Theology

La maternité : plus haute vocation d’une femme ?

La maternité est très honorable, mais le centre de notre existence se trouve ailleurs.

Mary sitting at Jesus' feet at her house

Le Christ dans la maison de Marthe et Marie, par Henryk Siemiradzki

Christianity Today May 28, 2025
WikiMedia Commons

Mon fils était encore bébé. Une femme à l’église s’est approchée de moi (Seana). Je rêvais de changer le monde pour Jésus, mais j’avais troqué les voyages missionnaires contre les couches à changer et les vaisselles de ma vie de banlieue. Cette femme m’a dit ceci : « Je suis tellement contente que tu restes à la maison. La maternité est ta plus grande vocation. »

À l’époque, cela m’a paru vrai — j’avais laissé une carrière que j’adorais pour rester à la maison avec mon enfant. Pourtant, cette femme semblait réduire tous mes dons pour servir le Christ à un rôle et une période de ma vie. Malheureusement, je me suis accrochée à cette remarque comme si elle venait de la bouche de Dieu. Et quand la maternité avec un enfant neurodivergent n’a pas conduit à mon plein épanouissement (comme certains livres chrétiens sur la parentalité me l’avaient enseigné), j’ai eu le sentiment d’avoir échoué à la fois en tant que femme et en tant que chrétienne.

De mon côté (Sandra), durant mes premières années de mariage, je m’identifiais davantage avec Ramah, pleurant les innocents qu’Hérode avait ordonné de tuer, qu’avec la petite ville de Bethléem. Durant dix Noëls, l’infertilité et les multiples fausses couches ont rendu mon cœur semblable à celui de « Rachel pleurant pour ses enfants et refusant d’être réconfortée, car ils ne sont plus » (Jr 31.15-22 ; Mt 2.16-18).

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En décembre 2022, un deuxième processus d’adoption a été interrompu, le deuxième en deux ans. Au milieu des arômes de pain d’épice et des lumières scintillantes, nous avons fermé la porte de la pouponnière et avons fait marche arrière, nos rêves laissant place à des mains vides. Le plus lourd de ma douleur provenait de mon incapacité à vivre ce que je percevais alors comme le plus grand appel de Dieu pour chaque femme : la maternité.

Après l’adoption réussie de notre fille, qui est maintenant maman elle-même, j’ai porté la casquette de maman travaillant à domicile durant toute son enfance. Mais au fur et à mesure que ma fille grandissait, j’ai dû reconsidérer cette idée que la piété au féminin n’était qu’affaire de maternité.

Au fil des ans, nous avons toutes deux — une maman travaillant à domicile avec trois enfants et une professeure de séminaire à présent grand-mère — lutté avec ces questions : la maternité est-elle vraiment la plus grande vocation de chaque femme chrétienne ? Comment Christ voyait-il la maternité ? La maternité était-elle la vocation la plus élevée pour les femmes dans l’Église primitive ? Si la maternité n’est pas notre appel le plus important, quel est-il ?

Au cours de cette démarche, nous avons lu des parcours de femmes chrétiennes dans l’histoire et exploré comment l’idéal biblique de la féminité diffère de certaines visions de la maternité promues dans le monde évangélique contemporain. Et ce que nous avons constaté, c’est que les Écritures et l’histoire de l’Église primitive peuvent aider à réorienter certaines de nos compréhensions concernant la « plus haute vocation » d’une chrétienne.

Commençons par celle qui est notre ancêtre universelle, Eve, que la Bible décrit comme « la mère de tous les vivants » (Gn 3.20). Dans les premiers chapitres du récit de la Genèse, Dieu crée nos premiers parents pour gouverner ensemble et remplir la terre (Gn 1.28). De cette façon, les humains masculins comme féminins reçurent les mêmes mandats concernant la gouvernance de la terre et leur multiplication.

Bien que la parentalité fasse partie de la façon dont Adam et Eve étaient censés glorifier Dieu et s’associer pour multiplier les porteurs de son image, nulle part dans ces premiers chapitres de la Genèse nous ne trouvons un passage qui suggère qu’avoir des enfants serait le plus grand bien d’une femme. Et dans le Nouveau Testament, au lieu d’une réitération du mandat de la Genèse de multiplier les humains, le Christ émet un mandat en vue de la multiplication de ses adorateurs en faisant des disciples (Mt 28.18-20).

Regardons maintenant du côté de l’autre mère la plus connue de toutes, celle qui a donné naissance à Dieu fait chair — Marie, « Mère de Dieu », comme la nommera le Concile d’Éphèse en 431 apr. J.-C.

Dans l’Évangile de Luc, l’ange Gabriel visite Marie et prophétise qu’elle donnera naissance à un enfant conçu par le Saint-Esprit (Lc 1.30–33). La maternité de Marie pour Jésus a été tout au long de sa vie un honneur qui a joué un rôle crucial dans le don du salut pour toute l’humanité. Il est clair que Dieu a intégré la parentalité, y compris le rôle de Joseph, dans le cadre de son plan miraculeux.

En continuant dans l’histoire de Marie, nous arrivons au moment où Jésus, devenu adulte, exerce son ministère auprès des foules. Alors qu’il enseigne le royaume et parle contre le légalisme des pharisiens, quelqu’un dans la foule l’interrompt pour dire : « Ta mère et tes frères se tiennent à l’extérieur, ils veulent te parler. »

En réponse, Jésus demande : « Qui est ma mère et qui sont mes frères ? » Pointant ses disciples, il dit : « Voici ma mère et mes frères. Car quiconque fait la volonté de mon père céleste est mon frère, ma sœur et ma mère » (Mt 12.47–50).

Certains pourraient penser que Jésus rejette ou rabaisse sa mère. Mais, selon la définition de Jésus, Marie aurait été incluse parmi les membres de la famille qu’il désigne. N’a-t-elle pas dit à Gabriel : « Je suis la servante du Seigneur. […] Qu’il me soit fait selon ta parole » ? (Lc 1.38) N’a-t-elle pas accepté d’aligner sa volonté sur la volonté de Dieu ?

Jésus affirme cependant ici ce qui est le plus précieux dans son royaume : non pas une relation naturelle liée par le sang — bien que la famille puisse être l’une des plus grandes bénédictions de Dieu — mais une parenté réciproque définie par l’obéissance à la volonté de Dieu. Lorsqu’il est vu sous cet angle, l’appel à la maternité de Marie pour Jésus était secondaire par rapport à sa foi et à l’obéissance à son fils.

Mentionnons aussi l’histoire bien connue de Marie et Marthe. Marthe fait toutes les tâches traditionnellement féminines, tandis que sa sœur, Marie, s’assoit aux pieds de Jésus — prenant la posture physique d’un disciple du premier siècle devant un rabbin. Marthe interpelle Marie, attendant son aide dans les tâches domestiques. Mais au lieu de la renvoyer à la cuisine, Jésus confirme que Marie a choisi « la meilleure part » (Lc 10.42).

De la bouche du Seigneur lui-même, nous apprenons que l’appel le plus élevé pour toute personne — indépendamment de son statut matrimonial ou parental — est de le suivre. L’appel le plus élevé pour une disciple n’est pas de faire des enfants, mais de faire des disciples (Mt 28.18-20). Parfois, les deux se rencontrent : nous avons toutes deux travaillé à faire grandir nos enfants dans la foi. Mais notre appel à faire des disciples s’étend bien au-delà du foyer et de la maison pour bâtir l’Église et accomplir son appel à être le corps du Christ.

Dans un article pour Christianity Today, Jeannie Whitlock raconte comment la naissance de son enfant lui a rappelé l’Église : « Nos corps sont aussi cruciaux pour le plan de Dieu que celui de Marie. Comme Marie, que nous soyons célibataires, mariés, parents ou autres, nous sommes appelés à porter la vie du Christ dans le monde. »

Paul honore de nombreuses femmes pour leur fidélité à l’Évangile. Sur les 29 personnes que l’apôtre salue dans sa lettre aux Romains, 10 sont des femmes. Nous trouvons des noms comme Phoebé — diaconesse de l’église de Cenchrées — et Prisca ou Priscilla (nous reviendrons à elle). Il est question d’une autre Marie, qui, selon certains, fait référence à Marie-Madeleine. Il y avait aussi Junia, proéminente parmi les apôtres, et Julia, parente de Philologue.

Tryphène et Tryphose étaient des ouvrières du Seigneur. Paul honore la sœur de Nérée et la mère de Rufus, qui était comme une mère pour l’apôtre. De ces dix femmes, une seule est mentionnée pour sa maternité biologique, mais toutes sont reconnues pour leur service fidèle dans le royaume.

L’apôtre Paul encourage les jeunes veuves à se marier, à avoir des enfants et à bien gérer leurs maisons (1 Tm 5.14). Il écrit que « il vaut mieux se marier que de brûler » (1 Co 7.9). Il honore également la fidélité de la mère et de la grand-mère de Timothée (2 Tm 1.5). Cependant, nulle part il ne parle du mariage ou de la maternité comme de la plus haute vocation d’une femme. Au contraire, dans sa lettre aux Corinthiens, il encourage les croyants à rester célibataires pour le service de l’Évangile (1 Co 7.8-9). Pour lui, « Christ est ma vie et mourir est un gain » (Ph 1.21). Il devrait en être de même pour nous.

Pour comprendre comment les femmes de l’Église du premier siècle voyaient leur appel, nous nous sommes tournées vers le livre des Actes. Là, nous avons constaté que, lorsque les femmes apparaissent dans le texte, ce n’est pas à cause de leur rôle de mère, mais à cause de leurs dons pour renforcer l’Église. Priscilla, avec son mari Aquilas, enseigne le prédicateur qu’est Apollos (Ac 18.24-26). Si Lydie, une femme d’affaires éminente, était mère, le texte ne le mentionne pas. Au lieu de cela, elle est reconnue pour avoir conduit sa maison à la foi et pour son hospitalité (16.14-15). Et les filles célibataires de Philippe sont mentionnées pour leur exercice du don de prophétie (21.8–9).

Si la maternité était vraiment la plus importante vocation d’une femme, ne parlerait-on pas avant tout des femmes de la Bible pour leur maternité plutôt que pour leur service pour le royaume de Dieu ? Mais tel n’est pas ce que nous observons. Oui, les femmes chrétiennes qui se sont mariées et ont eu des enfants ont été appelées à aimer et à bien prendre soin de leurs familles, mais cela n’était pas considéré comme leur premier appel. Cela faisait partie de leur appel suprême à suivre le Christ.

Lorsque Paul liste les qualifications pour qu’une femme plus âgée soit placée sur la « liste des veuves » dont l’Église doit prendre soin, il affirme qu’elle doit « être connue pour ses œuvres bonnes, avoir bien élevé ses enfants, ouvert sa maison aux étrangers, lavé les pieds des membres du peuple saint, secouru les malheureux, et pratiqué toutes sortes d’actions bonnes » (1 Tm 5.9-10). De cette liste, un seul point est lié à la maternité.

Paul ne précise pas non plus que les enfants élevés par les veuves doivent être leurs enfants biologiques (la plupart des enfants sont adultes au moment où leur mère atteint l’âge prescrit de 60 ans !). En fait, bon nombre des veuves « qui n’ont pas de soutien » ne sont probablement pas des mères biologiques, car Paul dit que celles qui ont des enfants et des petits-enfants devraient être prises en charge par leur propre famille au lieu de l’Église (v. 5).

L’instruction apostolique était si claire dans ce passage et dans d’autres passages que les responsables masculins de l’Église primitive reconnaissaient la qualité d’office légitime (clergé) à un « ordre des veuves » dans les Constitutions apostoliques, un ancien manuel de conduite de l’Église utilisé au troisième siècle.

Ce même modèle où le discipulat l’emporte sur la maternité est également observable dans l’histoire de l’Église primitive. Lorsqu’une noble du troisième siècle, Perpétue, devient chrétienne par le témoignage de sa servante, Félicité, les autorités les jettent en prison. La jeune Perpétue avait un fils en bas âge, qu’elle est autorisée à allaiter dans sa cellule. Mais, quand on lui dit de renier sa foi en Christ et d’adorer les dieux romains sans quoi elle mourra et laissera son enfant sans mère, elle choisit la mort avant son enfant parce que sa plus haute allégeance va à Christ. En prison avec elle, Félicité accouche et choisit également de laisser son bébé aux soins de sa communauté chrétienne locale plutôt que de renier sa foi. Imaginez la douleur déchirante de ces décisions !

Angoissé, le père de Perpétue essayera même de la faire changer d’avis à plusieurs reprises, mais elle répondra que ce n’est qu’en se consacrant à Christ et à sa gloire qu’elle restera sa « fille perpétuelle ». Si la maternité était vraiment la plus haute vocation de la femme chrétienne dans l’Église primitive, de telles héroïnes de notre foi auraient ou auraient dû choisir leur mariage et leur famille plutôt que de mourir pour Christ.

De tels récits transforment la manière dont, moi, Sandra, je prie et me soucie de ma fille, de son mari et de leur fille, et comment, moi, Seana, j’envisage la maternité avec mes enfants toujours à la maison. Suivre Christ a conduit certaines de nos mères dans la foi dans l’arène. Suivre Christ m’amène à l’évier de la cuisine, à mes piles de linge et à mes discussions sur l’univers Marvel au repas. Quelle que soit l’arène dans laquelle Dieu nous mène, nous nous sacrifions pour servir le Seigneur. Tel est notre vocation la plus élevée. Indépendamment de leur statut parental, toutes les femmes peuvent aujourd’hui encourager la foi dans nos églises.

« Quand auras-tu des enfants ? » Quand nous entendrons quelqu’un poser cette question à notre amie qui n’en a pas encore, interviendrons-nous ? Quand nous verrons une mère épuisée, choisirons-nous de lui dire autre chose que « la maternité est ta plus grande vocation » ? Face aux multiples pressions qui pèsent sur la maternité, parviendrons-nous à accorder notre cœur à la présence de notre Sauveur pour le servir ? Serons-nous comme Marthe, fixées sur l’accomplissement de tout ce que notre culture attend de nous en tant que femmes, ou nous mettrons-nous d’abord aux pieds de Jésus, comme Marie ?

Depuis l’annonce de l’ange à Marie, suivre le Christ a toujours été la plus haute vocation de chaque femme. Et que nous finissions ou non par devenir épouse ou mère, nous pouvons toutes devenir des filles perpétuelles de Dieu.

Sandra Glahn est professeure au Dallas Theological Seminary, présidente de l’Evangelical Press Association et autrice ou coautrice de plus de 25 livres. Seana Scott est écrivaine, conférencière et créatrice de contenu, passionnée par le discipulat.

Traduit par Dominique Montefia pour Servir Ensemble et révisé par Christianity Today

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