islamique a fait son apparition au Niger. La prédication contre les chrétiens a commencé à démanteler la tolérance religieuse traditionnelle et a radicalisé de nombreux habitants de la plus jeune nation du monde.

Et en 2015, l’affaire des caricatures de Mahomet — qui a suscité l’attaque terroriste de Charlie Hebdo à Paris — a entraîné des centaines d’attaques contre des églises, des écoles, des foyers et même un orphelinat. Mais à Maradi, des voisins musulmans ont entouré les propriétés de la SIM, défendant les « bonnes personnes » qui s’y trouvaient.

« Pour lutter contre l’intolérance, nous avons besoin de relations locales de confiance, pour promouvoir l’idée que les chrétiens travaillent pour le bien des autres », dit Illia Djadi. « Nous n’avons pas besoin de plus d’évangélistes, mais de plus de Tonys. »

Le livre de Tony Rinaudo, The Forest Underground : Hope for a Planet in Crisis, a remporté le prix 2022 du livre chrétien australien de l’année. Son verset clé est le Psaume 104.30 — « Quand tu envoies ton Esprit… tu renouvelles la face du sol »

« Dieu ne travaille pas seulement à restaurer les personnes brisées », dit Rinaudo. « Il travaille aussi à restaurer une terre brisée. »

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Le président du Nicaragua ferme des organisations chrétiennes à but non lucratif

Et autres nouvelles des chrétiens du monde entier.

Christianity Today January 16, 2023
Oswaldo Rivas / Contributor / Getty

Le président Daniel Ortega a suspendu 2 600 organisations à but non lucratif au Nicaragua en 2022, dont un orphelinat, une association de théologiens et de nombreuses autres organisations chrétiennes. La répression des critiques a commencé en 2018, lorsque la police a tué plus de 300 étudiants protestataires dans le conflit le plus meurtrier que le pays ait connu depuis la guerre des Contras. En 2021, Ortega a été réélu de manière triomphale après avoir emprisonné des opposants et dissous des partis d’opposition. Le gouvernement a interdit l’accès du pays à la presse étrangère, qualifié l’Église catholique de « fomenteuse de coup d’État », arrêté de nombreux prêtres, fermé les stations de radio religieuses, puis s’est attaqué aux organisations à but non lucratif. La belle-fille du président, qui l’a accusé d’abus sexuels en 1998, estime qu’Ortega mène « une guerre contre la vérité ».

Haïti : Des kidnappeurs de missionnaires mis à prix

Le gouvernement américain a déclaré vouloir imposer une réponse à trois Haïtiens dirigeant le gang qui a enlevé 17 missionnaires anabaptistes en 2021. Le secrétaire d’État Antony Blinken a annoncé que le gouvernement donnera un million de dollars pour toute information menant à l’arrestation de Joseph Wilson, qui se fait aussi appeler Lanmò Sanjou ; Jermaine Stephenson, également connu sous le nom de Gaspiyay ; et Vitel'Homme Innocent. Le gang des 400 Mawozo a enlevé 17 missionnaires américains et canadiens alors qu’ils visitaient un orphelinat haïtien. Cinq d’entre eux avaient d’abord été libérés, probablement après le paiement d’une rançon, et les douze autres ont pu échapper à leurs ravisseurs après deux mois de captivité. Les experts estiment que le gang a une influence politique croissante.

Brésil : Soupçons d’escroquerie pyramidale aux cryptomonnaies

Le fils éminent d’un pasteur pentecôtiste a été arrêté par la police fédérale et accusé de fraude financière impliquant des cryptomonnaies. Patrick Abrahão, 24 ans, faisait la promotion de ses plans d’investissement auprès de ses abonnés Instagram et de ceux de son père, promettant à un moment donné des rendements annuels de 300 %. Il a ensuite cessé de payer les investisseurs tandis qu’Ivonélio Abrahão da Silva, fondateur du Mouvement international pour la restauration des nations, cherchait à les rassurer en leur disant que tout allait bien. Le père et le fils étaient tous deux d’éminents partisans de Jair Bolsonaro.

États-Unis : Exposition d’un document évangélique de référence

Un exemplaire rare d’un document du Second grand réveil prônant un « simple christianisme évangélique » est désormais exposé à l’Abilene Christian University, au Texas. La Declaration and Address de Thomas Campbell, publiée en 1809, est considérée comme un point de repère dans l’histoire chrétienne américaine. Le texte rejetait les credo et les dénominations et encourageait l’unité de l’Église par « la libéralité généreuse des amis sincères du christianisme authentique » et un engagement renouvelé envers les éléments essentiels de la foi. L’auteur et son fils, Alexander, ont par la suite joint leurs efforts à ceux d’un revivaliste de Cane Ridge, Barton W. Stone, pour former le mouvement Stone-Campbell, qui a donné naissance aux Églises du Christ, à l’Église chrétienne indépendante et au mouvement des Disciples du Christ. Il ne subsiste que six exemplaires de Declaration and Address.

Danemark : Les chrétiens-démocrates envisagent leur retrait

Un parti pro-vie vieux de 51 ans n’a pas réussi à obtenir de siège au Parlement danois lors des élections de l’automne, n’atteignant que 0,5 % des voix. Les chrétiens-démocrates n’ont remporté aucune élection nationale depuis 2005, et la direction du parti envisage de se retirer complètement de la politique nationale. Au Danemark, l’avortement est autorisé au-delà du premier trimestre de grossesse pour une grande diversité de raisons.

Nigeria : Premier festival national de cantiques

L’artiste reggae et gospel Buchi Atuonwu a accueilli le tout premier festival national de cantiques du Nigeria. Des équipes de louange et des chorales de l’Église évangélique « Winning All », de la communauté pentecôtiste du Nigeria, de l’Église catholique et des Églises de sainteté « white garment » se sont réunies à l’université de Lagos pour disputer un premier prix de 2 millions de nairas nigérians (environ 4 500 dollars américains). Atuonwu a également réuni une chorale œcuménique de 2 022 personnes pour témoigner de l’unité de l’Église. Pour lui, les grands hymnes qui soutiennent la foi doivent être célébrés.

Irak : Un chrétien tué à Bagdad

Un travailleur humanitaire chrétien américain a été tué par balle dans sa voiture près de son domicile à Bagdad. Stephen Troell, enseignant au Global English Institute, a été arrêté par une voiture puis tué par des assaillants d’une autre voiture, selon la police locale. Sa femme et son enfant étaient avec lui, mais n’ont pas été blessés. Personne n’a revendiqué l’attaque. Les attaques contre les étrangers sont rares en Irak depuis la défaite de l’État islamique en 2017. Le gouvernement irakien actuel, qui s’est engagé à remanier le système politique mis en place après l’invasion américaine, a récemment reçu un vote de confiance du parlement.

Russie : Distribution de bibles en chinois à Moscou

L’association Bibles for China a distribué 50 000 bibles en chinois aux Églises de Moscou. À l’origine, le groupe prévoyait de les distribuer du côté russe de la frontière entre la Russie et la Chine, dans l’espoir que des travailleurs migrants, des hommes d’affaires et des acheteurs chinois s’en emparent et que les Écritures fassent leur chemin jusqu’aux foyers chinois. La personne chargée de la distribution prévue a cependant fui la Russie lorsque le gouvernement a commencé en octobre à procéder à la conscription en vue de la guerre avec l’Ukraine.

Hong Kong : Un pasteur condamné pour des propos sur le système judiciaire

Un pasteur a été reconnu coupable de sédition et condamné à un an de prison. Garry Pang Moon-yuen a été arrêté après avoir assisté au procès d’une militante qui avait organisé une veillée pour commémorer le massacre de la place Tian’anmen et l’avoir applaudie dans la salle d’audience. Les autorités disent avoir découvert des vidéos sur YouTube montrant le pasteur en train d’inciter à la rébellion contre le gouvernement. Pang, qui par le passé dirigeait l’Église chrétienne chinoise d’Oxford en Angleterre, avait décrit et commenté les procédures judiciaires. Il affirme que la police et les tribunaux utilisent l’ancienne loi britannique et la récente loi sur la sécurité nationale pour écraser la dissidence démocratique et instaurer un contrôle autoritaire accru.

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L’apôtre Pierre et les chrétiens qui ont pris d’assaut la capitale du Brésil

Cet apôtre passionné savait ce qu’est le zèle religieux. Son évolution dans la manière de le canaliser a changé le monde.

Des manifestants, partisans de l’ancien président brésilien Jair Bolsonaro, s’agenouillent pour prier alors qu’ils prennent d’assaut le palais Planalto à Brasilia, au Brésil.

Des manifestants, partisans de l’ancien président brésilien Jair Bolsonaro, s’agenouillent pour prier alors qu’ils prennent d’assaut le palais Planalto à Brasilia, au Brésil.

Christianity Today January 16, 2023
Adaptations par Christianity Today/Image source : Eraldo Peres/AP Images

En tant que Brésilien, je me souviendrai du 8 janvier 2023 comme de l’un des pires jours pour la démocratie de mon pays. En tant qu’évangélique, je m’en souviendrai aussi comme l’un des jours les plus sombres pour l’Église de mon pays.

Ce dimanche, des dizaines de citoyens en colère sont arrivés à Brasilia et ont pris d’assaut le Congrès national, la Cour suprême et le palais du Planalto, arrachant des meubles, endommageant des tableaux, brisant des fenêtres et frappant des journalistes. Ces extrémistes étaient des partisans de l’ancien président Jair Bolsonaro qui croient à tort que l’élection de 2022 a été truquée.

Les images vidéo de l’attaque de dimanche montrent la violence des vandales. Mais elles révèlent également que certains manifestants portaient des bibles, priaient avant d’entrer au Congrès et chantaient des cantiques alors qu’ils étaient détenus par la police fédérale — ce qui laisse comprendre que beaucoup étaient des évangéliques, une composante importante de la base électorale de l’ancien président.

« Le Brésil appartient au Seigneur Jésus. Le Congrès est notre église. Le Congrès est l’église du peuple de Dieu. Si vous êtes un chrétien, venez au Congrès. Le Congrès est à nous, le peuple de Dieu, jusqu’à l’intervention militaire. » Extrait d’une vidéo filmée au Congrès national, mise en ligne par Clayton Nunes.

Malheureusement, les germes de l’extrémisme qui a atteint son apogée dimanche ont en partie été semés et cultivés par des Églises évangéliques. Certaines d’entre elles ont soutenu Bolsonaro et fait campagne pour lui lors des dernières élections, amplifiant la polarisation, les discours de haine et la radicalisation. Dans leur appui extravagant à Bolsonaro, certains leaders évangéliques ont fait d’un politicien grossier, violent et cupide un « homme de Dieu ».

Au-delà de la manière dont de nombreux membres d’Églises évangéliques ont cultivé une proximité inadéquate avec Bolsonaro tout au long de sa présidence et de sa campagne de réélection, de nombreux responsables chrétiens ont peiné à manifester la réalité du fruit de l’Esprit dans leur engagement politique. Tout en appelant publiquement l’Église à défendre les valeurs familiales, trop de pasteurs ont été eux-mêmes en proie à la haine, à la rancœur, à la violence, à un esprit de division et à l’orgueil envers leurs adversaires politiques — des œuvres de la chair qui, selon Paul, empêchent d’entrer dans le royaume de Dieu (Ga 5.19-21).

Ces dernières années, diverses Églises ont entretenu un rapport pour le moins léger avec la vérité et ont trop souvent partagé de manière irresponsable des théories du complot. En 2022, certains chrétiens ont affirmé que des groupes de gauche se battaient pour la légalisation de la pédophilie. Depuis que Lula a revendiqué la victoire au second tour d’octobre, des chrétiens ont rejoint nombre de leurs compatriotes pour suggérer que les résultats du second tour de l’élection découlaient d’une fraude électorale.

Au lendemain de l’assaut contre le gouvernement, un sondage réalisé le 10 janvier par l’Instituto Atlas révélait que 67,9 % des évangéliques brésiliens pensent que Lula n’a pas réellement gagné les élections, 64,4 % estiment que l’assaut était justifié et 73,8 % pensent que Bolsonaro n’en est pas responsable.

Après les élections, des bolsonaristes ont installé des campements devant des casernes dans tout le pays, demandant à l’armée d’intervenir et de chasser Lula du pouvoir. Il y a quelques jours, alors que la police de Belo Horizonte démantelait un camp, un homme invoquait Dieu en mauvais hébreu : « Yauh, Yauh, s’il te plaît, ne le permets pas, Yauh. »

La prière était fervente et désespérée. Elle semblait également sincère et révélait une théologie qui avait encouragé le désespoir, le fanatisme et une attitude révolutionnaire — peut-être soutenue depuis la chaire. Nous avions là tous les ingrédients pour démolir une démocratie et ternir le témoignage chrétien. Autant de signes avant-coureurs de la tragédie à venir.

Je crains que nous ayons vu ce dimanche les fruits des pires tendances de l’Église, y compris le ressentiment envers le président et une partie de nos concitoyens brésiliens, une aversion pour la vérité, et une volonté d’embrasser la violence plutôt que la protestation non violente lorsque les choses ne vont pas dans le sens souhaité.

Ce n’est pas en faisant basculer les résultats en faveur d’un autre parti que l’on évitera ces choses lors de prochaines élections délicates. Au contraire, pour les chrétiens de toutes tendances politiques, il serait plutôt temps de nous reconnaître dans la vie et l’exemple de l’apôtre Pierre, puis de suivre les conseils qu’il nous donne pour vivre notre foi dans des circonstances difficiles ou des contextes où nous ne sommes pas nécessairement d’accord entre nous.

Pierre, passion et transformation du cœur

La Bible rapporte l’histoire d’êtres humains qui font des erreurs, qui pèchent et qui sont pourtant appelés par Dieu à la repentance et la conversion. L’apôtre Pierre est l’une de ces personnes. Il apparaît dans les Évangiles comme quelqu’un qui aime profondément Jésus, mais qui est enclin aux prétentions égoïstes, aux déclarations irréfléchies, voire aux décisions violentes. Pierre passe fréquemment et passionnément à côté du sujet. Il se dispute avec Jacques pour savoir qui s’assiéra un jour à la droite de Jésus. Il dit à Jésus qu’il ne le reniera jamais, et il coupe l’oreille d’un homme lorsque Jésus est arrêté. Même après que le Seigneur lui ait pardonné son reniement et que Pierre ait répandu l’Évangile après la première Pentecôte, il peine à surmonter sa xénophobie à l’idée de partager sa foi avec les païens.

Bien que peu enclin à faire taire ses émotions, quelques années après ses débordements malencontreux, Pierre écrit ainsi à des chrétiens qui cherchent à vivre leur foi avec audace :

Dans vos cœurs, révérez le Christ comme Seigneur. Soyez toujours prêt à répondre à tous ceux qui vous demandent de donner la raison de l’espérance qui est la vôtre. Mais faites-le avec douceur et respect, en toute bonne conscience, afin que ceux qui parlent malicieusement de votre bonne conduite dans le Christ aient honte de leur calomnie. (1 P 3.15-16)

La première exhortation de Pierre, « Dans vos cœurs, révérez le Christ comme Seigneur », met immédiatement de l’ordre dans nos priorités et nous appelle à vérifier si nous ne céderions pas à l’idolâtrie. Notez que Pierre écrit à des personnes qui croient en Jésus. Pourtant, il demande encore à ces chrétiens de s’assurer que le Seigneur est bien au centre. Cela implique non seulement de croire en Jésus, mais aussi de suivre sa parole et son exemple dans nos actions. Pour ce qui est des événements que nous avons vécus, Jésus ne cautionne nulle part le nationalisme ou la sédition — deux tendances politiques courantes dans le cadre du messianisme de son époque. Au contraire, le Seigneur n’a pas seulement fait l’éloge des Samaritains, il a aussi intégré les zélotes et les collecteurs d’impôts parmi ses disciples : opposants à l’occupant et collaborateurs.

S’adressant aux chrétiens vivant dans un monde hostile, l’apôtre Pierre — le même Pierre qui, auparavant, tenant d’une foi à la fois agressive et lâche, avait coupé l’oreille de Malchus et renié Jésus trois fois — explique comment répondre à qui nous demande la raison de notre espérance. Pierre utilise deux substantifs : la douceur (πραΰτητος), évoquant humilité et gentillesse, et le respect (φόβου), évoquant aussi révérence et crainte. Dans les rapports entre personnes, la douceur traduit une attitude d’humilité ou de soumission. De même, le respect renvoie à un sentiment de profonde considération pour autrui.

L’idée d’avoir une bonne conscience revient ailleurs dans 1 Pierre ; « conscience » réapparaît en 1 Pierre 2.19 et à nouveau en 3.21. Dans les deux cas, le contexte est celui de l’attitude de soumission et de respect que les chrétiens doivent adopter, même lorsqu’ils sont maltraités ou persécutés.

Lorsque nous nous sentons lésés, il est nous arrive souvent de nous penser légitimes à contourner les règles, déformer la vérité et agir en considérant que « la fin justifie les moyens ». Mais en prenant le temps d’y réfléchir, nous verrons rapidement que c’est précisément ce genre d’actions qui discrédite les chrétiens aux yeux du reste du monde. En réalité, Pierre veut que notre caractère soit si irréprochable que — il vaut la peine de répéter ces mots — « ceux qui parlent malicieusement de votre bonne conduite en Christ aient honte de leur calomnie ».

Quel rapport y a-t-il donc entre Pierre et les chrétiens qui ont saccagé la capitale brésilienne dimanche ou portent une responsabilité dans cette attaque en raison de leur influence ? Leurs vies manifestent que le zèle religieux peut prendre des proportions excessives et devenir une idolâtrie, dérobant la place qui n’appartient qu’au Seigneur. Comme Pierre nous l’enseigne, vivre selon les enseignements de Jésus signifie le considérer comme Seigneur suprême de notre vie. Même les chrétiens d’entre nous qui pourraient (naïvement) croire qu’ils ne prendraient jamais part à quelque chose comme l’attaque de dimanche dernier devraient reconnaître que nous échouons tous régulièrement dans ce domaine.

Les évangéliques doivent vivre la même métanoïa, ou conversion spirituelle, que l’apôtre Pierre. Cette transformation s’est peut-être produite lorsqu’il a commencé à suivre deux instructions de son Maître : au lieu de couper les oreilles, « range ton épée » (Jean 18.11), et au lieu de renier Jésus par peur ou par lâcheté, « prends soin de mes brebis » (Jean 21.16).

Gutierres Fernandes Siqueira est journaliste et théologien. Il est l’auteur de cinq livres, dont Quem tem medo dos evangélicos ? (« Qui a peur des évangéliques ? » — Mundo Cristão.) Il vit à São Paulo et est membre d’une Assemblée de Dieu (Ministério do Belém) dans cette ville.

Reportage additionnel par Marisa Lopes et Mariana Albuquerque

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Lumière du monde, espoir des nations

Méditation pour le jour de l’Épiphanie.

Méditation de l’Avent 2022.

Méditation de l’Avent 2022.

Christianity Today January 6, 2023
Stephen Crotts

Lisez Matthieu 2.1-12 et Ésaïe 49.6 , 60.3

En revoyant l’étoile, les mages furent remplis de joie. Ils entrèrent dans la maison, virent l’enfant […] et, tombant à genoux, ils lui rendirent hommage. MATTHIEU 2.10-11

Tout au long de l’histoire, les humains ont levé les yeux vers le ciel nocturne à la recherche de signes venant d’en haut. Cette orientation a conduit de nombreuses personnes à vénérer les étoiles et les corps célestes. En Genèse 1, le soleil et la lune ne sont pas désignés de la manière habituelle ; ils sont décrits comme le grand et le petit luminaires (v. 16), probablement pour éviter les noms couramment invoqués dans le culte des idoles dans le Proche-Orient ancien.

Pourtant, Dieu allait bientôt utiliser cette même recherche humaine de signes dans les étoiles pour révéler son alliance : il ordonna à Abraham de lever les yeux et d’observer les innombrables étoiles, préfigurant la bénédiction de sa descendance pour les nations. Des centaines d’années plus tard, pourtant, alors que les enfants d’Abraham étaient exilés à Babylone, les ténèbres des nations paraissaient avoir dévoré la lumière. L’espoir semblait perdu.

Mais Matthieu 2 nous fait assister à un renversement salutaire inattendu ! Des mages — issus d’une élite connue pour sa pratique de l’astrologie (et son idolâtrie) et venant probablement de la région où le peuple de Dieu avait été exilé — sont conduits à la foi en la promesse d’Abraham par leur étude du ciel. Les récits transmis par Daniel et les exilés de Babylone étaient-ils en train de s’accomplir ? S’aventurant probablement sur le même trajet de plus de 1400 kilomètres de l’ancienne Babylone à Jérusalem que les exilés de retour au pays avaient fait tant d’années auparavant, les mages cherchaient une réponse à une seule question : « Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? ».

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Leur quête révèle une profonde aspiration spirituelle : « Nous avons vu se lever son étoile, et nous sommes venus lui rendre hommage ». Leur voyage était un accomplissement de la vision prophétique d’Ésaïe et un avant-goût de ce qui devait arriver : « je t’établirai pour être la lumière des autres peuples afin que mon salut parvienne aux extrémités de la terre. » (49.6). La « petite lumière » de l’étoile, orienta les Mages vers la « grande lumière » de la petite ville de Bethléem, suffisamment brillante pour éclairer toutes les nations. La lumière est entrée dans le monde, et les ténèbres ne l’ont pas étouffée.

La lumière de l’Épiphanie — l’apparition de Dieu dans la venue de Jésus — continue d’offrir un espoir à toutes les nations qui tâtonnent dans l’obscurité à la recherche de la vérité divine. Et comme nous le montrent les mages, c’est une nouvelle trop belle pour être gardée pour nous ! Ces mages venus d’Orient continuent de nous enseigner que nous aussi, nous sommes appelés à voyager et partager la nouvelle que Jésus est la Lumière du monde et l’espoir des nations. Comme nous le dit l’Écriture : « vous êtes un peuple élu, une communauté de rois-prêtres, une nation sainte, un peuple que Dieu a pris pour sien, pour que vous célébriez bien haut les œuvres merveilleuses de celui qui vous a appelés à passer des ténèbres à son admirable lumière » (1 P 2.9).

Rasool Berry est pasteur enseignant de l’Église The Bridge à Brooklyn, New York. Il est également l’hôte du podcast Where Ya From?.?

Réfléchissez à Matthieu 2.1-12 et à Ésaïe 49.6 ; 60.3.


Que révèle la visite des Mages sur l’identité et la mission de Jésus ? Comment l’Esprit vous incite-t-il à répondre à ce Jésus en tant que Lumière du monde ?

Jour de Noël

Méditation de l’Avent pour le 25 Décembre.

Méditation de l’Avent 2022.

Méditation de l’Avent 2022.

Christianity Today December 25, 2022
Stephen Crotts

Semaine 4: Emmanuel


En parcourant les événements entourant la Nativité, nous contemplons l’Incarnation. Jésus — le Dieu fort, le Prince de la paix, la Lumière du monde — s’est fait chair et a habité parmi nous. Comme l’annonçait la prophétie d’Ésaïe, il est « Dieu avec nous ». Jésus est Emmanuel.

ÉSAÏE 9.5– 6

Car un enfant est né pour nous, un fils nous est donné. Et il exercera l’autorité royale ; il sera appelé Merveilleux Conseiller, Dieu fort, Père à jamais et Prince de la paix. Il étendra sa souveraineté et il instaurera la paix qui durera toujours au trône de David et à tout son royaume. Sa royauté sera solidement fondée sur le droit et sur la justice, dès à présent et pour l’éternité.

Lisez Ésaïe 7.14 et 9.1-7


Célébrez dans la joie la naissance de Jésus.

En voyant Jésus, ils surent.

Méditation de l’Avent pour le 24 Décembre.

Méditation de l’Avent 2022.

Méditation de l’Avent 2022.

Christianity Today December 24, 2022
Stephen Crotts

Semaine 4: Emmanuel


En parcourant les événements entourant la Nativité, nous contemplons l’Incarnation. Jésus — le Dieu fort, le Prince de la paix, la Lumière du monde — s’est fait chair et a habité parmi nous. Comme l’annonçait la prophétie d’Ésaïe, il est « Dieu avec nous ». Jésus est Emmanuel.

Lisez Luc 2.22-40

Car mes yeux ont vu ton salut, que tu as préparé aux yeux de toutes les nations. LUC 2.30-31

Il est difficile d’être parent, et être parent pour la première fois apporte un poids supplémentaire de difficultés. Tout est nouveau — de la sensation des premiers battements de la vie dans le ventre de la mère aux premiers moments de la rencontre avec votre enfant, puis le premier bain, les premiers repas, les premiers mots et les premiers pas. Il y a tellement de premières fois !

Imaginez ce qu’ont vécu Joseph et Marie, voyageant avec leur nouveau-né de Bethléem à Jérusalem. Le voyage à pied devait prendre quelques heures. Dans une obéissance fidèle, ils firent la route pour la première fois en tant que tout nouveaux parents, se joignant à la coutume de se consacrer à Dieu avec leur enfant.

Tout se passait selon la coutume jusqu’à l’arrivée du juste et pieux Siméon. Il avait attendu la délivrance d’Israël, et en entrant dans les cours du temple, il vécut aussi une première fois. Dieu accomplit sa promesse que Siméon vivrait pour voir le Messie. En voyant l’enfant Jésus, il sut.

Et Siméon ne s’est pas contenté de le voir. Il l’a tenu dans ses bras. À cet instant, Siméon comprit de manière tangible que le salut de Dieu annoncé par les prophètes serait non seulement mondial, mais aussi intime et personnel. Le salut lui-même était incarné dans l’enfant qui babillait et gigotait dans ses bras. Pendant que Siméon adorait et parlait du salut de Dieu, Marie et Joseph s’émerveillaient, se souvenant probablement de l’instruction des anges leur demandant de nommer leur enfant Jésus, un nom évoquant le salut de Dieu.

Pendant que Siméon parlait à Marie, Anne s’approcha d’eux et confirma le cantique d’adoration prophétique de Siméon en louant elle-même Dieu. Pendant des décennies, la vie entière d’Anne avait été centrée sur l’adoration de Dieu, la prière et le jeûne. En voyant Jésus, Anne sut. Elle sut que c’était l’enfant qu’ils attendaient pour la rédemption du peuple de Dieu, et elle parla de Jésus à tous ceux qui voulaient l’entendre. La lumière promise aux nations était arrivée.

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En Marie et Joseph, en Siméon et Anne, nous voyons des instantanés de ce que sont la dévotion à Dieu et une vie juste. Nous voyons l’obéissance et la foi, la discipline et le dévouement, l’attente et l’adoration. Ils ont vu Emmanuel. Ils ont tenu Emmanuel dans leurs bras. Ils ont connu Emmanuel. Ils ont parlé d’Emmanuel.

Alors que nous célébrons cet Emmanuel en cet Avent, marchons dans l’obéissance fidèle comme Marie et Joseph. Entraînons-nous à être dévoués, sincères et remplis d’adoration comme Siméon. Prions, jeûnons et parlons de Jésus à tous ceux qui veulent l’entendre, comme Anne. Il n’y a de rédemption en aucun autre nom.

Kristie Anyabwile est l’autrice de Literarily: How Understanding Bible Genres Transforms Bible Study et l’éditrice de His Testimonies, My Heritage.

Méditez Luc 2.22-40.


Qu’est-ce qui est le plus saisissant pour vous dans l’histoire de Siméon et d’Anne ? Comment leur exemple — et celui de Marie et de Joseph — vous encourage-t-il et vous inspire-t-il en cette veille de Noël ?

Chrétiens dans et face à la Coupe du monde

Des chrétiens ont brillé durant la compétition sportive la plus suivie au monde. Face au coût humain de cet événement, des questions demeurent cependant…

Christianity Today December 23, 2022
Associated Press

Alors que des millions de chrétiens célébraient le quatrième dimanche de l’Avent, des millions de personnes étaient aussi rivées à leur écran, suivant avec passion la finale de la Coupe du monde qui a vu l’équipe argentine couronnée. Malgré un âge déjà avancé dans le milieu, le capitaine de l’équipe Lionel Messi, 35 ans, a été sublime dans la compétition, avec sept buts et quatre passes décisives à son actif, et a remporté le Ballon d’or pour sa cinquième Coupe du monde.

Bien que le réservé Messi, dont le bras droit porte un tatouage montrant Jésus couronné d’épines, n’ait pas exprimé sa foi ouvertement, si ce n’est en montrant le ciel après ses buts, cette Coupe du monde était aussi marquée par la présence de plusieurs chrétiens professants.

À la tête de l’offensive française contre l’Argentine se trouvait l’attaquant de 36 ans Olivier Giroud, le Psaume 23 tatoué en latin sur son bras droit : « Le Seigneur est mon berger. Je ne manquerai de rien ». Pendant cette Coupe du monde, Giroud est devenu le meilleur buteur de l’histoire de la France avec quatre buts magnifiques.

Si Kylian Mbappé, tête de proue de l’équipe, s’est montré à la hauteur des espérances avec sa vitesse fulgurante et ses tirs meurtriers, Giroud a fourni un point de convergence fiable en attaque et son jeu désintéressé a créé des ouvertures pour ses coéquipiers. « J’essaie de parler de ma foi chaque fois que je le peux », déclarait-il après avoir remporté la Coupe du monde en 2018. « Je sens que je dois utiliser mon exposition médiatique pour parler de mon engagement envers Jésus-Christ. »

Pendant la majeure partie de la dernière décennie, alors que Giroud jouait pour deux clubs de Londres, il a fréquenté l’Église St Barnabas de Kensington, qui appartient à l’aile évangélique de l’Église d’Angleterre. Lors du quart de finale de la France contre l’Angleterre, où il a marqué de la tête pour assurer la victoire 2-1 des Bleus, il faisait face à une nouvelle génération d’ailiers anglais qui vivent leur foi chrétienne avec grâce.

Avec trois buts chacun, les Anglais Marcus Rashford et Bukayo Saka ont brillé au Qatar. Tous deux ont été élevés dans des Églises pentecôtistes noires, et Rashford, 25 ans, s’est déjà fait un nom en tant qu’activiste et philanthrope contre le racisme et le sans-abrisme. À 21 ans, Saka a fait la couverture du Time après avoir été élu meilleur joueur anglais de l’année. Il a confié qu’il lisait la Bible tous les soirs pour trouver « la paix et le bonheur ». Bien que Rashford et Saka aient reçu des insultes racistes en ligne après avoir manqué les tirs au but en finale de l’Euro 2020, ils ont tous deux été salués pour leur résilience et pour avoir favorisé une saine camaraderie au sein de l’équipe anglaise.

L’Angleterre a affronté l’équipe nationale masculine des États-Unis en phase de groupe, et la solide défense américaine, menée par Walker Zimmerman, fils d’un pasteur, a permis aux outsiders d’obtenir un respectable match nul contre la redoutable Angleterre. Emmenant son fils d’un an à l’entraînement, Zimmerman a été un leader crucial à l’arrière. Il soutient par ailleurs le contrôle des armes à feu et l’égalité raciale et de genre, en faveur notamment de l’égalité salariale avec l’équipe nationale féminine des États-Unis.

Zimmerman a un compagnon de foi en la personne de Christian « Captain America » Pulisic, qui a marqué le but victorieux contre l’Iran pour envoyer l’équipe américaine en phase éliminatoire, tout en souffrant d’une blessure abdominale après avoir percuté le gardien de but adverse. L’année dernière, Pulisic déclarait à GQ que son transfert à Chelsea, pour un montant de 73 millions de dollars, l’avait rapproché de Dieu, malgré la forte concurrence pour son poste de meneur de jeu et les blessures qu’il y a subies. Deux mois avant la Coupe du monde, il postait le Psaume 147.11 sur Instagram : « Le Seigneur prend plaisir à ceux qui le craignent, qui mettent leur espoir dans son amour indéfectible. »

De l’autre côté du terrain, le gardien numéro 1 du Brésil, Alisson Becker, a réalisé des arrêts spectaculaires pour enregistrer deux sans faute et ne concéder que deux buts en quatre matchs. Bien qu’une frappe croate malheureusement déviée à la 117e minute ait éliminé les favoris en quart de finale, Alisson retournera à Liverpool où il est entouré de fidèles frères en Christ. Son charismatique entraîneur Jürgen Klopp est un chrétien convaincu, et Alisson a baptisé son coéquipier Robert Firmino dans une piscine de sa maison. Leur coéquipier Virgil van Dijk a même surnommé Alisson, qui est membre d’une Église Hillsong à Liverpool, le « saint gardien ».

Malgré la déception d’une élimination en quart de finale, le sélectionneur brésilien sortant Tite a offert à son équipe de quoi se réjouir. Fervent catholique, Tite a donné du temps de jeu aux 26 joueurs de sa liste au Qatar et a dansé avec ses joueurs pour célébrer la cascade de buts lors de la victoire 4-1 du Brésil sur la Corée du Sud. Pendant la Coupe du monde 2018, il avait assisté à la messe en Russie et il a été vu avec un chapelet lors d’un entraînement au Qatar.

L’équipe la plus pieuse a peut-être été l’Équateur. Un jour avant le début du tournoi, le milieu de terrain Carlos Gruezo partageait une vidéo de lui et de ses coéquipiers en train de prier. « Aujourd’hui commence une nouvelle histoire et celui qui guide nos pas, c’est Dieu », écrivait-il en légende. « Sans toi, nous ne pouvons rien faire. Nous te rendons toute la gloire et l’honneur. »

https://www.instagram.com/reel/ClLWSLJvyvb/

Après que le coéquipier de Guerzo, Enner Valencia, ait transformé un penalty lors du premier match de l’Équateur en Coupe du monde contre le pays hôte, le Qatar, lui et ses coéquipiers se sont rassemblés en cercle, à genoux, levant les mains pour louer Dieu.

Alors que beaucoup espéraient mettre fin à la domination des équipes européennes lors des dernières Coupes du monde, l’entraîneur marocain Walid Regragui a fait les gros titres en menant la première nation arabe et africaine en demi-finale. Bien que sa foi soit inconnue, il a assurément incarné l’impératif biblique d’honorer son père et sa mère en invitant les familles de ses joueurs à les rejoindre gratuitement au Qatar. L’une des images les plus émouvantes de la Coupe du monde a été celle de l’arrière droit marocain Achraf Hakimi courant vers sa mère dans les tribunes pour l’embrasser après la victoire historique du Maroc sur la Belgique. « Notre réussite n’est pas possible sans le bonheur de nos parents », déclarait Regrarui.

Si les supporters marocains ont rejoint les rangs des supporters argentins et brésiliens parmi les plus fervents du monde pendant cette Coupe, les plus appréciés ont été les supporters japonais. Le nettoyage des stades avec des sacs poubelles bleus après les victoires de leur pays sur les poids lourds que sont l’Allemagne et l’Espagne est devenu viral et a inspiré des actes de nettoyage similaires. Les Samurai Blues ont également laissé leurs vestiaires impeccables après chaque match, ce qui leur a valu le respect de la FIFA.

La Coupe du monde de football du Qatar n’aurait cependant pas été possible sans les centaines de milliers de travailleurs migrants originaires des pays d’Asie du Sud qui ont construit le stade, souvent à grand coût pour eux-mêmes. Plus de 2 000 travailleurs népalais sont morts au Qatar depuis 2010 alors qu’ils construisaient des stades extravagants sous une chaleur torride et dans des conditions atroces. D’autres souffriront de douleurs chroniques pour le reste de leur vie, tandis que leur famille restera embourbée dans les dettes et la pauvreté.

« Leur mort [celle des travailleurs migrants] a été acceptée et n’a pas fait l’objet d’une enquête, leurs familles ne sont pas indemnisées de manière adéquate », écrit le vainqueur de la Coupe du monde 2014 et ancien capitaine de l’Allemagne Philipp Lahm, un chrétien, pour expliquer pourquoi il a boycotté le Qatar.

Parmi les derniers mots du journaliste de football américain Grant Wahl, décédé pendant la Coupe du monde, on trouve une critique cinglante de l’apathie face à la souffrance des autres.

« Ils s’en fichent tout simplement », écrivait-il à propos de la mort d’un autre travailleur migrant dans l’un des centres d’entraînement de l’équipe, survenue pendant le tournoi.

Lorsque nous retournerons au culte après avoir applaudi la victoire de Messi ce dimanche, nous devrions peut-être nous demander si l’accusation de Wahl s’applique à nous.

J. Y. Lee est un doctorant au séminaire de Princeton et un écrivain indépendant qui avait réalisé un reportage au Brésil pendant la Coupe du monde 2014.

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