Les sectes ne sont pas qu’affaire de doctrine.

Un ex-membre explique comment les chrétiens peuvent soutenir le long cheminement de ceux qui quittent un groupe à forte emprise.

Christianity Today March 15, 2024
Illustration de Mallory Rentsch/Images source : Getty

Dans un reportage sur l’Église Shincheonji de Jésus, une secte sud-coréenne, certaines de nos sources évoquaient la difficulté que rencontrent souvent les familles et les amis pour aider leurs proches à voir clair sur les groupes religieux sectaires qu’ils ont rejoints et les aider à quitter ce milieu. Une fois sortis de ces groupes, leur chemin est encore long pour se reconstruire et, s’ils viennent d’un milieu chrétien, pour retrouver leur foi.

Nous nous sommes entretenus avec Tore Klevjer, accompagnateur chrétien basé à Wollongong, en Australie, et président du Cult Information and Family Support. Il nous parle de sa propre expérience dans la secte des Enfants de Dieu, de la manière dont il accompagne d’anciens membres de groupes religieux abusifs et de ce que les églises et les chrétiens peuvent faire pour mieux aider ceux et celles qui quittent ce genre d’environnement.

Cet entretien a été édité et abrégé par souci de clarté.

CT : Non seulement vous êtes un spécialiste de l’accompagnement en matière de sectes, mais vous avez aussi eu une expérience personnelle dans ce genre de contexte. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ?

Klevjer : J’ai grandi dans un foyer chrétien à Byron Bay, en Australie. Après le décès de ma mère, j’ai entrepris un voyage en Europe. Au cours de cette période, ma petite amie a mis fin à notre relation et s’est mariée avec quelqu’un d’autre. Je me sentais proche de la dépression et j’ai commencé à redouter de retourner en Australie. J’avais l’impression que rien ne m’attendait là-bas. J’étais vulnérable et désillusionné par la vie. C’est alors que j’ai été recruté par les Enfants de Dieu, un groupe du genre hippie, taxé par les médias de « secte sexuelle » en raison de certaines de ses pratiques.

Je les ai rencontrés à Amsterdam, alors que je faisais du stop à travers l’Europe. Ce qui m’a séduit chez eux, c’est leur zèle, l’impression qu’ils donnaient d’être heureux et leur apparente liberté par rapport aux normes de la société. J’avais certes un étrange sentiment que quelque chose clochait, mais je ne savais pas exactement quoi. Cela me rappelait l’ambiance du film Les femmes de Stepford, comme si j’avais pénétré dans un monde surréaliste d’apparente perfection, dont j’ai compris plus tard qu’elle ne pouvait être due qu’à une emprise extrême.

Au fil du temps, on m’a appris à faire passer des marchandises en contrebande, à échanger des devises au marché noir et à me présenter sous une fausse identité aux entreprises et aux églises pour obtenir leur soutien. Si je rechignais devant ces pratiques frauduleuses, on me disait : « Tu n’as pas la foi pour ça ? » Le péché était devenu quelque chose de totalement subjectif.

La secte nous obligeait à renoncer à nos familles et à nos anciens amis parce que « l’on aura pour ennemis les membres de sa famille » (Mt 10.36). J’ai pris le nouveau nom d’Abel et j’ai écrit une lettre à mon père pour lui dire que je n’avais plus qu’un seul père et que c’était Dieu. Cela lui a brisé le cœur.

Lorsque le groupe s’est introduit en Asie, nous sommes allés en Inde et y avons passé quatre ans à enseigner l’éducation religieuse dans diverses écoles et collèges.

Quand avez-vous commencé à vous rendre compte que quelque chose n’allait pas et comment avez-vous quitté le groupe ?

Au cours de ma dernière année dans le groupe, on nous imposait des séances de recyclage au cours desquelles nous étions rabaissés, surveillés, critiqués et exorcisés. Cela me frustrait. Et pour trouver du réconfort, je me tournais de plus en plus vers ma Bible et de moins en moins vers les écrits du groupe. J’ai commencé à remettre en question la secte des Enfants de Dieu et on nous a finalement mis à la porte, moi, ma femme et nos cinq enfants.

De retour en Australie, mon rétablissement fut très dur. J’avais été formaté par les Enfants de Dieu pendant 11 ans. Je n’avais plus aucune idée du fonctionnement de la société et je n’avais que très peu d’argent. Parallèlement, j’ai réalisé combien j’avais été dupé. J’avais aussi gâché quelques-unes des meilleures années de ma vie. Du coup, je buvais beaucoup, mon mariage était au bord du désastre et j’étais dans un tel désarroi émotionnel que je sanglotais de manière incontrôlée dès qu’on entonnait un cantique à l’église.

Je me suis finalement construit ma propre foi, à partir des fondements. Cela fait maintenant 39 ans que j’ai quitté la secte.

Après mon départ, j’ai absolument voulu comprendre comment les gens se laissent entrainer dans des systèmes de croyances où ils trahissent leurs propres repères moraux et se font avoir par des affabulations ridicules. J’ai dévoré de nombreux livres sur les systèmes de croyances sains et malsains et j’ai formalisé ces recherches en obtenant un diplôme d’accompagnement.

Au fil des ans, j’ai pu accompagner de nombreuses familles désemparées qui avaient perdu des êtres chers, partis dans des sectes de diverses religions. J’ai également aidé de nombreux anciens membres à se reconstruire.

Les évangéliques emploient souvent le terme « secte » pour désigner un groupe qui s’écarte du christianisme biblique orthodoxe, par exemple, un groupe qui nierait la divinité de Jésus. Quelle en serait votre définition ?

La plupart des professionnels qui travaillent dans ce domaine préfèrent une définition plus sociologique qui considère une secte comme un groupe qui contrôle, exerce une emprise ou abuse des droits et des libertés d’une personne. Ce type de contrôle peut également se produire au sein d’un groupe prônant une croyance orthodoxe. Une église peut, par exemple, être doctrinalement orthodoxe tout en ayant une emprise légaliste sur ses membres en utilisant la culpabilité et la peur.

Pour comprendre cela, il est utile d’examiner d’autres systèmes d’emprise, tels que celui de la violence domestique. Dans une relation abusive, l’identité propre d’une personne est systématiquement diminuée, jusqu’à ce qu’elle devienne totalement dépendante de son oppresseur et docile à son égard. Les personnes sous emprise deviennent alors participantes à leur autodestruction, car elles sont convaincues qu’elles ne peuvent pas fonctionner en dehors du système. Elles se laissent couper de toute influence extérieure. Tout est soumis au contrôle du groupe : leur comportement, les informations qu’elles reçoivent, leurs pensées et leurs réactions émotionnelles. Les individus restent dans des environnements religieux contrôlants pour les mêmes raisons qu’une personne reste dans une relation abusive.

Pourquoi pensez-vous qu’il est important, pour les chrétiens, de considérer le terme « secte » d’un point de vuesociologique plutôt que théologique ?

Tout d’abord, de nombreuses églises pensent que si leurs fidèles reçoivent un enseignement théologique de qualité, ils ne seront jamais la proie d’une secte. Mon père avait l’habitude de me dire : « Tiens-t’en à la Bible, fiston, elle n’a encore trompé personne ! » C’est vrai d’une certaine manière, mais on peut aussi utiliser la Bible de manière très fallacieuse. Si les membres ou ex-membres d’une secte acceptent d’entendre un enseignement sain et construit sur quelques doctrines bibliques centrales, cela peut les aider grandement à se détacher des mythes qu’on leur a enseignés. Mais, il y a bien plus que les croyances doctrinales qui attirent un individu dans une secte. L’emprise graduelle et la privation d’informations y jouent un rôle de premier plan.

D’autre part, quand une personne quitte une secte, la priorité de l’église est souvent de la ramener à une « bonne théologie ». Or, il faut aussi reconnaître que cette personne a été abusée et manipulée spirituellement et qu’elle a besoin de temps pour guérir. Souvent, les anciens membres d’une secte ont l’impression de ne pas être à leur place à l’église. Ils éprouvent des difficultés face aux figures d’autorité (y compris un pasteur ou un accompagnateur spirituel) et ils se rebellent souvent contre toute forme de structure. Ils ont besoin d’acceptation et de tolérance sur leur chemin de guérison.

Il est donc important de ne pas réfléchir pour eux, mais de leur présenter diverses pistes à explorer, afin qu’ils arrivent à leurs propres conclusions. L’enseignement de la Bible doit être abordé avec beaucoup de sensibilité, en laissant la place aux questions, aux échanges et aux divergences.

Dans votre pratique d’accompagnement, quels sont les premiers mots que vous adressez à un ancien membre d’un groupe sectaire ?

« Ce n’est pas ta faute. Les avoir rejoints ne fait pas de toi quelqu’un de stupide. »

Il y a souvent une certaine honte face au sentiment de s’être fait berner. Lorsqu’ils repensent aux absurdités qu’ils tenaient pour vraies, les anciens membres d’une secte se disent que seules des personnes insensées ou crédules ont pu non seulement les avaler, mais aussi les enseigner à d’autres. Reconnaître le processus de recrutement de la secte, apprendre comment ses victimes ont été intentionnellement conditionnées et ciblées est un excellent point de départ et une base sur laquelle s’appuyer pour progresser. Les recherches scientifiques sur notre besoin humain d’appartenance et les expériences dans le domaine de la conformité sociale nous montrent que n’importe qui peut être vulnérable à la manipulation si ses circonstances de vie s’y prêtent.

Expliquez-nous comment se passe l’accompagnement d’une personne victime d’une secte.

De nombreuses questions se posent, notamment en ce qui concerne les relations avec les proches, les limites et la capacité à dire non, la pensée critique, la perte d’identité et la perte de sens et d’objectif dans la vie.

Évaluer les besoins physiques et de santé mentale de la personne est un bon point de départ. A-t-elle de la nourriture, un toit au-dessus de sa tête, un réseau familial ? Ou est-elle seule et sans soutien ? A-t-elle besoin d’une intervention médicale ?

J’ai parlé à de nombreuses personnes qui ont suivi une thérapie après avoir vécu dans une secte et qui m’ont dit : « Le psychologue ne m’a pas compris ! » Certains accompagnants ont tendance soit à minimiser l’expérience sectaire et à se concentrer sur les problèmes d’enfance de leur patient, soit à attendre que celui-ci les forme à propos de son expérience dans la secte. Le patient repart avec le sentiment d’avoir payé pour enseigner le thérapeute. Pour être efficace dans ce domaine, un accompagnant doit pouvoir comprendre ce que le patient a vécu. Lui expliquer comment se produit la manipulation mentale et ce que les sectes ont en commun est une bonne base. Cela aidera le patient à normaliser ce qui lui est arrivé et à ne pas se sentir seul et isolé.

Un principe biblique utile à retenir est que Dieu a voulu nous créer avec le libre arbitre. Une secte contrôlante nous enlève ce libre arbitre. Par conséquent, si j’arrive à ramener une personne au point où elle est capable de penser par elle-même et ensuite à la guider dans une bonne direction sans lui imposer ma propre vision du monde, pour moi, c’est un succès. La véritable conversion, elle, est l’œuvre du Saint-Esprit.

Lorsque le patient est d’origine chrétienne, quand et comment aborder la question de la foi et de l’église ?

Je ne pars jamais du principe que je dois parler de théologie. Partager l’Évangile avec quelqu’un qui se remet d’avoir reçu un soi-disant « Évangile » peut être très déroutant pour la personne. Il m’arrive parfois de demander à un patient comment il perçoit sa foi après son départ de la secte, ce qui suscite des réactions mitigées. Beaucoup souhaitent attendre et voir, puis réévaluer la situation plus tard. Parfois, ils ont des questions spécifiques concernant les interprétations de la Bible ou les écrits tordus de la secte. Souvent, ils souffrent de phobies qui leur ont été inculquées. Ils craignent, par exemple, que s’ils s’éloignent de « la volonté supérieure de Dieu », ils seront jugés. Il est donc important d’identifier et de dissiper leurs peurs irrationnelles.

Si un patient lit encore sa Bible, je lui recommande d’opter pour une traduction différente de celle utilisée par la secte. Cela l’aide à la lire avec un regard neuf et à ne pas se heurter automatiquement aux interprétations de la secte. Il est bon également d’affirmer au patient sa liberté de ne pas lire sa Bible pendant un certain temps, jusqu’à ce que les choses se tassent. On lui recommandera alors plutôt de se concentrer sur d’autres disciplines spirituelles ou de réfléchir à la création de Dieu, à son amour, sa bonté, sa compassion.

Rappelez-vous que cette personne a été blessée spirituellement et qu’elle a fait confiance à quelqu’un qui lui disait détenir la vérité. Elle n’est pas prête à ce que quelqu’un d’autre lui dise la même chose. Elle a besoin d’amour, d’attention et d’espace pour guérir à son propre rythme. La fréquentation de l’église peut ne plus jamais convenir à certaines personnes qui ont été victimes d’une secte. Il se peut qu’elles veuillent simplement faire partie d’un petit groupe. Il est important qu’elles apprennent à prendre leurs propres décisions et à réfléchir par elles-mêmes. Les prophéties, les « paroles de connaissance » et l’hyperspiritualisation des expériences peuvent être des éléments problématiques pour une personne qui a été manipulée.

Si nous découvrons qu’un proche fait partie d’une secte, que devrions-nous faire ?

Essayez de maintenir la relation et la communication à tout prix. Il n’est pas utile de faire des déclarations directes telles que « Tu es tombé dans une secte » ou « Tu te fais avoir ». On inculque souvent dans les sectes que « l’on aura pour ennemis les membres de sa famille » (Mat 10.36). Si l’entourage de la victime dénonce la secte, cela ne fait que renforcer cette « prophétie » que les dirigeants lui ont enseignée. Cela vient appuyer le sentiment que le groupe a raison. Or, il faut éviter à tout prix de pousser la victime encore plus loin dans la secte.

Demandez-vous à quel besoin ce groupe répond dans la vie de votre proche. S’agit-il d’un besoin d’acceptation et de communauté ? Y a-t-il des relations brisées dans la famille ou autour ? Des problèmes de dépendance ? Un parent dominant ou contrôlant ? Parfois, il faut d’abord résoudre des problèmes familiaux pour que le proche ait envie de revenir.

Prenez contact avec quelqu’un qui connaît bien le fonctionnement des sectes pour trouver des conseils spécifiques sur votre situation. Il existe beaucoup de documentation qui explique comment réagir vis-à-vis du membre d’une secte. Ce genre de situation peut rarement être résolue par la seule logique.

Comment l’Église peut-elle être mieux préparée à protéger ses brebis vis-à-vis de sectes religieuses ?

Les églises pourraient faire un travail d’introspection en se rappelant que le contrôle sectaire peut exister à divers degrés. Elles devraient se demander si elles n’exercent pas un contrôle légaliste sur leurs membres. Rappelons-nous que les pharisiens de l’époque de Jésus vivaient des vies d’apparence vertueuse, mais extrêmement légalistes. Ils imposaient des lois et des attentes aux autres tout en ne reconnaissant pas leurs propres besoins et leur pauvreté d’esprit.

Il faut aussi noter que les sectes forment leurs membres — elles les enseignent et leur demandent de transmettre à leur tour cet enseignement. Ils mémorisent les Écritures sur des sujets clés. Je suis peiné de voir des groupes de jeunes chrétiens ne penser qu’à s’amuser tout en négligeant un enseignement apologétique solide et compréhensible leur permettant de fonder leurs propres croyances. Un enseignement biblique sur les signes de la seconde venue du Christ pourrait les préparer à identifier les faux prophètes.

En outre, les églises n’informent pas assez leurs jeunes sur les sectes et le phénomène de la manipulation. Elles supposent peut-être que si on leur enseigne la Bible, ils seront en sécurité. Or, il est essentiel de leur apprendre à détecter la manipulation et l’emprise et à comprendre ce qu’est la conformité sociale. Il leur sera utile aussi de pouvoir identifier les vulnérabilités personnelles susceptibles d’être exploitées par une secte : incertitude quant à l’avenir, isolement et manque de bonnes amitiés ou période de transition telle que le départ à l’université.

On dit qu’« une clôture en haut d’une falaise est bien plus efficace qu’un hôpital en bas ». Nous avons besoin dans nos églises de prendre conscience des phénomènes sectaires et d’enseigner nos jeunes plus sérieusement. Prenons bien soin des jeunes qui sont à un tournant de leur vie. Ils sont particulièrement vulnérables.

Traduit par Anne Haumont

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