À mesure que les adolescents de la génération Z grandissent, bon nombre d’entre eux s’éloignent de la foi chrétienne et mettent les responsables d’Église au défi de s’adapter aux nouvelles attentes des plus jeunes membres de leur troupeau.
En février dernier, le groupe Barna Research rapportait que les jeunes adultes de 18 à 22 ans aux États-Unis sont deux fois moins susceptibles de se dire chrétiens et de suivre Jésus que les adolescents de 13 à 17 ans. Toujours aux États-Unis, une légère majorité des jeunes adultes d’aujourd’hui, 52 % plus précisément, ne se définissent pas comme chrétiens.
La génération Z est diversifiée, instruite et férue de médias sociaux. En matière de foi, les jeunes qui en font partie sont ouverts à Jésus et à ses enseignements, mais sceptiques à l’égard d’institutions et de responsables perçus comme manquant de sincérité.
Kendall Johnson, 20 ans, a découvert la foi à l’université et a pu en approfondir les bases dans le cadre d’un groupe universitaire. Mais ce sont les femmes « réelles et authentiques » de son Église locale de Raleigh, en Caroline du Nord, qui l’ont aidée à grandir spirituellement. Bien que plus âgées qu’elle, ces femmes lui ont ouvert leur cœur et lui ont partagé les luttes qu’elles connaissaient dans leur propre vie.
Leur ouverture, dit Kendall Johnson, « me permet de voir à quel point leur foi et leur confiance en Jésus est vivante et réelle. C’est grâce à elles que j’ai compris que le christianisme se vit dans la relation aux autres et à Dieu. »
Comme Kendall, les jeunes chrétiens attendent le même type de transparence, d’honnêteté et d’authenticité de la part de leurs responsables.
« Dans certaines générations, plus les leaders spirituels étaient hors du commun, plus on leur faisait confiance », explique Darrell Hall, auteur de Speaking Across Generations: Messages That Satisfy Boomers, Xers, Millennials, Gen Z, and Beyond. « La génération Z ne veut pas de différence entre le Darrell et le Dr Hall en moi. Pas de double personnalité. Pas d’écart entre qui je suis et qui je prétends être. »
Pour cultiver des relations authentiques, Hall estime que les responsables doivent être accessibles pour les jeunes. Ils doivent aller à leur encontre, soit en personne, soit sur les réseaux sociaux et les applications qu’ils utilisent.
Les jeunes de la génération Z apprécient les échanges interactifs. Ils veulent être invités à partager leur opinion avec les adultes, pour parvenir à des conclusions communes à propos des sujets débattus. Hall applique cette approche efficace à la maison avec ses trois ados. S’il y a, par exemple, des changements dans les tâches ménagères à effectuer, il leur en explique la raison et leur propose un planning dont ils discuteront ensemble pour arriver au résultat escompté.
Dans un contexte spirituel, les chrétiens de la génération Z apprécient que les pasteurs expriment les difficultés qu’ils rencontrent dans la compréhension des Écritures et parlent des luttes qu’ils connaissent dans leur vie et dans leur foi.
« Les personnes âgées et les baby-boomers n’ont pas besoin d’être au courant de mes luttes pour m’accepter », estime Hall, qui a aussi par le passé été responsable de ministère auprès des jeunes adultes et est aujourd’hui pasteur pour le campus à la Way Community Church de Conyers, en Géorgie.
La génération Z ne veut pas m’entendre dire « Voici ce que dit la Bible, et voici ce que j’ai à dire à ce sujet. La génération Z veut savoir ce que je ressens par rapport à cela, ce que ça me coûte d’adhérer à cette parole, ce que je ne comprends pas, ce que je fais concrètement pour grandir dans ma foi et ce que cela a apporté à ma vie de tous les jours ; non pas d’abord en tant que leur pasteur, mais bien en tant que personne. »
Ce désir de relations authentiques, nous expliquent des jeunes de cette génération, vient de leurs luttes et de leur scepticisme face à l’hypocrisie des puissants. De nombreuses études montrent en effet que cette tranche d’âge est celle qui se méfie le plus des marques commerciales, des gouvernements et d’autres grandes institutions ; elle est consciente de la prévalence de la désinformation et du battage médiatique que le monde subit. Et pour une grande part elle s’estime en mesure d’y discerner le vrai du faux.
En ce qui concerne la vie d’Église, les jeunes de cette génération se méfient donc des abus spirituels ainsi que du racisme et du sexisme qui peut prévaloir dans certains milieux religieux. Ils accordent plus d’importance aux personnes rencontrées et aux enseignements reçus qu’à l’institution religieuse en tant que telle.
Kendall Johnson, en Caroline du Nord, préférait les rencontres informelles avec les femmes de son Église aux réunions structurées du groupe universitaire, qu’elle voyait plutôt comme des séances de questions-réponses.
Invitée par une de ces femmes à lire la Bible avec elle en famille, elle s’est sentie traitée comme une amie et non comme une « simple » étudiante. Elles approfondissaient leur lecture de la Bible d’égale à égale. « Ces personnes voulaient me voir grandir et me consacraient du temps », dit-elle. « C’étaient simplement des gens normaux qui m’aimaient, sans arrière-pensées. »
Les chrétiens de la génération Z n’aiment pas non plus que l’on juge ou dénigre leur manière de vivre selon des normes d’une autre génération. Olivia Denny, 19 ans, étudiante à l'université Liberty, s'est vue critiquée par des membres plus âgés de sa communauté, qui lui reprochaient d'être « impudique » parce qu'elle portait des shorts ou des débardeurs à l'Église.
« Ce n’est pas parce que vous estimez que ce que quelqu’un fait est un péché que vous devez laisser entendre qu’il ne devrait pas venir à l’Église, ou dire des méchancetés à son sujet », proteste-t-elle. « Il faut plutôt essayer de l’aider. »
Pour accompagner la génération Z dans ses luttes contre le péché, il faut trouver un bon équilibre entre l’amour et la vérité, explique-t-elle encore. Il faut beaucoup parler avec les jeunes pour mieux appréhender la culture dont ils sont imprégnés, une culture où prévaut entre autres l’affirmation des identités LGBT.
Les réponses vagues ou superficiellement « chrétiennes » les frustrent ; ils ont besoin de responsables qui comprennent leurs difficultés et leur donnent des réponses transparentes, explique Andrew Root, professeur et spécialiste du ministère auprès de la jeunesse et de la famille au Luther Seminary.
Les réponses générales qui ne tiennent pas compte de leurs questions ou des défis de la vie réelle sont perçues comme hypocrites et peuvent les rendre encore plus cyniques. En revanche, quand des aînés et des responsables d’Église lient des relations authentiques avec eux, cela change totalement la donne.
« Ces jeunes voudraient être connectés de manière plus large au monde, ils aimeraient participer à quelque chose qui les dépasse, mais ils sont viscéralement méfiants », déclare encore Root. « Les responsables de jeunes devraient éviter d’instrumentaliser leurs rapports avec eux. […] Entretenez la relation pour la relation. »
Traduit par Anne Haumont
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