Tom Brown, un héros ?

En détruisant la création de Dieu, nous nous privons de son appel à l’adoration.

Christianity Today October 15, 2021
John Fedele / Getty / Edits by Rick Szuecs

Un article de juin 2021 sur le site Atlas Obscura offrait ce sous-titre : « Le passe-temps auquel Tom Brown consacre sa retraite est une aubaine pour les cuisiniers, les écologistes et le cidre ». J’ajouterais : « et pour l’Église ».

Brown, un ingénieur chimiste à la retraite, a passé ces dernières années à rechercher des variétés de pommes oubliées ou perdues. Au début du 20e siècle, il y avait environ 14 000 variétés de pommes aux États-Unis. Mais comme le rapporte Eric J. Wallace dans l’article d’Atlas Obscura, « à la fin des années 1990, la production indigène de pommes destinées au marché intérieur américain reposait sur moins de 100 variétés ! »

Au cours des 25 dernières années, Brown « a retrouvé environ 1 200 variétés, et son verger d’un hectare […] contient 700 des plus rares d’entre elles » — jaunes tachetées, rouges ou vertes, avec des surnoms tels Carolina Beauty ou Sheepnose. Pourtant, poursuit Wallace, « les experts ont estimé qu’environ 11 000 variétés anciennes ont disparu ». Autant de subtiles nuances de douceur, d’acidité, de couleur et de texture. Autant de glorieux parcours de culture ou d’hybridation. Disparus. Remplacés par l’homogénéité industrielle.

Les débats sur la biodiversité peuvent s’enliser dans des échanges abstraits. L’ampleur de la catastrophe environnementale pourrait plonger n’importe qui dans une inhibition paralysante. Le problème est trop complexe, trop difficile à saisir dans sa globalité. Mais dans les particularités des oiseaux du jardin, des vers de terre et des variétés de pommes, les questions concernant la création me deviennent compréhensibles.

Comme Matthew Sleeth, défenseur de la cause environnementale, le souligne à juste titre, si l’on comprend que le changement climatique est bien d’origine humaine, on en déduit intuitivement que le monde est en train de mourir. Ne devrions-nous pas alors, en tant qu’Église, nous lamenter devant ce dépeuplement des cieux et des mers qui défigure non seulement la terre mais aussi notre foi ? La destruction de la création affecte inévitablement notre éthique et le culte que nous rendons à Dieu.

Toute disparition d’espèce, végétale ou animale, signe la perte de quelque chose qui, au départ, a été conçu avec un amour infini. La nature est une icône, une fenêtre sur le ciel de Dieu. Lorsque nous détruisons l’icône, nous ne pouvons plus entendre son appel à l’adoration.

Dans son livre Against Nature (« Contre la nature »), Steven Vogel écrit que lorsque la nature est réduite à une simple fonction d’objet, nous voyons la création comme l’obstacle « à surmonter et maîtriser pour satisfaire les besoins matériels humains ». Il en résulte une « séparation fondamentale des humains et de la nature ».

Le monde créé cesse d’être un lieu qui reflète la gloire de Dieu, un lieu d’émerveillement. Il devient au contraire la matière brute qui alimente l’exploitation commerciale et la consommation personnelle irréfléchie. Un monde déraciné est un monde sans Dieu.

De plus, notre vision de la nature a un impact considérable sur notre théologie, nos croyances et notre éthique. Si la création est dévalorisée, nous perdons notre identité de créatures incarnées et le sens de nos existences. Si la perte de 11 000 variétés de pommes n’pas de sens, alors pourquoi la façon dont j’utilise mon corps serait-elle si importante ? Et d’ailleurs pourquoi les corps sont-ils si importants après tout ?

Dans un éditorial sur l’éthique sexuelle chrétienne, Andy Crouch écrivait que « la question du corps est un des éléments-clé d’une saine théologie sexuelle. Car derrière le rejet du corps se cache en fin de compte un dégoût gnostique pour l’incarnation en général ».

Bien que je parle beaucoup de la sainteté de l’incarnation, je flirte régulièrement avec le gnosticisme. Je passe mes journées à discuter avec des collègues sur des écrans. Je mange de la nourriture qui apparaît comme par magie sur ma table sans avoir à me salir les mains puisque je n’ai participé ni à la plantation ni à la récolte des ingrédients qui la composent. Mes écrits et mes prédications me maintiennent dans un monde d’idées déconnectées de la réalité.

Pour beaucoup d’entre nous, nos corps semblent à peine nécessaires pour vivre. Avec notre déconnexion culturelle de la réalité, des limites et des rythmes du monde naturel, nous peinons à entretenir une théologie du corps qui apparaît aussi arbitraire qu’abstraite.

Une partie de la vocation de l’Église et de sa contribution pour aujourd’hui consiste à montrer aux gens comment vivre à nouveau en tant que créatures. Pour beaucoup, le chemin du retour à la foi ne se trouvera pas dans de meilleurs arguments en sa faveur — bien que ceux-ci soient importants — mais dans une relation plus profonde avec ce monde bien terrestre, poussiéreux, et glorieux dans lequel nous nous trouvons. Préserver la beauté de la création préserve notre adoration de Dieu.

Tom Brown est donc bel et bien un héros. Il a récupéré 1 200 échantillons de la délicieuse sagesse de Dieu – 1 200 témoins que la substance de la création, y compris notre corps, compte. Il a sauvé un trésor d’icônes aussi sacrées qu’une voûte parée d’or du Vatican.

J’espère lui ressembler davantage. J’espère me salir les mains aujourd’hui au contact de la terre. J’espère me promener ou apprendre à connaître une autre variété d’arbre dans mon jardin. J’espère manger des produits du potager récemment planté par mon mari et me rappeler que le Créateur m’a également créée. Il a fait de moi une partie de ce monde où les rochers, les rouges-gorges et même les pommes « crient » son nom.

Traduit par Jacques Lemaire

Révisé par Léo Lehmann

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Combattre l’anxiété avec l’Ancien Testament

Ces antiques écrits sont une étonnante source de soutien dans nos luttes contre le stress.

Christianity Today September 30, 2021
Illustration by Matt Chinworth

Cet article est le troisième d’une série de six essais rédigés par un panel d’éminents chercheurs qui réexaminent la place du « Premier Testament » dans la foi chrétienne contemporaine. — Les éditeurs

Statistiquement, je fais partie de la génération des « millenials ». Surnommés « la génération anxieuse », la plupart d’entre nous sommes stressés et en proie à une anxiété qui perturbe notre travail en moyenne deux fois plus qu’auparavant. Nous sommes leaders en matière de crise de santé mentale dans un environnement où beaucoup estiment que l’anxiété est en hausse pour tout le monde.

Jusqu’à récemment, je ne pensais pas être une personne anxieuse. Puis, en une seule année, j’ai terminé la rédaction de ma thèse de doctorat en Angleterre, j’ai occupé plusieurs emplois à temps partiel pour payer les factures, je me suis déchiré un ligament du genou (à la 36e semaine de grossesse de ma femme), je suis devenu père pour la première fois, j’ai trouvé un emploi universitaire, obtenu un visa de travail, déménagé outre-Atlantique, trouvé un logement, terminé mon premier trimestre d’enseignement et soutenu ma thèse de doctorat. Tout cela n’était pas forcément mauvais ni ne représentait la fin du monde. Certaines de ces choses étaient excellentes. Mais au bout du compte, j’ai fini épuisé et anxieux.

Mon histoire n’a rien d’exceptionnel. Les lieux de travail sont de plus en plus mobiles, ce qui crée un risque d’isolement et de surmenage. On dit aux jeunes d’aller n’importe où et de faire ce qui leur plaît, mais leur santé mentale en paie le prix fort. Et cela sans parler de problèmes plus graves comme la toxicomanie, les abus, les maladies chroniques, le chômage, le sans-abrisme et une foule d’autres fléaux qui affligent tant de personnes aujourd’hui. En réponse à cela, c’est toute une industrie du bien-être plus que florissante qui s’est développée, où l’offre va des thérapeutes Instagram, aux animaux de compagnie, en passant par les gadgets antistress. En tant que chrétien, il peut nous arriver de ressentir une certaine tension, voire même de nous sentir coupables, lorsqu’un médecin ou un livre de développement personnel paraît davantage améliorer notre santé mentale que la lecture de la Bible.

Ayant moi-même cherché une aide professionnelle pour gérer mon anxiété, je peux cependant affirmer que mon propre chemin de rétablissement s’est toujours ancré dans la Bible, en particulier dans le passage suivant, tiré de l’Ancien Testament : « N’aie pas peur, car je suis moi-même avec toi. Ne promène pas des regards inquiets, car je suis ton Dieu. Je te fortifie, je viens à ton secours ; je te soutiens par ma main droite, la main de la justice » (És 41.10). Si l’on en croit la sagesse des médias, ou même celle de certains responsables chrétiens, ma guérison n’était pas censée se produire de cette façon, pas à l’aide de ce poussiéreux Ancien Testament. Mais alors que d’autres préparent son cercueil et son éloge funèbre, je le trouve rempli de vie.

Heureusement, je ne suis pas le seul. Plusieurs de nos chants d’adoration les plus thérapeutiques regorgent de références à l’Ancien Testament, ainsi par exemple « J’élève un Alléluia » (« Raise a Hallelujah ») et « Béni soit ton nom » (« Blessed Be Your Name »). Le livre primé de Fleming Rutledge, The Crucifixion (« La crucifixion »), souligne comment les communautés qui endurent des générations de marginalisation puisent du réconfort dans les récits d’exil et de délivrance de l’Ancien Testament. On le voit dans le discours de Martin Luther King Jr. « I Have a Dream », dans lequel il utilisait des thèmes de l’Ancien Testament, dont une allusion au Psaume 30, pour réconforter son auditoire anxieux.

Les textes de la Bible — en particulier l’Ancien Testament — sont anciens, et ont été écrits bien avant la crise de santé mentale que nous vivons aujourd’hui. Mais ils ne sont pas pour autant sans rapport avec nos préoccupations, ni à reléguer simplement en toile de fond du Nouveau Testament, considéré comme plus pertinent. En fait, parce qu’il relate l’histoire de divers individus et leurs expériences les plus difficiles, l’Ancien Testament n’est pas si ancien. Il offre une forme particulière de thérapie de groupe.

Apprendre de l’expérience

La pertinence de l’Ancien Testament pour traiter l’anxiété tient d’abord à sa composition. Il est le produit du travail de dizaines d’auteurs au fil d’un millénaire entier. Il relate ainsi un nombre accablant d’événements traumatisants, du meurtre d’Abel à l’oppression d’Israël en Égypte, en passant par le viol de Tamar et l’exil à Babylone, pour n’en citer que quelques-uns. Cela change du Nouveau Testament, qui est si condensé et a été rédigé en si peu de temps que des événements similaires du premier siècle — comme la destruction du temple de Jérusalem ou l’éruption qui a rasé Pompéi et peut-être tué des dizaines de chrétiens de cette époque — n’y figurent pas.

Imaginez que vous vous trouviez près du site du World Trade Center le jour du 11 septembre 2001. Quelles pensées et quels sentiments éprouveriez-vous ? Dans de nombreux pays, la plupart de ceux qui étaient déjà nés au moment des attentats se souviennent de l’endroit où ils se trouvaient en ce jour fatidique et de ce qu’ils ont ressenti en regardant les images de l’effondrement des tours diffusées en boucle. Les expériences qui sous-tendent les textes de l’Ancien Testament ne sont pas très différentes. Presque tous les textes de l’Ancien Testament contiennent au moins un événement perturbant pour la société dans son ensemble — qu’il s’agisse d’une catastrophe naturelle, d’une invasion militaire, d’un exil national ou d’un scandale politique.

Il n’est donc pas surprenant que l’Ancien Testament contienne bien plus de ces fameux « N’ayez pas peur » bibliques que le Nouveau Testament. Ces documents distillent la sagesse des siècles, nous faisant pénétrer dans le conseil des plus anciens des anciens et des sages les plus avisés pour apprendre ce que ce que signifie avoir confiance en Dieu.

Faire preuve de solidarité

L’un des moyens par lesquels l’Ancien Testament apporte du réconfort aux anxieux est sa dépendance à l’égard de deux genres littéraires très attirants. Le premier est le récit historique, que l’on trouve dans des livres comme la Genèse ou Josué. Contrairement à certains profils sur les réseaux sociaux qui sont soigneusement conçus pour ne présenter que les meilleures facettes, les moments les plus palpitants et les plus grandes réussites de la vie d’une personne, ces anciens récits révèlent une image plus complète. Les personnages sont présentés avec à la fois leurs accomplissements et leurs faiblesses. Il y a Moïse, l’orateur effrayé (Ex 4.10) ; Achaz, le monarque désespéré (2 R 16.7) ; et Naomi, la belle-mère marquée par l’amertume (Rt 1.20-21). Ces personnages dissipent les stigmates de l’anxiété et nous rappellent que Dieu agit à travers des personnes brisées.

Les Psaumes viennent compléter les récits en nous offrant des images prises sur le vif d’individus réagissant à l’anxiété. Loin d’un résumé bien ordonné destiné à une réunion de rétrospective, la question pénétrante de David, « Jusqu’à quand, Éternel ? » (Ps 13.1), nous invite à prendre part nous même à sa souffrance aiguë et nous donne la permission d’implorer Dieu pour qu’il mette aussi fin à nos propres souffrances. Asaph exprime l’inexprimable lorsqu’il dit que Dieu ne lui a donné qu’un « pain trempé de larmes » (Ps 80.5). Plus important encore, cet ensemble de voix humaines apporte des réponses théologiques : « L’Éternel est pour moi, je n’ai peur de rien : que peuvent me faire des hommes ? » (Ps 118.6). Le réconfort des Psaumes se ressent surtout quand on se rappelle que ce sont des chants destinés à être chantés et qu’ils sont la Parole inspirée de Dieu. Ainsi, comme le notait Jean Calvin, lorsque nous chantons les Psaumes pendant les épreuves, c’est comme si l’Esprit de Dieu chantait à travers nous.

Évidemment, les textes de l’Ancien Testament ne semblent pas toujours être une bonne ressource pour combattre l’anxiété. Certains passages font l’effet d’un coup de poing littéraire : la promesse du jugement transmise par Michée à l’encontre du peuple d’Israël (Mi 2.3-5) ; les récits de grandes épreuves, telles que le quasi-sacrifice d’Isaac par Abraham (Ge 22.1-18). Loin de nous réconforter, ces textes ne font parfois qu’augmenter notre angoisse. Mais si nous les lisons attentivement, nous constaterons que chacune de ces histoires est rédemptrice, car l’anxiété est passagère et a pour but de nous rapprocher de Dieu dans la foi et dans l’espérance. L’intention d’un auteur biblique n’est jamais de s’acharner à titiller les peurs d’un croyant ou de lui ôter sa foi en un Dieu bon.

Poser la question existentielle

Au-delà du partage d’histoires et du réconfort offert, les textes de l’Ancien Testament lancent souvent un défi : allez-vous mettre en pratique la foi que vous professez ? Cela peut sembler banal, mais c’est exactement ce que nous avons besoin d’entendre si l’anxiété est, au moins en partie, le produit de notre volonté, une habitude de l’esprit qui peut être contrecarrée. Lorsque je consultais un professionnel dans le cadre d’une thérapie axée sur mes points forts, c’était la question qu’il ne cessait d’aborder avec moi. « Votre Dieu n’est-il pas un Dieu d’amour et de soins infinis ? Comment cela peut-il être mis en lien avec votre anxiété ? » Il est troublant de faire face à un non-chrétien qui met en évidence la déconnexion entre ce que vous croyez (orthodoxie) et ce que vous pratiquez (orthopraxie), mais il avait raison. Vous ne pourrez pas réciter très longtemps la « Prière de la sérénité » avant que la phrase « le courage de changer les choses que je peux » ne sonne comme un appel à l’action.

L’Ancien Testament s’intègre parfaitement dans ce mouvement qui va du réconfort à l’exhortation. Josué dit aux Israélites d’entrer au Canaan avec courage (Jos 1.18). Les Proverbes opposent les méchants et les pieux en fonction de leur relation à la peur et à l’anxiété : « Le méchant prend la fuite sans même qu’on le poursuive, tandis que le juste a autant de confiance qu’un jeune lion » (Pr 28.1). Dans le livre d’Ésaïe, le prophète défie Achaz alors qu’il s’inquiète de la menace d’une invasion militaire : « Si vous ne croyez pas, vous ne subsisterez pas » (7.9).

Fondamentalement, ces commandements ne sont pas émis par un Dieu pointant du doigt qui reste à l’écart tandis que nous sommes plongés dans les terreurs de la vie. Ce Dieu est toujours présent et, même lorsqu’il nous commande, il marche déjà avec nous, nous conduisant sur des chemins que nous ne pouvons emprunter seuls. C’est le message de Psaume 23.4, que certaines traductions restituent ainsi : « Même quand je marche dans une vallée d’obscures ténèbres, je ne redoute aucun mal, car tu es avec moi ». Cette traduction nous aide à voir que Dieu marche avec nous, non seulement à l’approche de la mort, mais dans tous les moments sombres de notre vie. Il est toujours là.

Lorsque ce Dieu omniprésent nous demande d’être audacieux et courageux, nous trouvons un paradigme surprenant pour faire face à l’anxiété. La vie de foi est difficile et exige une confiance en Dieu au-delà de ce que l’œil peut voir. Mais une vie d’incrédulité est encore plus difficile parce qu’elle capitule devant la peur et perd Dieu de vue dans la panique qui s’ensuit. Quoi qu’il en soit, et contrairement à ce que l’on entend parfois, ce n’est pas le doute qui évince la foi. Le doute est un outil qui permet de remettre ses peurs en question. C’est l’anxiété elle-même qui amenuise notre foi. Notre vocation en tant que croyants anxieux est de voir et d’apprécier la contradiction entre notre anxiété et le Dieu qui nous aime. Avec l’aide d’autres techniques, et éventuellement de médicaments, le simple fait de croire en Dieu nous fait combattre l’anxiété.

Ce défi a un grand impact sur moi personnellement. Je suis très bon pour ce qui est de contrôler ma vie. Je sais anticiper les demandes, gérer des projets et persévérer. Je planifie mes journées à l’heure près (parfois même de façon plus précise) et je me réfère à d’autres personnes, que ce soit ma femme ou un collègue, pour m’assurer que j’assume mes responsabilités à la maison et au travail. Mais dans mes moments les plus sombres, surtout quand je suis fatigué, je suis anxieux à propos de choses que je ne pourrai jamais contrôler. Je suis tracassé par les accidents d’avion, le cancer, ou à propos d’interactions avec des inconnus.

Si elles ne sont pas contrôlées, ces pensées deviennent le bruit de fond de ma vie. C’est donc une grâce de s’entendre dire que son anxiété crée des illusions ou, pour reprendre les mots de Martin Luther, un théologien qui a plus que quiconque lutté contre l’anxiété, que celle-ci est tout ce que Satan peut nous faire à présent, car le Seigneur est « une tour fortifiée : le juste s’y réfugie et se trouve en sécurité » (Pr 18.10).

Thérapie trinitaire

Malgré la multiplicité des personnages que l’Ancien Testament nous présente, des prophètes aux rois, pour réfléchir à leur combat pour leur foi et face à leur anxiété, il subsiste toujours un sentiment d’inachèvement. Leurs conseils humains restent limités. Ainsi, c’est tout un chœur de voix qui nous pousse à nous en remettre au conseil de Dieu lui-même. Dieu soutient Moïse en envoyant des fléaux ; Esaïe livre la parole du Seigneur à Achaz ; Naomi reçoit une réponse à ses prières. Ces voix humaines indiquent une solution divine. Job lui-même se lamente ainsi : « Si seulement il y avait quelqu’un pour servir d’intermédiaire entre nous, quelqu’un pour nous rassembler » (Job 9.33).

C’est là que le Nouveau Testament entre en jeu. Il est centré sur le plus grand cataclysme de l’histoire — la mort du Fils de Dieu — et sur la façon dont les cataclysmes de l’Ancien Testament trouvent leur résolution en lui. Mais le Nouveau Testament n’abandonne jamais le modèle de rédemption de l’Ancien Testament, en particulier le réconfort d’un Dieu qui marche avec nous dans « une vallée d’obscures ténèbres ». L’incarnation de Jésus en cette nuit providentielle à Bethléem permet à Dieu de pénétrer plus pleinement dans nos souffrances, et même dans nos maladies mentales.

Lorsque Jésus atteint Gethsémané, il dit qu’il est accablé de douleur ou « très affligé », triste au point d’en mourir (Mt 26.38). Cette expression est dérivée du terme grec lypè, désignant sans doute l’émotion la plus redoutée dans l’Antiquité. Certains chercheurs suggèrent que c’était l’équivalent de notre notion de dépression. Cette émotion était si pénible que les stoïciens, ces philosophes grecs connus pour leurs efforts en vue d’éviter toutes émotions négatives, croyaient qu’il n’y avait pas de remède. C’était un état mental irrémédiable.

Alors que ce Dieu-homme désespéré est suspendu sur la croix, il se tourne, vous l’avez deviné, vers l’Ancien Testament. « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mt 27.46 ; Ps 22.1). Nous entrons ici dans le mystère du Dieu trinitaire. Au moment où Jésus exprime son angoisse de mourir, nous ne pouvons pas être absolument sûrs de ce que l’Esprit lui a dit. Mais cela avait probablement à voir avec le contenu du psaume qu’il récitait : « Ils proclameront sa justice, déclarant à un peuple encore à naître : Il l’a fait ! » (22.31).

La note finale d’espoir et d’attente du Psaume 22 préfigure la résurrection de Jésus, et c’est un événement qui a des implications beaucoup plus profondes que nous ne pouvons l’imaginer. Si Jésus peut se rendre dans les recoins mentaux les plus sombres de l’esprit humain à Gethsémané et émerger ressuscité et justifié, nous aussi, par notre foi en lui, serons élevés à une nouvelle vie et à une nouvelle psychologie. Cette prise de conscience est un grand encouragement pour les personnes anxieuses.

Pour moi, l’anxiété a toujours été un sentiment de malheur imminent. Elle est difficile à ébranler, et le désastre semble inévitable. Il n’y a pas de séance de thérapie ni de judicieux conseil qui puisse complètement la terrasser. Mais dans la thérapie du Père, du Fils et du Saint-Esprit, une promesse est faite selon laquelle notre anxiété finira par prendre fin, et cette perspective nous aide à endurer nos vies souvent angoissées. Mieux encore, cette promesse laisse augurer une libération totale de l’anxiété et de toute maladie mentale, lorsque nous recevrons de nouveaux corps et que nous nous lèverons pour célébrer la victoire du Christ avec un esprit qui ne connaît que « l’amour parfait » de Dieu, celui qui « chasse toute peur » (1 Jn 4.18).

B. G. White est professeur adjoint d’études bibliques au King’s College de New York et membre du « Center for Pastor Theologians ».

Traduit par Valérie Marie-Agnès Dörrzapf

Révisé par Léo Lehmann

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Pourquoi s’inquiéter du CO2 ?

Entre catastrophes naturelles et dernier rapport du GIEC, le changement climatique revient sur le devant de la scène médiatique. En tant que chrétiens, pourquoi devrions-nous nous en préoccuper ?

Christianity Today September 15, 2021
Illustration by Mallory Rentsch / Source Images: Christiana Gottardi / Hennie Stander / Patrick Hendry / Unsplash

Le 22 avril 2021, à l’occasion de la Jounée de la Terre, le président Joe Biden ouvrait un sommet virtuel de deux jours sur le climat en engageant les États-Unis, deuxième producteur mondial de gaz à effet de serre (GES) après la Chine, à réduire ses émissions de 50 à 52 % par rapport au niveau de 2005. C’est un objectif ambitieux, et un objectif que les États-Unis ne sont pas en passe d’atteindre aisément. Les projections quant aux émissions de l’année dernière envisageaient une baisse de plus de 20 %, principalement en raison de l’impact de la pandémie sur l’activité humaine. Mais avec l’assouplissement des restrictions sanitaires partout dans le monde, la pression pour un retour à la normale s’intensifie, ce qui est une mauvaise nouvelle pour l’atmosphère puisque cela signifie des émissions de gaz carbonique (CO2) à des niveaux jamais atteints naturellement depuis plus de 20 000 ans.

Jésus prédisait déjà la destruction de l’environnement à l’échelle cosmique alors qu’il se tenait sur le parvis du temple, symbole de la création comme demeure du Tout-Puissant, reprenant un ancien langage apocalyptique évoquant l’obscurcissement du soleil et de la lune, les famines, les tremblements de terre et la guerre (Mc 13.5-25).

Les sombres prévisions de Jésus s’accompagnent néanmoins d’un rappel réconfortant de la souveraineté de Dieu et de sa sollicitude pour son peuple (13.13). Le Seigneur veillera sur la vie humaine (Ps 121.7-8). Malheureusement, ces vérités se mêlent parfois à des idéologies nationalistes et à l’économie du laissez-faire, et se teintent des soupçons tenaces de certains chrétiens envers la science comme substitut séculier de la foi. Des chrétiens expriment leur scepticisme vis-à-vis des règles gouvernementales freinant l’activité économique et, en raison des erreurs du passé, leur scepticisme vis-à-vis des prédictions scientifiques sur le futur. D’après une enquête parue en 2015, plus d’un tiers des évangéliques estimaient qu’il n’y avait « aucune preuve solide » de la réalité du changement climatique.

Si seulement c’était vrai ! Au lieu de cela, une écrasante collection de preuves accumulées depuis le milieu des années 1800 à bord de navires et étoffée depuis à l’aide de satellites, de données géologiques et d’analyses informatiques, convergent toutes pour affirmer que la terre se réchauffe. Plus de 90 % des scientifiques de la Terre sont d’accord pour désigner l’activité humaine comme cause principale. Malgré les marées grandissantes, les conditions météorologiques extrêmes et les températures de plus en plus chaudes, le changement climatique, ignoré, menace de détruire les économies, de rendre certaines parties du monde inhabitables et d’exacerber les disparités entre riches et pauvres. Il reste à voir à quoi cela pourrait ressembler exactement — car le consensus sur le réchauffement n’est pas consensus sur ses effets futurs — mais les inquiétudes sont réelles.

Ma fille adolescente se plaint régulièrement lorsqu’elle entend ces perspectives catastrophiques : « Pourquoi m’avez-vous fait naître dans un tel monde ? »

Selon Robin Globus Veldman, professeur adjoint d’études religieuses à l’Université A&M du Texas, c’est en partie à cause de l’attente du retour du Christ que certains évangéliques nient les sombres pronostics sur le climat et s’opposent aux mesures gouvernementales. Le monde, qui est la demeure du mal, est voué à l’extinction par le retour triomphal de Jésus (Ap 19.11-21). Ajoutez au triomphe final le caractère temporaire inhérent à la vie terrestre et vous débouchez sur un déficit d’intérêt pour la préservation la planète.

Depuis le commencement, Dieu a donné aux humains le pouvoir sur la Terre (Gn 1.28), ce qui implique que nous qui sommes créés à son image soyons pleins de la même attention bienveillante pour la création que lui (Gn 2.15 ; Lv 25.3-5). Cette responsabilité et ce pouvoir qui nous ont été confiés devraient favoriser la créativité dans le développement de solutions pour le climat et motiver des changements de mode de vie. Pourtant, la nature humaine pécheresse étant ce qu’elle est, nous sommes enclins à abuser du pouvoir et à nous servir nous-mêmes, transformant notre responsabilité de prendre soin en une domination despotique, avec des conséquences néfastes pour nous-mêmes, nos communautés et potentiellement notre planète.

La résurrection et le retour de Jésus sont la réponse finale de Dieu à toute dépravation et toute destruction. Le Fils de l’homme viendra « sur les nuées avec une grande puissance et avec gloire. Il enverra ses anges et rassemblera ses élus des quatre vents, des extrémités de la terre jusqu’aux extrémités des cieux » (Mc 1.26-27). Jésus fait sienne la prophétie de Daniel 7, un sommet de la prophétie vétérotestamentaire. Daniel vit « quelqu’un semblable à un fils de l’homme, venant sur les nuées du ciel. […] Il reçut autorité, gloire et pouvoir souverain » (v. 13-14).

Jésus parle de lui-même comme « Fils de l’homme » tout au long des Évangiles, ce qui signifie qu’il est plus qu’un être humain normal. Comme nous le commémorons à Noël, Jésus n’était le fils d’aucun homme mais a été conçu par le Saint-Esprit, et en conséquence, investi du droit divin de juger le péché humain. La spécialiste du Nouveau Testament Elizabeth Shively note en outre que l’obscurcissement du soleil et l’ébranlement des cieux représentent également le jugement de Jésus contre les puissances démoniaques.

Cependant, cette assurance du futur triomphe divin et du renouvellement de toutes choses n’est pas une raison pour laisser aller le présent à sa perte. Le retour de Jésus ne nous décharge pas de nos responsabilités. Au contraire, nos égards et notre préoccupation pour la terre et ses habitants seront des critères de jugement de notre propre fidélité (Mt 25.14-30 ; Mc 13.33-34 ; Lc 18.8).

Pour des chrétiens qui considèrent la création comme l’œuvre de Dieu (Ps 19.1), la foi pousse à louer, à remercier et à agir en sages intendants de la création. J’essaie moi-même, par petites touches, de faire ma part. J’élève des abeilles, j’évite les herbicides, je conduis une voiture hybride et j’ai installé des panneaux solaires. Mais étant donné l’ampleur des signes avant-coureurs, mes petits efforts ont probablement plus d’effet pour soulager ma conscience et impressionner mes voisins que pour atténuer la catastrophe mondiale.

Une réorganisation systémique mondiale est nécessaire, une tâche énorme exigeant une immense volonté politique, en particulier de la part des pays les plus riches qui émettent des gaz à effet de serre aux niveaux les plus élevés. En 2020, environ 40 % de l’électricité américaine provenait des énergies renouvelables et de l’énergie d’origine nucléaire. Il faudra que ce chiffre passe à 80 % d’ici 2030 pour atteindre la moitié de l’objectif global de Biden visant une réduction de 50 % des gaz à effet de serre.

Les individus et les Églises peuvent démontrer une manière de « gérer » la création avec amour et plaider en faveur de l’action politique. Une telle action selon des principes de conservation et de préservation peut aider à libérer les ressources propres de la nature pour son rétablissement — un témoignage de la puissance créatrice donnée par Dieu — mais est aussi une nécessité pour la survie humaine. Il y a une solidarité fondamentale entre les créatures faites à l’image de Dieu et la création où l’empreinte de Dieu est visible, une continuité fondamentale entre la création actuelle et la nouvelle création. Notre nouvelle naissance engendre sa nouvelle naissance (Rm 8.20-23).

Dans les Écritures, la promesse de la nouvelle création mentionne spécifiquement un nouveau ciel et une nouvelle terre (Es 65.17 ; Ap 21.1), un monde nouveau mais pas nécessairement si différent. La continuité fondamentale entre la création actuelle et la nouvelle suggère une nouvelle Terre modelée d’après la nôtre. Notre planète n’est donc pas une planète jetable, tout comme nos corps ne sont pas de simples vases d’argile qu’on jetterait négligemment de côté. Les chrétiens confessent la résurrection des corps sur le modèle du corps ressuscité de Jésus et, de même, l’émergence d’une nouvelle demeure sur le modèle du nouveau ciel lui-même (Ap 21.2). La vie éternelle ne sera pas vécue par des êtres éthérés flottant sur les nuages, mais par des êtres revêtus de corps nouveaux dans une ville nouvelle illuminée par la gloire de Dieu (v. 23).

Les chrétiens soutiennent que ce qui est créé et maudit est précisément ce qui sera racheté et glorifié. Bien que toutes choses meurent et retournent à la poussière, c’est à partir de cette même poussière que se produira la résurrection. Tout comme nous goûtons les prémices de notre salut à venir dans le temps présent — ​​par l’adoration, la vie en communauté, la beauté et l’amour — de même, ne devrions-nous pas vivre les avant-goûts de la réconciliation avec notre environnement ? L’anticipation de cette réconciliation devrait affecter la façon dont nous interagissons avec la Terre : l’énergie que nous consommons, les jardins que nous cultivons, la nourriture que nous mangeons, l’eau que nous utilisons, les freins que nous imposons au consumérisme et au gaspillage, les politiques que nous défendons. En tant que peuple racheté, nous avons dès à présent la responsabilité de vivre certains aspects de la vie éternelle, sur la terre comme au ciel.

Daniel Harrell est rédacteur en chef pour Christianity Today.

Traduit par Philippe Kaminski

Révisé par Léo Lehmann

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À quoi ressemble la sanctification ?

La diversité des récits bibliques nous aide à faire des disciples de ceux qui nous sont confiés.

Christianity Today September 15, 2021
Illustration by Rick Szuecs | Source imags: Lach Ford / Unsplash / Envato

À l’occasion d’une étude biblique sur la sanctification, j’ai présenté trois récits de la Bible sur le thème de la vie chrétienne. Le premier était un récit de renouveau, de mort et de résurrection abordant les sujets de la repentance et du pardon de Dieu présent dans chaque nouvelle journée. Le deuxième texte était centré sur l’histoire du peuple de Dieu cheminant à travers un désert périlleux et faisant face à des combats et à des attaques spirituelles. Le troisième passage représentait la vie de service par une image : devenir des sacrifices vivants, agréables à Dieu, s’engager auprès de ses voisins et partager joies et fardeaux en communauté.

J’ai ensuite posé la question : « lequel de ces récits décrit le mieux votre vie présente ? » Sans surprise, les participants ont choisi des récits différents. Une femme pensait ne pas être assez bonne pour être acceptée par Dieu parce qu’elle portait la culpabilité de ses péchés passés. « Comment Dieu peut-il me pardonner ? J’ai besoin de retourner encore et encore à la Croix ». Un autre paroissien témoignait : « J’ai l’impression que la vie est un combat et que je suis constamment attaqué, tenté de douter des promesses de Dieu ». Ce frère était au chômage depuis un certain temps et, après avoir essuyé des refus répétés de la part d’employeurs potentiels, il ressentait le besoin de renouveler sa confiance en Dieu. Une troisième personne déclara : « Je cherche simplement à savoir ce dont les gens ont besoin dans mon voisinage et à apporter des réponses à ces besoins ! » Ce jeune homme était prêt à l’action, impatient de servir ses prochains.

Chaque chrétien expérimente-t-il la vie spirituelle de la même manière ? Bien sûr que non. Nous enseignons pourtant souvent la sanctification comme si c’était le cas. Nous discutons pour savoir si la sanctification doit être considérée comme un cycle ou un processus, si la sainteté est une question de combat permanent ou de perfection atteinte, et ainsi de suite. Nous faisons de la sanctification un concept qui offrirait une solution simple et univoque. Nous perdons ainsi de vue que la sanctification est inscrite dans une histoire — celle de l’œuvre du Saint-Esprit dans et à travers (et bien sûr en coopération avec) des vases brisés — dont le langage riche et imagé des récits bibliques rend à merveille témoignage. Il n’existe pas de manière unique et homogène de penser la sanctification : chacun se trouve à un endroit différent lorsqu’il s’agit de décrire la vie chrétienne. Je suis reconnaissant pour la variété et la richesse des récits dont nous disposons dans les Écritures pour nous aider dans notre marche avec ceux qui sont confiés à nos bons soins spirituels.

Les expériences et les besoins spirituels des participants à cette étude biblique correspondaient aux récits de sanctification que nous trouvons dans la Bible. Le récit du renouveau évoquait le besoin de restauration de la première participante. La deuxième personne était confrontée au doute et l’image de la vie dans le désert — tenir ferme contre les attaques du Malin en gardant espoir dans les promesses de Dieu — répondait à son besoin de sécurité au milieu des luttes de la vie. Le dernier participant s’interrogeait vraiment sur le but de la vie, et s’est senti concerné par l’image biblique du service et l’appel à former une communauté.

La vie chrétienne consiste-t-elle à mourir et à ressusciter à une vie nouvelle, à tenir bon dans le désert, ou à faire de la place à d’autres dont les besoins façonnent notre sens du service ? La réponse est oui ! La sainteté a de nombreux visages. L’Écriture nous propose plusieurs façons de décrire et d’inviter les auditeurs de la Parole à vivre la vie de l’Esprit. L’Esprit est semblable à un sculpteur qui nous façonne à la ressemblance du Christ de la manière la plus adaptée à nos besoins.

Quelles sont les principales difficultés vécues par nos frères et sœurs ? Leur identité ? Le besoin de sécurité ? La recherche du sens de leur existence ? C’est en permettant à divers récits de façonner notre compréhension de la sanctification que nous pourrons les accompagner au mieux dans leur cheminement spirituel.

Les récits et les images bibliques nous fournissent une grammaire imagée pour nous permettre d’exprimer ce à quoi ressemble la vie dans l’Esprit à différents moments du voyage spirituel d’une personne. Cette grammaire aide à formuler l’état spirituel, les besoins et les espoirs d’une personne. Ce faisant, elle invite à la prière pour demander à l’Esprit saint d’agir en profondeur et de répondre aux besoins : Viens, Esprit saint !

Outre les récits de renouveau, de désert et de service, l’Écriture nous transmet de nombreuses autres images et histoires à propos de la vie chrétienne. Des récits d’hospitalité envers les étrangers, de parias accueillis dans le royaume de Dieu par la foi en Christ, de l’Esprit saint conduisant l’Église hors de Jérusalem vers les marges où vivaient les Samaritains et les païens. Ou encore des récits de vie consacrée à Dieu dans le travail et la prière, de soin apporté au jardin sans négliger le temps du repos sabbatique, de Jésus accomplissant la mission reçue du Père sans renoncer au temps passé avec ce Père dans la prière.

En accompagnant les personnes dont nous avons la charge dans leur croissance à l’image du Christ, nous pouvons nous tourner vers les nombreux récits bibliques de vies sanctifiées. Ils peuvent correspondre à ce que nos paroissiens rencontrent dans leur cheminement spirituel. Et bien sûr, dans la vie réelle, ces récits se croisent souvent. Le peuple de Dieu peut être confronté à la fois à la culpabilité, à la honte, à la lutte et au besoin de servir ! La vie est complexe.

Mais l’Esprit nous guide lorsque nous cheminons avec les vies complexes de nos prochains. Ce faisant, nous reconnaissons que nous avons nous aussi besoin de l’Esprit saint pour nous donner le même pardon, la même sécurité, le même sens, le même accueil et le même repos que ceux dont nous nous occupons. Nous aussi, nous prions : Viens, Esprit qui nous façonne !

Leopoldo Sánchez est professeur de théologie systématique au séminaire Concordia de Saint-Louis. Il est l’auteur de Sculptor Spirit : Models of Sanctification from Spirit Christology.

Traduit par Denis Schultz

Révisé par Léo Lehmann

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Le coronavirus a fait des ravages. Mais la Bible redonne l’espoir.

Une récente étude montre une corrélation entre la lecture des Écritures et les critères établis par Harvard en matière d’épanouissement humain.

Christianity Today September 9, 2021
Illustration by Keith Negley

En période d’épreuves de nombreuses personnes se tournent vers la Bible pour être encouragées. Et d’après une récente étude, c’est une bonne idée. Au milieu d’une pandémie mondiale, d’une élection controversée aux États-Unis et de divers troubles sociaux, l’American Bible Society (ABS), avec l’aide du Human Flourishing Program de l’université de Harvard, a trouvé une forte corrélation entre la lecture des Écritures et le niveau d’espoir ressenti par les personnes.

Selon deux enquêtes menées auprès de plus de 1000 personnes à six mois d’intervalle, ceux qui lisent fréquemment la Bible s’évaluent à 33 points de plus en termes d’espoir que ne le font les lecteurs irréguliers des Écritures. L’étude a également révélé que les gens ont plus d’espoir lorsqu’ils lisent plus fréquemment les Écritures.

Sur une échelle de 1 à 100, 100 étant la note correspondant au plus d’espoir, les Américains qui déclarent lire la Bible trois ou quatre fois par an obtiennent un score de 42, ceux qui la lisent tous les mois obtiennent 59 points, toutes les semaines un score de 66, et ceux qui la lisent plusieurs fois par semaine atteignent 75.

Selon l’étude les personnes qui ne lisent jamais la Bible sont légèrement plus optimistes que ceux qui la lisent rarement. Mais ces personnes qui ne lisent pas la Bible ont environ 5 points de moins en termes d’espoir que ceux qui lisent les Écritures tous les mois.

La lecture de la Bible — avec d’autres aspects de la vie communautaire et de disciple, comme le fait d’aller à l’Église ou de participer à un petit groupe — semble contribuer au sentiment de bien-être et de bonheur des gens, déclare Tyler VanderWeele, directeur du Human Flourishing Program de l’école de santé publique T. H. Chan de l’université de Harvard.

« Les Églises jouent un rôle important et en profondeur pour contribuer au bien-être des personnes en général — et particulièrement en cette période », ajoute-t-il.

Selon VanderWeele les résultats sont cohérents avec d’autres études sur l’impact de l’appartenance religieuse et l’épanouissement humain. Les personnes qui vont à l’Église et lisent leur Bible ont tendance à être plus heureuses, moins susceptibles de se suicider et elles ont peuvent donner plus de sens à leur vie.

Cette étude en deux phases est cependant unique, car elle a interrogé des personnes avant et après la pandémie de coronavirus qui a frappé les États-Unis. La première enquête a eu lieu en janvier 2020 et la seconde en juin, lorsque le nombre total de cas confirmés dépassait les 2,5 millions et que l’Organisation mondiale de la santé recensait plus de 125 000 décès aux États-Unis.

Nous n’avions pas prévu de mener une enquête qui mettrait en évidence l’impact du COVID-19, déclare John Plake, directeur de planification pour le service (ministry intelligence) pour l’ABS. Mais les chercheurs ont discerné qu’au-delà toutes les problèmes apportés par la pandémie, une opportunité se présentait à eux.

En janvier 2020, John Plake et ses collègues de l’American Bible Society avaient décidé d’élargir le nombre de questions posées dans le cadre de leur 10e rapport annuel sur la Bible (rapport « State of the Bible »). Ils avaient examiné une mesure de l’épanouissement humain développée à Harvard et choisi d’inclure quelques questions sur le sentiment de sécurité, le bonheur et la santé mentale dans leur étude de l’utilisation de la Bible.

Ils ont recueilli des informations auprès de plus de 1 000 personnes et ont commencé à traiter ces informations, comme ils l’avaient fait les années précédentes.

Avant qu’ils n’aient terminé, les cas de COVID-19 ont commencé à monter en flèche. Le virus s’est propagé assez rapidement pour donner naissance à une pandémie, de nombreuses activités ont été interrompues, le président Donald Trump a déclaré l’urgence nationale et les autorités sanitaires ont exhorté les gens à ne pas se réunir en grands groupes.

Les chercheurs de l’ABS, sur le point de publier leur étude sur l’utilisation de la Bible, ont alors eu une autre idée : et si, au lieu de publier leurs nouvelles données la semaine de Pâques, ils les conservaient et réalisaient une deuxième enquête ? Ils pourraient ainsi avoir une idée précise de l’impact d’une crise nationale sur la façon dont les gens utilisent la Bible — et de l’impact de cette utilisation sur les gens en temps de crise.

Les chercheurs se sont vite rendu compte que, en ayant utilisé des mesures d’épanouissement humain dans l’étude de janvier, ils avaient établi par inadvertance un point de comparaison pour mesurer comment les gens se portaient pendant la pandémie du COVID-19.

VanderWeele était de la partie. Il considérait que l’étude était importante car elle permettait de faire un bilan humain de la pandémie de COVID-19 et des restrictions qui y sont liées — une réalité qui ne peut pas être mesurée par les données boursières ou le produit intérieur brut. Le Human Flourishing Program s’est associé à l’ABS pour la deuxième étude en juin.

Les résultats ont été publiés en octobre dans le Journal of General Internal Medicine dans un rapport co-écrit par VanderWeele, Plake, Jeffery Fulks d’ABS et Matthew Lee de Harvard. « Les échantillons en ligne des mesures nationales de bien-être avant et pendant la pandémie de COVID-19 » montrent que le bonheur et la satisfaction à l’égard de la vie, la santé mentale et physique, les sentiments de sens et de finalité, et la stabilité financière et matérielle ont tous fortement diminué entre janvier et juin. Le virus a dévasté le pays et les fermetures ont fait des ravages économiques en même temps qu’ils ont isolé les gens.

Pour l’essentiel, l’étude confirme ce que tout le monde sait. La stabilité financière et matérielle, comme on pouvait s’y attendre, a subi le plus gros coup dur pour de nombreuses personnes, chutant de 16,7 %. VanderWeele note toutefois que les données ont montré que l’impact économique est très variable. Certaines personnes n’ont pas perdu leur emploi et ont économisé de l’argent en restant à la maison, ce qui les a placés dans une meilleure situation financière relative, tandis que d’autres ont beaucoup souffert de l’arrêt de l’activité économique pendant la crise.

Le bonheur et la satisfaction à l’égard de la vie ont diminué de 9,6 % chez les personnes interrogées, et la santé mentale et physique de 7,4 % pour cent.

L’étude a également révélé que les liens sociaux n’ont pas diminué autant qu’on pourrait s’y attendre. Cela pourrait être dû au fait que, même si de nombreuses personnes étaient confinées, elles ont noué des relations plus étroites avec leur entourage immédiat.

La famille de VanderWeele elle-même a passé plus de temps ensemble et ses enfants ont commencé à communiquer régulièrement avec leurs grands-parents sur Internet.

« Je pense que cette période a offert un temps de réflexion sur ce qui compte vraiment dans la vie », déclare VanderWeele. « D’un point de vue chrétien, on grandit souvent à travers la souffrance. »

Mais les données les plus intéressantes, du point de vue de l’ABS, sont celles sur la façon dont la Bible, l’Église et les disciplines chrétiennes semblent avoir aidé les gens à traverser cette période sombre. Ces données ont montré que le déclin des mesures de l’épanouissement humain était moins prononcé chez les personnes qui lisaient régulièrement leur Bible et participaient à la vie de l’Église, que ce soit en personne ou en ligne.

L’engagement dans les Écritures semble avoir atteint son apogée juste après le début du COVID-19 — le niveau le plus élevé depuis des années — mais il a ensuite chuté de manière significative vers la fin du mois de juin. D’après Scott Ross, qui travaille sur la guérison des traumatismes avec des Églises en lien avec L’ABS, il s’agit là d’une tendance courante lorsque les gens subissent des traumatismes. Si beaucoup se tournent vers la Bible pour trouver des réponses dans les moments difficiles, ils cessent souvent de la lire fidèlement après un certain temps. D’une certaine manière, ce qui se passe actuellement ressemble à une réponse à un traumatisme à l’échelle de la société.

Mais les données montrent que les Américains qui se consacrent activement à l’étude de la Bible et s’engagent dans le culte collectif obtiennent de meilleurs résultats dans tous les domaines de l’épanouissement humain, notamment une meilleure santé mentale et physique et un sens plus profond de l’identité et de la vertu. Ils ont même un sentiment de stabilité financière et matérielle supérieur à ceux qui ne vont pas à l’Église ou ne se plongent pas dans la Bible.

Les chrétiens sont aussi clairement plus optimistes. Sur une échelle de 1 à 100, les non-chrétiens ont obtenu un score d’environ 50, les chrétiens non pratiquants un score de 57 et les chrétiens qui participent régulièrement à la vie d’une congrégation locale un score de 66.

Le lien n’est cependant qu’une corrélation. Les chercheurs n’ont pas démontré que la lecture de la Bible ou le culte chrétien conduisent à l’épanouissement humain, mais seulement que les deux éléments sont liés. Néanmoins, ils pensent que ces données donnent une meilleure idée de ce à quoi ressemble une société saine et procurent des raisons pratiques et sociales d’encourager la participation à la vie de l’Église et l’étude de la Bible.

« Je pense que notre étude sur la Bible m’a montré empiriquement tout ce que je savais intuitivement et existentiellement », déclare Ross.

Il croit que les Églises pourraient utiliser cette information pour faire une différence dans le ministère auprès des gens.

« Ce que nous constatons, c’est qu’à mesure que les gens ont la possibilité de partager et de s’écouter les uns les autres, de réfléchir et de se plonger dans les Écritures en groupe, nous voyons ces symptômes de traumatisme diminuer.

Adam MacInnis est un journaliste installé en Nouvelle-Écosse, au Canada.

Traduit par Valérie Marie-Agnès Dörrzapf

Révisé par Léo Lehmann

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Books

Les Haïtiens se rassemblent dans des églises endommagées, et des gangs offrent leur aide

Alors que la catastrophe a conduit au report de la rentrée scolaire, retour en arrière sur un dimanche d’après-séisme à Haïti, et perspectives pour la suite.

Des paroissiens assistent à une messe sur le terrain jouxtant une cathédrale endommagée par le tremblement de terre aux Cayes, à Haïti, le dimanche 22 août 2021, huit jours après le séisme de magnitude 7,2 qui a frappé la région.

Des paroissiens assistent à une messe sur le terrain jouxtant une cathédrale endommagée par le tremblement de terre aux Cayes, à Haïti, le dimanche 22 août 2021, huit jours après le séisme de magnitude 7,2 qui a frappé la région.

Christianity Today September 9, 2021
Matias Delacroix / AP Photo

LES CAYES, Haïti — Dimanche 22 août, un chef de gang offrait une trêve et proposait de l’aide aux collectivités du Sud-Ouest d’Haïti ébranlées par le tremblement de terre, suscitant une lueur d’espoir pour les opérations de secours perturbées par le pillage de camions d’aide et d’autres troubles.

Il restait à voir ce qu’il adviendrait de l’offre de Jimmy Cherizier, alias « Barbecue ». Bien que puissant patron de la criminalité, Cherizier est loin d’être le seul chef de gang en Haïti, et les échos des médias sociaux à propos d’une prétendue trêve des gangs n’avaient pas réussi jusque-là à empêcher les attaques contre les efforts de secours grandissant.

L’offre est intervenue alors que de nombreux Haïtiens retournaient à leurs cultes dans ou à l’extérieur des églises endommagées, pour la première fois depuis que le séisme de magnitude 7,2 a frappé, le 14 août.

Depuis la catastrophe, des gangs ont bloqué des routes, détourné des camions d’aide et volé des fournitures, obligeant les travailleurs humanitaires à transporter des fournitures par hélicoptère. Par endroits, des foules désespérées se sont battues pour des sacs de nourriture.

Dans une vidéo publiée sur Facebook, Cherizier s’était adressé aux régions les plus durement touchées de la péninsule sud-ouest d’Haïti avec ces mots : « Nous voulons leur dire que les Forces révolutionnaires du G9 et leurs alliés, tous pour un et un pour tous, sympathisent avec leur douleur et leur chagrin. »

« Les Forces révolutionnaires et les alliés du G9 […] participeront au secours en leur apportant de l’aide. Nous invitons tous les compatriotes à faire preuve de solidarité avec les victimes en essayant de partager avec eux le peu qu’il y a », déclarait-il encore.

Ce même jour, l’Agence de protection civile d’Haïti relevait la liste des morts confirmés à 2,207.

Des paroissiens assistent à une messe sur le terrain jouxtant une cathédrale endommagée par le tremblement de terre aux Cayes, à Haïti, le dimanche 22 août 2021, huit jours après le séisme de magnitude 7,2 qui a frappé la région.Matias Delacroix / AP Photo
Des paroissiens assistent à une messe sur le terrain jouxtant une cathédrale endommagée par le tremblement de terre aux Cayes, à Haïti, le dimanche 22 août 2021, huit jours après le séisme de magnitude 7,2 qui a frappé la région.

L’augmentation du nombre de morts est la première depuis le mercredi précédent, lorsque le gouvernement avait signalé 2189 décès. Le gouvernement a déclaré que 344 personnes étaient toujours portées disparues, que 12268 personnes avaient été blessées et que près de 53000 maisons avaient été détruites par le séisme.

Si l’église où sert Pierre Verdieu Badette aux Cayes est toujours debout, la plupart de ses fidèles ont presque tout perdu.

« Il est douloureux, en tant que berger, d’être témoin que votre troupeau a presque tout perdu et ne peut rien y faire », déclare Badette à CT. « La situation ne nous a pas empêché d’adorer notre Dieu omniprésent. Pourtant, l’atmosphère était différente de tout ce que nous avons connu. Je pouvais voir dans les yeux et l’esprit de mes frères et sœurs tant de questions difficiles auxquelles on attendrait que moi, le pasteur, je puisse apporter quelque élément de réponse ».

Un hôpital de campagne érigé aux Cayes par le groupe humanitaire Samaritan’s Purse prévoit quatre interventions chirurgicales ce dimanche-là, au lendemain de son ouverture. Trois des 10 salles d’opération qui desservent la région étaient hors service après le séisme, de sorte que le groupe basé aux États-Unis a ouvert son hôpital sur le campus haïtien de l’Université d’Amérique centrale.

L’hôpital de campagne ajoute non seulement une salle d’opération, mais aussi un laboratoire, une pharmacie et des possibilités de radiographie. Même une semaine après le tremblement de terre, des hélicoptères amenaient quatre blessés graves en provenance de régions éloignées.

Le cercueil contenant le corps du pasteur baptiste Andre Tessono, tué lors du tremblement de terre de magnitude 7,2 qui a frappé la région, est porté au cimetière lors de ses funérailles dans le quartier Picot aux Cayes, Haïti, dimanche 22 août 2021.Matias Delacroix / AP Photo
Le cercueil contenant le corps du pasteur baptiste Andre Tessono, tué lors du tremblement de terre de magnitude 7,2 qui a frappé la région, est porté au cimetière lors de ses funérailles dans le quartier Picot aux Cayes, Haïti, dimanche 22 août 2021.

L’infirmière Ali Herbert prépare la salle d’opération — une grande tente — pour une intervention chirurgicale le dimanche après-midi. Une opération sur un fémur cassé est prévue plus tard. Avec les ventilateurs soulevant l’air étouffant et les volets ouverts de la tente pour l’aération, l’ensemble détone par rapport à un bloc opératoire stérile, mais offre de bien meilleures conditions que celles dans lesquelles la plupart des patients ont été jusqu’à ce qu’ils arrivent, explique-t-elle.

« Une salle d’opération normale n’aurait pas ce genre de configuration ». « Nous devons simplement faire ce que nous pouvons et garder l’espace aussi propre que possible, et nous espérons que les patients s’en tirent bien. »

Certains patients ont reçu un premier traitement, mais ont besoin de plus de soins. D’autres sont traités pour la première fois, décrit-elle.

Les personnes ayant besoin d’aide se présentent également à l’hôpital public de l’autre côté de la ville. L’espace est compté et certains sont installé sur des lits à l’extérieur des salles. Si leur blessure est moins grave, ils sont parfois assis à même le sol sur un carré de carton.

Rousseau Hussein, un résident travaillant aux urgences, déclare que la situation s’est calmée au cours de la semaine écoulée, mais qu’ils continuent d’accueillir les patients blessés dans le tremblement de terre en provenance des zones périphériques. L’hôpital a reçu du soutien et a le nécessaire pour traiter les cas qui se présentent.

Des gens apportent une offrande de fleurs à côté de l’église détruite par le tremblement de terre où le ministre de l’Église baptiste Andre Tessono est mort, lors de ses funérailles dans le quartier de Picot aux Cayes, Haïti, dimanche 22 août 2021, huit jours après qu’un tremblement de terre de magnitude 7,2 a frappé la région.Matias Delacroix / AP Photo
Des gens apportent une offrande de fleurs à côté de l’église détruite par le tremblement de terre où le ministre de l’Église baptiste Andre Tessono est mort, lors de ses funérailles dans le quartier de Picot aux Cayes, Haïti, dimanche 22 août 2021, huit jours après qu’un tremblement de terre de magnitude 7,2 a frappé la région.

Aux Cayes, beaucoup ont assisté au culte ce dimanche pour pleurer les disparus et rendre grâce pour leur propre survie.

Dans une église évangélique du quartier de Bergeaud, les paroissiens chantaient des hymnes sous les rayons du soleil qui passaient à travers les trous du toit et des murs.

Le pasteur Sevrain Marc Dix Jonas, affirme que le service de ce dimanche est spécial, parce que jusqu’à présent sa congrégation n’avait pas pu se réunir depuis le séisme.

« Aujourd’hui nous devions être là », dit-il, debout sous une ouverture béante au sommet de la façade de son église. « Pour remercier Dieu. Il nous a protégés. Nous ne sommes pas morts. » Son église est l’une des rares où les fidèles peuvent se rassembler à l’intérieur. Dans beaucoup d’autres cas, les services ont eu lieu dans la rue à l’extérieur des sanctuaires effondrés.

Le fils et la mère du ministre de l’Église baptiste Andre Tessono pleurent lors de ses funérailles dans le quartier Picot aux Cayes, Haïti, dimanche 22 août 2021.Matias Delacroix / AP Photo
Le fils et la mère du ministre de l’Église baptiste Andre Tessono pleurent lors de ses funérailles dans le quartier Picot aux Cayes, Haïti, dimanche 22 août 2021.

Bernard Fountaine, pasteur adjoint à la troisième Église Baptiste de la Mission Evangélique Baptiste du Sud d’Haïti aux Cayes, affirme qu’il y a une myriade de raisons pour lesquelles moins de croyants sont venus adorer ce dimanche.

« Certaines personnes ne sont pas encore revenues dans le lieu de culte par peur des répliques, d’autres ne savaient pas si l’Église allait se réunir ». « [Enfin,] ceux dont les maisons se sont effondrées n’avaient pas les vêtements pour venir à l’église. » L’Église de Wilbert Clément aux Cayes, l’Église Baptiste de Cance, a été gravement endommagée. Il a prêché sur le Psaume 91 et sur le Seigneur comme l’abri invincible pendant la catastrophe. « La congrégation est totalement épuisée et effrayée », nous dit-il.

La dévastation a frappé Lory, un village dans la campagne à environ 120 kilomètres au nord-ouest de l’épicentre du séisme. Les offices du dimanche à « L’église par la foi » de Lory attirent normalement environ 700 personnes. Cette semaine, seuls 200 fidèles se sont présentés à l’église.

« Les gens ont peur des répliques et sont dans l’insécurité parce qu’ils n’ont plus de maison. Vous pouvez voir la peur dans leurs yeux », déclare le pasteur Lomann Dolce à CT. « Ils prient pour de l’aide parce qu’ils ont tout perdu. Ils ne se sentent plus en sécurité. Dieu est leur seul espoir. »

À Camp Perrin, à environ 48 kilomètres à l’ouest de l’épicentre, le tremblement de terre a endommagé un certain nombre de bâtiments éducatifs qui sont liés au ministère de l’Église baptiste de Guichard. Ce dimanche, ceux qui étaient présents ont passé du temps à adorer et à prier pour que leurs maisons et leur école soient reconstruites et pour le financement de la clinique médicale gratuite qui se trouve également sur leur propriété, a rapporté le pasteur Eberle Nazaire à CT. « Si nous ne trouvons pas ces fonds nécessaires, la situation sera très difficile dans les prochains jours, car nous sommes maintenant au milieu de la saison des ouragans ». « Nous avons besoin de cet argent pour reconstruire des maisons et éduquer les enfants et les jeunes ».

L’apologète haïtien Lesly Jules s’inquiète que certains concluent que c’est le séisme qui a tué des gens alors que, en réalité, le problème est que les bâtiments n’étaient pas conformes au code de la construction.

« Malheureusement, depuis le dernier tremblement de terre, les codes de construction n’ont pas été appliqués par le gouvernement haïtien », déclarait Jules à CT dans un précédent article où lui et d’autres dirigeants chrétiens haïtiens abordent la réponse de l’Église aux tremblements de terre de 2010 et 2021 et proposent à l’Église mondiale des sujets de prière pour Haïti.

« Les Églises n’ont pas insisté sur la nécessité d’agir avec sagesse lorsqu’il est question de construire. Le sens littéral de la parabole du fou qui construit sa maison sur le sable n’a pas été mise en rapport avec les tremblements de terre », affirme-t-il encore.

« Priez pour la force du témoignage de l’Église haïtienne. Le pays a désespérément besoin d’une église qui remplira le rôle de sel et de lumière », déclare Magda Victor, secrétaire générale de la Société biblique haïtienne.

Dans la foulée de l’assassinat du président au mois de juillet, le président de l’Université Emmaüs d’Haïti, Guenson Charlot, et son épouse, Claudia Charlot, directrice de Hand Up Micro Credit, ont participé au podcast Quick to Listen de CT (en anglais). Guenson se disait préoccupé par le fait que trop d’étrangers essayent de trouver une solution rapide aux problèmes systémiques d’Haïti : « Ce que je demande en ce moment à nos amis et à nos frères chrétiens évangéliques en Amérique du Nord, c’est d’avoir un peu de patience ». « Laissez-nous travailler ».

« Le changement que nous espérons n’arrivera pas du jour au lendemain. Je sais que les besoins sont pressants, mais nous devons avoir une stratégie d’autosuffisance », dit-il. « Nous ne pouvons pas résoudre tous les problèmes du jour au lendemain. Pour être plus efficaces dans ce que nous faisons, nous devons investir dans des plans à long terme. »

Reportages d’Evens Sanon et Marko Alvarez pour Associated Press, avec contribution de Christopher Sherman. Reportage supplémentaire de Morgan Lee pour CT.

Traduit par Lee Tracey Jahdona Hubguerly Louis-Jeune

Révisé par Léo Lehmann

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L’intervention en Afghanistan : succès ou gâchis ?

Alors que le monde entier débat du retrait des États-Unis, 15 personnalités réfléchissent à la manière d’appliquer leur foi à ce qui s’est passé, et à ce qui suivra.

Des fresques murales le long des murs de l’ambassade américaine encore paisible, le 30 juillet 2021 à Kaboul, Afghanistan.

Des fresques murales le long des murs de l’ambassade américaine encore paisible, le 30 juillet 2021 à Kaboul, Afghanistan.

Christianity Today August 31, 2021
Paula Bronstein / Getty Images

Il sera difficile d'oublier les images d'Afghans se ruant sur les avions en partance, certains s’y accrochant à mains nues dans leur désespoir de quitter leur pays après la prise de Kaboul par les talibans.

La mise en œuvre par le président Joe Biden du retrait d'Afghanistan prévu par l'ancien président Donald Trump, la prise de pouvoir rapide des talibans et l'absence apparente de coordination et de planification pour évacuer les traducteurs et autres personnes menacées de persécution ont suscité une intense indignation et une grande tristesse dans le monde entier.

Les chrétiens ne sont pas tous d'accord sur ce que le gouvernement et l'armée américaine auraient dû faire. Mais ils essaient de mettre leur foi en pratique pour tenter de comprendre au mieux ce qui est juste après ces événements.

Christianity Today a interrogé 15 personnalités pour savoir ce qu'elles déplorent dans le retrait américain et la prise de pouvoir des talibans, comment elles prient pour l'avenir de l'Afghanistan, ce qu'elles pensent que les chrétiens américains peuvent apprendre de cette guerre, quel en sera selon elles l'impact à long terme sur le champ missionnaire et si les décennies d'investissement des troupes américaines et des travailleurs chrétiens étrangers ont porté du fruit.

Nos contributeurs :

Chris Seiple

est président émérite de l'

Institute for Global Engagement

(« Institut pour l’engagement mondial) et auteur de

The US Military/NGO Relationship in Humanitarian Interventions

(« La relation entre armée américaine et ONGs dans les interventions humanitaires »).

Paul Miller

est professeur de pratique des affaires internationales à la

Georgetown University’s School of Foreign Service

(« École du service diplomatique de l’université de Georgetown »). Il a précédemment occupé le poste de directeur pour l'Afghanistan et le Pakistan au sein du Conseil national de sécurité américain..

Mariya Dostzadah Goodbrake

et sa famille étaient autrefois des réfugiés afghans. Elle est aujourd'hui directrice exécutive de

Global FC

, une organisation qui s'occupe des réfugiés dans la région de Kansas City.

Eugene

, un travailleur chrétien qui a servi en Afghanistan et au Pakistan pendant des décennies et qui a requis l'anonymat en raison de son ministère en cours.

Jenny Yang

est vice-présidente chargée de la promotion et de la politique de

World Relief

, la branche humanitaire de la

National Association of Evangelicals

et l'une des neuf agences américaines de réinstallation des réfugiés.

Mark Tooley

est l’éditeur de

Providence: Journal of Christianity & American Foreign Policy

et président de l’

Institute on Religion and Democracy

.

Humphrey Peters

est le primat de l'Église du Pakistan et l'évêque du diocèse de Peshawar, qui englobe Kaboul.

Ryan Brasher

a passé sept ans (2014-2021) comme professeur de sciences politiques au

Forman Christian College

de Lahore, au Pakistan.

Mark Morris

est directeur de RefugeeMemphis.com et professeur d'études théologiques urbaines à

Union University

.

Mansour Borji

est directeur de la promotion pour

Article 18

, une organisation qui soutient les chrétiens persécutés en Iran.

Josh Manley

est le pasteur principal de l'église de Ras Al Khaimah, aux Émirats arabes unis, et il a établi des relations avec des pasteurs afghans.

Fouad Masri

est président et directeur général de

Crescent Project

et pasteur libano-américain.

Hurunnessa Fariad

est une musulmane américaine d'origine afghane et directrice de l'action sociale du

Multi-Faith Neighbors Network

, qui établit des relations entre les communautés religieuses afin de diminuer la méfiance ou les oppositions.

Un autre contributeur est un ancien responsable missionnaire d'Asie du Sud-Est, qui a requis l'anonymat en raison du fait qu'il est toujours actif dans la région concernée.

Une dernière contributrice est une Afghane basée aux États-Unis et mariée à un pasteur afghan, qui a requis l'anonymat en raison de ses relations personnelles en Afghanistan.

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Que regrettez-vous le plus dans le retrait américain et la prise de pouvoir des talibans ?

Femme d'un pasteur afghan : C'est arrivé si vite et personne n'était prêt. Il avait été dit que ce serait pour septembre, mais ils sont partis si vite. Ma sœur célibataire n'a pas pu partir.

Hurunnessa Fariad : La première est de savoir qu'une nation pleine de gens résilients et persévérants va continuer à souffrir. Plus de 40 ans d'effusion de sang et de peur, c'est trop, et cela ne devrait pas se produire dans le monde d'aujourd'hui. L'Afghanistan est retourné à l'âge sombre, littéralement du jour au lendemain.

Deuxièmement, la lâcheté avec laquelle le président Ghani a abandonné sa responsabilité de servir le peuple afghan. […] Il a vendu et laissé l'Afghanistan aux loups. Troisièmement, le retrait américain a été si mal planifié et exécuté. La panique et la ruée qui ont suivi à l'aéroport de Kaboul auraient pu être évitées. Qu'advient-il des plus de 80 000 demandeurs de visa d’immigrants spéciaux (SIV) à qui le gouvernement américain avait promis la protection et qui sont pourtant bloqués à Kaboul, craignant pour leur vie alors que les talibans reprennent le contrôle ?

Quatrièmement, la violence et le contrôle qui seront exercés sur les femmes afghanes. L'idée que les femmes soient à nouveau contraintes de porter la burqa, qu'elles ne soient pas autorisées à sortir de chez elles sans une escorte masculine légale, qu'elles ne puissent pas aller à l'école ou travailler, qu'elles soient contraintes de se marier avec des membres des talibans, fait bouillir mon sang et saigner mon cœur pour mon peuple.

Paul Miller : Je ne sais pas par où commencer. Je déplore les vies perdues, les libertés perdues, l'injustice rampante, la victoire de la tyrannie et de la terreur. Les méchants ont gagné. Nous vivons dans un monde où une coalition des nations les plus riches et les plus puissantes de l'histoire s'est collectivement persuadée qu'elle était impuissante à arrêter la plongée d'une nation dans l'anarchie et la barbarie. Et, comme elle était impuissante, elle s'est racontée le mythe réconfortant que c'était inévitable, qu'il n'y avait rien à faire. Je déplore les mensonges que nous nous racontons et les mythes que nous tissons pour nous aider à nous sentir mieux face aux décisions moralement insensées et lâches que nous prenons.

Jenny Yang : Je suis préoccupé par les retombées humanitaires du retrait américain d'Afghanistan et par le manque de planification qui a placé de nombreux Afghans vulnérables dans une situation très difficile et limité les options pour ceux qui doivent être évacués. De nombreux groupes de personnes craignent les conséquences du retour au pouvoir des talibans : les personnes associées à l'armée américaine, les chrétiens et les autres minorités religieuses, les femmes et les jeunes filles, en particulier celles qui ont saisi l'occasion de poursuivre leur éducation. Nous sommes en deuil avec ces personnes et nous demandons aux États-Unis et aux autres pays de faire pression sur les talibans pour leur offrir le plus de protections possibles.

Mansour Borji : Le fait que les valeurs chèrement acquises des droits de l'homme et de la démocratie sont de plus en plus ternies en raison du manque de vision et d'engagement à long terme des puissances occidentales qui ne les défendent que du bout des lèvres, alimentant ainsi les idéologies et les régimes despotiques qui exploitent les pays et bafouent la dignité de leurs citoyens.

Josh Manley : Si je déplore de nombreuses réalités concernant la prise de contrôle de l'Afghanistan par les talibans, je déplore surtout la situation périlleuse dans laquelle cela place nos chers frères et sœurs de l'Église afghane. Pendant un certain temps, ils avaient connu un certain degré relatif de stabilité et de sécurité. Je déplore ce que les nouvelles circonstances pourraient signifier pour leur avenir. Je déplore la peur et l'inquiétude qui les assaillent en ce moment même.

Mark Tooley : Cette guerre, comme toutes les guerres, reflète la dépravation humaine. Celle-ci est inévitable et inéluctable. Et pourtant, nous pouvons admirer le sacrifice et le courage de tous les Américains, Afghans, et différents membres de l'OTAN et de nombreuses ONG qui ont travaillé et se sont donnés pour que l'Afghanistan échappe aux ravages du passé. Les succès ont été nombreux : une espérance de vie plus longue, une meilleure santé, plus d'éducation, plus de libertés, et ce pendant 20 ans. Ces victoires ne seront pas entièrement étouffées par les talibans. Et nous pouvons supposer que l'Église en Afghanistan, aussi petite soit-elle, a planté des graines dont les générations futures récolteront les fruits au-delà de ce que nous pouvons imaginer.

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Comment priez-vous pour l'avenir de l'Afghanistan ?

Femme d’un pasteur afghan : Pour la liberté des femmes.

Chris Seiple : Ma prière est que l’Église d'Afghanistan et du reste de l'Asie centrale découvre de nouvelles façons d'être équipée et de servir. J'espère en particulier que les Églises d'Afghanistan et de cette région, ainsi que de la région Moyen-Orient/Afrique du Nord, deviendront des lieux de prise en charge des traumatismes – et donc de réconciliation interne et externe – au service de toute la société.

Mark Morris : Prions pour le salut des dirigeants talibans. Prions pour que Dieu cache ceux qui courent le plus de risques aux mains malveillantes des hommes mauvais. Prions pour que l'Évangile progresse et que le Christ consolide son Église en Afghanistan.

Mansour Borji : Que la vie des gens soit épargnée, en particulier celle des personnes ayant une foi et/ou des convictions que des groupes intolérants comme les talibans jugent dangereuses et susceptibles de saper leur régime totalitaire. Que l'Afghanistan renaisse de ses cendres comme un phénix, cette fois plus fort et plus sage. La dernière fois que les talibans étaient au pouvoir, le peuple afghan a mesuré la vacuité des promesses faites par les révolutionnaires islamistes. Une nouvelle génération va revivre cette expérience.

Paul Miller : Je prie pour la victoire du royaume de Dieu, pour la paix et la justice, alors qu'il est manifestement humainement impossible que ces choses se réalisent dans un avenir prévisible.

Évêque Peters : Nous prions pour que le Saint-Esprit touche les talibans afin qu'ils restent tolérants et reconnaissent les droits de l'homme de tous les peuples. Le corps mondial du Christ doit exprimer l'amour et la compassion chrétienne aux talibans et partager la bénédiction et la joie que Dieu nous a données. Si, avant le retrait, nous priions une fois par jour pour l'Afghanistan, nous devrions maintenant prier dix fois.

Jenny Yang : Je prie en priorité pour ceux qui cherchent désespérément à s'enfuir, afin que Dieu préserve leur vie et leur permette – que ce soit par l'intermédiaire du gouvernement américain ou autrement – de trouver refuge dans un endroit sûr où leurs droits et leur dignité sont pleinement respectés. Au-delà de cela, je prie pour l'épanouissement du peuple afghan, en particulier de ceux qui sont particulièrement vulnérables, afin qu'ils fassent l'expérience de la liberté et de la joie au milieu d'un environnement difficile. Et je prie pour que la communauté internationale continue à pousser les talibans à préserver les droits et libertés des femmes et des enfants, des minorités religieuses et ethniques, et de tous ceux qui sont souvent en désaccord avec leur régime et pourraient en souffrir.

Hurunnessa Fariad : Je prie pour que les enfants afghans n'aient jamais à s'endormir au son des bombes et des coups de feu. Je prie pour que la nation soit florissante dans tous les domaines de la vie – éducation, affaires, tourisme – qu'elle encourage et protège les femmes et les droits de l'homme pour toutes les ethnies qui composent l'Afghanistan. Je prie pour que l'Afghanistan soit reconnu comme une nation forte, digne et persévérante, comme elle l'était avant l'invasion soviétique.

Eugene: Que le peuple afghan commence à penser son avenir sans la présence de militaires d'autres nations sur son territoire pour le contrôler et parler d'édification de la nation alors que le peuple de tout État a le droit de le faire lui-même. Que les talibans tiennent leurs promesses d'une société plus libre où les femmes participent à tous les aspects de la vie et où les filles/femmes sont scolarisées. Que les disciples de Jésus grandissent en nombre et en maturité et bénissent le pays par des actes et des paroles transformateurs.

Fouad Masri : Je prie pour la protection et la multiplication des croyants clandestins. Je prie pour que les Afghans voient qu'un groupe djihadiste ne peut être le leader légitime de toute la diversité du peuple afghan. Je prie pour que les Afghans hors de leur pays rencontrent des amis chrétiens qui les réconfortent.

Mariya Dostzadah Goodbrake : Je prie spécifiquement pour qu'une génération pleine de courage, de résilience et de détermination se lève. Je crois que la génération qui a reçu un avant-goût de la liberté et de la dignité la plus élémentaire n'oubliera pas. Nous servons un Dieu qui nous rappelle constamment de ne pas oublier, de nous souvenir, de réfléchir au chemin que nous avons emprunté. Ma prière profonde est que cette génération n'oublie pas le parfum de la démocratie mais se lève avec courage pour vaincre l'ennemi. Je prie pour une intervention surnaturelle dans le cœur du peuple afghan, pour que les valeurs et les principes du Royaume soient miraculeusement plantés comme des graines dans le sol afghan, pour qu'ils poussent comme des arbres et portent des fruits au-delà de notre compréhension. Aucune démocratie ne se construit en 20 ans. Rien n'est perdu.

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Quelles réflexions les chrétiens américains devraient-ils tirer de cette guerre ?

Ryan Brasher : Les chrétiens américains devraient a) être reconnaissants pour cette période d'ouverture dans l'histoire de l'Afghanistan ; b) faire preuve de sagesse et de discernement, plutôt que de patriotisme aveugle, lorsque le gouvernement américain propose des opérations militaires à l'étranger (qui peuvent très bien être justifiées, mais il y a très peu d'exemples, après la Seconde Guerre mondiale, d'interventions militaires réussies (et éthiques), en particulier dans le Sud) ; c) être ouverts à l'accueil des réfugiés d'Afghanistan et d'autres pays déchirés par la guerre – y compris dans leurs propres quartiers.

Chris Seiple : La formulation de la question en appelle une autre : Sommes-nous des Américains qui se trouvent être chrétiens, ou des chrétiens qui se trouvent être Américains ? Quoi qu'il en soit, il existe des façons séculières et ecclésiales de réfléchir à la guerre, en reconnaissant que Dieu est souverain – et que le Saint-Esprit travaille activement dans les deux cas.

Sur le plan « spirituel », il est juste de se demander si un chrétien devrait même se soucier de telles choses, d'autant plus que la « victoire est déjà remportée ». Je pense que oui – sans équivoque – puisque nous sommes appelés à construire le royaume de Dieu « sur la terre comme au ciel ».

Mais nous devons davantage travailler à notre théologie de la citoyenneté, ainsi qu'à notre théologie de l'engagement et à notre théologie de la souffrance, qui doivent toutes former et alimenter la théorie séculière du changement positif qui permette de comprendre comment la mise en œuvre de nos convictions sert le bien commun. Pour ce faire, nous devons être des chrétiens crédibles et des Américains crédibles. Et pour être crédibles, nous devons être qualifiés pour notre engagement. N'oubliez pas : Dieu n'a pas besoin de nous pour faire sa volonté. Mais il souhaite ardemment que nous prenions part à ce qu'il fait déjà. Nous ne nous engageons pas d’abord dans le monde pour le changer, mais parce qu'il nous a changés.

Mansour Borji : Les Américains ont payé cette guerre de leur sueur et de leur sang. Leurs impôts ont été investis dans l'effort de guerre et leurs jeunes sont morts sur les champs de bataille. Cette guerre avait pour but de déraciner une idéologie qui a engendré le 11 septembre. Cela n'a rien à voir avec un pique-nique ! Les chrétiens américains devraient demander des comptes à leurs gouvernements afin qu'ils démontrent les valeurs par lesquelles les Américains veulent être connus, et ne répètent pas les mêmes désastres de politique étrangère qui ne font qu'enhardir leurs ennemis.

Responsable missionnaire asiatique : Les chrétiens américains ne vont pas du tout (et ne devraient pas !) se sentir fiers de cette guerre et, pire encore, de la manière dont le retrait américain a été mené. Ils devraient faire preuve d'humilité chaque fois qu'ils rencontrent un Afghan et être prêts à le laisser parler et à l'écouter. Ils ne devraient pas essayer d'argumenter ou de justifier les actions américaines, mais faire preuve d'empathie et d'amour envers leur voisin afghan.

Hurunnessa Fariad : La guerre et les invasions ne devraient pas être la première réponse. La diplomatie et le dialogue avec les autres doivent être recherchés aussi loin que possible. Nous sommes tous des habitants de cette Terre et une guerre à un endroit affectera tout le monde partout ailleurs. En tant que musulmane, je peux dire que nous devons nous lever et nous battre pour ce qui est juste et moralement sain, et cela est également très important dans la foi chrétienne. Je pense simplement qu'en tant qu'Américains, nous avons abandonné la plupart de nos principes fondamentaux lorsque nous avons décidé de laisser l'Afghanistan aux mains des talibans.

Paul Miller : Une guerre juste est censée viser une paix meilleure, des conditions durables de shalom non seulement pour nous-mêmes mais aussi pour nos ennemis et pour ceux qui vivent dans le pays où nous combattons. Nous devrions réfléchir longuement et sérieusement à la façon dont nous, électeurs, avons permis à nos élus d'ignorer ces exigences de justice par notre passivité, notre négligence et notre apathie. Nous avons mené une guerre de convenance, une campagne sans fin de chasse-taupes contre les terroristes sans nous soucier de créer des conditions de paix durables en Afghanistan ou pour nous-mêmes – parce que nous nous sommes dit que c'était trop difficile et trop cher. Nous sommes maintenant témoins du prix élevé de notre choix. Et voici le pire : construire des conditions de paix durables n’était pas une simple question de charité ; c’aurait été une stratégie prudente et plus efficace que ce que nous avons fini par faire.

Évêque Peters : Des millions de Pakistanais célèbrent le règne des talibans comme la victoire de l'Islam sur l'Amérique infidèle. La minorité chrétienne pakistanaise (1,2 % de la population) a réagi avec appréhension et prudence. Elle craint un développement de l'influence des talibans au Pakistan.

L'Église mondiale ne peut pas être critique et négative en permanence. L'analphabétisme et le chômage sont élevés dans cette région et les superpuissances britannique, russe et américaine n'ont pas réussi à y établir leur autorité. Compte tenu de cette volatilité, nous devons accepter le règne des talibans. Cela est d’autant plus important lorsque nous regardons la façon dont les talibans ont commis des atrocités et des effusions de sang en 1995. Cette fois-ci, jusqu'à présent, ils se sont comportés de façon beaucoup plus humaine. Cela peut être attribué aux 20 ans de présence américaine en Afghanistan.

Eugene : Je suis Américain et Suisse. J'ai vécu parmi les Afghans pendant 25 ans et j'ai été en relation avec eux pendant environ 40 ans. Dans toute guerre, et particulièrement dans celle-ci, en tant qu'Américains, nous portons une terrible responsabilité pour n'avoir pas permis aux peuples d'être libres. Nous avons fourni suffisamment de munitions aux Afghans pour vaincre les Russes, mais pas assez de soutien pour remplacer la culture de la guerre par les fondements d'une société civile robuste et saine. Nous sommes maintenant dans une position où nous ne pouvons pas dire que nous nous sommes comportés comme un peuple pieux dans ce pays.

Il est maintenant impératif que nous priions pour que les Afghans trouvent un moyen d'établir leur propre société civile et que nous donnions généreusement nos prières, notre temps et notre énergie pour soutenir sa croissance. Nous devons faire preuve d'une grande humilité en affirmant que nous sommes des disciples de Jésus et que nous avons le cœur brisé par la destruction de l'Afghanistan à laquelle notre pays a contribué. Ensuite, il nous faut partager et pratiquer l'amour du Christ et respecter les peuples d'Afghanistan dans leur quête d'avenir pour leur pays.

Mariya Dostzadah Goodbrake : Dans notre réflexion, nous voulons rester encouragés et nous rappeler les bonnes vérités chrétiennes : « Dieu vaincra », « Ce monde est brisé », « La justice n'est pas de ce côté de la vie », ou « Nous avons déjà la victoire ».

Oui, ces affirmations nous rappellent que nous avons un Dieu qui a déjà vaincu, mais pourrions-nous nous prendre un temps de deuil avant de revenir à ces vérités ? Pourrions-nous exprimer une juste colère ? Pourrions-nous dire que, pour ce moment, le mal l'a emporté ? Pourrions-nous simplement nous asseoir dans la douleur et l'injustice pendant un moment ?

Pourquoi faire ? Parce que ce n'est qu'ainsi que nous pourrons ressentir une once de la douleur et de la tourmente du peuple afghan et de ceux qui ont tant perdu et se sont sacrifiés pour la guerre. Puis, lorsque nous aurons fait cela, que nous nous serons alignés avec cette peine, nous nous souviendrons que demain nous continuerons le combat.

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Si les États-Unis se sont engagés dans une guerre peu judicieuse au départ, était-il bon de s'arrêter et de se retirer complètement, comme un signe de repentance ?

Femme d’un pasteur afghan : C'était une mauvaise décision de partir si vite. Ils devaient finalement partir, mais pas de cette façon.

Mark Morris : Avec tout mon respect, cette question n'est pas très utile. Nous pouvons tous spéculer et refaire le passé, à l'infini. Nous ne pouvons pas revenir en arrière. Oui, les habituelles bavures égocentriques, culturellement ignorantes et égoïstes en matière de politique étrangère ont été répétées par chacun de nos deux partis lorsqu'ils détenaient les rênes du pouvoir dans notre pays. Je ne m'attends pas à ce que les États-Unis se repentent. Nous verrons plutôt nos dirigeants se pointer du doigt et blâmer l'autre parti. Chaque dirigeant, chaque parti sera tenu responsable par Dieu des décisions qu'il a prises et des dommages ou du bien fait à l'humanité par ces décisions politiques. Maintenant nous devons décider de la manière dont nous devons réagir au présent.

Ryan Brasher : J'hésite un peu à parler de « repentance » en matière de politique étrangère ou militaire américaine. Le gouvernement américain n'est pas le représentant de l'Église ou d'un corps chrétien. En outre, il n'était pas évident en 2001 que les choses tourneraient comme elles l'ont fait. Il semble qu'il était sage de mettre fin à l'engagement américain en Afghanistan, même si la rapidité avec laquelle cela a été fait était peut-être imprudente.

Jenny Yang : Je ne suis pas en mesure de commenter la question du rôle militaire des États-Unis en Afghanistan, mais ce qui est clair pour moi – et pour de nombreux chrétiens – c'est que nous avons une obligation de nous préparer et d'aider ceux qui seront vulnérables lorsque nous partirons. Lorsque nous partirons, nous devrons le faire de manière à protéger les personnes qui ont risqué leur vie aux côtés des États-Unis. Abandonner nos alliés maintenant, après leur avoir promis pendant des décennies que nous les soutiendrions, serait une tache morale pour notre nation, dont les répercussions dureront des décennies. La façon dont nous quitterons l'Afghanistan laissera une empreinte durable dans l'histoire de notre nation.

Fouad Masri : Cette question est source de confusion. Je pense que nous confondons le rôle de l'Église et le rôle du gouvernement. Le rôle du gouvernement est de protéger le pays et d'arrêter le mal commis contre ses citoyens. Le rôle de l'Église est de faire preuve de miséricorde et de justice. En tant que ministre chrétien, je crois que la guerre ne résout rien. Jésus veut que nous soyons des artisans de paix. Jésus veut aussi que nous prenions la défense des plus petits. Le meurtre des femmes hazara, ouzbek et tadjik par les talibans doit cesser. La charia islamique est directement opposée aux commandements de Dieu. Il s'agit d'une guerre idéologique et nous la menons avec les mauvaises armes.

Responsable missionnaire asiatique : Si les militaires américains se sont engagés dans une guerre peu judicieuse, ils n'auraient dû se retirer que lorsqu'ils pouvaient le faire sans causer davantage de dommages et de répercussions. Cela signifie qu'ils auraient dû rester plus longtemps pour contribuer au développement du pays et s'assurer qu'au moment de leur départ, l'armée et le gouvernement afghans étaient suffisamment forts et disposaient des infrastructures et de la force nécessaires pour tenir par eux-mêmes sans aucun soutien étranger. Cela aurait pu prendre des années, mais cela aurait été le prix coûteux que les États-Unis devaient payer pour être entrés dans la guerre de manière imprudente.

Mariya Dostzadah Goodbrake : L'Amérique est entrée en Irak et en Afghanistan à la manière d’un franc-tireur. Il n'y avait pas de retour en arrière possible, quelle que soit la cause. La guerre n'était pas imprudente, elle était mal calculée. Les États-Unis ne sont pas entrés dans cette guerre dans le seul but de se venger des auteurs du 11 septembre, comme l'a déclaré le président Biden. Le président George W. Bush a conquis les cœurs des Afghans et des Américains avec l'idée d'apporter dignité, sûreté et sécurité au peuple afghan. Cette justification de la guerre était beaucoup plus durable et défendable. Les soldats américains ne sont pas restés en Afghanistan pendant 20 ans pour se venger des terroristes, ils sont restés pour libérer le cœur des Afghans et leur donner un nouvel espoir. Le fait que Biden réduise la guerre à une vengeance est un affront à ceux qui y ont perdu la vie et aux familles des soldats qui se demandent maintenant si leurs sacrifices ont été vains.

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Quel type d'impact à long terme pensez-vous que cela aura sur le champ de mission en Afghanistan et dans les régions avoisinantes ?

Femme d’un pasteur afghan : Si des personnes sont fragiles dans leur foi, certaines tomberont. Les médias sociaux seront détruits par les talibans, ce qui rendra difficile pour les croyants d'être encouragés de l'extérieur.

Mark Morris : La question suivante reste sans réponse : Où sont les missionnaires ? Où sont les organisations caritatives internationales ? Pendant que les expatriés postent sur Facebook pour exprimer leur gratitude envers le transport militaire qui les a fait sortir, les Afghans se sentent abandonnés. Des chrétiens afghans ont souligné aujourd'hui à quel point c'était déplacé. « Vous célébrez votre départ, mais vous ne mentionnez même pas ceux que vous avez laissé derrière vous pour dans la souffrance ». Il faut beaucoup de prudence dans les paroles que nous partageons à l'heure actuelle, car l'Occident n'est pas apprécié pour l'instant vu la nature de notre départ. Un meilleur plan aurait pu démontrer notre humanité et notre intérêt d'une manière plus tangible.

Mansour Borji : Pas plus tard qu'hier, j'ai appris que certains chrétiens afghans brûlent à présent de la littérature et d'autres documents chrétiens dans leurs maisons, car ceux-ci pourraient les exposer aux talibans qui fouillent à présent maison par maison pour identifier leurs cibles. Beaucoup de ces croyants qui cherchent désespérément la sécurité hors d'Afghanistan sont le fruit de nombreuses années de prière, de formation de disciples et de ministère fidèle dans un environnement difficile. Bien sûr, leur impact sur leurs communautés peut perdurer, mais peut-être pas aussi efficacement qu'auparavant. De plus, le régime iranien se sentira maintenant plus en sécurité car il n'aura plus de forces américaines de part et d'autre de son sol. Il a le sentiment qu'il peut poursuivre son règne de terreur qui a déjà fait du mal à l'Eglise non seulement en Iran, mais aussi en Irak, en Syrie, au Yémen et au Liban.

Paul Miller : L'Afghanistan sera un pays fermé aux missions, comme il l'était avant 2001. L'ouest et le sud du Pakistan seront probablement également fermés. Le travail missionnaire sera extrêmement dangereux et difficile.

Eugene : Il a toujours été difficile de gagner le droit de partager l'Évangile de manière holistique avec les Afghans ou d'autres peuples de ce contexte. Nous pouvons parler librement mais humblement du Christ et de sa merveilleuse puissance transformatrice, mais notre intervention déstabilisante basée sur la technologie et le retrait précipité qui s'en est suivi nous mettent face à d'énormes obstacles à surmonter.

Évêque Peters : La Chine a exprimé son intérêt pour l'établissement de relations diplomatiques avec l'Afghanistan. Donc, si la situation évolue dans ce sens, nous pensons que les Églises pakistanaises et chinoises pourraient jouer un rôle central en réalisant des percées à partir des enseignements islamiques. Les musulmans vouent un grand respect et une grande admiration à Jésus et à Marie. Il y a là un pont pour atteindre ces peuples.

Responsable missionnaire asiatique : Les Afghans locaux et les régions environnantes ne feront pas confiance aux Occidentaux aussi facilement, et surtout aux Américains, en raison du sentiment de trahison qu'ils éprouvent à leur égard. Ils seront probablement plus réceptifs ou ouverts aux personnes venant de pays non occidentaux. La Chine profitera probablement de son projet de « Nouvelle route de la Soie » pour établir des liens économiques avec l'Afghanistan, ce qui donnera l'occasion aux missionnaires chinois de s’y rendre en tant qu'hommes d'affaires.

Mais à plus long terme, la diffusion de l'Évangile devra être assurée principalement par les croyants afghans locaux, avec l'aide des croyants de la diaspora ainsi que des croyants iraniens dont la langue est proche du dari. La télévision par satellite et les technologies numériques et multimédias seront également des outils très importants pour aider à atteindre le peuple afghan, y compris les personnes déplacées.

Jenny Yang : Selon le Center for the Study of Global Christianity (« Centre pour l’étude du christianisme mondial »), moins de 3 % de la population afghane connaît personnellement un chrétien : non seulement presque personne n'a entendu l'Évangile, lu la Bible ou visité une église, mais presque personne ne connaît un chrétien. Malheureusement, avec les talibans au pouvoir, cette situation n'est pas prête de s'améliorer.

Cependant, alors que nous nous lamentons et pleurons sur une situation horriblement injuste qui force les gens à fuir leur pays, j'ai aussi vu comment Dieu a travaillé pour attirer des personnes à lui, ce qui, selon Actes 17.26-27, fait partie du dessein souverain de Dieu dans l'histoire, afin que les hommes et les femmes « le cherchent et peut-être tendent la main vers lui et le trouvent, bien qu'il ne soit éloigné d'aucun de nous ». Il y a une occasion unique pour les chrétiens des pays voisins d'accueillir les réfugiés afghans, et même aux États-Unis. Si l'Église mondiale accueille les réfugiés afghans, je crois que cela amènera de nombreux réfugiés afghans à comprendre et à ressentir l'amour du Christ.

Mark Tooley : La victoire des talibans est un coup énorme porté à tout ce qui pourrait ressembler à de la tolérance religieuse dans une région déjà très hostile aux voix non islamiques. Les persécutions seront plus nombreuses. Mais les affres du régime taliban finiront par discréditer sa version de l'islam, tout comme les théocrates iraniens ont créé des générations d'agnostiques et de sceptiques religieux, tandis qu'une Église encore très petite est en pleine expansion en Iran.

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Dans quelle mesure les décennies d'investissement des forces américaines et des travailleurs chrétiens étrangers en valaient la peine ou étaient-elles vaines ?

Femme d’un pasteur afghan : Cela en valait la peine, car en 2001, un grand nombre de personnes ont reçu le Christ et pratiquent leur foi parce qu'elles ont entendu l'Évangile par des étrangers.

Chris Seiple : Si votre objectif est spirituel et que vous ne définissez pas le succès par des mesures temporelles, mais par l’obéissance, le service concret assuré par la présence des disciples du Christ en Afghanistan portera des fruits que nous ne pouvons pas encore imaginer. Cela dit, de telles périodes sont propices pour que les ministères chrétiens reconsidèrent et réévaluent leur théologie de l’engagement et de la souffrance, en réfléchissant à ce que peut à présent être leur « présence ». En conséquence, les approches organisationnelles du leadership et de la gouvernance doivent également être revues, en veillant à ce que les stratégies d'engagement soient enracinées dans l'Écriture et la culture locale (et pas nécessairement dans celle du pays d'envoi).

Dit autrement, l'Église grandit toujours lorsqu'elle a de la compassion pour les populations locales, lorsqu'elle souffre avec elles. Le Nouveau Testament regorge d'histoires de chrétiens qui ne se sont pas plaints de leur situation, ni ne l'ont fuie, mais ont vu dans chaque situation difficile une occasion de partager l'amour du Christ, de manière pratique, en servant ceux qui ne pouvaient pas fuir la guerre, la famine et la peste. Puissions-nous être dignes de l'exemple de nos ancêtres spirituels.

Paul Miller : Pendant 20 ans, il n'y a eu aucune attaque terroriste internationale émanant de l'Asie du Sud. C'est une victoire qui ne pouvait pas être considérée comme acquise. Deuxièmement, nous avons donné à une génération d'Afghans le goût d'une vie meilleure, un souvenir qui, je l'espère, leur servira d'inspiration pour travailler à un avenir meilleur. Au-delà de cela, il est difficile de ne pas avoir le sentiment que tous nos efforts ont été réduits en cendres par la victoire des talibans, aidés et encouragés par la décision du gouvernement américain d'abandonner nos alliés, de trahir notre objectif et de rendre vains le sacrifice et les épreuves de milliers de personnes qui ont travaillé et servi là-bas.

Ryan Brasher : L'investissement des travailleurs chrétiens étrangers en valait vraiment la peine. L'œuvre du Christ ne dépend pas de la politique et des événements politiques, et elle en vaut toujours la peine. Quant à l'investissement du gouvernement et des militaires américains, je suis sûr que les talibans apprécient le développement massif des infrastructures du pays depuis qu'ils ont été chassés. Il leur sera plus facile de gouverner, pour le meilleur ou pour le pire ! L'Afghanistan est un autre exemple de bonnes intentions qui tournent mal, lorsque le développement n'est pas guidé par les conditions locales, les demandes locales, le partenariat local et la propriété locale, mais par des intérêts étrangers et les exigences de cycles de financement à court terme des donateurs internationaux. Les États forts et efficaces ne peuvent être importés ; ils doivent se développer à partir des conditions locales.

Eugene : La situation est ambivalente. Le travail d'un certain nombre de travailleurs des ONG et de groupes partageant les mêmes idées durera longtemps en raison de tout ce qui a été établi à travers une grande variété de programmes transformant la vie, tels que les soins oculaires, le développement communautaire, le travail auprès des personnes et des communautés concernant les personnes handicapées, les domaines médicaux, agricoles, économiques et autres. Il est également merveilleux de constater qu'il y a un nombre croissant de disciples de Jésus dans le pays et dans la diaspora afghane, car ces personnes et ces familles grandissent dans leur foi en Christ. Ces choses ne peuvent être enlevées.

Fouad Masri : Cela en vaut toujours la peine lorsque les gens ont la liberté d'étudier, d'aller à l'école, d'être créatifs et d'entendre les enseignements de Jésus. Quelle joie de rencontrer des croyants afghans. Quelle joie de voir Malala aller à l'école. Cela vaut toujours la peine de se sacrifier pour la liberté. Je pense à tous mes amis afghans qui ont eu l'occasion d'étudier, de voyager, de se distinguer et d'entendre la bonne nouvelle de Jésus. Ce que vous voyez, c'est un manque de réflexion à long terme de la part des nations, de l'Afghanistan, des États-Unis et de la communauté internationale.

Responsable missionnaire asiatique : Il y a eu des fruits spirituels, comme en témoigne le nombre croissant de croyants afghans clandestins ces dernières années. Les croyants qui sont restés sur place constitueront le noyau de l'Église clandestine qui poursuivra le travail d'évangélisation à l'avenir. Mais en regardant les sommes dépensées par le gouvernement américain, on se demande quel aurait pu être le résultat si une plus grande partie des dépenses avait été consacrée au développement des infrastructures, comme la construction d'écoles et d'hôpitaux, la création d'entreprises et d'emplois, et à l'amélioration de la vie de la population.

Mariya Dostzadah Goodbrake : Les graines de la démocratie ont été plantées dans le cœur des gens. Les travailleurs chrétiens ont laissé dans le pays des traces qui ne peuvent être effacées. Le sentiment de désespoir actuel n'est pas synonyme de défaite. Le sang des chrétiens et des soldats tombés au combat ne peut être emporté. Rien n'est jamais perdu […] ce que nous ne pouvons pas comprendre maintenant a encore le potentiel de faire beaucoup plus. Est-ce que tout cela en valait la peine ? Je ne suis pas sûre, mais ce à quoi je m'accroche, c'est que l'histoire de l'Afghanistan n'est pas terminée. Nous ne verrons peut-être pas la démocratie revenir dans le pays de notre vivant, mais cela nous rappelle simplement à l’humble réalité que nous ne jouons qu'un petit rôle dans une histoire bien plus vaste. Il y a un célèbre dicton afghan que mon père me rappelle en ce moment : « Dika Dika, Darya Maysha », qui se traduit par « goutte après goutte, une rivière se crée ». En ce moment, j'ai l'impression que cette rivière s'est asséchée ou vidée ; mais goutte après goutte, des progrès seront accomplis.

Mark Morris : Nos disciples de Jésus afghans me disent que cela en valait la peine.

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Y a-t-il autre chose que vous aimeriez dire ?

Femme d’un pasteur afghan : Souvenez-vous des chrétiens afghans. Priez pour eux. Encouragez-les. Les croyants se sentent abandonnés et sont désorientés. S'il vous plaît, priez pour nous.

Chris Seiple : L'Afghanistan est une des nombreuses questions – avec la pandémie, les questions raciales, la situation politique, etc. – qui devrait interpeller les chrétiens sur la façon dont ils s'organisent pour témoigner de leur espérance intérieure. Les organisations chrétiennes, locales et mondiales, devraient se demander si leur stratégie, leur structure et leurs effectifs sont adaptés à l'époque dans laquelle nous vivons, et si leur personnel a été suffisamment équipé pour s'engager d'une manière digne de l'Évangile.

Responsable missionnaire asiatique : On peut relever plusieurs similitudes ou parallèles entre la croissance rapide des Églises en Iran dans les années 1980 et 1990 après la révolution islamique et celle qui s’est produite en Chine après la révolution culturelle. Il serait intéressant de voir si l'Afghanistan connaîtra également une croissance rapide des Églises dans les 10 à 20 prochaines années après l'invasion des talibans. Ces pays présentent tous de nombreuses similitudes : l'existence de forts antécédents anti-occidentaux et anti-chrétiens ; une longue histoire de souffrance et de pauvreté ; des régimes gouvernementaux extrêmement autoritaires et durs ; un grand nombre de jeunes désenchantés en raison du manque de libertés sociales ; et des personnes qui ont perdu la foi en leur propre religion ou idéologie (p. ex., le communisme, l'islam), pour n'en citer que quelques-unes.

Josh Manley : Actuellement, nos frères et sœurs afghans se cachent. Songez au prix qu'ils doivent payer pour rester fidèles à l'Évangile. Bien que la politique soit essentielle et qu'elle ait assurément une réelle importance et une place qui lui revient, demandez-vous si nous n’aurions pas à apprendre de nos frères et sœurs en Afghanistan que nous avons placé trop d'espoir dans la politique.

Les chrétiens américains ont-ils perdu de vue la mission de l'Église en se tournant trop vers les politiciens américains pour accomplir leur mission ? L'acrimonie actuelle, les ruptures d'unité et les conflits évidents entre des chrétiens qui professent le même Évangile ne sont-ils pas autant d’indices en ce sens ?

La possibilité de participer au processus politique est une grande bénédiction pour nous, mais pourrions-nous aussi apprendre quelque chose de nos frères et sœurs afghans qui n'ont pas accès au pouvoir politique ? Nos frères et sœurs là-bas ne sont nullement désorientés quant à la manière de faire progresser la mission de l'Église et quant à savoir de qui ils dépendent pour le faire.

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Traduit par Léo Lehmann

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Comment prier pour Haïti après le nouveau séisme ?

Des responsables chrétiens en Haïti partagent ce qui a changé pour les croyants entre 2010 et aujourd’hui.

Christianity Today August 31, 2021

Au mois de juillet, le président Jovenel Moïse était assassiné. Puis, le samedi 14 août, un tremblement de terre de magnitude 7,2 a frappé ce pays des Caraïbes, faisant plus de 2200 morts et des milliers d’autres blessés et déplacés.

Les organisations humanitaires chrétiennes tentent de trouver l’équilibre entre la nécessité d’approvisionner d’urgence la zone sinistrée et celle de garder un œil sur la tempête tropicale Grace, de rester attentif à la situation du COVID-19 en Haïti et de faire face aux graves problèmes de sécurité qui affectent le pays.

World Vision a indiqué travailler avec le gouvernement local et la police pour protéger les familles contre le vol et le pillage à la suite du tremblement de terre. Alors que l’organisation humanitaire chrétienne disposait de fournitures immédiates pour 6 000 personnes, elle et d’autres groupes tels que Operation Blessing et l’association adventiste du septième jour ADRA International étaient en train de mobiliser du personnel et des fournitures pour Les Cayes, tout proche de l’épicentre du séisme. Samaritan's Purse a déployé dès le dimanche son avion DC-8 transportant 31 tonnes de secours tout en mettant en place une unité mobile de traumatologie de niveau 2. Le mardi qui a suivi la catastrophe, ils annonçaient l’ouverture d’un hôpital de campagne de 36 lits.

Le tremblement de terre appelle la comparaison avec celui de magnitude 7,0 qui avait frappé l’île en 2010, tuant plus de 300 000 personnes selon le gouvernement haïtien, et en blessant presque autant. Dans son sillage, le théologien haïtien Dieumeme Noelliste déclarait à Christianity Today qu’il ne s’attendait pas à ce que la crise amène son peuple à abandonner sa foi :

Ce n’est pas la première fois qu’une catastrophe nous frappe. C’est peut-être la plus brutale, mais il y a deux ans, nous avons eu quatre ouragans dévastateurs et même alors, les gens ne se sont pas retournés contre Dieu. Ils ont souffert beaucoup de choses des mains de leurs compatriotes haïtiens et sont restés fidèles à Dieu. Même à l’époque de l’esclavage, les Haïtiens ont été traités brutalement mais se sont ouverts à la version du christianisme que les propriétaires d’esclaves prêchaient. Les esclaves en redemandaient même ! Je vois l’Église continuer à grandir. Dans ces situations, les gens ont tendance à se tourner vers Dieu. C’est leur seul espoir.

Plus d’une décennie après le premier tremblement de terre, qu’est-ce qui a changé pour les chrétiens haïtiens maintenant confrontés aux conséquences d’un deuxième tremblement de terre dévastateur ? Au milieu de telles épreuves, ont-ils gardé la foi, et comment ?

Christianity Today a demandé à des dirigeants de l’Église haïtienne et des missionnaires de partager ce qu’ils voient sur le terrain  :

  • Edner Jeanty, directeur exécutif, Barnabas Christian Leadership Center
  • Lesly Jules, apologète et auteur de Objections rejetées : L’Approche Apologétique Classique
  • Dieumeme Noelliste, professeur d’éthique théologique, Denver Seminary
  • Luke Perkins, assistant du président, Séminaire de Théologie Évangélique de Port-au-Prince
  • Magda Victor, secrétaire générale de la Société biblique haïtienne

L’Église est-elle mieux préparée à faire face à ce tremblement de terre qu’au précédent ? Qu’est-ce que les chrétiens haïtiens ont appris en matière de théologie, de service et de témoignage ?

Jeanty : En termes de réponse à la crise, l’Église est mieux préparée aujourd’hui dans la mesure où elle a la mémoire vivante des expériences passées. J’avais convoqué une réunion entre divers groupes intervenus dans les efforts de secours face à l’ouragan Matthew et nous avons identifié quelques bonnes pratiques et erreurs à éviter. Ce document est en train d’être partagé avec divers groupes alors que nous envisageons des interventions pour cette nouvelle crise.

En matière de théologie, il y a probablement moins de gens pour dire qu’il s’agirait d’un jugement divin à cause d’un soi-disant pacte avec Satan que nos ancêtres auraient passé. Cela vient soit de la pression de la société, soit du fait que nous ne nous laissons plus convaincre par des explications simplistes du mal. Heureusement, les gens invoquent toujours le Seigneur et croient que, malgré les catastrophes naturelles, il est toujours le Dieu bon.

Pour ce qui est du ministère et du témoignage, l’une des leçons du tremblement de terre précédent et du confinement lié au COVID est que le ministère de l’Église ne se limite pas aux quatre murs de nos bâtiments. Par exemple, le ministère peut se faire en ligne et les réunions dans les foyers peuvent être stratégiques. Malheureusement, pour la plupart, les Églises continuent à exercer leur ministère de la même manière, atteignant les mêmes personnes, utilisant les mêmes méthodes et restant aveugles aux mêmes opportunités et défis. Il y a, cependant, une plus grande aspiration des dirigeants chrétiens à atteindre des positions politiques au niveau national. Mais il faut un enseignement généralisé sur l’engagement civique pour que la communauté évangélique ne continue pas à être naïve sur la réalité de la politique.

Dans une moindre mesure, on assiste à de nouvelles initiatives pour promouvoir le développement économique. De nos jours, le niveau de pauvreté au sein du mouvement chrétien haïtien est une limite importante au témoignage de l’Église, alors que la communauté chrétienne pourrait tirer parti de la confiance entre frères et sœurs dans la foi, des valeurs chrétiennes que nous partager, de la direction du Saint-Esprit, de l’esprit d’entreprise haïtien, et du nombre de leaders disponibles pour le coaching. Je crois que la création d’emplois et le fait de faire des affaires avec une éthique chrétienne est la voie durable vers un discipulat dynamique et une vie plus abondante dans ce pays.

Jules : Malheureusement, depuis le dernier tremblement de terre, les codes de la construction n’ont pas été appliqués par le gouvernement haïtien. Les Églises n’ont pas insisté sur la nécessité d’agir avec sagesse lorsqu’il est question de construire. Le sens littéral de la parabole du fou qui construit sa maison sur le sable n’a pas été mise en rapport avec les tremblements de terre.

La théologie n’a pas beaucoup évolué. Beaucoup de chrétiens croient encore que les catastrophes naturelles sont une punition de Dieu qui est en colère à cause de nos péchés. Dans ce contexte, il ne faut pas s’étonner que les catastrophes naturelles continuent de faire des victimes en Haïti. L’idée de gestion de la création en tant que mandat de Dieu doit être enseignée et appliquée si nous voulons faire face efficacement aux catastrophes naturelles.

Noelliste : D’une manière générale, l’Église haïtienne devrait être plus consciente de sa responsabilité cette fois-ci qu’il y a 11 ans. À la suite du tremblement de terre de 2010, plusieurs leaders religieux éminents se sont réunis et ont formé une organisation qui a été chargée de mobiliser et de préparer l’Église haïtienne pour l’exercice de son rôle prophétique dans la société. Le mouvement a produit une série de réflexions théologiques sur des valeurs clés jugées essentielles pour une vie de qualité dans toute société : intégrité, justice, bonne gouvernance et protection de l’environnement. Des séminaires et des colloques ont été organisés dans tout le pays pour diffuser les résultats de ces études. Du matériel de prédication a même été développé sur ces thèmes pour alimenter les chaires haïtiennes et rendre la prédication plus pertinente pour le contexte.

Le but de cet effort était de faire comprendre que la tâche de bâtir une nation respectable n’appartient pas à Dieu seul. Les gens en général, et le peuple de Dieu en particulier, ont un rôle important à jouer à cet égard. Dans ce projet, le caractère moral est un atout irremplaçable. Si un peuple n’est pas préparé et disposé à apporter cette contribution, Dieu ne peut être tenu responsable des calamités qui lui arrivent.

Perkins : Après le tremblement de terre de 2010, notre séminaire a vu une augmentation du nombre de nouveaux candidats. Les gens sont venus au séminaire en disant : « Dieu m’a fait la grâce de m’épargner, alors je veux être prêt à mieux le servir ».

Victor : Les deux tremblements de terre, celui qui a frappé Haïti en 2010 et celui qui ne date que de quelques jours, ont pris tout le monde par surprise, mais pour des raisons différentes. Le tremblement de terre du 12 janvier 2010 nous a surpris, car les Haïtiens s’étaient déshabitués de l’idée des tremblements de terre. Avant 2010, le dernier séisme majeur qui avait frappé Haïti remontait à 1842. Les gens avaient oublié à quoi ressemblait un tremblement de terre. Cela seul a causé la mort de nombreuses personnes.

Le dernier tremblement de terre nous a surpris d’une manière différente : personne ne s’attendait à ce que le pays soit à nouveau touché en si peu de temps. À l’heure où la nation panse ses plaies ― blessures infligées par l’émergence du variant Delta du COVID-19, par l’incertitude politique dans laquelle la nation a été plongée par le récent assassinat du président Jovenel Moïse, par toutes sortes de troubles sociaux et politiques ― un tremblement de terre 11 ans après le tremblement de terre dévastateur de 2010 était la dernière chose à laquelle nous nous attendions pour Haïti !

Mais nous, les Haïtiens, sommes très résistants. Malgré tout ce qui nous arrive, l’Haïtien moyen reste inébranlable dans sa conviction que « Bondye bon » (« Dieu est bon »). Cela permet à l’Église de maintenir relativement facilement l’affirmation que Dieu est parfaitement bon, tout-puissant et omniscient tout en permettant le mal et la souffrance dans le monde.

Mais l’Église est consciente de la vérité de ce dicton : « Les gens ne prêtent pas attention à ce que vous savez tant qu’ils ne savent pas que vous prêtez attention ». D’où l’accent mis par l’Église sur le ministère auprès du peuple haïtien au milieu des catastrophes les plus graves qui ont frappé le pays. Même les personnes les plus hostiles à l’Église reconnaissent son impact positif sur la société haïtienne, en particulier en période de catastrophe nationale.

En quoi les réponses de l’Église et de la société sont-elles différentes lorsqu’une catastrophe est naturelle ou causée par l’homme ?

Jeanty : En cas de catastrophe naturelle :

  • Personne n’est à blâmer
  • Les victimes sont touchées de manière indiscriminée
  • La solution est le soutien et la reconstruction
  • Il y a des appels à la compassion
  • Il y a un intérêt humain international à apporter de l’aide
  • La politique n’est pas la préoccupation principale

Dans une catastrophe causée par l’homme :

  • Les reproches passent d’un groupe à l’autre
  • Habituellement, les victimes sont ciblées
  • La solution comprend l’intervention sociale (négociation, etc.)
  • Il y a des appels à la justice
  • Il y a un intérêt étranger limité à aider
  • Des intérêts politiques sont en jeu

Jules : La société haïtienne est animiste. Quelle que soit la situation à laquelle nous sommes confrontés, la responsabilité en est attribuée à Dieu ou au diable. Toute bonne chose qui arrive est l’œuvre du Seigneur. Toute mauvaise chose qui arrive est l’œuvre du diable. Avec un tel état d’esprit, il est difficile d’envisager la responsabilité humaine ou le rôle de l’Église lorsqu’il s’agit de lutter contre le mal moral et le mal naturel dans la société.

Ainsi, il a été difficile pour certaines personnes de comprendre que ce n’était pas le tremblement de terre qui a tué les gens mais plutôt notre refus d’appliquer les codes de la construction. La compréhension commune est que Dieu a un plan pour Haïti. En temps voulu, Il fera d’Haïti la perle des Caraïbes comme on l’appelait autrefois. Que Dieu ait ou non un plan pour Haïti ne doit pas nous priver de notre responsabilité d’intendance.

Noelliste : Les catastrophes morales et naturelles causent douleur et souffrance aux gens. Les deux nous font pleurer. Dans le cas d’Haïti, les deux nous poussent à nous exclamer : « Combien de temps, Seigneur ! Combien de temps ! » Mais à côté des lamentations, lorsqu’une catastrophe survient, nos esprits se tournent vers la question : « Pourquoi ? » Notre tendance est de localiser la cause du désastre moral chez l’homme, et de recourir au mystère lorsqu’il s’agit d’expliquer un désastre naturel. Parfois, nous les appelons « actes de Dieu ».

Après une réflexion plus approfondie, j’en suis venu à croire qu’un grand nombre de catastrophes naturelles peuvent également nous être imputées. Plusieurs éléments appuient cette position. D’une part, la chute a eu un effet négatif sur la création. La terre a été maudite à cause de cela, et à ce jour, la Création est dans un état de fatigue, attendant le moment de sa délivrance. Mais la chute était un problème humain, pas un accident naturel. Plus que cela, il est maintenant établi que notre comportement a un effet délétère sur la Création. Notre usage, ou mésusage, de la terre a un impact négatif sur celle-ci. Ici aussi, la faute est nôtre. Enfin, les effets des catastrophes naturelles telles que les tremblements de terre et les ouragans dépendent de la façon dont nous gérons l’environnement. Les effets des tremblements de terre et des ouragans qui ont frappé Haïti seraient beaucoup moins graves et désastreux si le paysage haïtien n’était pas aussi fragile. Les mêmes catastrophes se produisent dans d’autres pays avec beaucoup moins de dégâts, de destructions et de pertes en vies humaines.

Perkins : Les trois dernières années ont été particulièrement pénibles, car il est difficile de savoir qui/quelle est la cause de ce qui arrive. Est-ce le gouvernement, ou l’opposition, ou les oligarques, ou une combinaison quelconque ? Si vous demandez à 10 personnes, vous obtiendrez 10 avis différents. Mais avec un tremblement de terre ou un ouragan, l’ennemi est facile à identifier et vous ne pouvez rien y faire. Alors les gens se rassemblent et travaillent pour s’entraider. Pour l’Église, la réponse est la même dans tous les cas : gardez les yeux fixés sur Jésus et aimez votre prochain.

Victor : Les catastrophes naturelles sont soudaines. L’étendue de la dévastation qu’elles provoquent est écrasante et choquante. Cependant, elles ont tendance à rassembler les gens et à faire ressortir le meilleur de nous. Des séquences vidéo qui nous sont parvenues des lieux touchés par le séisme nous ont fait pleurer et nous ont réconfortés lorsque nous avons vu les efforts déployés par la population pour secourir à mains nues les personnes piégées sous les décombres. Et ce ne sont pas nécessairement des membres de la famille ou des amis, mais, dans la plupart des cas, des voisins et de parfaits inconnus qui se sont sentis obligés d’aider à sauver les autres. De telles démonstrations spontanées de compassion et d’héroïsme ont apporté réconfort et espoir à votre cœur.

Les catastrophes d’origine humaine sont plus difficiles à gérer. Dans cette catégorie on retrouve meurtres, massacres, violences politiques, violences sociales, coups d’État et autres calamités infligées à une nation par des ennemis étrangers ou locaux. Haïti souffre des deux types de catastrophes. Notre histoire est marquée par le chaos politique, la violence (massacres, assassinats, tueries insensées, etc.) sans espoir que les coupables soient un jour traduits en justice. Une grande partie de la population se sent trahie et abandonnée par les « amis d’Haïti » au sein de la communauté internationale, qui soutiennent des dirigeants politiques qui ne font que perpétuer le sort du peuple haïtien.

Comment l’Église mondiale devrait-elle prier pour vous tous en Haïti pendant cette période ?

Jeanty : Merci de prier pour :

  • Un transport sûr des secours humanitaires et une distribution équitable de l’aide à toutes les victimes.
  • Un témoignage puissant de la compassion chrétienne pendant la crise.
  • Des contributions généreuses qui arrivent à temps pour la reconstruction, y compris pour les églises endommagées.
  • La limitation de la cupidité et de la mauvaise utilisation des fonds et du matériel de secours.
  • Une vision et une volonté politique des collectivités locales afin qu’elles recherchent avant tout le bien-être des populations.
  • Une avancée politique et une stabilité grâce à des négociations significatives entre les groupes politiques et la société civile, afin que la nation puisse aller de l’avant après l’assassinat du président.
  • Que des citoyens crédibles et expérimentés dans le pays et dans la diaspora soient trouvent une visibilité en tant que leaders politiques potentiels pour la nation.

Vous pouvez remercier pour :

  • Les vies épargnées parce que le tremblement de terre s’est produit pendant la journée.
  • Les réseaux de communication qui ne sont pas tombés en panne, de sorte que informations ont pu atteindre le monde extérieur rapidement.
  • Les principales organisations chrétiennes telles que Compassion, World Vision, MAF, la Fédération des Églises protestantes et l’Association évangélique des Églises d’Haïti.

Noëlliste : Cette catastrophe n’aurait pas pu frapper Haïti à un moment plus critique. L’assassinat du président Jovenel Moïse a créé un vide de leadership que le pays s’efforce de combler. Le vide est aggravé par le fait que le pays est confronté à une véritable crise constitutionnelle. Personne, y compris le président par intérim, n’a de mandat sanctionné par la Constitution pour assumer le pouvoir et exercer l’autorité. Personne ne satisfait aux dispositions prévues dans la constitution actuelle pour assumer le pouvoir.

Une demande de prière urgente va à une percée dans la recherche d’une issue à la crise constitutionnelle. Le pays a désespérément besoin d’un leadership qui ait la légitimité et l’autorité pour diriger. Une commission composée de personnes issues de la société civile, de l’Église et des partis politiques a été mise en place pour sortir de l’impasse, mais elles ne semblent pas en mesure de se mettre d’accord sur l’approche à adopter pour la tâche qui leur a été assignée.

Outre le vide de leadership, le pays est confronté à un grave problème de sécurité. Dans diverses parties de Port-au-Prince, les gangs règnent sans opposition. L’artère principale de la ville de Port au Prince, (Route Nationale #2) qui traverse la ville et relie la partie sud du pays à la partie nord, a été rendue impraticable en raison de la violence causée par les gangs concurrents. La loi et l’ordre se sont effondrés. Les gens ne peuvent pas aller travailler parce qu’ils craignent pour leur vie. Les grandes institutions doivent être relocalisées dans des zones plus sûres, laissant derrière elles les établissements qu’elles occupaient depuis des années. Tout récemment, une femme enceinte qui tentait de traverser cette voie dangereuse a été abattue avec son bébé dans le ventre ! Nous avons urgemment besoin de prière pour le retour à un minimum de sécurité afin que les gens puissent continuer leur vie.

Après l’assassinat de Moïse, un constitutionnaliste haïtien de renom a écrit un article analysant la situation dans laquelle se trouvait le pays. Il a conclu qu’il n’y avait pas de solution constitutionnelle. Mais il poursuit en suggérant que la seule solution est d’ordre moral. Il veut dire par là que la seule issue est qu’une entité dotée d’une autorité morale et d’un statut moral suffisants se lève et montre la voie en cette heure critique de l’histoire du pays. C’est un rôle que l’Église doit jouer. Mais hélas, il est douteux que celle-ci ait le poids moral et la crédibilité nécessaires pour fournir un service aussi vital. L’Église semble courir pour se mettre à l’abri. L’une des trois personnes impliquées dans le complot visant à assassiner le président est un pasteur qui a été mis en prison pour sa participation présumée à cet acte odieux !

Merci de prier pour la force du témoignage de l’Église haïtienne. Le pays a désespérément besoin d’une Église qui remplisse son rôle de sel et de lumière.

Perkins : Il y a de réelles inquiétudes quant à l’acheminement de l’aide dans la zone touchée. La seule route qui relie la zone au reste du pays vous oblige à passer par Martissant, une petite zone juste à l’ouest de la capitale, Port-au-Prince, qui est restée sous contrôle de gangs pendant des mois. [Note de la rédaction : Face à ces violences, l’ONU et le gouvernement haïtien ont appelé à la mise en place d’un « corridor humanitaire ».] Il y a quelques jours à peine, ces gangs ont ouvert le feu sur des véhicules qui tentaient de passer. Soit dit en passant, ce même gang a pris le contrôle de notre campus de séminaire à la fin de l’année dernière.

Priez que Dieu dégage un passage à travers ces obstacles afin que l’aide puisse circuler librement. Une organisation partenaire, Missionary Flights International, a envoyé un avion de Floride cette semaine pour soutenir la MAF et aider à fournir une sorte de pont aérien dans la région. Cela aidera, mais cette route devra tôt ou tard être dégagée.

De plus, les Haïtiens sont épuisés. Depuis juillet 2018, le pays connaît les pires troubles politiques depuis une génération. À toutes sortes de moments, les gens ont craint de quitter leur domicile de peur d’être pris dans des troubles ou d’être kidnappés. C’est la crise qui a conduit à l’assassinat du président, et qui reste irrésolue. Les gens étaient déjà épuisés et maintenant, il y a le traumatisme supplémentaire d’une catastrophe naturelle.

Victor : Notre nation a un besoin urgent de prière en ce moment critique de son existence. Nous avons besoin de justice, de paix et d’unité nationale sans lesquelles rien ne peut être réalisé : « Une maison divisée contre elle-même ne peut subsister » (Mt 12.25). Veuillez prier pour que ces choses se matérialisent dans la vie de notre nation.

Priez aussi pour que notre nation se repente afin que Dieu accomplisse sa promesse dans 2 Chroniques 7.14 de « guérir notre pays » de tous ses maux. Priez pour les victimes du tremblement de terre. Les autorités haïtiennes ont estimé le nombre de morts à plus de 1 400 ; les blessés à 1800 ; beaucoup sont portés disparus et beaucoup d’autres sont à présent sans abri. Priez que Dieu continue à nous montrer sa miséricorde et sa compassion. Car sans le grand amour du Seigneur, nous aurions déjà été anéantis. Malgré toutes les calamités qui ont frappé notre nation, nous pouvons dire : « Jusqu’à présent, le Seigneur nous a aidés. Ses compassions ne nous ont pas déçus » (1 S 7.12 ; Lm 3.22).

Traduit par Kervenly Calasse

Révisé par Léo Lehmann

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Charles Spurgeon savait qu’il est possible d’être fidèle et déprimé

Son exemple peut encourager les croyants qui « marchent dans les ténèbres » sans voir de lumière.

Christianity Today August 14, 2021
Ilbusca / Getty Images / Edits by Mallory Rentsch

Pour Charles Spurgeon, le célèbre prédicateur du 19e siècle, la dépression était plus qu’un simple phénomène circonstanciel. Les exemples qu’il utilisait à ce propos dans ses prédications et conférences, souvent enracinés dans sa propre expérience, tenaient compte d’une forme importante de la dépression : celle qui vient sans cause. Dans un sermon, il déclarait :

Lorsque votre esprit est déprimé, vous pouvez avoir à portée de main tous les réconforts qu’offre la vie et vous trouver pourtant dans une misère plus sombre que la mort. Vous pouvez n’avoir aucune cause extérieure de chagrin et pourtant, si l’esprit est abattu, le soleil le plus brillant ne soulagera pas votre tristesse. […] Il y a des moments où tout ce qui nous apparaissait évident s'obscurcit et où toutes nos joies s’enfuient. Bien que nous puissions encore nous accrocher à la Croix, c’est d'une façon désespérée.

Spurgeon comprenait que la dépression n’est pas toujours « logique » et que sa cause n’est pas toujours évidente. Il y a des moments, disait-il, où notre esprit nous trahit, et nous nous enfonçons dans les ténèbres. Nous sombrons dans des « abîmes sans fond » où nos âmes « peuvent saigner de dix mille façons et mourir encore et encore à chaque heure ». On ne peut pas raisonner cela, et il est difficile d’y trouver un remède. Comme il l’exprimait lors d'une conférence donnée à ses étudiants :

On peut aussi bien se battre avec la brume qu'avec ce désespoir informe, indéfinissable et pourtant si enveloppant. On ne s’accorde aucune pitié dans cette situation, parce qu’il semble déraisonnable, et même coupable d’être troublé sans cause manifeste ; et pourtant l’homme est réellement troublé, au plus profond de son esprit même […] Il faut une main céleste pour repousser ce désespoir […] car rien de moins ne sera capable de chasser ce cauchemar de l’âme.

Je suis extrêmement reconnaissante pour des citations de Spurgeon telles que celle-ci, parce qu'elles témoignent de sa compréhension de telles expériences. Je me souviens à quel point je me suis senti impuissante face à ma propre dépression, à quel point il me semblait que j’étais impuissante à faire quoi que ce soit pour y échapper. Certaines personnes s’attendaient à ce qu’il y ait un remède miracle, une solution logique, ou qu’une sorte de résolution spirituelle permette d’en triompher, mais la lumière et la joie continuaient à se dérober.

Spurgeon avait manifestement expérimenté cette impuissance, ainsi que la maladresse de beaucoup face à cet état. Il interpella d'ailleurs directement depuis la chaire ces « aides » dures et insensibles – promptes à blâmer, promptes à exhorter les personnes dépressives à se sortir de là, et lentes à faire preuve de compassion. Il ne tolérait pas non plus l’affirmation accusatrice selon laquelle les « bons chrétiens » ne pourraient pas être touchés par la dépression. « Le peuple de Dieu, prêchait-il, marche parfois dans les ténèbres sans voir de lumière. Il y a des moments où les meilleurs et les plus brillants des saints n’ont pas de joie. »

Pour lui, il était évident que le fait qu’elle passe par une dépression ne permettait pas de savoir si une personne était chrétienne ou non ; ce n’était pas non plus un signe que quelqu'un ne grandit pas dans sa foi. Il est possible d’être fidèle et déprimé : « La dépression de l’esprit n’est pas un indice que la grâce décline – la perte de la joie et l’absence d’assurance peuvent s’accompagner de la plus grande des avancées dans la vie spirituelle ». Puissent les pasteurs être toujours plus nombreux à prêcher ainsi !

Vous continuez d'être utile!

Peut-être faites-vous l’expérience que votre moral est si bas que vous ne pouvez rien faire, rien apporter aux autres. Vous êtes submergé et paralysé par la tristesse. Votre cerveau est brumeux, votre humeur est maussade. Tout est sombre. Puis apparaissent les questions : Et si cela perdurait ? Et si je ne pouvais plus jamais faire quoi que ce soit de valable ?

Spurgeon connaissait ce sentiment. C’est peut-être la raison pour laquelle, dans une conférence sur la dépression adressée à ses étudiants, il leur dit : « Ne pensez pas que c'en est fini de votre utilité ». Il fut abattu plusieurs fois physiquement et émotionnellement, mais cela n’a pas arrêté son ministère. Il a écrit des milliers de sermons et d’innombrables lettres, lu abondamment, rencontré des gens, prié avec eux, mis en place et structuré des ministères et enseigné au Pastor’s College (« Collège pour pasteurs »). Sa souffrance ne l’a pas empêché de continuer à être utile. Au contraire, tout cela a porté des fruits dans sa vie. Son expérience de la dépression lui a permis d’encourager et de soutenir d’autres personnes qui en souffraient également.

Ainsi, Spurgeon, exhortait ses étudiants à prendre conscience des situations dans lesquelles ils pourraient être plus susceptibles de souffrir de dépression. La liste qu’il leur donna a bien des traits autobiographiques :

  • quand vous avez une maladie qui se prolonge ou des problèmes physiques,
  • quand vous êtes plongé dans un travail mentalement ou émotionnellement intense
  • quand vous êtes seul ou isolé
  • quand vous menez une vie sédentaire et que vous surmenez votre cerveau
  • après le succès
  • avant le succès
  • après un coup dur
  • quand les ennuis et les découragements s'accumulent peu à peu
  • quand vous traversez une période d’épuisement et de surmenage

Mais la dépression peut aussi simplement advenir sans cause, sans raison, sans justification, ce qui, à ses yeux, était le cas de figure le plus douloureux de tous.

Spurgeon offrait également des conseils compatissants et pratiques à ses paroissiens, prêchant à propos de choses telles que le besoin de repos : « L’esprit a besoin d’être nourri et le corps a lui aussi besoin de nourriture. N’oubliez pas de prendre en considération ces questions ! Il pourra sembler à certaines personnes que je ne devrais pas mentionner de petites choses comme la nourriture et le repos, mais ce sont peut-être les tout premiers éléments qui devraient être mentionnées pour aider véritablement un pauvre serviteur de Dieu déprimé ». Prendre soin de soi n’est pas une simple idée moderne. Spurgeon avait appris de sa propre expérience que prendre bien soin de son corps représente une part importante de la lutte contre la dépression, et il partageait volontiers cette sagesse durement acquise.

Sa propre souffrance lui permettait également de mieux compatir avec les autres et les réconforter. Les gens venaient depuis des kilomètres à la ronde pour solliciter conseil et consolation, et ceux qui ne pouvaient pas venir lui écrivaient des lettres. C’était un « guérisseur blessé » qui utilisait son propre chagrin pour apporter du réconfort aux autres:

C’est un grand cadeau que d’avoir appris par expérience à compatir. « Ah !, leur dis-je, J’ai été là où vous êtes en ce moment ! » Ils me regardent, et leurs yeux affirment : « Non, tu n’as sûrement jamais ressenti ce que nous ressentons. » Je poursuis alors par ces mots : « Si tu te sens plus mal que je ne l’ai été, je te plains vraiment, car j’aurais pu dire avec Job : "Mon âme préfère la mort à la vie". J’aurais aisément pu me faire violence de mes propres mains pour échapper à l'état misérable de mon esprit ».

Il y a un profond réconfort à réaliser que quelqu’un d’autre comprend, au moins en partie, votre souffrance. Une telle personne peut offrir un secours différent de ce que tous les autres pourraient apporter. Survivre à des expériences douloureuses telles que la dépression nous place dans une position particulière et nous confère la responsabilité spécifique d’offrir présence et réconfort à d’autres. Spurgeon nous encourage à ne pas l’oublier : « Celui qui a été dans le cachot obscur connaît le chemin qui mène au pain et à l’eau. Si vous avez traversé la dépression et que le Seigneur est intervenu pour vous réconforter, soyez prêt à aider ceux qui sont maintenant dans une situation similaire à celle que vous avez connue ».

Vous êtes toujours utile, nous dit Spurgeon. Vous aussi, vous pouvez être un compagnon pour qui chemine dans l’obscurité.

Chanter dans les ténèbres

Quand je pense aux paroles que Spurgeon nous a transmises, héritage de ses propres luttes, cela me rappelle un hymne vigoureux que je me souviens avoir chanté dans l’Église de mon enfance :

Fondé sur les promesses inébranlables,
Quand les tempêtes hurlantes du doute et de la peur m’accablent,
Par la Parole vivante de Dieu je demeurerai stable
Fondé sur les promesses de Dieu.

Dans les moments les plus misérables de la vie de Spurgeon, ce sont les promesses de Dieu dans les Écritures qui le sortirent du désespoir. Dans les premières années de son ministère, alors même qu’il était déprimé et désemparé face aux critiques sévères qui lui étaient adressées, il fut réconforté grâce un verset de la Bible écrit de la main de sa femme Susannah : « Heureux serez-vous, lorsqu'on vous insultera » (Mt 5.11). Au fil des années, un autre verset le remplaça, toujours recopié par sa femme : « Je t’ai éprouvé dans le creuset de l’affliction » (Es 48.10). Après la catastrophe du Surrey Gardens Music Hall, alors que sept personnes avaient été piétinées à mort et de nombreuses autres blessées après une fausse alerte durant la prière de Spurgeon pendant un service bondé, ce sont les Écritures qui l'ont consolé et tiré du gouffre.

Et à de nombreuses reprises dans ses sermons, les paroles de l’Écriture et la vie des personnages bibliques l’encourageaient. Ils lui rappelaient la vérité. Ils l’aidaient à continuer à chanter. Ils le gardaient en vie. C’était là, où les promesses de Dieu se heurtaient à sa propre douleur, qu’il trouvait l’espérance.

Dans son introduction au Carnet de chèques de la Banque de la Foi, un livre de méditations rédigé alors qu’il luttait contre la compromission de la doctrine au sein du corps pastoral (durant ce qui a été appelé « The Downgrade Controversy »), Spurgeon écrit ceci : « Je crois à toutes les promesses de Dieu, et j’ai personnellement éprouvé et vu tenir beaucoup d’entre elles. […] Je dirais donc à mes [frères et sœurs chrétiens] dans leurs épreuves — Mes frères, Dieu est bon. Il ne vous abandonnera pas : il vous supportera. […] Tout le reste passera, mais sa parole ne passera jamais » .

« Tant mieux pour Spurgeon », pourrions-nous dire, « mais c’est si difficile ». Il le savait, bien évidemment. Il a connu cette lutte, la lutte pour la foi, pour continuer à croire, la lutte pour s’accrocher à l’espérance offerte par les promesses. Il connaissait les tentations du doute. Il savait combien la dépression les rendait encore plus difficiles à supporter, combien il semblait plus facile de remettre en question la bonté de Dieu, sa fidélité, sa présence continue : « Ce perpétuel assaut, ces coups de poignard incessants, ces cisaillements lancinants, ces constants coups de hache à l'encontre de la foi, ne sont pas choses faciles à supporter ». Mais il nous faut endurer. Et c’est précisément « en endurant qu’on apprend à endurer ». Nos épreuves enrichissent ces promesses et renforcent encore davantage notre foi en elles, car nous voyons encore et encore qu’elles sont suffisamment robustes pour nous soutenir. Elles nous enseignent l’humble dépendance à l'égard d’un Dieu fidèle.

Spurgeon ne voyait pas la solution à la souffrance et à la dépression dans les mantras que de nombreux chrétiens déprimés ont trop souvent entendu : Lisez la Bible, priez davantage, ayez la foi. Il n’y a pas de panacée à la dépression, pas de remède spirituel facile. Mais quand nous sommes dans les ténèbres, les promesses des Écritures sont suffisamment fortes pour nous garder attachés à lui. Savoir que nous appartenons au Christ est une ancre. Quand nous nous débattons, quand nous ne savons pas si nous pourrons continuer, quand nous nous sentons perdus, quand les ténèbres nous consument, nous pouvons encore nous accrocher aux promesses de Dieu, même quand nous avons à peine la force d’y croire. Ces promesses sont sûres, quels que soient nos sentiments, quel que soit notre état extérieur.

Lorsque nous voyons des personnages bibliques comme Eli, qui voulait mourir, ou les psalmistes, qui luttaient contre la dépression et des sentiments d’abandon par Dieu, et que « nous nous trouvons dans des situations similaires », déclarait Spurgeon, « nous sommes soulagés de découvrir que nous marchons sur un chemin que d’autres ont parcouru avant nous ». Nous voyons ces saints jetés dans les ténèbres. Mais nous voyons aussi la fidélité de Dieu. Et nous voyons aussi et surtout ses promesses suffisamment solides pour préserver ces personnes, comme elles peuvent le faire pour nous. Ne soyez donc pas consternés, leurs histoires nous rappellent qu'ils sont aussi passés par là. Et que c’est une épreuve que beaucoup ont dû endurer. Vous êtes toujours à lui. Le Christ qui vous a racheté ne vous abandonnera pas dans l’obscurité.

Spurgeon a dit un jour : « Dans la nuit du chagrin […] les croyants [sont] comme des rossignols, et ils chantent dans l’obscurité. Il n’y a pas de véritable nuit pour un homme qui a l’esprit d’un rossignol ». Cela me rappelle un message que j’ai reçu un jour d’un ami : « Tu es courageuse. Tu te tiens dans les ténèbres, te murmurant la Vérité à toi-même ». Je me sentais tout sauf courageuse à l’époque. Cela avait été une année difficile. Cela avait été une année de larmes, de questions et de nuits agitées. Et voici que mon ami le plus proche me disait courageuse. Je ne pouvais pas le croire. Je n’étais pas courageuse, j’étais désespérée. Que pouvais-je faire d’autre dans cet endroit sombre à part continuer à murmurer la Vérité ? C’était tout ce que j'étais capable de faire pour garder l’obscurité à distance, pour l’empêcher de m’étouffer.

Voilà ce que Spurgeon nous offre. Un appel à chanter les promesses de Dieu. Chantez sa fidélité. Même si vous ne pouvez pas encore la voir, même si vous ne la sentez pas, murmurez-vous la Vérité. Chantez dans l’obscurité.

Adapté de Companions in the Darkness de Diana Gruver. Copyright ©2020, Diana Janelle Gruver. Utilisé avec la permission de InterVarsity Press, P.O. Box 1400, Downers Grove, IL, 60516-1426 www.ivpress.com

Traduit par Jean-Paul Rempp

Révisé par Léo Lehmann

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Venus du monde entier, des athlètes olympiques chrétiens à encourager

Partez à la rencontre de femmes et d’hommes qui participent aux Jeux Olympiques de Tokyo 2020 et font de leur foi une priorité.

Christianity Today August 4, 2021
VCG / Getty Images

Les Jeux de Tokyo 2020 se tiennent dans des conditions inédites. Le gouvernement japonais a pris la décision de dernière minute d’interdire les spectateurs, et un certain nombre d’athlètes ont dû abandonner après avoir été testés positifs à la COVID-19 ou mis en quarantaine car ils avaient été en contact avec ceux qui avaient été testés positifs.

Comme les autres athlètes, les athlètes chrétiens ont fait des sacrifices, ont affronté des épreuves dans leur santé mentale et ont repoussé leurs limites physiques pour se rendre aux Jeux. Mais ils ont pu le faire en sachant où repose ultimement leur identité. Beaucoup d'entre eux ont également utilisé leur notoriété comme tremplin pour témoigner de l’œuvre de Dieu dans leur vie et pour redonner en fonction de ce qu’ils ont pu accomplir. Voici 14 athlètes chrétiens du monde entier qui concourent à Tokyo.

Lucas Lautaro Guzman, Taekwondo (Argentine)

@lucastkd94

En 2012, Sebastián Crismanich est devenu le premier Argentin à remporter une médaille d’or en taekwondo aux Jeux olympiques. Lucas Lautaro Guzman espère devenir le deuxième.

En 2019, il a remporté une médaille de bronze aux Championnats du monde de taekwondo 2019 dans la catégorie poids légers hommes. Sa réussite est survenue trois mois seulement après le décès de sa mère à la suite d’une brève bataille contre le cancer du sein. Bien que cette perte ait été difficile, Guzman a approfondi sa foi et dit aujourd’hui qu’il a beaucoup de raisons d'être reconnaissant.

Juste avant le début des Jeux olympiques, Guzman a célébré son 27e anniversaire au Kazakhstan. Dans une légende accompagnant sa « dernière photo en tant que jeune homme de 26 ans », il écrivait : « Je ne pense pas mériter tout ce que je vis. […] Je ne peux rien demander de plus à Dieu, car il me donne tellement que je suis plus que satisfait et comblé. Indépendamment de tout le [succès] extérieur que je reçois, je dois avouer que ma relation avec le Christ est de loin ce qui m'est arrivé de meilleur. Et ce n'est pas que je veuille convaincre les autres de penser comme moi. En fin de compte, ce que nous disons est utile tant que cela fait ses preuves dans nos actions et notre conduite. »

Nicola McDermott, saut en hauteur (Australie)

@nicolalmcdermott

« À quoi ressemblerait une vie consacrée au sport ? » C'est la question que pose Nicola McDermott, athlète en saut en hauteur, dans sa bio Instagram, puis elle continue en disant qu'il faut mener sa vie en cherchant à donner une réponse sensée à cette interrogation. Sur le terrain de sport, McDermott, 24 ans, a remporté une médaille de bronze aux Jeux du Commonwealth de 2018 et a établi un record personnel l’année dernière après avoir quitté l’Australie pour s’entraîner en Europe pendant la pandémie. En dehors du terrain, elle a cofondé Everlasting Crowns, un ministère par lequel elle espère que « ses camarades athlètes puissent être transformés par l’amour parfait de Jésus, intégrés dans les Églises et formés pour être une bénédiction partout où ils sont envoyés ».

« Ma foi est la raison pour laquelle je suis restée si longtemps dans le sport », déclarait-elle au Guardian plus tôt cette année. « La foi, c'est la confiance dans les choses que vous n’avez pas vues, n’est-ce pas ? Penser sauter deux mètres, quand j’avais huit ans et que je sautais une hauteur de 1,15 m, il faut un peu de foi pour y croire. J’ai tellement pratiqué le sport jusqu’à mes 20 ans que je pensais que c’était ce qui me rendrait heureuse – et qu'une fois que je serais championne olympique, une fois que j’aurais atteint quelque chose, alors je serais heureuse. J’ai atteint un niveau où j’avais tout ce dont j’avais toujours rêvé, mais j’étais toujours insatisfaite – j’ai réalisé que j’avais mis mon identité dans la performance et la réussite. La foi pour moi, c’était de réaliser que je suis aimée indépendamment de mes performances – le saut en hauteur est simplement un moyen de me connecter à Dieu.

Ítalo Ferreira, surf (Brésil)

@italoferreira

Le surf a fait son entrée aux Jeux olympiques cette année et le champion du monde 2019 Ítalo Ferreira a remporté la première médaille d'or chez les hommes. L'athlète de 27 ans a utilisé les médias sociaux pour louer Dieu pour cette victoire, en partageant le mot d’ordre qu'il avait emporté avec lui au Japon : di amén que viene el oro (qu’on pourrait traduire par « dites amen et l'or viendra »). Ferreira explique qu'il avait prié ces mots depuis son lit, à partir de 3 heures du matin, en demandant à Dieu d'aider son rêve à se réaliser. « Et le voici ! Mon nom dans l'histoire du surf », a-t-il déclaré. Pour remporter l'or, Ferreira a dû surmonter des conditions agitées, une tempête qui a forcé les surfeurs à ramener la compétition de deux à un jour, et une planche qui s'est brisée dès les premières minutes de son tour pour la médaille d'or. Submergé par les larmes, il poursuit : « Je me suis beaucoup entraîné ces derniers mois et Dieu a fait de mon rêve une réalité. Je ne veux que remercier Dieu de m'avoir donné l'opportunité de faire ce que j’aime ».

Originaire d'une petite ville du nord-est du Brésil, Ferreira a remporté sa première compétition de surf deux mois après que son père, un homme qui achetait du poisson aux pêcheurs et le revendait aux restaurants, ait acheté une planche à son fils pour la première fois. Alors que Ferreira grimpait rapidement dans le monde du surf d'élite, il gagna suffisamment d'argent pour acheter à ses parents une maison sur la plage. « L'océan a beaucoup de poids dans ma vie. Mon père le premier a vécu de la mer en vendant du poisson, et moi je le fais en surfant », exprime Ferreira dans un spot vidéo encourageant à protéger l'océan. « Un avenir sans océan ? Ce serait terrible. Je pense que l'océan est un cadeau exceptionnel de Dieu pour les peuples. »

Charles Fernandez, Pentathlon moderne (Guatemala)

@charlesfernandez_5

Lorsque Charles Fernandez avait sept ans, sa famille a quitté les États-Unis pour s'installer au Guatemala, le pays d’origine de son père, pour y servir comme missionnaires. Des années avant la naissance de son fils, Carlos Fernandez avait participé à l’épreuve du pentathlon, qui comprend l’escrime, la nage libre, le saut d’obstacles équestre et une épreuve combinant le tir au pistolet et la course d'endurance. Carlos et sa femme Esther dirigent maintenant un ministère dans les montagnes aux abords d’Antigua, au Guatemala, au service de la communauté maya environnante.

Après avoir participé aux Jeux olympiques de 2016 à Rio, où il s’est classé 15e alors qu’il avait 20 ans, Fernandez a remporté les Jeux panaméricains en 2019. « Le retour dans mon pays avec deux médailles, c’est clairement une immense bénédiction de pouvoir partager ces moments avec ces personnes qui se battent chaque jour pour sortir de la pauvreté et leur donner l’espérance dans le Christ », déclarait Fernandez, après avoir remporté deux événements régionaux en 2018. « C’est pour cela que je fais ce que je fais, pour être une lumière du Christ pour les nations dans ce sport. » Tout au long de la pandémie, Fernandez, qui se considère également comme un travailleur social, a voyagé entre les États-Unis et le Guatemala pour essayer d’aider ses concitoyens. « Mon objectif en tant qu’athlète est de leur apporter de l’espoir, de leur montrer que tout est possible quand on travaille dur », a-t- il déclaré dans une interview l’année dernière. « Les deux façons dont je soutiens le pays (socialement et par le sport) sont différentes, mais Dieu merci, elles s’accordent d’une manière très spéciale. C’est la raison et la motivation pour ce que je fais aux Jeux olympiques. »

Jonatan Christie, Badminton (Indonésie)

@jonatanchristieofficial

Aucun pays n’a une plus grande population musulmane que l’Indonésie. Mais l’un de leurs athlètes les plus appréciés est un joueur de badminton de 23 ans qui aime Jésus. En voici une des raisons : en 2018, cinq ans après avoir remporté son titre senior à 15 ans, Christie a promis à Dieu que s’il parvenait à la finale du simple masculin de badminton aux Jeux asiatiques de 2018, il donnerait la moitié de sa prime. Quelques semaines plus tôt, un tremblement de terre avait frappé l’île de Lombok, faisant plus de 500 morts et déplaçant près d’un demi-million de personnes.

Christie a remporté les Jeux asiatiques et a ensuite payé pour reconstruire une école et deux mosquées, espérant que ce geste contribuerait à rassembler son pays. Malgré ses distinctions, Christie reste humble. « Je ne suis pas un homme parfait. Je suis loin d’être une bonne personne. Je ne pense pas être un bon modèle parce que je lutte encore moi-même contre de nombreux péchés », a déclaré Christie plus tôt cette année, lui qui est actuellement classé septième mondial. « J’ai beaucoup appris des gens qui m'entourent sur la façon de traverser les épreuves avec Dieu. Ma vie spirituelle ne se déroule pas toujours sans accrocs. Suivre Jésus ne signifie pas toujours que tout ira bien. Je dois encore faire face à de nombreuses épreuves. Mais pour moi, quelles que soient les épreuves que Dieu nous permet d'affronter, nous devons continuer à apprendre et à grandir. Si nous pouvons surmonter un problème avec Dieu, il doit y avoir une nouvelle porte qui s’ouvre, afin que nous puissions être plus mûrs pour faire face à nos problèmes.

Raelin D’Alie, Basketball 3×3 (Italie)

@rmdalie11

Raelin D’Alie mesure un mètre soixante et a grandi à Racine, dans le Wisconsin. Mais au cours des deux prochaines semaines, elle représentera l’Italie au sein de son équipe féminine de basket-ball à trois contre trois. La jeune femme de 33 ans, qui a représenté l’Italie au cours des 10 dernières années, a marqué le panier qui a qualifié l’Italie aux Jeux olympiques après un score de 0-9 au début du match.

L’année dernière, la saison de D’Alie avec Virtus Bologna a été interrompue en raison de la pandémie. « Je suis une personne de foi, donc ma réponse à la souffrance est de prier et de chanter pour Dieu. J’ai dit à mon colocataire : "C’est un coup dur pour l’Italie". Et nous avons prié pour que Dieu utilise ce moment pour donner aussi aux gens l’une des plus grandes joies qu’ils aient vécues en peu de temps », a-t-elle déclaré à The Journal Times. « Je sais que l’Italie est très fière que nous allions aux Jeux olympiques et j’espère vraiment faire quelque chose d’incroyablement spécial pour l’Italie, surtout à cause des souffrances qu’elle a endurées au cours des 18 derniers mois. »

Yohan Blake, Sprint (Jamaïque)

@yohanblake

Usain Bolt ne sera pas présent à ces Jeux olympiques, mais son partenaire d’entraînement de longue date, Yohan Blake, sera en compétition. En 2012, Blake a terminé derrière Bolt dans les sprints du 100 m et 200 m. Ensemble, avec deux autres coéquipiers jamaïcains, ils ont remporté l’or dans le relais 4×100 m. En 2016, ils ont réitéré leur succès. Au-delà de ses objectifs sportifs, Blake aspire à aider les gens. Selon la biographie de son site Web, il « se considère comme placé par Dieu sur terre pour aider et prendre soin de ses brebis comme un berger aimant. Cet état d’esprit a fait de lui l’individu gentil et dévoué qu’il est aujourd’hui ».

Blake, dont la présence sur les réseaux sociaux alterne versets bibliques et publicités pour son nouveau site Web, participera au 100 m masculin.

Odunayo Adekuoroye, Lutte (Nigéria)

Une seule athlète nigériane a déjà remporté une médaille d’or aux Jeux olympiques. La lutteuse Odunayo Adekuoroye pense qu’elle sera « certainement » la deuxième. « Je crois par la grâce spéciale de Dieu c'est mon heure briller », affirmait-elle plus tôt le mois dernier. « Donc, j’apporterai certainement la médaille d’or au Nigeria par Sa grâce ».

Adekuoroye a grandi dans le sud-ouest du Nigeria et, enfant, vendait des marchandises dans la rue. Elle s'est d'abord intéressée au sprint avant que son désir de voyager ne l’incite à se lancer dans la lutte, une décision que ses parents n’ont pas soutenue au début. Adolescente, Adekuoroye leur cachait son passe-temps. Quand ils ont découvert qu’elle faisait de la lutte en secret, ils n’ont cédé que lorsque son entraîneur a proposé de payer ses frais de scolarité et de l'accueillir chez lui. Sa carrière a transformé la situation financière de sa famille : Adekuoroye a pu acheter une voiture pour son père et ouvrir une boutique pour sa mère. « La lutte m’a rendu célèbre, m’a sorti de la pauvreté et m’a donné un nom. Nous n’avions rien à la maison, mais j’ai commencé à gagner de l’argent. Au moins maintenant nous ne sommes pas riches, mais nous sommes à l’aise », déclarait-elle l’année dernière.

Adekuoroye est double vainqueur des Jeux du Commonwealth et a atteint les quarts de finale à Rio. « En tant que chrétienne, je crois au principe du travail et je prie comme indiqué dans la Bible », a-t-elle témoigné avant une compétition en 2015. « Moi et mes entraîneurs travaillons, il reste donc au peuple nigérian de prier pour l’équipe. »

Nick Willis, Course de fond (Nouvelle-Zélande)

@willisnick

Après quatre Jeux Olympiques, le Kiwi Nick Willis est de retour pour sa cinquième édition. « Ce n’est pas de la vantardise ou de la fanfaronnade, mais cela m’étonne simplement que je puisse faire une course de deux heures et finir comme si c’était un jogging de 10 minutes. Être aussi en forme est une expérience unique que peu de monde peut comprendre », tweetait-il en 2019. Parfois, je veux prendre ma retraite, mais Dieu m’a donné ce don, alors je vais courir et courir !

Courir, c'est ce qu'il a fait. Willis a remporté deux fois des médailles olympiques pour la Nouvelle-Zélande au 1500 m ; il a remporté la médaille d’argent en 2008 à Pékin et une médaille de bronze en 2016 à Rio. Bien qu’il représente un pays d’Océanie, Willis vit à l’autre bout du globe après avoir déménagé pour étudier à l’Université du Michigan. C’est là que, sur les encouragements de son frère, il s’est impliqué dans avec Athletes in Action et a renoué avec sa foi d’enfant, un acte qui l’a aidé à faire face au chagrin qu’il ressentait encore après avoir perdu sa mère dans sa jeunesse. « Quelque chose a commencé à frapper mon cœur, me disant que ma mère regardait ma vie depuis le ciel. J’ai essayé de lutter contre cela avec plus d’alcool et de vie nocturne, mais ces battements au cœur sont devenus de plus en plus forts », écrivait-il . «C' est devenu impossible à nier. Je savais que Dieu me poursuivait, et ce depuis de nombreuses années. J’ai finalement décidé d’arrêter de Le fuir.

Au lieu de cela, Willis court aujourd’hui presque comme une façon de louer Dieu, comme le suggérait une conversation qu'il rapportait dans un tweet il y a plusieurs années :

« Papa, pourquoi tu cours toujours ? »

« Parce que je remercie Dieu de m’avoir donné des jambes rapides. »

« Est-ce que tu sens sa puissance dans tes jambes quand tu cours ? »

« Je suppose, oui ! »

Wayde Van Niekerk, Sprint (Afrique du Sud)

@waydedreamer

Lorsque Wayde Van Niekerk a remporté le 400 m à Rio et battu le record de longue date de Michael Johnson, il a immédiatement ouvert la bouche pour louer Dieu. « J’en rêvais depuis que j'étais petit », avait-il déclaré à la BBC. « La seule chose que je peux faire maintenant est de louer Dieu. Je me suis agenouillé chaque jour et j’ai dit au Seigneur de prendre soin de moi et de veiller sur moi à chaque pas. J'ai demandé au Seigneur de me porter tout a long de la course et je suis vraiment béni pour cette opportunité ».

L’année suivante, Van Niekerk remerciait encore Dieu après avoir remporté une médaille d’or aux Championnats du monde de l’IAAF. Mais le coureur sud-africain a à peine concouru depuis, après s’être déchiré le ligament croisé antérieur lors d’un événement caritatif de rugby. Pourtant, sa foi ne semble pas avoir vacillé. Des versets bibliques ornent ses publications sur Twitter et Instagram. « Soyez courageux dans le Seigneur », a-t-il tweeté dans une annonce pour une course récente. Dans une autre publication : « L’amour fidèle du Seigneur me soutient.

An Baul, Judo (Corée du Sud)

@anbaul

Avant d’entamer son combat pour la médaille d’or à Rio, An Baul a prié. « Je n’ai pas prié pour qu’An Baul remporte la médaille d’or. J’ai juste prié pour pouvoir faire de mon mieux et revenir sans regrets. […] Même quand ce ne sont pas les Jeux olympiques, j’ai tendance à prier comme ça avant chaque match ». Champion du monde 2015 et favori pour la médaille en 2016, An a été contré par l’Italien Fabio Basile, classé 29e dans sa catégorie de poids.

Envie de prier pour le judoka sud-coréen pour les Jeux Olympiques ? Voici ses sujets de prière : « J’espère bien finir le match avec tout le soutien des autres. Veuillez prier pour notre sécurité et notre santé pendant les Jeux olympiques, afin que nous puissions faire aussi bien qu'à l'entraînement, sans regrets. »

Latisha (Yung-jan) Chan, Tennis (Taïwan)

@latishayjchan

Latisha Chan et sa sœur aînée Chan Hao-ching participeront à leurs deuxièmes Jeux olympiques consécutifs et tenteront de passer les quarts de finale, où elles ont perdu en 2016. Actuellement classées 21e mondiales, les sœurs ont été éliminées en quart de finale à Roland-Garros et à Wimbledon plus tôt cet été. En tant que joueuse de double féminin et double mixte, Chan a remporté près de trois douzaines de tournois, dont l’US Open 2017 aux côtés de Martina Hingis, Championnats de France 2018, les Championnats de France 2019 et Wimbledon en 2019 avec Ivan Dodig.

En 2015, Latisha, sa sœur et sa mère se sont toutes fait baptiser ensemble. Pour faire face à la pression, Chan a souvent trouvé un coin tranquille, mis de la musique et prié. « La plupart de mes prières à notre Père céleste ne visent pas à gagner les matchs, mais à demander des conseils », a-t-elle déclaré en 2017. « Je prie pour que nous ne nous blessions pas et que nous fassions un bon match. De plus, je prie pour que quel que soit le résultat final, nous soyons en mesure de l’accepter et d’apprendre une attitude d’humilité tout au long du processus ».

Cherelle Thompson, Natation (Trinité-et-Tobago)

@cher_ellet

Cherelle Thompson voulait faire partie de l’équipe olympique l’an dernier. Mais comme ses collègues athlètes le savent si bien, les choses ne se passent pas toujours comme prévu. Empêchée d’entrer dans une piscine pendant les premiers mois de la pandémie l’année dernière, Thompson a reconnu son besoin de s’accrocher à sa foi pendant cette période. « Je reconnais ma vision limitée de la vie et de mon avenir, et je m'en remets à lui avec confiance en raison de Sa souveraineté et de Sa capacité à prendre bien soin des siens », a-t-elle écrit. « Autant j’aime contrôler tous les détails et savoir à quoi ressemblera chaque étape, autant je fais confiance à Dieu en lui abandonnant mon avenir. Je ne perds pas espoir (pour tout ce que je veux accomplir), mais je lui laisse l’autorité sur les parties de ma vie sur lesquelles je pensais avoir le contrôle ».

Maintenant de retour dans la piscine, la jeune femme de 29 ans s’est qualifiée pour les Jeux olympiques la dernière semaine de juin et participera à l'épreuve du 50 mètres en nage libre féminine.

Joshua Cheptegei, Course de fond (Ouganda)

@joshuacheptegei

En 2017, Joshua Cheptegei saluait sur Twitter les exploits de son collègue coureur de fond médaillé, Mo Farah. Puis un fan a répondu : « Joshua, maintenant c’est à toi de devenir champion ». Cheptegei a accepté l’invitation. « Regardez simplement l’espace, DIEU a tellement d’ors pour moi en réserve, IL me fortifiera, je suis le serviteur du Seigneur », a-t-il tweeté .

En 2020, Cheptegei a établi le record du monde des courses de 5 000 m et 10 000 m. Malgré ce succès, le coureur ougandais connaît bien l’échec.

Lorsque l’Ouganda a accueilli les Championnats du monde de cross-country en 2017, Cheptegei était la meilleure chance du pays hôte de décrocher une médaille d'or. C’était à peine quatre mois avant de publier ce tweet, et Cheptegei était sur le point de remporter la course senior de 10 km. Mais dans son dernier tour, devant le public local, il a ralenti au point de prendre la 30e place, une défaite qui l’a laissé tellement déprimé qu’il a essayé d’éviter les gens pendant des semaines. Aujourd’hui, il utilise sa voix pour plaider contre les mutilations génitales féminines.

Simone Manuel, Natation (États-Unis)

@swimone

En 2016, Simone Manuel a remporté quatre médailles olympiques, deux d’or et deux d’argent : l’or au 100 m nage libre et au relais 4×100 m quatre nages ; l’argent au relais 4×100m nage libre et au 50m nage libre. La co-capitaine de l’équipe de natation, âgée de 24 ans, sera de retour aux Jeux olympiques cette année, mais elle a eu du mal à se rendre aux jeux.

Pendant des mois, Manuel a souffert de surentraînement, un état qui la laissait mentalement déprimée et physiquement épuisée, ce qui a contraint son médecin à lui ordonner d’arrêter de s’entraîner pendant trois semaines en mars de cette année. Lors des essais olympiques de juin, elle n’a pas réussi à se qualifier pour la finale du 100 m nage libre. Mais elle est maintenant à Tokyo après s’être qualifiée sur le 50m nage libre. « Je devais juste prendre un moment pour louer Dieu », a déclaré Manuel à NBC Sports après avoir remporté cette course et obtenu sa place à Tokyo. « Je veux dire, cette année a été difficile, en particulier les deux derniers mois, mais avant de plonger, j’ai senti que c’était mon moment, et je suis tellement reconnaissante pour les bénédictions que Dieu m’a données. »

Avec l’aide de Giselle Seidel, Maria Fennita et Juhyun Park pour la traduction.

Traduit par Valérie Marie-Agnès Dörrzapf

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