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Se tourner les uns vers les autres et se détourner des écrans

Peut-être que la technologie a tout changé. Mais Dieu est toujours là, continuant de façonner les êtres humains pour la relation et la présence.

Two students sitting at desks facing each other.
Christianity Today December 16, 2025
Illustration by Elizabeth Kaye / Source Images: WikiMedia Commons

Au cours des derniers dimanches matin, j’ai participé à un groupe de soin de l’âme dans notre Église. À plusieurs reprises, le pasteur qui animait la session posait la question : « Comment va ton âme ? »

Dès le début, il nous a proposé une autoévaluation qui en a laissé beaucoup d’entre nous fébriles, troublés par nos propres réponses et par le sentiment d’urgence à nous améliorer. Le pasteur Steve, percevant l’agitation dans la salle, nous a doucement ramenés au moment présent, nous rappelant de ralentir, de prêter attention, et de demander à Dieu ce qu’il voulait nous montrer et comment nous pouvions l’inviter ici.

« Ne cherchez pas à tout résoudre d’un coup », répétait-il.

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Lorsque j’écris sur la technologie à l’école, je dois souvent me rappeler la même chose. C’est une conversation qui ne peut pas être simplifiée. Nous ne pouvons pas revenir aux technologies éducatives des années 1990 — Oregon Trail et les cours de dactylographie (qui, ironiquement, semblent aujourd’hui absents de nombreux programmes) — avec des ordinateurs utilisés ponctuellement avant d’être rangés pour aller jouer dehors.

Comme me l’a confié un enseignant du secondaire, il est important d’apprendre aux élèves à utiliser les outils technologiques — gérer des projets, suivre des échéances, communiquer professionnellement par courriel — afin de les préparer aux études supérieures et à la vie professionnelle. De fait, nous devons tous apprendre à utiliser le numérique de manière responsable. Mais celui-ci est devenu si omniprésent dans l’enseignement primaire que cette responsabilité semble hors de portée.

La tentation est grande soit d’abandonner toute résistance, soit de céder à une panique totale face aux résultats scolaires que nous observons dans de nombreuses écoles américaines. Comment sommes-nous censés préparer nos enfants à un avenir saturé de technologies que nous ne comprenons pas nous-mêmes ? Devons-nous nous résigner à un futur post-lettré et post-numérique, où les machines feront toute notre réflexion ?

Depuis près de dix ans, je fais face à la technologie scolaire en tant que mère, et depuis cinq ans, je la considère à l’échelle nationale comme journaliste. Si ces années m’ont appris quelque chose, c’est bien que nous devons ralentir.

Nous avons mis en place une éducation axée sur la technologie sans vraiment réfléchir à ses conséquences, rêvant de ce qui serait possible plutôt que de discerner avec soin ce qui serait sage. Aujourd’hui, nous résolvons chaque problème technologique par une nouvelle solution technologique, empilant programmes sur programmes, écrans sur écrans, sans tenir compte de la manière dont beaucoup de ces solutions échouent dans la vraie vie, dans de vraies écoles, avec de vrais enfants.

Il est aussi tentant de désigner des coupables. La responsabilité de nos difficultés liées à la technologie scolaire n’est pas équitablement répartie, mais ce n’est pas non plus le mauvais comportement d’un seul groupe qui nous a conduits ici. Les entreprises de technologies éducatives, ou edtech, utilisent des lobbyistes pour vendre leurs produits aux États et aux écoles. Les districts achètent des iPads pour les enfants de maternelle parce que, eh bien, tout le monde le fait — et que c’est un moyen de gérer des classes surchargées de 26 élèves. Les enseignants utilisent des quiz virtuels pour gagner du temps et assignent des manuels numériques parce que ce sont ceux que le district a achetés. Les élèves trichent et prennent des raccourcis pour venir à bout de tâches répétitives dans des programmes défaillants sur leurs appareils fournis par l’école. Et les parents sont souvent tenus à l’écart, inconscients ou ambivalents quant au temps passé devant les écrans à l’école — peut-être parce que nous avons nous-mêmes des habitudes similaires.

Ralentir. Prêter attention. Et demander à Dieu ce qu’il veut nous montrer et comment nous pouvons l’inviter ici.

J’écris cet article dans une ancienne église reconvertie en café à Battle Ground, dans l’État de Washington. Je passe quelques jours ici avec mon grand-père âgé, pour m’occuper de lui après une chute. Il a 96 ans et n’a ni Internet ni une bonne couverture cellulaire à la maison ; j’ai donc utilisé Google pour trouver le café le plus proche avec du Wi-Fi. (Les merveilles de la technologie !)

Je ne m’attendais pas à entrer dans une ancienne église. Et pourtant, me voilà ici, en ce premier dimanche de l’Avent. Des chants de Noël résonnent depuis un haut-parleur installé dans la tribune où le chœur chantait autrefois. C’est un peu triste, mais en écoutant les jeunes filles derrière moi discuter du passage de la première épître de Jean qu’elles souhaitent étudier dans leur cours de Bible, je me dis : Dieu est toujours là, même si ce lieu ne ressemble en rien à ce que connaissaient ses anciens paroissiens.

La technologie a transformé — et, à certains égards, abîmé — l’éducation de mes enfants. À l’image de cette ancienne église, leur scolarité ne ressemble en rien à ce que j’avais imaginé. Parfois, lorsque j’y pense trop longtemps, je me laisse emporter par l’inquiétude et l’anxiété, « soucieuse de beaucoup de choses » (Luc 10.41). Mais Dieu est là aussi.

Les jeunes filles derrière moi s’arrêtent sur 1 Jean 4 : « Celui qui est en vous est plus grand que celui qui est dans le monde », lit l’une d’elles, assise sur un canapé à l’endroit même où se trouvait autrefois la chaire (v. 4). Elle lit ensuite tout le chapitre à voix haute.

En envoyant son Fils unique, Jésus, Dieu a « manifesté son amour parmi nous », dit le verset 9. Pendant l’Avent, nous attendons cette venue : la Parole faite chair. Corporelle. Incarnée. Non pas un Dieu spirituel ou numérique, mais un Dieu qui s’assoit à table et rit avec vous. Un Dieu au café, si l’on veut.

Et peut-être est-ce là l’invitation — la réponse à toutes nos inquiétudes concernant la technologie. Les êtres humains ont toujours faim de relations réelles, profondément humaines. Je vois ce besoin tout autour de moi, et même beaucoup de ceux qui travaillent dans la technologie et l’aiment plus que moi le reconnaissent.

Récemment, j’ai parlé avec Ginger Schantz, qui dirige avec son mari, Dann, un centre d’éducation technologique appelé Venture Robotics, à Midland, au Texas. « Les élèves avec lesquels nous avons travaillé accordent plus de valeur à la relation qu’aux leçons technologiques », m’a-t-elle expliqué. « Ils veulent toujours être avec Dann. Oui, ils aiment nos gadgets, mais l’attrait s’estompe rapidement, et ils préfèrent simplement discuter avec lui et avec les autres enfants présents. »

C’est ce que 1 Jean 4.7 nous demande : nous aimer les uns les autres. À notre époque, cela doit inclure — aussi souvent que possible — le fait de nous détourner des machines pour revenir à l’instant présent. Revenir à la personne vivante et respirante, complexe et curieuse, assise en face de nous — ou de l’autre côté de la salle de classe.

La semaine dernière, je suis passée au lycée de ma fille et j’ai remarqué une série d’affiches de recherche colorées, réalisées par les élèves, accrochées dans un couloir — une scène plus fréquente dans une école primaire que dans un établissement comme celui-ci. Chacune explorait l’histoire, la géographie et la culture d’un pays différent.

J’ai discuté quelques minutes avec la proviseure, et lorsque je lui ai fait remarquer combien il était agréable de voir ce travail, elle m’a expliqué que ces affiches étaient là à la demande des élèves : les enquêtes menées l’an dernier révélaient une lassitude face au travail en ligne. Avec son encouragement, les enseignants faisaient donc davantage de travail hors écran. J’ai imaginé la scène dans la salle de classe où ces affiches avaient été réalisées : des élèves discutant en travaillant, partageant des feutres, des idées et des plaisanteries.

Un peu plus loin dans le couloir se trouvait une salle d’anglais, où la classe de ma fille lisait Roméo et Juliette à voix haute. Quelques portes plus loin encore, dans le cours d’introduction à l’ingénierie, les élèves construisaient des ponts et testaient leur solidité, rivalisant entre eux avec cette intensité bon enfant que seuls des garçons de 15 ans savent déployer.

Peut-être que la technologie a tout changé. Mais en parcourant ces couloirs cet après-midi-là, je me suis rappelé qu’elle n’a pas changé ce que signifie être humain. Dieu est toujours là, continuant de façonner les êtres humains pour la relation et la présence. Peut-être sommes-nous allés trop vite et trop loin dans la mauvaise direction, mais il n’est pas trop tard pour ralentir et prêter attention — pour nous tourner les uns vers les autres plutôt que vers les machines.

Carrie McKean est une auteure basée dans l’ouest du Texas. Ses articles ont été publiés dans The New York Times, The Atlantic et Texas Monthly. On peut la retrouver sur carriemckean.com.

Traduit par Jonathan Nabié

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