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Les chrétiens indiens défient les menaces de mort et les raids

Les nationalistes hindous espèrent que le Maharashtra deviendra le prochain État indien à adopter une loi anticonversion.

A woman prays at St. John the Baptist Church in Thane, India.

Une femme prie à l’église Saint-Jean-Baptiste de Thane, en Inde.

Christianity Today September 2, 2025
Hindustan Times/Contributeur/Getty

Le 20 juillet, une foule d’environ 200 nationalistes hindous a pris d’assaut le Bethel Prarthana Bhavan (« Salle de prière Bethel ») dans la ville de Malegaon, au Maharashtra. Elle était accompagnée de policiers et de représentants de l’administration. Le but était de perturber le culte dominical en cours. Des slogans dénonçant les « conversions chrétiennes » ont alors remplacé les chants de louange habituels, a raconté le pasteur Simon Raut à Christianity Today.

Les fidèles, stupéfaits, ont vu les assaillants — membres du groupe militant Hindutva Bajrang Dal — s’en prendre au pasteur et aux anciens de l’église, affirmant qu’ils n’avaient pas l’autorisation gouvernementale pour prier dans le bâtiment. Ils ont arraché et déchiré les tracts insérés dans des bibles, poursuit Raut. La police et d’autres officiels sont restés silencieux jusqu’à ce que la tension retombe, puis ils ont remis un avis officiel aux responsables de l’église, leur ordonnant de cesser toute activité.

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Depuis 2019, environ 300 croyants se réunissent chaque dimanche dans cette salle, après avoir débuté en 2017 comme une église de maison. Raut rejette les accusations selon lesquelles l’église se serait réunie illégalement et aurait converti de force des hindous.

« Le terrain m’appartient », affirme-t-il. « J’ai toutes les autorisations. C’est simplement une tentative pour bloquer l’œuvre puissante de Dieu dans notre région. »

Malgré l’attaque, les cultes se poursuivent dans la salle. Les responsables de l’église ont engagé un avocat chrétien pour contester l’avis.

Deux jours plus tard, un scénario similaire s’est produit à Nashik, à 105 kilomètres de là. Le pasteur de l’assemblée raconte que la police a convoqué au commissariat six croyants d’une église fondée en 2009. Les policiers leur ont interdit de se rassembler dans les locaux ou dans une maison du village. Depuis, les 200 membres de cette communauté se sont dispersés en six petits groupes, se réunissant en secret. Par crainte d’arrestations, nous avons accepté de ne pas révéler davantage de détails sur cette église ou son pasteur.

Depuis la victoire écrasante du parti nationaliste hindou Bharatiya Janata Party (BJP) en novembre 2024 dans le Maharashtra, dans l’ouest de l’Inde, les attaques contre les chrétiens ont explosé. Rien qu’en 2025, la Religious Liberty Commission de l’Evangelical Fellowship of India a recensé 11 cas de violence dans la région, contre un seul sur la même période l’an dernier.

L’avocat chrétien Wilson Nathan, membre d’une équipe fournissant une assistance juridique bénévole aux chrétiens persécutés, constate une forte progression de la violence ces derniers mois. Il a reçu des appels de détresse de districts de tout l’État. Les églises de maison des districts tribaux, notamment à Dhule et Nandurbar, sont souvent la cible du fanatisme hindou. La plupart des nouveaux convertis dans l’État sont issus de hameaux tribaux et dalits marginalisés, où le christianisme est en plein essor.

La montée des protestations contre la communauté chrétienne intervient alors que le BJP milite pour une loi anticonversion, une promesse de campagne. Le texte, dont l’entrée en vigueur est prévue pour décembre, vise à freiner les conversions et à fermer les « églises non autorisées », en particulier dans les zones tribales. Le Maharashtra deviendrait ainsi le 14ᵉ État à adopter une telle loi, appelée ironiquement Freedom of Religion Act. L’État du Tamil Nadu a néanmoins depuis abrogé sa loi anticonversion, tandis que les législateurs du Karnataka ont annoncé leur intention d’abroger la leur.

Les responsables chrétiens estiment que les nationalistes hindous cherchent à influencer l’opinion publique par des discours antichrétiens, des attaques contre les lieux de culte et des accusations de « conversions forcées ». Cela leur permettrait d’agir en toute impunité et d’agresser les chrétiens à leur guise. Nombreux sont ceux qui s’attendent à ce que le gouvernement adopte ensuite la loi anticonversion sans difficulté.

Les conséquences se font déjà sentir. « La peur est palpable chez ceux qui exercent une activité chrétienne », confie Arun Shinde, pasteur retraité de l’église Saint Andrew à Nashik. « Je ne peux plus imaginer partager l’Évangile, prier en public ou distribuer des nouveaux testaments comme je le faisais encore l’an dernier. »

Le 21 juin, un député du BJP, Gopichand Padalkar, a promis une récompense de 300 000 roupies (3 450 dollars américains) pour l’agression d’un prêtre chrétien, de 500 000 roupies (5 740 dollars américains) pour briser les membres d’un prêtre et de 1,1 million de roupies (12 640 dollars américains) pour tuer un prêtre et sa famille. Malgré les protestations, la Commission nationale pour les minorités, organisme fédéral chargé de protéger les intérêts des minorités religieuses, n’a ouvert une enquête qu’au 6 août.

Le même jour, la Haute Cour de Bombay, la plus haute juridiction du Maharashtra, a accepté une requête d’intérêt public contre Padalkar déposée par le secrétaire de l’Association of Concerned Christians.

Le gouvernement de l’État a également annoncé sa décision de renforcer la surveillance des dalits et des personnes issues des tribus converties. Les chrétiens issus des minorités tribales risquent désormais de perdre leurs prestations sociales. De même, le gouvernement retire leur statut de caste répertoriée aux dalits qui s’identifient comme chrétiens.

Face à ces menaces, environ 15 000 chrétiens de tout le Maharashtra se sont rassemblés le 11 juillet à Azad Maidan, un terrain de sport de Mumbai, la capitale de l’État, chantant des hymnes et priant pour protester contre la loi anticonversion, les attaques contre les églises et les discours de haine.

Parmi eux, le pasteur Digambar Prakash Singh, menacé de mort par des nationalistes hindous par téléphone. « On me dit que je serai tué si je ne cesse pas d’évangéliser », confie-t-il. « Je leur réponds : vous êtes les bienvenus chez moi, parlons-en. »

Malgré tout, il garde l’espérance : « La persécution croissante est le signe que l’Évangile se répand. Ce n’est qu’une question de temps avant que Dieu nous accorde une grande moisson. Nous devons suivre l’exemple de l’apôtre Paul : bénir ceux qui nous persécutent. »

Traduit par Mélanie Boukorras pour Infochrétienne.

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