Un chemin dans le désert

Méditation de l’Avent pour le 28 Novembre

Christianity Today November 28, 2022
Stephen Crotts

Semaine 1: Le Dieu fort


Ce nourrisson enveloppé de langes et déposé dans une crèche est le Créateur glorieux et le soutien de toutes choses. Jean Baptiste nous parle de sa force et de sa puissance. Nous entendons l’annonce de son retour promis et de son règne ultime. Jésus est le Dieu fort.

Lisez Ésaïe 40.1–5 et Malachie 3.1–4 ; 4.5–6.

On entend une voix crier : « Dégagez un chemin dans le désert pour l’Éternel, nivelez dans la steppe une route pour notre Dieu ! » ÉSAÏE 40.3

Parmi les premiers destinataires d’Ésaïe 40, il y avait les Israélites déportés sur une terre étrangère — exilés et captifs dans l’ancienne Babylone. La ville était située à environ une heure au sud de l’actuelle Bagdad, en Irak, et était considérée comme le centre de la civilisation mésopotamienne, une cité cosmopolite de jardins suspendus dans le désert, célèbre du nom d’Hammurabi et de son code. Mais le peuple de Dieu ne voulait pas rester bloqué là. Il voulait rentrer chez lui, à Jérusalem. Il était pourtant loin, très loin de chez lui, sans espoir de retour.

Dans ce contexte de désespoir, ils firent l’expérience d’une irruption de la grâce de Dieu. « Réconfortez », s’écrie le prophète, usant d’un mot hébreu ayant des connotations de courage et de force. « Reprenez courage, reprenez espoir », disait en quelque sorte son message. « Ce n’est pas la fin. Vous allez voir et vivre quelque chose que vous n’auriez jamais pu imaginer dans ce temps de désert. » Comme leurs ancêtres de jadis qui avaient fait l’expérience d’une provision et d’une délivrance miraculeuses dans le désert égyptien, eux aussi allaient voir Dieu leur tracer un chemin à travers le désert.

En rapprochant Ésaïe 40.1-5 de Malachie 3.1-4 et 4.5-6, nous voyons se dessiner la promesse de Dieu d’envoyer un messager pour préparer les cœurs de son peuple à la délivrance. Ils seraient purifiés comme par le feu afin qu’ils puissent voir Dieu, eux-mêmes et le monde plus clairement. Dans cette libération, ce qui avait été déchiré par l’exil, comme les relations familiales, serait un jour réparé (Ml 4.5-6).

Dieu a tenu parole ; les Israélites ont fini par retourner à Jérusalem. Pourtant, ce retour n’était pas le point final de la prophétie. Des siècles plus tard, un autre prophète, Jean Baptiste, ouvrirait la voie au Dieu fort, notre Seigneur Jésus-Christ, pour sauver son peuple de sa vie d’exil — éloigné de Dieu et des autres à cause du péché. Jean devait adoucir les cœurs pour l’arrivée du Christ.

La prophétie de Malachie doit encore s’accomplir à un autre niveau (3.1-4) : elle pointe vers la seconde venue de Jésus, lorsque nous serons pleinement purifiés — raffinés — lorsque toutes choses seront renouvelées (voir Ap 21.5).

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Les délivrances extraordinaires dans des situations désespérées n’ont pas été reléguées à l’histoire ancienne. Le Dieu tout-puissant accomplit quotidiennement des libérations prodigieuses. Dieu apparaît lorsque tout espoir semble perdu. Nous pouvons nous confier en sa force. Pendant l’Avent, nous nous rappelons que nous pouvons faire confiance à celui qui a été promis, qui est venu à nous en tant que nouveau-né, mais qui tenait toute la puissance et la force de l’univers, et même au-delà, dans ses petites mains !

Êtes-vous dans le désert, soupirant après la délivrance — soupirant après l’intervention de Dieu dans sa puissance ? Nous ne savons peut-être pas comment ou quand la délivrance viendra, mais elle viendra. Dieu vient toujours. Demandez à Dieu de préparer votre cœur à son arrivée et à la délivrance qui l’accompagne inévitablement.

Marlena Graves est professeure de formation spirituelle au Northeastern Seminary. Elle est l’autrice de plusieurs livres, dont The Way Up Is Down.

Contemplez Ésaïe 40.1–5 et Malachie 3.1–4 ; 4.5–6.


Comment voyez-vous la force de Dieu dans ces promesses ? Dans leurs différents niveaux d’accomplissement ? Comment ces passages résonnent-ils avec nos propres désirs et aspirations ?

Le Christ, Seigneur éternel

Méditation de l’Avent pour le 27 Novembre.

Christianity Today November 27, 2022
Stephen Crotts

Semaine 1: Le Dieu fort


Ce nourrisson enveloppé de langes et déposé dans une crèche est le Créateur glorieux et le soutien de toutes choses. Jean Baptiste nous parle de sa force et de sa puissance. Nous entendons l’annonce de son retour promis et de son règne ultime. Jésus est le Dieu fort.

Lisez Ésaïe 9.6–7 ; Colossiens 1.15–20 et Hébreux 1.1–12.

Car un enfant est né pour nous, un fils nous est donné. Et il exercera l’autorité royale ; il sera appelé Merveilleux Conseiller, Dieu fort, Père à jamais et Prince de la paix. ÉSAÏE 9.6

De tous les signes habituels de cette période précédant Noël — lumières suspendues aux maisons, crèches exposées, arbres décorés d’ornements — celui que j’attends le plus est la musique. Les chants de l’Avent et de Noël ramènent à notre mémoire ces événements familiers : la Sainte Famille à la crèche, les anges chantant devant les bergers émerveillés, les rois mages se dirigeant vers la « petite ville » de Bethléem. Ces hymnes et cantiques bien connus nous donnent chaud au cœur.

Cependant, plusieurs de ces chants contiennent des paroles qui rompent avec la familiarité et proclament une réalité théologique étonnante : ce nouveau-né dans la crèche est le Dieu fort.

« Il est né, le divin enfant », répète l’un de nos classiques. Ce Christ qui est né, dit « Les anges dans nos campagnes », est « le Dieu Sauveur ». « Écoutez le chant des anges ! » présente ainsi ce profond paradoxe : « Son palais est une étable. Une crèche est son berceau. Et pourtant c’est l’Admirable. C’est le fils du Dieu très haut ».

« Salut, blanche étoile » résume : « Le fils adorable, lui, le Roi des rois, naît dans une étable, meurt sur une croix ». Ces paroles résonnent avec la vérité qu’affirme Ésaïe 9.6-7 : cet enfant est celui qui a été promis et qui régnera éternellement sur le trône de David, établissant son royaume de justice, d’équité et de paix.

C’est un mystère insondable sur lequel le Nouveau Testament nous invite également à nous pencher. L’auteur de l’épître aux Hébreux proclame que le Fils « est le rayonnement de la gloire de Dieu » et « l’héritier de toutes choses » (1.2-3). Paul déclare que « c’est en lui qu’ont été créées toutes choses dans les cieux comme sur la terre, les visibles, les invisibles » et que « tout subsiste en lui » (Col 1.16-17). Jésus-Christ est souverain sur toutes choses et la plénitude de Dieu demeure en lui.

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Voici celui a été promis, que le peuple de Dieu attendait et dont nous nous apprêtons à célébrer la naissance. C’est le Seigneur devant lequel Dieu a envoyé un messager pour préparer le chemin, prêchant un message de repentance. C’est le Sauveur qui, dans son œuvre d’amour et de rédemption, allait vaincre le pouvoir du péché et de la mort par son sacrifice sur la croix et sa résurrection victorieuse. Et c’est celui dont nous attendons le retour dans l’espérance, confiants dans « le Roi des rois, le Seigneur des seigneurs [qui] seul est immortel, [dont la] demeure est bâtie au sein de la lumière inaccessible à tous » (1 Tm 6.15-16).

Cette réalité — que l’enfant dans la crèche est le Dieu fort — est bien au-delà de ce que nous pouvons pleinement comprendre. Et pourtant, c’est vrai. Dans l’admiration et l’humilité, nous suivons l’exhortation de « Minuit, chrétiens » : « Peuple, à genoux ». Dans une humble gratitude, nous l’adorons.

Le Roi des Rois naît dans une humble crèche, Puissants du jour, fiers de votre grandeur À votre orgueil c’est de là qu’un Dieu prêche, Courbez vos fronts devant le Rédempteur !

Méditez Ésaïe 9.6–7 ; Colossiens 1.15–20 ; et Hébreux 1.1–12.
En option : Lisez également 1 Timothée 6.13–16.


Quelle description de la force et de la puissance de Jésus dans ces passages attire votre attention ? Pourquoi ? Comment cette vérité pourrait-elle façonner votre louange en cette période de l’Avent ?

La simplicité de Joseph nous enseigne la maturité spirituelle

Dieu a confié son Fils unique à un homme qui ne pouvait pas offrir ce que sa culture attendait, mais avait d’autres ressources.

Christianity Today November 25, 2022
Illustration by Matt Chinworth

Pendant la guerre civile au Burundi dans les années 1990, j’ai passé plusieurs mois dans un camp surpeuplé de personnes déplacées à l’intérieur du pays — des gens comme moi qui avaient fui leur maison mais ne pouvaient pas fuir le pays. L’une de mes expériences les plus douloureuses a été de voir la saine masculinité de certains pères brisée par ce changement dans leur vie.

Alors qu’ils subvenaient autrefois aux besoins de leur famille, ils devaient désormais compter sur l’aide alimentaire. Ils étaient privés de leur liberté de mouvement, incapables de faire ce qu’ils avaient fait toute leur vie (agriculture ou commerce). Certains commencèrent à boire beaucoup pour faire face à leur dépression.

Cela m’a fait penser à Joseph, le mari de Marie, qui a également dû fuir et faire face aux frustrations d’une vie sans stabilité. Il aurait pu devenir comme ces hommes. Il aurait pu en vouloir à ses gouvernements locaux et coloniaux pour la façon dont ils l’avaient privé de certaines opportunités et obligé à errer à travers toute la région. Il aurait pu en vouloir à Dieu qui lui avait demandé d’épouser une femme qui, aux yeux de ceux qui l’entouraient, méritait probablement le divorce et non son soutien. Il aurait pu essayer de compenser sa masculinité menacée par un manque de coopération ou par un légalisme dominateur.

Mais ce n’est pas ainsi que les Écritures dépeignent Joseph. Au contraire, l’homme que Dieu a choisi pour prendre soin de son fils accepte la direction inattendue de Dieu à chaque étape délicate, non pas avec ressentiment, mais dans une coopération sans réserve avec Dieu. J’ai pu voir à quel point cela peut être difficile. Comment Joseph a-t-il fait ?

Nous ne savons pas grand-chose sur Joseph. Il est l’un des personnages bibliques dont très peu de choses sont dites. Ni leader politique ni grand prophète, son nom serait resté absent de l’Écriture s’il n’avait pas été le gardien du Messie. Pourtant, sa lignée aurait pu être un sujet de fierté et le fondement d’une aspiration à une place d’honneur. Dans le récit que fait Luc de la visite de l’ange à Marie, Gabriel affirme que Jésus est le descendant promis de David et qu’il recevra le trône de son ancêtre et un royaume qui n’aura pas de fin (Lc 1.31-33). Le fait que Matthieu, auteur juif de l’Évangile et disciple de Jésus, présente Joseph comme descendant de David est significatif (1.20). Cela place Joseph, père adoptif du Messie, au cœur du plan divin pour l’humanité.

Les écrits apocryphes fournissent une image instable, voire colérique, de Joseph. Le Protévangile de Jacques et l’Histoire de Joseph le charpentier affirment tous deux que Joseph était un veuf ayant des enfants d’un précédent mariage. Ces détails sur Joseph viennent étayer l’idée populaire que Marie était une vierge perpétuelle, mais rien dans les Écritures ne permet de penser que Joseph ait eu des enfants auparavant : les récits de la nativité ne mentionnent personne d’autre que Marie voyageant à Bethléem avec Joseph, et seuls Marie et Jésus sont mentionnés lorsqu’il est demandé à Joseph de fuir en Égypte avec eux (Mt 2.13-15).

Il est très probable que le vrai Joseph, non apocryphe, était un jeune homme juif moyen, ayant reçu une certaine éducation religieuse. Les écrits rabbiniques suggèrent que l’âge attendu pour le mariage à l’époque de Joseph était la fin de l’adolescence. Joseph vivait donc probablement avec ses parents ou sa famille lorsque l’ange lui a dit d’épouser Marie. Après la naissance de Jésus, il a encore eu quatre garçons et un nombre inconnu de filles avec Marie (Mt 13.55-56).

La Bible laisse entendre que Joseph était un homme ordinaire issu d’un endroit ordinaire, un homme du village qui était connu par sa profession. Les gens le voyaient comme « le charpentier » (13.55). Ses journées étaient probablement remplies de dur labeur.

Si la culture juive valorisait le travail manuel, la réalité était totalement différente pour les Romains, la puissance coloniale qui régnait sur la Palestine du vivant de Joseph. De leur point de vue, la charpenterie était une profession d’esclave. Joseph était donc loin de faire partie de la haute société.

Une partie de ce statut était peut-être liée à sa naissance. Une autre était peut-être un choix. Joseph vivait à une époque difficile, où les opportunistes pouvaient collaborer avec les Romains et jouir d’une vie matériellement confortable. Il n’a pas pris le chemin de Matthieu, l’ancien collecteur d’impôts. Matthieu, l’auteur de l’Évangile qui en dit le plus sur Joseph, connaissait bien la tentation de la collaboration. Joseph, s’il est différent, ne fait cependant pas de résistance inutile aux Romains. Il se rend ainsi dans la ville de ses ancêtres pour le recensement imposé par les autorités.

Dans son mode de vie simple et terre-à-terre, il était confronté aux pouvoirs en place qui prospéraient sur l’injustice, la violence et la corruption. Penser cette confrontation met en lumière la spiritualité de Joseph, et Dieu se tient clairement à ses côtés.

En effet, Dieu est proche de ceux qui, comme Joseph, sont pauvres et humbles de cœur et qui tremblent à sa parole (Es 66.2). La simplicité, en tant que discipline spirituelle, nous aide à éviter l’attrait du matérialisme et nous permet de nous concentrer sur les choses qui comptent vraiment. Ceux qui pratiquent la simplicité peuvent être riches sans matérialisme et descendre d’une lignée royale sans rivaliser avec Hérode. Pour eux, la justice vaut mieux que la gloire du monde.

Il me semble également clair que si Joseph a pu bien guider sa famille, c’est parce qu’il était ouvert à Dieu et à ses messagers d’une manière qui défie certains légalismes. La spiritualité de Joseph l’avait préparé à l’inattendu.

Dans les cultures fortement patriarcales, les hommes pensent généralement avoir la responsabilité de subvenir aux besoins de leur famille, parfois avec une bonne dose de détachement émotionnel à l’égard de leur femme, et ils s’attendent en principe à ce que leurs propres plans soient ceux de leur famille. Les chefs de famille peuvent être rigides et réticents face à des comportements non conventionnels. Dans ma culture, par exemple, bien que le vent des droits de la personne souffle depuis plus de deux décennies maintenant, la plupart des hommes chrétiens luttent encore pour se débarrasser d’attitudes et de comportements patriarcaux rigides, et certains déforment la Bible pour justifier ces comportements.

La fuite en Égypte par Henry Ossawa TannerWikiMedia Commons
La fuite en Égypte par Henry Ossawa Tanner

Joseph n’était pas ainsi. Cela apparaît très clairement dans son attitude à l’égard de Marie. En tant que juif, Joseph savait ce qui pouvait arriver à une fille qui avait des relations sexuelles avant le mariage (Dt 22.13-21). La grossesse était la preuve la plus convaincante d’une inconduite sexuelle. Légalement, il aurait eu des raisons de dénoncer Mary.

Mais pour Joseph, le péché de Marie ne faisait pas d’elle un paria. Il savait qu’elle méritait amour et protection. La traduction anglaise NIV combine magnifiquement la culture religieuse juive de Joseph et sa spiritualité personnelle dans ce verset : « Comme Joseph, son mari, était fidèle à la loi, mais qu’il ne voulait pas l’exposer à la disgrâce publique, il envisageait de divorcer sans faire de remous » (Mt 1.19).

Joseph n’est pas le mari grincheux et émasculé de la légende de Noël. Avant même de recevoir le message de Dieu concernant Jésus, l’amour manifeste de Joseph pour Marie et son engagement à protéger sa dignité l’emportent sur tout légalisme. Le comportement de Joseph illustre une masculinité authentique et une droiture que la Bible appuie.

La situation, bien sûr, n’est pas celle qu’il avait d’abord imaginée. Dans un rêve, un ange lui révèle que la grossesse de Marie est d’origine divine. Joseph laisse alors de côté ses plans et accepte d’obéir aussi rapidement et simplement que Marie avait accepté d’être enceinte avant le mariage (Mt 1.24 ; Lc 1.38).

Une réponse aussi ouverte à une aventure aussi difficile et risquée aurait été impossible de la part d’un esprit légaliste et spirituellement émoussé. Un homme légaliste aurait pu rapidement rejeter le message de l’ange comme une hallucination apparemment contraire à la loi. La spiritualité de Joseph était telle qu’il était capable d’accorder plus de valeur à la volonté du législateur qu’à la loi, ce qui échappait à de nombreux théologiens et chefs religieux de premier plan (Mt 15.3-9), sans parler des disciples de Jésus.

Lorsque, dans un autre rêve, un ange ordonna à Joseph de fuir en Égypte avec Marie et le bébé, Joseph obéit et s’enfuit (Mt 2.13-14). Pour beaucoup dans la position de Joseph, le commandement aurait semblé insensé. Ils s’attendaient à un Messie puissant et conquérant, pas à un bébé réfugié (Ac 1.6).

Le fait que Joseph ait pu mettre de côté la mentalité commune à cause d’un rêve montre que sa spiritualité était plus profonde que la pensée religieuse dominante de son époque. Il pouvait dire quand Dieu lui avait parlé directement. Ce simple villageois sut coopérer avec Dieu pour préserver la vie du Messie.

Nous voyons souvent la Nativité comme une réconfortante célébration de l’innocence. En Europe et aux États-Unis, Noël est souvent marqué par une recherche de confort. Dans mon pays, c’est une sorte de fête des enfants chez les évangéliques.

Joseph pourrait-il s’intégrer dans ces Noëls modernes ? Certes, Joseph avait l’humilité enfantine que Jésus louera plus tard (Mt 18.4). Sa simplicité et sa droiture sont une forme d’innocence. Mais Joseph a pris soin de Jésus en des temps bien troublés. Peut-être nos Noëls seraient-ils plus savoureux si nous nous souvenions que l’innocence et la réceptivité sont aussi les caractéristiques du père que Dieu a choisi pour guider une famille à travers le danger, et pas seulement celles d’enfants gardés bien au chaud.

Joseph savait sûrement à quel point les dirigeants romains pouvaient être violents. Sur les routes, il a peut-être croisé des crucifiés agonisants qui, comme sa famille, représentaient une menace pour le régime en place.

En raison d’une décision politique d’un empereur situé à des milliers de kilomètres, Jésus est né dans une Bethléem surpeuplée — un casse-tête logistique pour Joseph. Il est possible que le couple ait voyagé avec des parents qui étaient à leurs côtés lors de la naissance de Jésus. Mais il n’est fait mention de personne pour aider Joseph à veiller sur Marie et le bébé. Lorsqu’il n’y avait pas de place pour eux avec les hôtes, Joseph n’a pas eu les moyens de faire mieux (Lc 2.4-7). Plus tard, une autre décision politique et un autre rêve l’ont poussé à fuir en Égypte avec Marie et Jésus. Hérode ne pouvait pas laisser grandir un enfant qui pourrait potentiellement lui disputer le trône, et tenta de l’assassiner.

La fuite en Égypte, par James TissotMusée de Brooklyn
La fuite en Égypte, par James Tissot

La peur, l’angoisse et un sentiment d’impuissance ont dû envahir le cœur tendre de Joseph lorsqu’il a pris conscience de la menace. Quiconque a vécu des violences de masse (comme dans le cas d’une guerre civile) connaît l’agonie que l’on ressent face à la possibilité de perdre des êtres chers et notre incapacité de les protéger.

N’importe qui à la place de Joseph se serait posé des questions existentielles et aurait remis en question sa foi. A-t-il été tenté de s’ôter la vie comme certains le font lorsqu’ils sont confrontés à une situation similaire ? A-t-il pensé à migrer vers un endroit plus sûr et à ne jamais revenir en Palestine ? A-t-il été tenté par la passivité ou le fatalisme ? La combinaison du danger, du chagrin, de l’ennui, du manque de travail significatif, de lourdes responsabilités et d’autres poids encore conduit de nombreux déplacés de force à réagir de ces diverses manières.

C’est la spiritualité de Joseph, magnifiquement entretissée dans les épreuves qu’il rencontre, qui fait de son histoire un récit d’espoir. Il a certainement médité ces paroles de l’ange : « Lève-toi, prends l’enfant et sa mère, fuis en Égypte et restes-y jusqu’à nouvel ordre » (Mt 2.13). Il y avait là un ordre, mais aussi une promesse. Dieu était au contrôle. Un jour, Joseph et sa famille reviendraient. Les dirigeants égoïstes et cruels n’auraient pas eu le dernier mot dans la vie de la famille de Joseph.

Et cependant, Joseph et sa famille se trouvaient dans une situation délicate où il devait s’en remettre à Dieu pour prendre les décisions les plus fondamentales. Un mauvais choix pouvait être fatal. Mais lorsque l’heure du retour arriva, l’ange demanda à Joseph de revenir (Mt 2.19-20).

Encore une fois, Joseph fut divinement guidé pour prendre une décision lourde de dangers. Toute personne qui a été réfugiée le sait. Dans le camp de personnes déplacées où je vivais, certains hommes sont partis pour reprendre leur vie normale avant que la zone ne soit sûre ; leur impatience leur a coûté la vie.

Le monde était toujours le monde, malgré un moment de répit. Dieu recommanda à Joseph de ne pas s’installer en Judée, mais en Galilée. La sécurité complète, le plein soulagement restaient encore hors d’atteinte. Hérode était mort, mais son fils était au pouvoir (v. 21-23). Dieu n’a pas détruit immédiatement tous les méchants, mais il n’a pas non plus permis qu’ils contrecarrent ses plans.

Aujourd’hui, le monde est, à certains égards, meilleur qu’il ne l’était à l’époque de Joseph. Les organisations de défense des droits de l’homme peuvent parler au nom des faibles et contribuer à protéger leur vie. Cependant, l’humanité est toujours déchue et, par conséquent, loin d’être parfaite. Le nombre de personnes déplacées de force dans le monde a atteint son plus haut niveau depuis 40 ans. Les guerres, les tremblements de terre, les éruptions volcaniques, les ouragans, les pandémies et les décisions des politiciens peuvent anéantir notre sentiment de sécurité et de stabilité.

Cela dit, nous ne devons jamais oublier que Dieu est à l’œuvre et qu’il est avec nous, même aux heures les plus sombres (Ps 23.4-5). En outre, il a promis de nous instruire sur la voie à suivre (Ps 32.8) comme instruments de sa volonté sur terre.

Tout comme Dieu s’est servi de Joseph, il a l’intention de se servir de nous pour réaliser ses desseins pour notre génération. Mais cela exige de nous le type de spiritualité qui transcende les traditions confessionnelles et les mentalités légalistes. Il nous faut soigneusement éviter les pièges de la chair pour rester sensibles à Dieu qui agit dans notre temps.

Tout comme Dieu ne permettra pas que ces choses nous séparent de lui, nous ne devrions pas permettre que le danger, l’insécurité ou même la mort nous empêchent de coopérer avec lui.

Comment faire cela ? Non pas par des stratégies compliquées, mais avec une foi semblable à celle de Joseph : une foi simple, enfantine, prête à dépendre de Dieu pour les décisions que nous prenons, à faire ce qu’il nous ordonne de faire, et à aller là où il nous conduit sans rechigner, que cela soit confortable ou dangereux.

Acher Niyonizigiye est pasteur à l’International Community Church de Bujumbura, au Burundi, cofondateur de l’association Greenland Alliance et auteur de Be Transformed and Glorify God with your Life.

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Books

Les « non dénominationnels » sont désormais le groupe le plus important des protestants américains

Le dernier recensement américain des religions révèle que les communautés indépendantes se sont multipliées au cours de la dernière décennie.

Christianity Today November 25, 2022
Tyler Milligan / Unsplash

Les « non » sont en tête.

Pas les « non religieux », qui attirent l’attention depuis des années, alors que le nombre d’Américains qui ne s’identifient pas à une tradition religieuse spécifique est passé de 5 % seulement pendant la guerre froide à environ 30 % aujourd’hui. Non, je parle ici des chrétiens « non dénominationnels », des personnes qui se défont de leurs affiliations institutionnelles, se dissocient de la tradition et s’affranchissent des marques ecclésiastiques établies.

Le nombre d’Églises indépendantes a augmenté d’environ 9 000 communautés en l’espace d’une décennie, selon les nouvelles données décennales publiées par le dernier recensement religieux américain. Sans grand bruit, elles ont tranquillement remodelé le paysage religieux.

Il y a maintenant cinq fois plus d’Églises non dénominationnelles que de paroisses de l’Église presbytérienne aux États-Unis. Il y a six fois plus d’Églises non dénominationelles que d’Églises épiscopaliennes. Et il y a 3,4 millions de personnes de plus dans les Églises non dénominationelles que dans les communautés des Baptistes du sud.

Si « non dénominationnel » était une dénomination, ce serait la plus grande dénomination protestante, avec plus de 13 % des pratiquants en Amérique.

« Les deux plus grandes évolutions de la religion aux États-Unis, ce sont les non religieux et les non dénominationnels », déclare Ryan Burge, professeur de sciences politiques à l’Eastern Illinois University et expert en données démographiques religieuses. « Nous sommes dans une période de transition pour les dénominations protestantes. »

Les chrétiens non dénominationnels n’apparaissent pas dans les sondages religieux aux États-Unis, parce que les gens ne considèrent pas « non dénominationnel » comme une identité. Il est plus probable qu’ils se disent simplement « chrétien », ou peut-être « protestant ». Si on leur demande, ils pourront préciser s’ils se considèrent ou non comme évangéliques ou nés de nouveau. Mais peu d’entre eux, voire aucun, se déclareront « non dénominationnel ».

Le US Religion Census (recensement des religions aux États-Unis) permet toutefois d’identifier le nombre croissant de chrétiens non dénominationnels, car il s’agit d’un véritable recensement, dans lequel des équipes dénombrent les communautés et établissent des rapports sur le nombre de personnes fréquentant les différentes Églises. Depuis que le National Council of Churches a lancé le projet en 1952 et que l’Association of Statisticians of American Religious Bodies l’a relancé en 1990, ce décompte décennal est devenu la mesure la plus officielle des groupes religieux dans le pays.

En 2010, ce décompte recensait 35 496 communautés indépendantes sans affiliation dénominationnelle formelle. Le chercheur à la tête du projet, Scott Thumma, déclarait à CT qu’il y en avait certainement plus, mais qu’il s’agissait du comptage le plus précis jamais réalisé jusqu’à présent.

En utilisant la même méthode en 2020, l’équipe du US Religion Census a trouvé 44 319 communautés indépendantes, avec un nombre d’adhérents estimé à 21 millions. Cela fait des chrétiens non dénominationnels le premier ou deuxième plus grand groupe de protestants en Amérique, selon la façon de compter. Les baptistes du Sud ont environ 7 000 Églises de plus, mais 3,4 millions de membres en moins.

Le groupe protestant suivant, les méthodistes unis, ne peut revendiquer qu’environ la moitié du nombre de personnes recensé chez les baptistes du Sud, et la dénomination a perdu un certain nombre de communautés dans une scission depuis que le recensement en avait comptabilisé un total de 30 051 en 2020.

Scott Thumma, l’un des quelques experts et observateurs attentifs qui ont suivi la croissance non dénominationnelle au cours de la dernière décennie, pense que plusieurs facteurs sont à l’origine de ce qu’il décrit comme « un individualisme au niveau communautaire ».

Il s’agit de l’expression d’un « individualisme organisationnel qui va de pair avec l’individualisme personnel », dit-il, qui permet aux Églises de se libérer du poids de certains bagages culturels.

« C’est un avantage en matière d’évangélisation », estime Scott Thumma. « Un visiteur potentiel d’une Église non dénominationnelle n’a pas d’attentes culturelles quant à ce qu’il pourrait trouver à l’intérieur, comme c’est le cas avec une étiquette épiscopalienne, Assemblées de Dieu ou baptiste du Sud. Le visiteur doit faire sa propre expérience du culte. »

Cela peut être particulièrement intéressant pour des évangéliques qui s’inquiètent du fait que le terme évangélique soit devenu un repoussoir.

« Que cela soit dû à des liens avec la rhétorique nationaliste chrétienne ou avec [l’ancien président Donald] Trump et le parti républicain, j’entends partout des gens qui essaient de trouver un terme plus approprié que celui d’évangélique pour se décrire », rapporte Scott Thumma. « Comme si la marque était trop ternie pour pouvoir être remise en valeur. »

La croissance des non dénominationnels a également été soutenue par un écosystème d’éditeurs et d’organisations paraecclésiales qui produisent du contenu religieux non dénominationnel. Historiquement, les dénominations fournissaient aux Églises de la musique, des programmes pour l’école du dimanche et des programmes d’études bibliques. Elles organisaient également des voyages missionnaires et humanitaires. Mais cela a changé, et les communautés sont désormais plus enclines à faire leur propre tour du marché.

Aujourd’hui, même certaines Églises dénominationnelles finissent par être « fonctionnellement non dénominationnelles », déclare Scott Thumma, « faisant défection ou cessant d’entretenir les liens […] et créant leur propre marque locale. »

Cela ne signifie pas pour autant que les dénominations évangéliques disparaissent. Selon ce recensement de 2020, de nombreuses dénominations évangéliques ont connu un léger déclin, mais leur nombre n’a pas chuté.

La Christian and Missionary Alliance (CMA) a perdu environ 200 communautés entre 2010 et 2020. Les Églises du Christ ont perdu environ 700 communautés ; l’Église Foursquare, 400 ; les baptistes libres, 350 ; l’Église de Dieu (Cleveland, Tennessee), 180 ; l’Église wesleyenne, 150 ; Vineyard, environ 50.

L’Église anglicane d’Amérique du Nord, bien que le plus important des nombreux groupes ayant quitté l’Église épiscopalienne, est passée de 913 paroisses à 873.

Les autres dénominations ont progressé, mais pas de manière significative. La Convention baptiste du Sud et les Assemblées de Dieu ont grandi d’environ 500 communautés chacune. L’Église presbytérienne d’Amérique en a ajouté environ 100 ; l’Église du Nazaréen, 100 ; et les Églises évangéliques libres, 250.

Certaines Églises protestantes noires ont également connu une modeste croissance. L’Église de Dieu en Christ a été rejointe par plus de 300 communautés entre 2010 et 2020. L’Église épiscopale méthodiste chrétienne a crû d’environ 150 communautés et les baptistes du plein évangile d’environ 100.

Selon Cliff Grammich, président du comité de l’association des statisticiens chargé du recensement décennal, les données du recensement reflètent le paysage religieux au début de la pandémie de COVID-19. Certaines informations ont pu arriver un peu avant et d’autres après que les organisations religieuses aient commencé à ressentir l’impact de la pandémie. Le rapport de 2020 servira de référence pour les études ultérieures sur les éventuels effets à long terme de la pandémie.

Constater « l’augmentation de l’affiliation ou de la désaffiliation en réponse à la pandémie et à ses conséquences prendra du temps », estime Cliff Grammich.

Comme le recensement compte les communautés, les données montrent également plus clairement les différences régionales que la plupart des sondages religieux. Le catholicisme romain, par exemple, qui s’est développé au moins en partie grâce à l’immigration en provenance d’Amérique latine, s’est déplacé vers le sud et l’ouest. Il existe des communautés au Nevada, en Arizona et en Californie qui revendiquent 6 000 à 10 000 adhérents, bien que ces personnes ne se présentent probablement pas à chaque messe dominicale.

La Floride et le Texas ont tous deux connu une croissance du nombre de personnes se déclarant religieuses, qui semble liée à l’augmentation de leur population. À l’autre bout du pays, l’adhésion religieuse est en baisse dans le Upper-Midwest.

Les données montrent que, dans de nombreux comtés, le nombre de personnes activement religieuses a diminué d’environ 5 % en l’espace d’une décennie.

« Ce qui n’est probablement pas perceptible pour le résident moyen », déclare Ryan Burge. « Pour la plupart des Américains, c’est une stabilité relative. »

Cependant, alors que le nombre de non religieux et de non dénominationnels continue à augmenter, les observateurs pourraient être contraints de revoir certaines des explications courantes des changements d’affiliation religieuse. La notion de « tension culturelle », soutenue par Rodney Stark, par exemple, a été beaucoup utilisée pour expliquer le déclin des Églises protestantes de gauche et le succès numérique des communautés évangéliques. Mais cette thèse, qui a longtemps suscité le scepticisme des experts en la matière, ne correspond pas aux données relatives à la diversité religieuse au niveau des comtés et n’explique pas les récentes fluctuations parmi les évangéliques et les nombreuses communautés chrétiennes qui s’affranchissent de leur identité dénominationnelle.

Quelle que soit l’explication, il est clair que les non dénominationnels sont en croissance, comme les non religieux. Et dans les années à venir, il est probable que de plus en plus d’Églises protestantes laisseront derrière elles les noms de dénomination.

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Car un enfant nous est né

Méditations de l’Avent de Christianity Today.

Christianity Today November 24, 2022
Stephen Crotts

Introduction de l’Avent 2022: Il nous a été promis


Lisez Ésaïe 9.6–7

Pendant l’Avent, nous préparons nos cœurs à célébrer l’arrivée de cet enfant — l’enfant Jésus, couché dans une crèche, entouré d’amour par Marie et Joseph, adoré par les bergers et les rois mages. Mais l’Avent — du mot latin signifiant « arrivée » — nous invite à nous préparer bien au-delà de la sainte nuit de sa naissance.

Tout au long de l’histoire de l’Église, l’Avent a été une saison d’attente. Dans les premiers siècles du christianisme, il s’agissait d’une période de pénitence en préparation de l’Épiphanie — la célébration de la venue de Jésus et de la révélation de son identité, qui était également un jour réservé au baptême des nouveaux croyants. Rapidement, l’Avent a commencé à se concentrer sur la perspective d’une autre manifestation : la seconde venue du Christ. Au cours du Moyen-Âge, les thèmes que nous avons aujourd’hui tendance à associer à l’Avent furent intégrés aux traditions de l’Église, les chrétiens associant la célébration de Noël à leur contemplation du retour de Jésus.

Chacun de ces thèmes historiques s’entremêle dans les lectures traditionnelles de l’Avent, car les promesses et les prophéties de la Bible nous donnent abondamment à voir l’identité et la mission de Jésus. En nous plongeant dans ces vérités, notre adoration de l’enfant dans la crèche est enrichie. Nous nous agenouillons devant celui qui allait manifester son identité par des miracles extraordinaires. Nous nous inclinons devant celui qui, un jour, reviendra dans la gloire pour juger les vivants et les morts.

Ésaïe contient certaines des prophéties les plus fascinantes pointant vers Jésus. On y entend parler d’un fils promis qui sera appelé Emmanuel — Dieu avec nous (7.14). On y apprend qu’une lumière se lèvera sur un peuple vivant dans les ténèbres (9.2). Et on y rencontre cette annonce retentissante :

Car un enfant est né pour nous, un fils nous est donné. Et il exercera l’autorité royale ; il sera appelé Merveilleux Conseiller, Dieu fort, Père à jamais et Prince de la paix.
Il étendra sa souveraineté et il instaurera la paix qui durera toujours au trône de David et à tout son royaume. Sa royauté sera solidement fondée sur le droit et sur la justice, dès à présent et pour l’éternité. (Ésaïe 9.6–7)

Les prophéties de l’Écriture concernant cet enfant promis ont souvent plusieurs niveaux de signification et des accomplissements multiples. Elles pointent fréquemment vers un accomplissement à l’époque du prophète, mais orientent également notre regard vers le Messie et sa première venue, et vers le second avènement que nous attendons encore.

Dans ce recueil de méditations proposé par CT, nous explorons ce que l’Écriture nous dit de celui qui nous a été promis, approfondissant ainsi notre foi dans le Sauveur que nous connaissons et aimons. Des réflexions quotidiennes se penchent sur des passages clés qui nous aident à approfondir notre compréhension de qui est Jésus. Chaque semaine est centrée sur un aspect central de son identité telle qu’elle transparaît dans les prophéties d’Ésaïe.

Le Dieu Fort

Les premières lectures traditionnelles de l’Avent peuvent paraître étonnamment en décalage avec nos attentes autour de Noël. Au lieu des guirlandes et des bougies, il est question des horreurs de la fin des temps. Au lieu d’anges joyeux, tout commence par un prophète appelant bruyamment à la repentance. Ces passages nous éloignent d’un état d’esprit un peu trop doucereux pour nous rappeler que Jésus est le Dieu puissant. Le Sauveur dont nous nous apprêtons à célébrer la naissance est le Fils de l’Homme lui-même qui reviendra un jour pour juger les vivants et les morts. Il est celui devant lequel Dieu a envoyé un messager pour préparer le chemin : Jean Baptiste, qui a crié dans le désert, témoignant de la puissance et de la gloire de Jésus. L’enfant dans la crèche est le Dieu fort dont le royaume n’aura pas de fin.

Le Prince De La Paix

De nombreux passages de l’Ancien Testament abordés pendant l’Avent nous invitent à réfléchir à la paix individuelle que nous pouvons connaître avec Dieu et à contempler la paix ultime qu’apportera un jour celui qui nous a été promis. La guerre, la violence et la douleur prendront fin. Les nations et les groupes humains divisés se prosterneront ensemble, comme un seul homme. Mais l’Écriture nous pousse à aller au-delà de notre tendance à une vision sentimentaliste de la paix : la paix qu’apporte le Christ est robuste et complète. Cette paix vient non seulement de l’amour de Jésus, mais aussi de sa puissance, car sa paix est directement liée à sa justice. Sa paix est liée à son juste jugement. Et la paix qu’il apporte a coûté cher.

La Lumière Du Monde

Du début à la fin des Écritures, la lumière est utilisée comme une métaphore pour nous aider à appréhender la présence de Dieu, le salut, la vie de foi et Jésus lui-même. On y lit les promesses d’une lumière qui brillera avec éclat, sans être gênée par les ténèbres. Lorsque Jésus a marché sur la terre, il s’est présenté comme cette lumière promise — la même lumière dont la présence illuminera un jour la cité de Dieu (Ap 21.23). Et, soulignons-le, Jésus n’est pas seulement une lumière pour vous est moi. Il l’est pour le monde entier. Comme les Écritures l’indiquent clairement à maintes reprises, il est celui qui a été promis pour toutes les nations, inaugurant un royaume planétaire et multiethnique.

Emmanuel

En cette dernière semaine de l’Avent, nous nous concentrons sur les événements entourant la Nativité, lorsque l’enfant promis — le Dieu puissant, le Prince de la paix, la Lumière du monde — est entré dans l’humanité en tant que nouveau-né. Voici l’Emmanuel, Dieu avec nous. Voici le Verbe fait chair, habitant parmi nous (Jn 1.14). Les promesses séculaires dont il faisait l’objet résonnent dans l’acclamation des anges, le message des bergers, la louange prophétique d’un homme et d’une femme âgés, et l’adoration joyeuse de non-juifs venus de loin pour s’incliner devant le Roi des rois.

Il Est L’Enfant Promis

En cette période de l’Avent, alors que nous nous préparons à célébrer la naissance de Jésus, puissions-nous contempler en profondeur les promesses de l’Écriture concernant son identité et ce qu’il est venu faire. En nous prosternant devant la crèche, nous nous émerveillons que cet enfant soit le Dieu fort, le Prince de la paix et la Lumière du monde. Il est celui qui est venu mourir. Il est celui qui est ressuscité triomphant, qui est monté au ciel, et qui tiendra sa promesse de revenir dans la gloire. Il fera régner la justice et portera à son aboutissement son royaume de paix. Il est Emmanuel, Dieu avec nous.

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(Re)découvrir l’Avent au-delà de 3 clichés populaires

Réflexions de chrétiens du Brésil, de Colombie, de France et des Philippines autour de ce temps liturgique.

Christianity Today November 24, 2022

Pour les chrétiens habitués à la liturgie, l’Avent est une saison d’attente marquée par la joie et l’espérance.

Mais pour de nombreux évangéliques, cette période pourrait presque passer à la trappe, que ce soit en raison d’une méconnaissance du calendrier liturgique de l’Église ou de la supposition qu’il s’agirait d’une pratique catholique que l’on ne voudrait pas reprendre.

Avent signifie « arrivée » ou « apparition » et provient du mot latin adventus. Chaque année, cette célébration commence quatre dimanches avant Noël et dure jusqu’au 25 décembre. Elle est divisée entre une période qui se concentre sur la seconde venue du Christ et une autre centrée sur sa naissance. (Les chrétiens orthodoxes pratiquent une célébration analogue, le jeûne de la Nativité, du 15 novembre au 24 décembre, avant la fête de la Nativité le 25 décembre.)

L’Avent remonte à la Gaule et l’Espagne des 4e et 5e siècles où il apparaît comme une période destinée à préparer le cœur des croyants à l’Épiphanie (6 janvier), et non à Noël. L’Épiphanie subsiste aujourd’hui comme un jour où est commémorée la visite des Mages (en Occident), ainsi que son baptême dans le Jourdain (en Orient).

Aujourd’hui, les coutumes de l’Avent incluent notamment l’utilisation de méditations et de prières spécifiques à cette période et l’allumage des bougies d’une couronne de l’Avent chaque dimanche, suivant quatre thèmes : l’espoir, l’amour, la joie et la paix. Certaines couronnes comportent également une bougie placée au centre pour symboliser Jésus, la Lumière du monde.

Cependant, dans certaines parties du monde majoritaire et dans les pays où le catholicisme est ou a été la religion dominante, les évangéliques n’observent généralement pas l’Avent.

Les Églises évangéliques françaises ignorent souvent l’Avent en raison d’une « réaction instinctive contre tout ce qui est liturgique, parce que cela rappelle le catholicisme », rapporte Gordon Margery, pasteur baptiste et intervenant à l’Institut biblique de Nogent-sur-Marne, vivant en banlieue de Paris.

Peu « d’Églises évangéliques historiques, pentecôtistes et néo-pentecôtistes » en Amérique latine prennent part à l’Avent, affirme le pasteur colombien Dionisio Orjuela. « Seules des Églises comme les luthériens, les anglicans et les épiscopaliens (ainsi que les catholiques) observent la période de l’Avent. »

Nous avons interrogé des responsables chrétiens du Brésil, de Colombie, de France et des Philippines pour en savoir plus sur la manière dont certains préjugés peuvent trouver une réponse, en particulier dans les contextes à majorité catholique.

Cliché n° 1 : L’Avent est exclusivement une pratique catholique romaine.

« La plupart des protestants d’aujourd’hui n’ont aucune idée de ce qui s’est passé dans l’Église pendant près de mille ans. Pourtant, ils sont sûrs d’une chose : ce qui s’est passé pendant l’ère prémoderne ne vaut pas la peine qu’on s’y attarde et ne peut que corrompre le christianisme », écrivait cette année Matthew Barrett, professeur au Midwestern Baptist Theological Seminary.

D’une manière, le calendrier ecclésial a été considéré comme une invention catholique. Les protestants, qui se méfiaient des innovations et tentaient de revenir aux pratiques de l’Église du Nouveau Testament, s'en sont débarrassés. Les puritains n'ont jamais célébré Noël, et d'autant moins l'Avent.

Les approches évangéliques contemporaines de l’Avent s’inscrivent souvent dans la même veine, beaucoup considérant cette pratique comme un rituel principalement catholique qui n’a que peu ou pas de sens ou de pertinence pour la vie spirituelle.

Mais des évangéliques du monde entier, des Philippines au Brésil, prennent part à l’Avent.

« Ces évangéliques sont issus de dénominations historiques (anglicane, réformée, luthérienne, méthodiste) qui prennent au sérieux le développement historique du culte et tiennent compte des circonstances historiques dans leurs pratiques tout en cherchant à être fidèles à la mise en œuvre des principes bibliques dans la contextualisation du culte », analyse Timoteo Gener, président du FEBIAS College of Bible aux Philippines.

Au Brésil, l’Avent est le temps liturgique le mieux accepté par les évangéliques, estime Daniel Vieira, directeur du projet Lecionário.

À ses yeux, faire l’expérience du calendrier liturgique permet de développer une « vision sacramentelle de la réalité » qui combat le consumérisme religieux et remet l'accent sur la formation spirituelle et le discernement.

C’est pour cela qu’aider les croyants à faire la distinction entre l’Avent et Noël est un besoin vital pour l’Église brésilienne à l’heure actuelle, ajoute-t-il.

« La plus grande difficulté est de mieux comprendre la différence entre l’Avent et Noël et de célébrer l’Avent d’une bonne manière, à l’aide des pratiques chrétiennes traditionnelles et d’un lectionnaire, un outil dont nous faisons la promotion au Brésil. »

Cliché n° 2 : L’Avent n’est pas biblique.

Certains évangéliques considèrent également que l’Avent n’est pas biblique, car il n’est mentionné nulle part dans les Écritures.

Les évangéliques ont souvent tendance à se détacher de l’histoire et de la tradition de l’Église. Beaucoup proviennent de milieux ecclésiastiques qui accordent plus d’importance à des prédications d’actualité et à la piété individuelle qu’à l’idée de suivre un calendrier historique de l’Église pour organiser les cultes ou d’utiliser des prières communautaires préparées.

Mais retrouver une notion de la tradition de l’Église peut nous éclairer sur les raisons pour lesquelles l’Avent est une pratique fondée sur la Bible, dans laquelle les croyants peuvent façonner leur foi selon la parole et la vérité de Dieu.

« Les évangéliques devraient étudier la tradition [de l’Église], car nous ne sommes pas les premiers à chercher des réponses aux questions et aux problèmes difficiles de la théologie. Cependant, nous ne devons pas élever la tradition à un statut d’autorité inattaquable », écrit le théologien baptiste Roger E. Olson.

Le temps de l’Avent reflète la Bible en soulignant la place centrale du Christ et de son œuvre salvatrice, soutient le prêtre épiscopalien Fleming Rutledge.

« L’Avent commence toujours dans l’obscurité. Mais il y a un “mais”, et nous le trouvons révélé dans l’histoire que racontent les Écritures », écrit-il. « C’est le message de l’Avent : dans un monde de profondes ténèbres et de détresse, de péché et de mal omniprésent, nous nous tournons vers la seule vraie lumière — Jésus-Christ, le Fils de Dieu. »

Certains chrétiens peuvent penser que le culte ne devrait être modelé que d’après les textes du Nouveau Testament et non selon son développement historique au cours des siècles, explique Timoteo Gener, le théologien philippin.

Mais la formation de l’année liturgique chrétienne — Avent compris — remonte à la manière dont l’Église primitive a intégré les pratiques culturelles de son époque dans sa vie cultuelle.

« Les pratiques et les fêtes de la synagogue juive ont été reprises et pratiquées par Jésus et ses disciples, et ces pratiques ont été remodelées par les disciples du Christ à la lumière de l’événement christique, ce qui a évolué plus tard vers une forme de culte chrétien historique », dit Timoteo Gener.

Lula Derœux, pasteure baptiste et animatrice biblique à la Ligue pour la lecture de la Bible en France, trouve qu’il y a du sens à célébrer l’Avent même si la Bible ne le mentionne pas explicitement : « Si la Bible ne nous dit pas comment et quand célébrer la naissance du Christ, elle nous encourage à nous en souvenir et à construire notre relation avec Dieu ».

« Notre besoin de célébrer, de préparer nos cœurs languissants et de louer le Seigneur dans l’attente transcende toutes les cultures et tous les âges ».

Cliché n° 3 : L’Avent ne concerne que la naissance de Jésus.

Comme l’Avent précède Noël, le 25 décembre, on suppose souvent qu’il s’agit simplement d’un prélude à la célébration du jour de la naissance du Christ.

Cependant, lorsque les chrétiens ont commencé à célébrer l’Avent, ils anticipaient le retour du Christ, et non sa naissance. La chose a évolué au Moyen Âge, lorsque l’Avent est devenu un moment pour commémorer et célébrer l’incarnation de Jésus. Cependant, l’approche « traditionnelle » de l’Avent a subsisté.

« La spiritualité de l’Avent n’est pas un moment pour méditer sur la naissance du Christ. Selon la tradition, nous ne devrions pas chanter de chants de Noël avant Noël lui-même, car l’Avent n’est pas un temps pour célébrer la naissance de Jésus dans la crèche, mais un temps pour attendre avec impatience la venue du Sauveur » écrivait Robert E. Webber dans Ancient-Future Time.

L’Avent était aussi, à l’origine, une période de jeûne et de réflexion sur soi », écrit Ted Olsen, éditeur exécutif chez CT.

Pour Daniel Vieira, l’Avent est une saison « pénitentielle » qui offre aux croyants un temps de discipline et de repentance intentionnelle.

« Une réflexion approfondie sur la tradition liturgique nous montre que l’Avent incarne une tension entre l’attente des peuples de l’ancienne alliance en vue de la rédemption et l’attente des peuples de la nouvelle alliance en vue de l’accomplissement qui se produira avec la seconde venue du Christ », explique-t-il.

Certains chants et lectures traditionnels de la période de l’Avent reflètent un désir ardent du retour du Christ, explique Gordon Margery.

« Je pense particulièrement à “Oh viens bientôt Emmanuel”. On le chante généralement comme une sorte de plaidoyer pour la naissance du Christ, en se mettant à la place des saints d’Israël qui attendaient sa venue. Mais j’ai l’impression que le chant fait écho à la prière finale de l’Apocalypse. »

« Viens, Seigneur Jésus ! » (Ap 22.20) L’attente eschatologique que l’Avent intègre est un élément de cette période qui ne doit pas être négligé.

« Les prophéties de l’Écriture concernant cet enfant promis ont souvent plusieurs niveaux de signification et des accomplissements multiples », écrit Kelli Trujillo, responsable de l’édition papier de CT dans l’introduction de l’édition 2022 du recueil de méditations de l’Avent de Christianity Today.

« Elles pointent fréquemment vers un accomplissement à l’époque du prophète, mais orientent également notre regard vers le Messie et sa première venue, et vers le second avènement que nous attendons encore. »

« Être dans l’Avent, c’est habiter le “déjà et pas encore” du Royaume de Dieu », dit Lula Derœux.

« Cela nous permet de nous souvenir des promesses du Seigneur et de la manière dont il prend soin de nous. La patience, la préparation qu’il a fallu pour donner un Sauveur à l’humanité est à couper le souffle, et être capable non seulement de se souvenir mais aussi de vivre quelque chose de cette période particulière est une bénédiction. »

« Nous pourrions lire tout l’Ancien Testament et y voir un Avent, l’aube d’un nouveau commencement. »

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Méditations de l’Avent 2022 proposées par Christianity Today

Toutes nos méditations de l’Avent rassemblées au même endroit.

Méditation de l’Avent 2022.

Méditation de l’Avent 2022.

Christianity Today November 22, 2022
Stephen Crotts

Produit par les éditeurs et contributeurs de Christianity Today, Il nous a été promis est un recueil de méditations de 4 semaines qui propose de vous accompagner individuellement, en petit groupe ou en famille durant l'Avent 2022.

Le Dieu fort

Le Prince de la paix

La Lumière du monde

Emmanuel

Épiphanie

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Books

Votre maison serait-elle un paradis pour débutants ?

Comment les difficultés des américains en quête d’une maison peuvent nous réorienter vers l’éternité…

Christianity Today November 19, 2022
Jon Krause

Je rafraîchis mes e-mails de manière compulsive, volant quelques instants entre les collations des enfants et les applications de crème solaire, ouvrant un soda pendant que je fais défiler ma boîte de réception. Quand le nom de mon agent immobilier apparaît, mon cœur fait un bond. Chaque courriel de sa part, ou plutôt de la part de la recherche automatique d’annonces de maisons qu’elle a mise en place pour nous sous son nom, suscite un florilège d’interrogations : est-ce de la brique ? De la pierre ? Y aura-t-il une buanderie, ou un vestiaire pour ranger les bottes, les manteaux, les laisses des chiens et les sacs à dos de la famille ?

Plus le temps passe, semble-t-il, et plus ma future « maison pour toujours » imaginaire est élaborée. Un grand arbre pour y suspendre un pneu comme balançoire ! Un potager ! Une baignoire !

Mais à chaque fois, la maison qui arrive dans ma boîte de réception me déçoit. Trop chère, laide ou nécessitant plus de réparations qu’il n’est envisageable financièrement — ou le plus souvent, les trois. Lorsque quelque chose correspondant aux limites de notre budget (qui s’élargit à contrecœur) attire enfin notre attention, nous appelons immédiatement notre agent, pour découvrir que la propriété est déjà sous contrat. En toute discrétion. Tout en liquide.

Le monde de l’immobilier appelle cela un marché favorable aux vendeurs. J’appelle ça la mort lente de mes rêves d’une « maison pour toujours ».

Nous avons vendu notre première maison, nichée dans un quartier pittoresque et agréable juste à l’extérieur de Washington, DC, à l’été 2020. L’offre que nous avons acceptée pour le petit pavillon où étaient nés nos deux bébés était bien supérieure au prix demandé (toutes conditions levées). Nous touchions les nuages.

Armés de la confiance que procure un bon investissement et d’un bon paquet de cash pour effectuer notre prochain premier versement, nous avons troqué un café accessible à pied et d’innombrables possibilités de plats à emporter contre une maison de location à la campagne, avec de grands espaces verts et un marché de producteurs au bout de la rue. Nous voulions y rester juste assez longtemps pour trouver une belle parcelle de terrain et construire une petite maison pour notre famille. C’était simple comme bonjour.

Mais nous n’étions pas les seuls à nous lancer dans l’exode urbain. Les villes américaines perdaient constamment des habitants avant même la pandémie, et, selon les données du service postal, 15,9 millions d’Américains ont déposé une demande de changement d’adresse entre février et juillet 2020. Beaucoup d’entre eux ont été poussés — ou libérés — par les fermetures liées au COVID-19, cherchant à avoir plus d’espace pour respirer alors que les maisons se transformaient en lieux où se mêlaient sous un même toit le travail, l’école, les repas et le repos.

Le logement est un sujet dominant des conversations de table depuis des années. Aux États-Unis, près d’un Américain sur cinq a changé de domicile ou connaît quelqu’un qui l’a fait au cours des premiers mois de la pandémie, selon le Pew Research Center. Sept personnes sur dix ont travaillé à domicile à un moment ou à un autre de la pandémie, ce qui a accru la pression sur un marché du logement qui s’était déjà tendu depuis des années.

Si les prix médians des logements américains ont crû de manière relativement régulière au cours de la dernière décennie, ils sont montés en flèche pendant la pandémie, augmentant de 30 % entre début 2020 et début 2022. Cela rappelle un peu les récits de la crise de la tulipe dans les années 1630, avec des offres et des surenchères folles sur des maisons situées dans des endroits recherchés, ou n’importe quel endroit d’ailleurs, dans une frénésie d’achat immobilier.

Il semble que nous ayons collectivement pris conscience du fait que, oui, nos maisons ont vraiment de l’importance, surtout lorsque nous sommes obligés d’y vivre.

Sauf qu’il est plus difficile que jamais de trouver une maison.

Internet offre peu de réconfort, avec des formules comme « Le pire moment pour acheter une maison, » « Le pire moment pour contracter un prêt hypothécaire » ou encore « Pourquoi la route devient encore plus cahoteuse pour les primo-accédants à la propriété. »

Oui, la hausse des taux d’intérêt et une petite hausse des disponibilités ont un peu apaisé le marché de l’immobilier au printemps dernier. Mais les prix continuent de grimper et l’acheteur américain moyen est toujours confronté à un scénario cauchemardesque, car les prêts deviennent plus chers et le nombre de logements disponibles reste extrêmement limité.

Comment en est-on arrivé là ?

L’économie du logement est complexe, et nos visions pandémiques de nos espaces de vie n’ont certainement pas été le seul facteur de rupture du marché immobilier américain. Les prix du carburant et les ralentissements dans les scieries, les pénuries de main-d’œuvre dans le secteur de la construction et l’inégalité croissante des revenus ont tous joué un rôle.

Mais il se pourrait qu’un facteur sous-jacent plus important, bien antérieur à la pandémie, contribue à nos difficultés dans le domaine de l’immobilier. Née de décennies d’expansion des banlieues et renforcée aujourd’hui par les émissions de décoration, Pinterest et les publicités pour le mobilier, la problématique est extrêmement difficile à admettre : se pourrait-il que le problème, ce soit en réalité nous ?

Les attentes de beaucoup de gens quant à la nature, à l’apparence et au coût d’une maison sont enracinées dans des décennies de croissance apparemment illimitée de l’appétit de l’acheteur moyen : plus de surface et de pelouse pour les banlieusards, plus d’équipements culturels et de cachet pour les citadins.

La préférence pour des maisons plus belles, plus grandes et mieux situées a alimenté un type particulier de croissance insoutenable sur le marché immobilier américain qui, ironiquement, nous a laissés sur notre faim — ou pire, en rade.

La crise immobilière actuelle aux États-Unis n’est, en un sens, qu’une preuve supplémentaire du type de surconsommation que les chercheurs John de Graaf, David Wann et Thomas H. Naylor décrivaient il y a 20 ans dans une critique devenue classique : Affluenza: The All-Consuming Epidemic. Cette affluenza, expliquent-ils, est causée par « l’idée que chaque génération sera matériellement plus riche que la précédente et que, d’une manière ou d’une autre, chacun d’entre nous peut poursuivre cette finalité unique sans porter atteinte aux innombrables autres choses qui nous sont chères ».

Mais pour les chrétiens, l’effondrement du marché du logement n’est pas seulement une occasion de pratiquer la vertu du contentement — bien que ce soit certainement le cas. La maison de rêve étant hors de portée de tant de personnes, il est peut-être temps pour nous, disciples de l’homme qui n’avait pas d’endroit où poser sa tête (Mt 8.20) et armés de toutes les promesses de l’éternité, de réimaginer ce à quoi sert vraiment une maison.

Les Américains ont, selon de nombreuses mesures, les plus grandes maisons du monde. Et bien que nous aimions nous en prendre à ces énormes bâtisses que nous avons renommées « McMansions », presque toutes les nouvelles maisons sont plus grandes qu’avant.

Les données du Bureau du recensement montrent qu’entre 1978 et 2018, la taille médiane d’une nouvelle maison aux États-Unis a augmenté de plus de 72 mètres carrés, soit 47 %. Il suffit de traverser presque tous les quartiers construits peu après la Seconde Guerre mondiale, puis de se rendre dans la plupart des banlieues résidentielles construites au 21e siècle, pour se rendre compte de la différence.

Compte tenu des progrès technologiques réalisés dans le domaine des matériaux de construction et de la mondialisation des chaînes d’approvisionnement, on pourrait supposer que les maisons sont moins chères à construire qu’il y a un demi-siècle, et que nous en construisons donc de plus grandes. En réalité, en ajustant en fonction de l’inflation, le prix au mètre carré d’une nouvelle maison unifamiliale aux États-Unis est resté relativement stable entre 1978 et 2020, selon diverses analyses du recensement et d’autres données du gouvernement.

Oui, il existe des exceptions régionales, des marchés immobiliers surchauffés dans le nord-est ou sur la côte ouest, où les logements sont bel et bien devenus moins abordables. Mais dans l’ensemble, ce n’est pas tant le prix de l’immobilier qui a changé au cours des dernières décennies que ce que nous essayons de nous offrir.

Explorant le « pourquoi » de la taille des foyers américains, Joe Pinsker, journaliste pour The Atlantic en résume les causes : « Au cours du 20e siècle, les politiques gouvernementales, l’invention de matériaux de construction moins chers et produits en série, le marketing des constructeurs de maisons et un changement dans la façon dont les gens considéraient leur maison — non seulement comme un foyer, mais aussi comme un patrimoine financier — ont encouragé des maisons toujours plus grandes. »

Il n’y a rien de mal en soi à posséder une grande maison. Mais les grandes maisons se sont développées au détriment des maisons abordables. Malgré le fait que les salaires n’ont pas suivi les coûts du logement, les constructeurs ont répondu au désir de maisons plus grandes, rendant encore plus difficile l’accès à une première maison plus petite et à prix raisonnable. Cette situation est particulièrement préjudiciable aux personnes à faible revenu et autres groupes marginalisés qui, en plus de lutter contre les pratiques de prêts prédateurs et leur exclusion historique de l’accès aux prêts hypothécaires, doivent maintenant faire face à la hausse des loyers et à un marché peu tolérant à l’égard des petits acomptes ou des historiques de crédit moins que parfaits.

« Ce que [les constructeurs] construisent est une réponse au marché », explique Matt Bowe, propriétaire d’Alair Homes Hunt Country. Alair est une entreprise de conception et construction située dans le comté de Loudoun, dans l’État de Virginie, une banlieue de Washington et l’un des comtés les plus en expansion du pays.

« S’ils sentaient que, en masse, le marché valorise la qualité et la durabilité plutôt que la taille et le tape-à-l’œil, alors c’est ce qu’ils construiraient. »

Selon Bowe, de nombreux constructeurs privilégient ainsi les installations et les matériaux de construction bon marché qui ne sont pas tant faits pour durer que pour impressionner à un coût minimal. « Culturellement, nous sommes conditionnés à penser que nous méritons plus. »

Bowe ne pourrait pas être plus proche de la vérité.

Clément Bellet, économiste à l’Université Érasme de Rotterdam, aux Pays-Bas, constatait dans une étude de 2019 que la satisfaction des propriétaires de banlieues américaines chutait lorsque ceux-ci comparaient leur maison à des maisons plus grandes et plus récentes situées à proximité. Il écrit : « Les propriétaires exposés à la construction de grandes maisons dans leur banlieue évaluent leur maison à un prix inférieur, sont plus susceptibles de chercher à acquérir une plus grande maison et de s’endetter davantage. »

Mais ce n’est pas seulement un problème de banlieues aisées. Le rêve américain de grandes maisons dans des régions à faible densité est très répandu et profondément ancré. À l’Université de Californie, à Merced, une étude a constaté que, lorsqu’on leur demandait de choisir entre un lotissement de maisons unifamiliales et un lotissement à plus forte densité de population, la plupart des participants préféraient l’option à faible densité, indépendamment de leur origine ethnique, de leur niveau d’éducation ou de leurs opinions politiques.

Cette préférence se manifeste lors des réunions des conseils municipaux dans tout le pays. Même lorsque les villes mettent en place des plans pour le développement de zones à densité légèrement plus élevée, les habitants réagissent souvent et font annuler ces plans (pour diverses raisons, parfois bien intentionnées).

En somme, à une époque où la pénurie de logements n’est plus seulement le problème des grandes villes, nos aspirations en matière de logement ne sont pas du tout en phase avec les réalités des communautés dans lesquelles nous vivons.

Supposons que nous puissions nous libérer de cette mentalité d’accumulation et nous contenter de moins de mètres carrés. Cela ne résoudrait certainement pas la crise du logement, mais pourrait nous aider à nous épanouir dans les logements dont nous devons nous contenter si nous ne parvenons jamais à acquérir la maison de nos rêves.

Mais les idoles peuvent trouver place dans n’importe quel type de maison. Considérez le boom pandémique qui a remodelé l’industrie américaine de la piscine avec une explosion de la demande. Privés d’un luxe tel que les voyages, nous avons investi nos économies dans des habitations luxueuses ; les marchands de piscines sont encore en train de rattraper les retards sur les commandes des dernières années.

Je me suis souvent demandé (tout en m’arrachant les cheveux en cliquant sur 87 photos d’une maison que je n’arrive pas à croire que j’envisage d’acheter) si, lorsque nous attachons tant d’importance à notre foyer terrestre, nous ne passons pas à côté de l’essentiel.

Carly Thornock est coach de maison dans l’Utah. Elle aide les personnes — principalement les mères — à apprendre à percevoir leur maison de manière à favoriser des relations familiales positives.

Elle a étudié le mariage et la famille à l’Université Brigham Young, et a effectué l’essentiel de ses recherches sur les maisons. Dans une étude de 2019 publiée dans le Journal of Environmental Psychology, Thornock et ses coauteurs explorent la corrélation entre la superficie en mètres carrés et la qualité des interactions entre les membres de la famille — des paramètres comme la gentillesse, la chaleur et la prise de décision efficace.

« Je [ne croyais pas] que si vous avez une plus grande maison, vous serez une famille plus heureuse », dit-elle. « J’ai vu suffisamment de gens dans le monde entier pour savoir qu’il y a beaucoup de familles très heureuses et fonctionnelles qui logent dans des espaces modestes et limités. Alors [quel était] le critère important ? »

En fin de compte, l’étude a révélé que la taille d’une maison n’était qu’un facteur parmi d’autres du bon fonctionnement d’une famille. Il est tout aussi important de voir ce que les gens pensent ou ressentent à propos de leur logement. Les chose s’expliquaient « entièrement par la façon dont les gens filtrent leur maison à travers leur cerveau et leur expérience émotionnelle », dit Thornock.

Il y a donc des choses que nous pouvons faire pour changer la perception de notre maison, quelle que soit sa taille. Par exemple, selon Thornock, il est intéressant de considérer les histoires qu’une maison raconte sur les personnes qui y vivent et ce qu’elles sont. Ces histoires peuvent être façonnées par quelque chose d’aussi simple qu’une collection de photographies, sans qu’une piscine ou une superficie supplémentaire soit nécessaire.

« Avec les photos de famille, beaucoup de gens réagissent avec une histoire d’appartenance. “C’est moi. Voici ma mère, mon père et mes frères et sœurs. Et nous faisons partie d’un groupe” ». « Ce que nous introduisons dans notre espace et renforçons dans notre psyché fait partie de ce que nous créons pour nous-mêmes. »

Bien que nous sachions, en tant que chrétiens, que nous ne serons jamais vraiment chez nous ici-bas, le désir de créer un espace durable, beau et propice à la vie dans lequel passer nos journées ne doit en aucun cas être sacrifié sous le couvert d’une piété ascétique. Construire des maisons ici-bas est pieux et bon, une occupation spécifiquement bénie dans le livre de Jérémie lorsque Dieu ordonne à son peuple de « construire des maisons et de s’établir » et de « rechercher la paix et la prospérité de la ville dans laquelle je vous ai transportés » (29.5-7).

Comme l’argent, les maisons sont moralement neutres en elles-mêmes — c’est ce que nous en faisons qui compte. De nombreux théologiens et penseurs chrétiens ont médité sur cette aspiration inhérente à l’être humain de relier l’éternité au présent par le biais des lieux que nous habitons.

Wendell Berry écrit dans Hannah Coulter : « C’est par l’endroit qui est le nôtre, l’amour que nous lui portons et la façon dont nous le gardons, que ce monde est relié au ciel. » De même, le pasteur presbytérien Charles Henry Parkhurst, de la fin du 19e siècle déclare : « Le foyer interprète le ciel. Le foyer est un paradis pour débutants. »

À cette idée, cependant, C. S. Lewis ajoute un rappel opportun dans Le problème de la souffrance : « Notre Père nous restaure pendant le voyage au moyen de quelques agréables auberges, mais ne nous encourage pas à les confondre avec la maison. »

Alors, comment le croyant est-il appelé à façonner ces « agréables auberges » ? Comment concilier notre désir légitime de rentrer chez nous avec les réalités des difficultés financières, des problèmes immobiliers et des appétits domestiques excessifs que nous connaissons ici-bas ?

Une fois de plus, nous pourrions avoir à nous recentrer sur ce à quoi sert vraiment la maison.

Les meilleures maisons dans lesquelles j’ai mis les pieds — celles qui ressemblent le plus à un foyer — ne sont presque jamais les plus grandes, les plus belles, les plus propres ou les mieux organisées. Ce sont celles qui semblent vous envelopper dès que vous en franchissez le seuil, avec des signes de vie réelle : de la vaisselle dans l’évier et des jouets éparpillés sur le sol, une pile de livres intéressants à lire sur une table d’appoint, des meubles disposés de manière à favoriser la conversation, du thé sur la cuisinière, des tasses avec une histoire, et un genre de « laissez-moi regarder ce que nous avons dans le réfrigérateur » sans chichis ni austérité. Elles sont imprégnées d’un véritable état d’esprit du type de Galates 6.10, faire du bien à tous, et cela se voit.

« Les maisons sont là pour notre croissance et nos relations », dit Thornock. « Elles contribuent à notre lien avec Dieu, avec nous-mêmes, avec nos conjoints, avec nos amis, et avec notre voisinage et notre famille élargie. »

Ces derniers temps, des évangéliques américains ont mené campagne pour réaffirmer et se réapproprier les valeurs traditionnelles d’hospitalité. De nombreuses publications récentes ont été consacrées à l’utilisation de nos maisons dans le ministère, de The Gospel Comes with a House Key, l’hymne de Rosaria Butterfield à « l’hospitalité radicalement ordinaire », sans napperons crochetés, aux théories de la table turquoise, pour vivre l’hospitalité même sans maison.

Tous s’accordent sur l’importance de pouvoir se sentir à l’aise avec le désordre et d’embrasser le caractère sacré de la vie domestique ordinaire. « L’amour se manifeste dans les repas que nous préparons, les chambres que nous aménageons, les espaces dans lesquels nous vivons, respirons et menons notre existence », écrit Sarah Clarkson dans The Lifegiving Home.

Rien de tout cela ne nécessite des meubles onéreux ou une superficie importante. Une atmosphère d’hospitalité peut être créée n’importe où, d’une humble cuisine malmenée par le désordre des tout-petits à un studio dans une tour urbaine.

L’idée de la maison comme outil de rassemblement a influencé Bowe, le constructeur de Virginie. Son désir de créer un sentiment d’appartenance l’a conduit à collaborer avec Habitat for Humanity ainsi qu’avec Tree of Life, un ministère local qui fournit un logement et d’autres produits de première nécessité aux familles à faible revenu. Fils d’immigrants irlandais qui vivent dans la même petite ville du Cape Cod depuis 60 ans, Bowe explique que son point de vue sur la conception des maisons a été façonné par sa propre éducation.

« J’aime concevoir des maisons qui encouragent et invitent à l’interaction, à la coopération, à l’entente et aux interactions humaines, par opposition à ces grands espaces qui encouragent les gens à trouver chacun leur propre coin et à faire leurs propres trucs », explique-t-il. « Si je construis une maison personnalisée pour quelqu’un, je le fais bien sûr pour lui, mais je pense aussi à la façon dont cette maison devrait servir les familles [au-delà]. J’ai envie d’espérer que, dans 150 ans, cela vaudra la peine de la restaurer. »

Une bénédiction irlandaise dit : « Que votre maison soit toujours trop petite pour contenir tous vos amis. » Lorsque nos tendances perfectionnistes à la Pinterest se manifestent, nous ferions bien de nous en souvenir.

La plupart des discussions sur l’hospitalité ne tiennent cependant pas compte du fait qu’une maison est plus qu’un simple outil missionnaire. Les foyers chrétiens offrent également une protection à ceux qui y résident — physiquement, émotionnellement et spirituellement.

Cela vaut pour tous les types de plus en plus diversifiés de familles : grands-parents s’occupant de leurs petits-enfants, parents d’accueil ou adoptifs, plusieurs générations vivant sous le même toit, et couples dont le désir d’avoir un enfant n’est pas satisfait.

L’écrivain Andy Crouch estime qu’un foyer n’est pas nécessairement constitué d’une famille, mais peut simplement être une communauté de personnes sans lien de parenté « qui peuvent s’abriter sous un même toit, mais aussi, et plus fondamentalement, trouver un abri dans les soins et la sollicitude réciproques ».

Il est cependant impératif de reconnaître que, pour beaucoup, la maison est tragiquement bien en deçà de cet idéal — un lieu de négligence, d’abus et de solitude. Mais cela peut être reconnu tout en réaffirmant que le foyer, dans sa meilleure forme, est un havre de paix, qui revigore et équipe ses habitants pour qu’ils puissent servir les autres et répondre à leur vocation dans un monde marqué par l’agitation et la détresse.

Dans ses Lettres et notes de captivité (« Résistance et soumission »), Dietrich Bonhoeffer écrit : « [Un foyer] est un royaume à part entière au milieu du monde, une forteresse au milieu des tempêtes et des tensions de la vie, un refuge, un sanctuaire même ».

Bowe, qui a fait sa raison d’être de la construction de sanctuaires pour d’autres individus et familles, est d’accord. « Je pense toujours à [la maison] comme à ces quatre murs qui peuvent protéger une famille. Si vous considérez le foyer comme le vecteur de toutes les choses qui ont un impact réel — et il peut évidemment s’agir de choses éternelles pour les familles croyantes — c’est un endroit très important. Aussi difficile que puisse être ma journée la plus dure, je sais que lorsque je rentre chez moi, je peux faire abstraction de tout ça. »

Ésaïe 32.18 nous rappelle l’aspiration de Dieu à ce que nous trouvions notre demeure éternelle avec lui : « mon peuple vivra dans des demeures paisibles, dans des maisons sûres, dans des lieux de repos sans trouble ».

L’idéal biblique du foyer en tant que sanctuaire devrait motiver les chrétiens à œuvrer, dans la mesure de leurs possibilités, pour l’accès de chacun à un lieu d’habitation. Cela pourrait prendre la forme de soutien à la construction de maisons pour d’autres ou, comme dans le cas de Bowe, d’un partenariat avec des ministères qui luttent contre l’insécurité du logement. Pour certains, il peut même s’agir de plaider pour des options de logement abordable dans nos villes ou de se porter volontaire pour servir et rechercher des solutions pour la population croissante de sans-abri.

En attendant le ciel, nous devons — bien qu’imparfaitement — façonner nos lieux de vie et nos maisons terrestres pour qu’elles fonctionnent autant que possible comme ce qui nous attend. Dans son livre sur l’éternité, Surpris par l’espérance, N. T. Wright affirme que « les personnes qui croient en la résurrection, en un Dieu qui crée un monde nouveau dans lequel tout sera enfin restauré, sont continuellement motivées pour travailler à ce monde nouveau dans le présent ».

Pour les disciples du Christ, au cœur de cette nouvelle création se trouve notre propre recréation. Et c’est peut-être là l’utilité primordiale de nos maisons : elles constituent le treillis sur lequel nous grandissons en sainteté, le cadre de notre sanctification. En tant que lieu principal où se déroule la vie d’un croyant, où les liens se créent, où un sentiment d’appartenance et une identité se développent, et où nous pouvons, dans des conditions propices, grandir pour devenir ce que nous avons été créés pour être, nos foyers offrent une occasion idéale d’organiser notre vie quotidienne autour de vérités éternelles.

La maison n’existe pas seulement en vue de quelque chose ; elle existe fondamentalement en vue de Dieu. Par conséquent, la façon dont nous construisons et aménageons notre maison a une grande importance. Une maison bien conçue, qu’elle soit grande ou modeste, est un lieu de culte à part entière.

Dans The Hidden Art of Homemaking, Edith Schaeffer écrit : « Pour le chrétien qui est consciemment en communication avec le Créateur, il est certain que sa maison devrait refléter quelque chose de l’art, de la beauté et de l’ordre de Celui qu’il représente, et à l’image duquel il a été créé ! »

Pourtant, dans mon contexte américain, le foyer typique d’un chrétien ne semble pas très différent de n’importe quel autre foyer. Aucune tendance en matière de construction ou de conception de maison ne semble différencier de manière significative la maison d’un adepte du Christ de la maison voisine dans le quartier, à l’exception peut-être d’un panneau en bois affichant un verset.

Devrait-il y avoir une différence ? Comme le souligne Schaeffer, la matérialité de nos maisons, de nos lieux d’habitation, ne devrait-elle pas offrir un reflet de celui autour duquel elles sont censées être centrées ?

L’un des meilleurs exemples de ce qui peut arriver lorsque les chrétiens réfléchissent en profondeur à la manière dont le but et la structure du foyer peuvent nous attirer vers Dieu nous vient peut-être de la fin du 18e siècle.

En 1774, une femme connue par ses adeptes sous le nom de Mère Ann Lee conduisit huit membres d’une petite secte quaker à fuir les persécutions dont ils étaient victimes dans leur Manchester natal, en Angleterre, pour se rendre en Amérique en passant par le port de New York. Ils s’installèrent près d’Albany et entreprirent de construire une communauté utopique, un véritable paradis sur terre, où les membres mettaient en commun leurs ressources et vivaient dans des maisons communes. Ils se désignaient comme la Société unie des croyants en la seconde apparition du Christ. Nous les connaissons sous le nom de shakers.

Leur culte était excentrique — dansant pour combattre la frustration de leur péché — et leur théologie était peu orthodoxe, notamment dans leur conviction que la sexualité était la racine de toute dépravation et établissant pour cela des exigences strictes de chasteté. Mais le mouvement shaker se développa lentement, et de nouvelles communautés apparurent dans tout le Nord-Est et s'étendirent au loin jusqu’au Kentucky et à l’Indiana. Il atteignit son apogée avec environ 5 000 membres en 1840.

Si l’on se souvient surtout aujourd’hui des shakers pour leur mobilier et leur artisanat épurés et minimalistes, c’est parce qu’ils ont consacré une énergie considérable à l’élaboration d’une philosophie de conception centrée sur la place à donner à Dieu et à leur propre croissance spirituelle.

Dans la conception des shakers, la fonctionnalité, la propreté et l’ordre étaient des éléments clés pour éliminer les distractions susceptibles de détourner l’attention de Dieu. « Rentrez chez vous, et prenez bien soin de ce que vous avez », ordonne Lee dans ses Testimonies, un recueil de ses dictons collectés après sa mort (et donc questionnés par certains historiens). « Prévoyez des emplacements pour vos affaires, afin de savoir où les trouver, à tout moment, de jour comme de nuit ; apprenez à être soignés et propres, prudents et économes, et veillez à ne rien perdre. »

En pratique, cela a pour conséquence que les shakers étaient passés maîtres dans l’utilisation d’armoires et de boîtes pour le stockage. Leur marque de fabrique, les patères murales, était premièrement pratique — un moyen de suspendre des chaises et d’autres objets afin de libérer l’espace au sol pour divers usages — puis esthétique.

Les décorations — poignées de tiroir tape-à-l’œil ou ornements en bois — symbolisaient la convoitise et le matérialisme de la révolution industrielle de l’époque et étaient donc à éviter. Au contraire, les shakers croyaient que la beauté provenant de Dieu se manifestait par l’harmonie, les proportions, la qualité, les matériaux d’origine locale, les espaces ouverts et une lumière naturelle abondante. (« La lumière, toute la lumière, parce que c’est ce que Dieu est », déclarait un shaker au Commonweal Magazine en 2019).

Tout ce qui pouvait détourner de Dieu était supprimé, et il en a résulté un style qui est resté presque universellement apprécié et admiré jusqu’à aujourd’hui, même si d’autres tendances en matière d’aménagement intérieur sont apparues et ont disparu (adieu les cuisines couleur avocat…).

L’expérience des shakers a finalement échoué — seuls quelques membres de la secte subsistent à Sabbathday Lake, dans le Maine. Mais dans leur tentative de construire une forme de paradis, les Shakers ont créé un modèle d’aménagement intérieur qui a non seulement perduré pendant des siècles, mais a également transcendé les frontières religieuses et géographiques. Lorsque les communautés shaker se sont réduites au 20e siècle, leurs meubles ont été achetés et expédiés dans tous les États-Unis et dans le monde entier, et ont fortement influencé les designers modernes danois et les goûts américains du milieu du siècle. Ils ont été exposés au Metropolitan Museum of Art de New York et dans des expositions d’art du monde entier.

La simplicité épurée du style shaker a fini par céder la place à une forme de maximalisme lorsque le pendule du design a basculé dans l’autre sens. Mais cette simplicité connaît aujourd’hui un regain d’intérêt et, aux États-Unis, on la retrouve facilement sur les vitrines en ligne de géants de la décoration intérieure et elle influence toutes sortes de boutiques de design.

Il n’est pas surprenant que le style shaker soit à nouveau en vogue à l’heure actuelle. Son minimalisme caractéristique peut apparaître comme un antidote à tant de fléaux de la vie contemporaine, offrant la libération d’un excès de possessions à gérer, à nettoyer et à réparer et la liberté financière qui découle du fait de posséder et entretenir moins de choses (ou de réparer moins d’articles mal faits).

Là où nous sommes adeptes d’un scrolling sans fin ni sens, les shakers avaient pour adage « les mains au travail, le cœur à Dieu ». Là où nous connaissons une épidémie de solitude, ils vivaient une vie communautaire radicale soutenue par leurs maisons et les objets qu’elles contenaient. Là où nous pouvons en un instant passer une commande en ligne pour un produit fabriqué à l’autre bout du monde, les shakers disposaient d’un savoir-faire local et utile qui durait des générations. Là où nous avons des piles invraisemblables de désordre, ils avaient des espaces et des objets marqués par la fonctionnalité, l’ordre et la beauté épurée.

Ce que les shakers recherchaient, selon leurs propres mots, c’était « la véritable simplicité évangélique ».

À quoi pourraient ressembler les foyers chrétiens d’aujourd’hui si nous nous lancions à nouveau dans une quête collective profonde pour réimaginer comment les espaces de vie du 21e siècle pourraient refléter l’Évangile et soutenir notre croissance dans la sainteté ? Pour beaucoup de ceux qui font face à un marché immobilier insensé et onéreux, la meilleure maison que nous aurons probablement pendant des années est celle dans laquelle nous sommes déjà. Alors, que pourrait signifier « rechercher la prospérité » de la maison dans laquelle Dieu nous a placés ?

Les réponses sont probablement aussi variées que les lieux que nous considérons comme notre chez nous. Cela sera différent pour la famille qui possède un palace en banlieue de Houston et pour le célibataire enfermé dans un minuscule studio de Manhattan. Et la leçon des shakers n’est pas nécessairement que les chrétiens doivent se lancer dans une purge à la Marie Kondo, en débarrassant nos maisons de tout bien qui n’est pas taillé à la main dans un arbre de la forêt voisine.

Il s’agit plutôt de considérer dans quelle mesure — si tant est qu’il y en ait une — nos maisons sont des reflets actuels d’une réalité éternelle et de celui qui fonde cette réalité. Dieu a mis l’éternité dans chaque cœur humain (Ec 3.11), et les shakers, peut-être avec plus de succès que d’autres, ont capturé quelque chose de ce désir éternel de notre Créateur dans la fabrication méticuleuse de chaque chaise à dossier à barreau, armoire, crochet, balai et panier, chacun d’entre eux étant façonné avec le ciel en perspective.

L’exemple des shakers suggère qu’il est également possible pour nous, en tant que chrétiens modernes, de suivre une voie intègre, tournée vers l’éternité, dans la manière dont nous considérons ce qui fait notre foyer. À une époque où il est particulièrement difficile pour beaucoup d’accumuler des trésors immobiliers sur terre, nous avons une opportunité toute particulière de convertir nos biens immobiliers en trésors célestes.

Peut-être qu’un jour les historiens se pencheront sur nous et remarqueront comment nos maisons ont pointé de manière nouvelle vers des vérités universelles, comme des spécialistes l’ont dit du design shaker. Pour citer encore Schaeffer, « La conscience du fait que nous avons été créés à l’image du Créateur de la beauté devait avoir des conséquences pratiques ».

Au moment où j’écris ces lignes, notre famille est toujours sans demeure permanente. Nous payons notre loyer, cherchons, prions et espérons. J’ai envie de placer nos chères photos de famille dans un endroit où elles resteront assez longtemps pour accumuler quelques millimètres de poussière, de repeindre une pièce, de poser quelques fondements durables au « paradis pour débutants » de notre famille.

Et alors que nous regardons le monde trembler sous le poids de la guerre, de la discorde politique et de l’injustice, je dois me rappeler que le foyer ne se trouve pas dans la maison parfaite, mais dans les personnes qui s’y trouvent, le reflet de l’éternité qu’elle offre, l’abri qu’elle procure, la croissance et les liens auxquels elle contribue. Quel que soit le lieu, quelle que soit sa taille, quelles que soient les personnes qui y habitent, ces choses restent.

Cela ne m’empêchera cependant pas de continuer à chercher un arbre pour suspendre une balançoire, des patères shaker pour accrocher les manteaux d’hiver de mes enfants et une bonne vieille baignoire pour soulager les douleurs de ce long et joyeux voyage vers notre véritable « « maison pour toujours ».

Julie Kilcur est une écrivaine basée en Virginie.

Books

La trisomie de mon fils m’a montré ce qu’est l’Imago Dei

Les choses sont assez différentes de ce que je pensais jusque-là.

Christianity Today November 19, 2022
JS Cook / Getty Iamges

Pendant la majeure partie de ma vie de théologien, mes idées sur ce que signifie porter l'image de Dieu étaient assez conventionnelles – des héritages simplistes de théologies systématiques ou de livres. Nous pouvons aimer parce que Dieu est amour. Nous avons la capacité de raisonner ; Dieu est celui en qui on ne trouve aucune irrationalité. Notre statut de personne a pour origine le fait que Dieu est une personne. Nous exerçons la volonté ; Dieu est volitif. Nous sommes créatifs ; notre Dieu est le premier Créateur. Nous sommes des créatures du langage ; Dieu est Logos, le Dieu qui parle.

Nos doctrines les plus fondamentales sont souvent celles sur lesquelles nous construisons de la manière la plus approximative. Mais les bases étaient là. Le fait que nous soyons créés à l'image de Dieu est le principe doctrinal au moyen duquel les chrétiens comprennent ce que signifie être humain. S'appuyant sur l'affirmation de Genèse 1.27 selon laquelle « Dieu créa l’être humain à son image, à l'image de Dieu il le créa », elle-même soutenue par le témoignage du Nouveau Testament (voir 1 Co 11.7 ; Ep 4.24 ; Jc 3.9), les disciples du Christ affirment que chaque personne porte ce que l’on appelle l'imago Dei.

Puis j'ai rencontré mon fils Auguste, qui est né avec le syndrome de Down. Gus a ébranlé les bases de ma théologie.

Examiner ou se laisser toucher ?

Jusque-là, dans mon esprit, l'intelligence, la rationalité et le langage pouvaient être mesurés par rapport à une norme de compétence. Les personnes les plus aptes à démontrer ces caractéristiques portaient le mieux l'image de Dieu.

Mais Gus, avec sa langue proéminente, son corps un peu instable et ses tentatives difficiles de parler, posait de nouvelles questions. Qu'en est-il de ceux qui ne pourront jamais raisonner ou parler à un niveau exemplaire ? Comment un individu affecté par le syndrome de Down – comment mon garçon – porterait-il l'imago Dei ? Examiner l'image de Dieu uniquement à travers les yeux froids de la doctrine m'avait laissé avec une sorte d'astigmatisme. La vie m’offrait maintenant le correctif de l'expérience.

Dans son texte intitulé « Meditation in a Tool Shed » (« Méditation dans une cabane à outils »), C. S. Lewis tire d'un événement banal une leçon profonde qui m’a aidé à trouver le langage adéquat pour expliquer ma nouvelle perspective. Lewis remarque, alors qu'il se trouve dans un cabanon, un rayon de lumière qui brille à travers la porte. Il contemple d’abord le faisceau qui se détache en contraste frappant avec l'obscurité. Puis il se déplace de façon à ce que la lumière frappe directement dans ses yeux. En suivant le faisceau, il voit alors la verdure juste à l'extérieur et l'origine même du faisceau, le soleil. « Regarder dans la lumière du faisceau et regarder le faisceau sont des expériences très différentes, note Lewis.

Cette expérience ordinaire l’amène à réfléchir sur les façons dont nous essayons de comprendre un sujet. Il fait remarquer que nos cultures partent du principe que la façon de comprendre quelque chose est de l'observer. Nous élaborons des théories. Nous analysons. Nous objectivons. Si nous voulons comprendre l'amour, nous ne nous adressons pas aux amoureux, mais aux psychologues pour qui l'amour est le sujet d'un article de revue à comité de lecture. Si nous voulons comprendre la religion, nous ignorons l'expérience de la personne religieuse au profit de l'opinion d'un anthropologue.

Pourtant, si la connaissance que nous recueillons en observant une chose est précieuse, ce n'est pas le type de connaissance le plus fidèle à nos expériences. Sans l'expérience d'une chose, notre compréhension de celle-ci reste incomplète. Nous comprenons au mieux l'amour lorsque nous le vivons. Nous connaissons les expériences religieuses parce que nous les faisons. Cette connaissance expérientielle s'apparente au fait de se laisser éclairer par la lumière plutôt que de se contenter d’examiner le faisceau.

Ce que j'ai vu dans mon expérience avec Gus est quelque chose que je n'aurais jamais vu en me limitant à l’examiner. En le regardant, en l'analysant, je pouvais facilement glisser vers un exercice de relevé de mes marqueurs quantifiables de l'imago Dei. Son retard de développement cognitif et ses difficultés d’expression perturbaient mon appréciation limitée de ce à quoi l'image divine devrait ressembler. Mais en me laissant toucher par la lumière de mon expérience avec Gus, j'ai vu autre chose. J'ai vu l'innocence.

Ce qu'est et n'est pas l’innocence

Bibliquement, l'innocence de Dieu est attestée par son absence de péché, sa sainteté, son absence totale de connaissance expérimentale du mal (Lv 11.44-47 ; Es 6.1-13 ; 1 P 2.22 ; Jc 1.13). Nous pourrions aller jusqu'à dire que Dieu est totalement incompétent en matière de péché.

Notre existence humaine ne peut jamais pleinement correspondre à cela. Dans notre expérience, l'innocence signifie plutôt l'absence de ruse. C'est une simplicité qui vient d'un manque de connaissance ou de compréhension, résultant en une naïveté inoffensive qui exclut toute forme de fourberie. Dans le cas des personnes atteintes du syndrome de Down, l'innocence résulte de l’absence de compétence honteuse. Ces personnes sont inexpérimentées dans cette malveillance et cette immoralité que le reste d'entre nous peine tant à dépasser.

Je ne dis pas que les personnes atteintes du syndrome de Down ne sont pas déchues. Je crois que chaque fils d'Adam et chaque fille d'Eve, quel que soit son nombre de chromosomes, est né dans le péché. Une condition génétique ne change pas un état spirituel. Mais le péché se manifeste différemment dans la vie des personnes atteintes de trisomie 21.

Plus je me laissais toucher par mon expérience face au syndrome de Down, plus je me rendais compte que ma propension au péché était renforcée par une intelligence, une ruse et une capacité de préméditation merveilleusement absentes chez mes frères et sœurs atteints de trisomie. Ces personnes ne comprennent ni ne pratiquent la malice, la cupidité, la jalousie ou la tromperie comme les autres. Elles parlent avec une honnêteté sans compromis. Elles aiment sans les failles de prétention et d’autoprotection qui entachent nos relations.

L'Imago Dei en Gus

Les personnes atteintes du syndrome de Down portent l'image de Dieu dans un cœur sans artifice. Il n'est pas dans leur nature de marcher avec les méchants, de s’arrêter sur le chemin des pécheurs ou de s'asseoir aux côtés des moqueurs.

Je vois rarement ailleurs le genre d'innocence que je perçois chez Gus. Mais en accompagnant les besoins particuliers de mon fils, l'imago remplit mon champ de vision. Quand Gus est enthousiaste, il agite ses bras dans une célébration sans détours de sa liberté. Si son frère ou ses sœurs lui prennent un jouet, Gus accepte le geste avec des yeux brillants. Il est heureux que ses frères et sœurs soient heureux avec cette chose qu'il désirait il y a juste un instant. Il ne négocie pas ses besoins ; il les exprime sans s'excuser. Il couine d'une joie non dissimulée lorsque je m'approche, pleure de tout son cœur lorsque je m'éloigne, et croit cependant que même cette absence doit être un acte de bonne volonté.

Ces attributs de l'innocence ont moins à voir avec ce que les personnes atteintes du syndrome de Down peuvent ou ne peuvent pas faire qu'avec ce qu'elles sont. C'est ce que j'ai appris en me laissant toucher par « la lumière du faisceau ». En me contentant de regarder Gus, je voyais d’abord toutes ces compétences auxquelles j'avais autrefois attaché l'image de Dieu. Mais l'innocence n'est pas une compétence. C'est une incompétence en matière de vice. C'est une incarnation de la simplicité divine, qui se manifeste souvent avec des membres un peu plus courts, des yeux en amande et un sourire effronté.

La trisomie 21 est un faisceau que nous examinons depuis un certain temps. Mais c'est en se laissant toucher, en pénétrant dans la lumière de l'innocence qui en fait mystérieusement partie, que nous pourrons au mieux y découvrir l'imago Dei.

Corey Latta est l’auteur de plusieurs ouvrages dont C. S. Lewis and the Art of Writing. Corey et sa femme, Jennifer, vivent à Memphis avec leurs quatre enfants, Justice, London, Emma Jane et Gus.

Traduit par Teodora Haiducu

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Books

Il faut parfois secouer la poussière de ses pieds

Partir est une façon de répondre à la toxicité institutionnelle.

Christianity Today November 17, 2022
Renan Lima / Pexels / Edits by Rick Szuecs

L’une des expériences les plus frustrantes — mais finalement libératrices — que j’ai vécues au cours de mes trois décennies de ministère pastoral a été de démissionner d’une Église urbaine majoritairement blanche dans une ville majoritairement afro-américaine. Parmi les centaines de personnes qui fréquentaient cette communauté, beaucoup ont apprécié mon ministère en tant que prédicateur, enseignant, leader, musicien, mari et père. Pourtant, une minorité influente issue des banlieues, motivée par des questions raciales et socio-économiques, s’est opposée à mon leadership.

Mon fils aîné, se rappelant les défis que représentait le fait d’être un jeune homme afro-américain dans cette Église, m’a souvent dit : « Papa, il faut que tu écrives un livre et que tu cites des noms ! » Mon fils sait que j’ai essayé de vivre un véritable ministère multiethnique malgré les difficultés récemment pointées en la matière.

J’ai résisté à l’envie d’écrire ce livre cathartique, un grand « déballage », mais dans mon rôle de mentor auprès des jeunes pasteurs, j’ai essayé, comme Paul, de partager l’Évangile et ce que j’ai vécu (1 Th 2.8). Démissionner en tant que pasteur de cette Église a été un douloureux pas de foi. Je n’avais pas d’autre poste en vue. Mais être au chômage valait mieux que d’être rabaissé et démoralisé.

En 2021, des personnalités très en vue comme Beth Moore et la Progressive Baptist Church de Charlie Dates ont pris part à un exode important hors de la Convention baptiste du Sud. L’histoire de Jemar Tisby, qu’il raconte dans une interview détaillant sa sortie des milieux évangéliques blancs, a trouvé un écho chez des chrétiens de couleur et des femmes qui avaient pris le risque de s’impliquer de tout leur être dans des organisations chrétiennes qui prétendaient valoriser la diversité, avant de se faire malmener par les réalités de la vie dans le giron des patriarcats suprématistes blancs.

Tous les départs sont difficiles, mais tous ont un potentiel vivifiant. Ceux qui s’en vont finissent souvent par être rafraîchis par une vision renouvelée, des idées nouvelles et la redécouverte de leur voix et de leur personnalité. Les organisations qu’ils laissent derrière eux auraient également la possibilité de tirer des leçons importantes.

Certaines institutions chrétiennes défendront leur réputation en faisant appel aux textes des Écritures qui condamnent les faux enseignements (comme Jude v. 4). Leur stratégie est de discréditer ceux qui partent. Ce genre de condamnation est inutile et souvent sans fondement. Les gens qui sont partis comme moi ne l’ont pas fait parce qu’ils ont embrassé des doctrines hérétiques historiques. Nous sommes partis parce que l’institution était toxique.

Après avoir prêché dans une Église majoritairement blanche, j’ai découvert que les responsables qui avaient prié pour moi échangeaient des blagues racistes avant mon arrivée. J’ai fait part de mes préoccupations aux responsables de la dénomination, mais ils ont nié toute existence de racisme et se sont fâchés contre moi pour le seul fait d’avoir évoqué l’idée. J’ai secoué cette poussière de mes pieds et je suis allé de l’avant (Mc 6.11).

Partir peut être un acte prophétique qui met en évidence la toxicité institutionnelle. Jérémie notamment s’est tenu à l’extérieur du temple de Jérusalem, à ses portes, pour appeler à la repentance et à la réforme (Jr 7.1-3). Il a pris le risque de dire la vérité pour remettre le peuple de Dieu sur la bonne voie. Il a pointé du doigt un système religieux toxique qui protégeait l’injustice : « Est-elle à vos yeux une caverne de bandits, cette maison sur laquelle mon nom est invoqué ? » (v. 11)

Prêtez attention aux fidèles blessés qui s’en vont. Leurs paroles pourraient être la parole du Seigneur.

Jésus a repris le rôle de Jérémie lorsqu’il a renversé les tables des changeurs de monnaie (Mt 21.13). Walter Brueggemann, spécialiste de l’Ancien Testament, observe que « le temple et sa liturgie royale sont décriés comme des outils de contrôle social qui, en temps de crise, ne tiennent pas leurs grandes promesses. Le temple est dénoncé pour n’être plus une manifestation de la transcendance, mais une simple arène de manipulation sociale. »

Les départs ne se font pas à la légère, mais après un examen de conscience et d’intenses prières. De la même manière, les institutions devraient se livrer à un examen de conscience et confronter certaines valeurs fondamentales qui ne font que dévaloriser d’autres. Les déclarations éloquentes des institutions blanches sur l’équité et la diversité n’aboutissent trop souvent qu’à des mesures symboliques à l’égard des minorités ethniques. L’histoire chrétienne contient des moments épiques de dissidence réformatrice. Prêtez attention aux fidèles blessés qui s’en vont. Leurs paroles pourraient être la parole du Seigneur.

Peut-être qu’un jour j’écrirai ces mémoires, mettant en lumière mes luttes pour trouver un foyer ecclésial. J’ai appris à faire confiance à ma propre voix dissidente, en trouvant le courage de m’insurger contre l’injustice institutionnelle. Je prie pour que ceux qui confessent leur allégeance à Jésus aient le courage d’écouter ceux qui partent et de faire face à leurs propres péchés. Tout comme il faut du mouvement pour nettoyer les vêtements, il faut le remue-ménage des prophètes pour nettoyer les institutions.

Dennis R. Edwards, ancien pasteur et implanteur d’Église, est professeur associé de Nouveau Testament au North Park Theological Seminary de Chicago. Il est l’auteur de Might from the Margins: The Gospel's Power to Turn the Tables on Injustice (APG) et 1 Peter (The Story of God Bible Commentary).

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