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Le conflit du Caucase viendra-t-il aussi en France ?

Le président de la Fédération des Églises Évangéliques Arméniennes d’Europe explique que des membres des diasporas turque et azérie menacent les quartiers où les Arméniens sont implantés, faisant de l’amour chrétien un véritable défi pour lui.

Des Français d'origine arménienne et leurs soutiens manifestent à Paris.

Des Français d'origine arménienne et leurs soutiens manifestent à Paris.

Christianity Today December 8, 2020
Gilbert Léonian

Tout au long de la guerre de six semaines qui a eu lieu dans le Haut-Karabakh, la diaspora arménienne a cherché à assurer un soutien à cette ancienne patrie montagneuse du Caucase que les Arméniens appellent Artsakh.

Au total, ils ont offert plus de 125 millions d’euros en aide économique et humanitaire.

En Californie, ils ont créé des blocages du trafic routier pour protester contre le manque de couverture médiatique.

Au Liban, ils ont suspendu des bannières contre l’agression azérie et turque.

Et en France, leur pression sur le Sénat a été couronnée de succès puisqu’ils ont obtenu une résolution non-contraignante reconnaissant l’indépendance de l’Artsakh. (La législation internationale reconnaît en effet le Haut-Karabakh comme un territoire azéri.)

Ce vote symbolique a fâché l’Azerbaïdjan qui a demandé que la France sorte du Groupe de Minsk, co-présidé par elle-même aux côtés de la Russie et les États-Unis et chargé de superviser les négociations avec l’Arménie depuis 1994. La Turquie, pour sa part, cherche à prendre un rôle de premier plan.

Mais les conséquences de cette situation se manifestent bien au-delà des politiques régionales. La controverse pourrait même menacer la paix sociale française, au moment même où le Président Emmanuel Macron lance une campagne contre le « séparatisme » islamique.

L’Azerbaïdjan, mais surtout la Turquie, son alliée, ont en effet une importante diaspora répartie dans toute l’Europe. Ainsi, début novembre, des Azéris et des Turcs ont mené des manifestations dans des quartiers arméniens de la région lyonnaise, allant jusqu’à vandaliser le mémorial du génocide arménien.

En conséquence, la France a dissout l’un des groupes les plus violents, appelé les « Loups gris ».

Pour mieux évaluer la situation, nous nous sommes adressés à Gilbert Léonian, un pasteur basé en région parisienne et président de la Fédération des Églises Évangéliques Arméniennes d’Europe. Parmi les quelques 500 000 Français d’origine arménienne vivant en France, environ 3% sont évangéliques. Ils célèbrent leur culte dans neuf Églises.

Gilbert Léonian a étudié à la Faculté Libre de Théologie Évangélique de Vaux-sur-Seine, près de Paris. Il se souvient y avoir lu des numéros de Christianity Today dans les années 1970, alors qu’il étudiait la théologie systématique avec Henri Blocher, théologien évangélique renommé.

Gilbert Léonian et son épouse devant leur église en région parisienne.Gilbert Léonian
Gilbert Léonian et son épouse devant leur église en région parisienne.

Il nous parle des relations entre les diverses communautés ethniques, de ses peurs par rapport au sort des églises du Haut-Karabakh et de ses luttes personnelles pour aimer ses voisins azéris et turcs :

Gilbert Léonian, dans quelle mesure les communautés arménienne, turque et azérie sont-elles intégrées dans la société française ? Maintiennent-elles leur foi respective ?

Les premiers Arméniens sont arrivés en France au début des années 1920 suite au génocide de 1915-1918.

Les autres ont rejoint la France avec différentes vagues migratoires dues à l'insécurité qui régnait dans leur pays d'origine : Liban, Syrie, Turquie, Iran et, plus récemment, suite au tremblement de terre de 1988 en Arménie.

A ce jour, la population arménienne est principalement établie en France selon un axe sud-nord, depuis le port de Marseille, où la majorité des premiers immigrants arméniens sont arrivés et se sont installés, jusqu’à Paris, via Lyon, la seconde plus grande agglomération de France.

Le peuple arménien est profondément religieux. Il est le premier peuple de l'histoire de l'Église à avoir accepté le christianisme comme religion d'État en 301, 12 ans avant l'Édit de tolérance de l'empereur Constantin 1er en 313. En France, en plus de la minorité évangélique, 90% des Arméniens appartiennent à l’Église apostolique (orthodoxe) arménienne qui compte 24 Églises. Les catholiques représentent 7% de la population arménienne avec 5 Églises. Très peu d’Arméniens se disent athées.

Nous constatons cependant en France une grande sécularisation de la pratique religieuse, conformément à la tendance générale en Europe. Pour beaucoup d'Arméniens, l'Église est plus le lieu, en diaspora, du maintien de l'identité et de la culture arménienne, plutôt qu'un lieu de ressourcement de la piété chrétienne.

Concernant les Turcs et les Azéris, il y a environ 800 000 Turcs et 50 000 Azéris en France. D’une manière générale, ils essaient d'éviter de vivre à proximité des Français d'origine arménienne. Mais on les retrouve dans les grandes villes et un peu partout en France.

Toutes les études et tous les médias citent les Arméniens comme un exemple d'intégration réussie. Le Français d'origine arménienne le plus célèbre est le chanteur Charles Aznavour.

Par contre, les Turcs et les Azéris vivent souvent dans un certain repli identitaire et communautariste. Ils sont très attachés à leur religion musulmane.

La France compte 2 500 mosquées et lieux de culte musulmans et 800 imams, dont 300 n’ont pas la nationalité française. La moitié de ces derniers sont turcs et payés comme des fonctionnaires par l’État turc. Le précédent secrétaire général de l’organisation représentant le culte musulman en France était d’origine turque.

Cela donne une certaine idée de l’influence turque en France.

Quelles relations existe-t-il entre les Arméniens et les autres communautés ethniques ?

Dans la mesure où les gouvernements turcs successifs n'ont pas reconnu le génocide de 1,5 millions d'Arméniens en 1915, cette blessure n'est toujours pas guérie. La majorité des Arméniens gardent une profonde amertume et une profonde haine face à cette injustice.

Pour sauver leurs vies, les membres de ma propre famille ont fui les massacres en passant par la Syrie. Ils sont arrivés à Marseille en 1922, traumatisés et ayant tout perdu.

Mes parents, moi-même, mes enfants et petits-enfants sommes nés en France. Nous avons fait un long chemin d'intégration depuis cinq générations.

Au fond de moi, tout en étant chrétien né de nouveau et pasteur, sans chercher à cultiver la haine et la vengeance, j'avais toujours au fond de moi une distance vis à vis des Turcs et de tout ce qui est turc.

Et puis, un jour, ce mur est tombé.

Grâce à la prière et à la compassion que Dieu a déversée dans mon cœur, j'ai commencé un chemin de dialogue dans le but d'arriver un jour à une réconciliation fondée sur la vérité. Et Dieu a mis sur mon chemin un pasteur turc qui a reconnu l'horreur du génocide et qui a demandé pardon au peuple arménien en se mettant à genoux devant toute l'assemblée de mon Église.

En 2020, avec des amis turcs de ma région, nous devions aller visiter, le village de nos grands-parents en Cilicie, afin de continuer sur ce chemin de guérison intérieure. La COVID -19 nous en a empêchés.

Mais, après les horreurs commises dernièrement par les dirigeants de la Turquie et de l'Azerbaïdjan dans le Haut-Karabakh, la douleur du génocide s'est à nouveau réveillée en moi. J’ai le sentiment que ce chemin de dialogue s'est à nouveau éloigné de moi, et pour très longtemps.

Plusieurs groupes de chrétiens ont une véritable vision de Dieu pour faire connaître l'Évangile de Jésus-Christ au peuple turc. Je ne peux que les encourager à le faire et prier pour eux.

Que s’est-il passé durant cette manifestation de Turcs en région lyonnaise ?

L'impensable s'est produit à Décines, une ville près de Lyon à forte densité arménienne. Le 1er novembre 2020, environ 250 Turcs appartenant à un parti extrémiste ont défilé dans la rue principale de la ville en scandant des slogans anti-arméniens très violents. C’était comme une véritable chasse à l'homme. Quelques jours plus tard, en pleine nuit, ils ont tagué, toujours à Décines, les murs du Musée du patrimoine arménien, ainsi que le monument en souvenir des victimes de 1915. Ce type de manifestation haineuse s'est reproduit dans la ville de Vienne, au Sud de Lyon, une autre ville avec une importante population arménienne.

Après nous avoir chassés de nos terres, il y a 100 ans, ils nous pourchassent dans cette terre d'accueil qu'est la France, notre nouvelle patrie. Tous les édifices publics arméniens, dont les églises, les écoles, les centres culturels, etc… ont été placés sous surveillance policière dans toutes les villes de France, là où réside une forte communauté arménienne.

L'église de Gilbert Léonian en région parisienne.Gilbert Léonian
L’église de Gilbert Léonian en région parisienne.

Comment la communauté arménienne a-t-elle réagi à ce genre d’événement ?

Comme à leur habitude, les Arméniens ont réagi par des moyens pacifiques. Partout des meetings et des marches de protestation ont été organisés pour dénoncer le massacre des Arméniens dans le Haut-Karabakh.

A Paris, nous étions près de 20 000 personnes.

Nous avons aussi alerté le Président Emmanuel Macron, nos élus, les médias.

Dans plusieurs villes de France, dont la mienne à Alfortville, près de Paris, nous avons organisé des veillées de prières œcuméniques en faveur de la paix, avec notamment des apostoliques et évangéliques arméniens, des catholiques français et des maronites libanais.

Les officiels azerbaïdjanais déclarent qu'une fois qu'ils auront regagné la souveraineté sur le Haut-Karabakh, ils ne feront pas de mal aux citoyens arméniens. Comment voyez-vous la situation ?

Je reste très pessimiste sur la sécurité des quelques Arméniens qui vont demeurer dans la partie libre du Karabakh. Comment peut-on faire confiance à un chef de gouvernement qui s'est pavoisé en disant : « Nous avons enfin chassé ces chiens d'Arméniens ! »

Mon cœur saigne lorsque je vois dans les médias que les Arméniens qui fuient la zone occupée par les Azéris brûlent la maison qu'ils ont construite de leurs propres mains, afin qu'elle ne tombe pas aux mains des conquérants azéris.

Il ne faut pas nous faire d’illusions : les évènements dramatiques de Conflans-Sainte Honorine où un professeur d'histoire a été égorgé le 16 octobre 2020 devant son collège suite à son cours sur la liberté d'expression, et de Nice où trois fidèles catholiques ont, eux aussi, été égorgés pendant qu'ils priaient dans la cathédrale de la ville le 29 octobre, sont le fruit de la même idéologie fanatique à l'œuvre dans le carnage qu’a subi la population arménienne d'Artsakh.

Maintenant que l'accord de cessez-le-feu a été signé au détriment des Arméniens, quelles sont vos craintes ?

Tout d'abord, cette défaite ignoble et la perte des 3/4 du Haut-Karabakh sont un véritable crime contre l'humanité qui restera comme une plaie béante dans l'histoire des peuples civilisés. J'ai peur que le peuple arménien, qui a donné au cours des siècles tant de martyrs pour la cause de l'Évangile du Christ, ne se remette que difficilement de ces actes de barbarie en plein 21e siècle.

Je suis très inquiet sur la préservation des 500 églises et édifices religieux du Haut-Karabakh qui vont tomber aux mains de l'occupant. Le Haut-Karabakh est le berceau du christianisme arménien.

L'un des joyaux en grand danger est le monastère de Saint-Thaddée qui date du 12e siècle. Il est inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco. Saint Thaddée est l'un des deux apôtres de Jésus qui ont évangélisé le peuple arménien au 1er siècle.

Et enfin je suis très préoccupé pour l'Occident. Après ce drame brutal vécu au vu et au su du monde entier, qui arrêtera le fanatisme religieux ?

Quelle est actuellement votre prière ?

Les sujets de prières sont très nombreux, car le peuple arménien est à l'agonie, et il a besoin de la solidarité du monde entier. Au lieu de cela, nous déplorons le silence coupable des autorités internationales, ainsi que le manque de courage manifesté par les Églises de toutes confessions.

Je suis pasteur, par la grâce de Dieu, au sein des Églises évangéliques arméniennes de France depuis 47 ans, et je n'ai jamais été autant ébranlé dans mon humanité et dans ma foi chrétienne que par cette guerre barbare et cette capitulation injuste.

Ma prière, c'est que Dieu manifeste sa justice, en son temps et à sa manière.

Interview et traduction par Jean-Paul Rempp, avec reportage additionnel de Jayson Casper.

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Semaine de l’Avent 2 : La présence de Dieu et ses promesses

Méditations quotidiennes pour Christianity Today.

Christianity Today December 5, 2020
Illustration by Jared Boggess

Sauter à la lecture quotidienne : Dimanche | Lundi | Mardi | Mercredi | Jeudi | Vendredi | Samedi

Dimanche : Dieu a vu

Lecture du jour : Exode 1.1 – 3.10

L’exode d’Israël hors d’Égypte a fait travailler les imaginations d’innombrables générations. Fondamentalement, c’est une histoire d’espérance. Au début, les Israélites ne pouvaient pas s’en rendre compte. C’était une minorité méprisée, asservie par un pharaon ambitieux et rapace qui cherchait continuellement à soutirer du profit à un coût toujours moindre. Bien qu’il dépendît de leur travail, Pharaon considérait les Israélites – surtout les hommes – comme une menace potentielle. Non seulement il les exploitait jusqu’à l’os, mais il cherchait à exterminer leurs fils.

L’auteur de l’Exode commence son récit en s’intéressant aux femmes : des sages-femmes, une mère, sa fille, une servante et la fille de Pharaon. Chacune agit dans sa sphère d’influence pour résister à la politique cruelle de Pharaon. À elles toutes, elles sauvent Moïse le nouveau-né. Elles agissent avec espérance, refusant de se laisser soumettre par le régime. L’auteur décrit leurs actes de bravoure dans les termes où il décrira ensuite la manière dont Dieu sauvera la nation israélite.

Observons ces exemples : la mère de Moïse vit qu’il était beau, ce qui nous rappelle que Dieu attache du prix à chaque être humain fait à son image. Elle le plaça dans une caisse de jonc parmi les roseaux. Cette caisse (ou « panier ») fait écho au temps où Dieu sauva la famille de Noé de la mort par les eaux. Le sauvetage de Moïse préfigure la future fuite à travers la Mer des Roseaux (improprement appelée la Mer « Rouge »). La fille de Pharaon vit le coffre, vit le bébé qui pleurait et eut pitié de lui. Soudain, il y eut de l’espoir pour cet enfant condamné. Ensuite, on apprend que Dieu a vu son peuple qui souffrait, qu’il a entendu ses plaintes, et qu’il s’en est préoccupé. C’est cela qui a poussé Dieu à intervenir en envoyant Moïse pour conduire le peuple hors d’Égypte.

L’espérance chrétienne repose sur le fait que Dieu voit. Rien n’échappe à sa vigilance. Au cœur de l’Avent, se trouve l’idée que Dieu voit un monde qui est parti de travers et qu’il va faire quelque chose pour le remettre dans le droit chemin. Il peut quelquefois paraître distant de notre souffrance, mais il intervient avec cohérence pour confirmer l’alliance qu’il a conclue avec Abraham (Gn 17). C’est à cause de cette même alliance que Dieu a envoyé Jésus dans le monde.

Le récit de l’Exode nous invite à participer à l’œuvre de rédemption audacieuse de Dieu. Les femmes de ce récit n’ont pas eu d’appel du clairon venu du ciel pour les pousser à l’action. Elles ont simplement vécu comme si Dieu était capable de voir et d’agir en conséquence. Elles savaient ce qu’il était juste de faire, et elles l’ont fait.

Carmen Joy Imes

Lire Exode 1.1 – 3.10

. (On peut également lire 3.11 – 4.17 et 13.17 – 14.31.) En quoi les femmes des chapitres 1 et 2 incarnent-elles l’espérance ? Comment l’Exode peut-il enrichir notre approche de l’Avent ?

Lundi : La paix dans la tempête

Lectures du jour : Psaumes 46 et 112

Le psaume 46 affirme avec confiance : « nous sommes sans crainte quand la terre est bouleversée, quand les montagnes sont ébranlées au cœur des mers » (v.3). Notre monde, comme celui du psalmiste, est en plein marasme : une pandémie, une récession, de l’injustice raciale, des incendies démentiels, des ouragans, des inondations, sans oublier des élections tendues. Notre terre craque de partout et les montagnes s’effondrent dans la mer.

Ce qui me frappe dans ce psaume, c’est son incitation à la sérénité : « Arrêtez, et sachez que je suis Dieu ! » (v.11). Cette sérénité n’est pas le produit dérivé de problèmes résolus. Le psalmiste reste entouré par le grondement des nations et les catastrophes naturelles. Cependant, même là, dans le tumulte, Dieu impose la sérénité. Cela rappelle Jésus qui dort à l’arrière de la barque pendant la tempête (Marc 8.23-27). Sa confiance était si grande qu’il pouvait se reposer au milieu du fracas des vagues. Une paix aussi surnaturelle est accessible à quiconque sait qui est Dieu.

Au verset 11, Dieu explique pourquoi nous pouvons être apaisés : « Je domine sur les nations, je domine sur la terre. » Dieu connaît le déroulement de l’histoire. À la fin, c’est lui qui gagne. Cette assurance-là influence notre manière de réagir aux défis de la vie. Ce Dieu -là, celui qui finira par triompher, il est près de nous (v.8, 12). Il est notre forteresse dans la tempête.

Notre espérance émerge depuis le cœur même des ennuis – sans agitation, sans crainte –, non pas parce que nous avons confiance en nous-mêmes, mais parce que celui qui connaît tout et voit tout est avec nous.

Telle est l’espérance de l’Avent. Jésus s’est fait homme, il s’est plongé dans la tourmente de l’histoire humaine. Il a poussé son premier cri dans un monde en souffrance, où Rome prélevait des impôts injustes et gardait la main sur le culte d’Israël. Et quand Jésus reviendra pour notre rédemption finale, il se replongera dans un monde encore en proie à son lot de troubles.

Comme le dit le Psaume 112 : « La lumière se lève dans les ténèbres pour les hommes droits… [Le juste] ne redoute pas les mauvaises nouvelles, son cœur est ferme, plein de confiance dans l’Éternel » (v.4, 7). Un cœur ferme sait comment se termine l’histoire, de sorte qu’il affronte les tempêtes avec confiance. Voilà notre espérance.

Carmen Joy Imes

Méditez sur les Psaumes 46 et 112

. Quelle vision ces psaumes ont-ils de la paix et de l’espérance quand les temps sont difficiles ? Vers quoi Dieu attire-t-il votre attention dans ces psaumes ?

Mardi : Une transformation stupéfiante

Lecture du jour : Ésaïe 2.1-5

Ésaïe 2 rapporte une vision de la maison du Seigneur sur sa montagne, qui est en réalité le lieu où se situe le temple. Mais dans la vision, la montagne est devenue la plus haute du monde, et elle est donc devenue une attraction touristique mondiale où convergent « toutes les nations ». La raison pour laquelle les gens viennent, c’est qu’ils veulent apprendre du Seigneur. À partir de là, l’enseignement du Seigneur va se répandre, et à partir de là il prendra les décisions qui, entre les peuples, mettront un terme à leurs dissensions.

C’est un tableau invraisemblable, pour plein de raisons. La raison pratique, c’est que Sion, la montagne sur laquelle se dresse la maison de l’Éternel, n’était qu’un promontoire insignifiant parmi quelques hauteurs plus impressionnantes (même le Mont des Oliviers est plus haut). Mais je présume que la vision n’a rien à voir avec un changement littéral lié à la topographie.

Ce qui est plus pertinent, c’est le fait qu’Ésaïe vient de décrire Jérusalem comme une ville qui est semblable à une prostituée – un lieu où il n’y a ni fidélité, ni authenticité, ni gouvernement digne de ce nom, ni attention portée aux gens vulnérables (1.21-23). Mais ce constat est suivi d’une promesse disant que la ville sera purifiée et appelée « cité fidèle » à nouveau, et « ville de la justice » à nouveau (v.26). Et c’est là qu’Ésaïe ajoute sa vision d’une seconde transformation stupéfiante (2.1-5). À la suite de la première transformation, peut-être cette vision du monde attiré vers Jérusalem sera-t-elle accomplie.

J’étais à une rencontre de prière il y a quelque temps dans laquelle un de mes collègues faisait remarquer que nous vivons dans le contexte d’une quadruple crise : une crise du système de santé, une crise raciale, une crise gouvernementale et une crise économique. Ce n’est pas un contexte dans lequel les gens se tournent vers ceux qui appartiennent à Jésus comme si eux savaient comment aborder ces crises ; il ne semble pas qu’ils se tournent vers le peuple de Dieu à la manière dont la vision d’Ésaïe dépeint les gens qui sont attirés vers Jérusalem. Pourtant, telle est bien la promesse de Dieu.

Quand Jésus est venu, il est venu comme le « oui » de Dieu à toutes ses promesses (2 Co 1.20). Il ne les a pas toutes accomplies ni tout de suite, mais il a garanti qu’elles trouveraient leur accomplissement. Puissions-nous répondre à cette vision et à cette promesse exactement comme Ésaïe y incitait son propre peuple : « marchons à la lumière de l’Éternel ! » (2.5).

John Goldingay

Méditez sur Ésaïe 2.1-5.

Qu’est-ce qui vous frappe le plus dans cette vision ? À quelles attentes fortes et à quelles espérances fondamentales s’adresse-t-elle ? Méditez sur son rapport avec l’Avent ; avec la première venue du Christ et son retour attendu.

Mercredi : Construire une route

Lecture du jour : Ésaïe 40.1-11

Au cours des deux ou trois décennies écoulées, le service des routes nationales israélien a construit un réseau impressionnant de routes dans tout le pays. Parmi les projets en cours, il y a celui d’une artère urbaine avec des tunnels et des ponts qui pourra nous emmener directement au centre de Jérusalem à partir du point où l’autoroute de Tel Aviv atteint l’extérieur de la ville. Le problème, c’est que la construction suppose qu’on déplace des tombes romaines qui ont 1 900 ans, ce qui suscite des protestations. Mais les gens veulent arriver à Jérusalem, et vite, et ils ressentent le besoin d’avoir une route qui surmonte les obstacles – un peu comme celle que Dieu commande en Ésaïe 40 : « Dégagez un chemin pour l’Éternel, nivelez dans la steppe une route pour notre Dieu ! » (v.3, Bible du Semeur).

À l’été de 587 av J.-C., Dieu est, pour l’essentiel, parti de Jérusalem. Il était excédé de l’infidélité de son peuple. Sa gloire s’était retirée, comme on le voit en Ézéchiel 10. Et une fois que Dieu s’était retiré, Neboukadnetsar avait toute liberté de faire son entrée. Il se mit à dévaster la cité si intégralement qu’il la rendit quasiment inhabitable et qu’il dut implanter son quartier général de province ailleurs, à Mitspa.

Pendant un demi-siècle, il ne se passa rien. Puis, en Ésaïe 40, Dieu dit à un de ses assistants de mandater des entrepreneurs surnaturels pour déployer une autoroute avec des ouvrages d’art et des tunnels afin de lui permettre de revenir dans la cité, et de ramener son peuple dispersé avec lui. Et Dieu revint vraiment. Et aussi certains de ceux qui avaient été exilés ; et ils firent de leur mieux pour rendre à nouveau la ville habitable. Le livre d’Esdras relate comment ils reconstruisirent le temple et comment Dieu revint y demeurer et les y rencontrer à nouveau.

Tout bien considéré, les choses allèrent mieux entre Dieu et son peuple pendant les 500 années suivantes, même si, la plupart du temps au cours de cette période, ils restèrent sous l’autorité d’une succession de puissances impériales. Ils aspiraient toujours à leur indépendance.

En 30 ap J.-C., apparaît Jean le Baptiste, qui reprend Ésaïe 40 et proclame que le peuple doit se tourner vers Dieu pour être purifié. Et de nouveau, Dieu dit : Construisez-moi une route, je reviens, et je vais prendre votre destinée en main (voir Mt 3.3). Cette fois, la grande route était morale et religieuse, et c’est Jean qui était désigné pour la tracer.

Et de fait, à chaque Avent, Dieu nous redit, comme il le dit en Ésaïe 40 : Construisez-moi une route. Vous voulez voir Jésus ? Il arrive.

John Goldingay

Réfléchissez sur Ésaïe 40.1-11

, en considérant d’abord son contexte originel : le peuple de Dieu en exil, qui vit loin de Jérusalem. Puis relisez-le à la lumière du rôle de Jean le Baptiste et de la venue du Christ (Mt 3). Qu’est-ce qui en ressort pour vous quand vous regardez ce passage avec des lunettes différentes ?

Jeudi : Une prière audacieuse et dangereuse

Lecture du jour : Ésaïe 63.19 – 64.8

Nous aimerions que tu déchires les cieux et que tu descendes, au point que devant ta présence les montagnes tremblent ! Telle est la prière d’Ésaïe 63. En Ésaïe, l’ordre des chapitres laisse entendre que cette prière provient d’un temps où les Perses avaient mis fin à la mainmise babylonienne sur le Moyen-Orient. Le problème, c’est que Juda trouve que cette passation de pouvoirs n’est pas vraiment une amélioration. Les prophètes ont dit à Juda que Dieu anéantirait toutes les superpuissances, mais ce temps-là paraissait repoussé indéfiniment. La Perse qui prend le dessus sur la Babylonie souligne cela. Tout change mais rien ne change. Alors, déchire le ciel et viens remettre de l’ordre, Seigneur !

Mais au chapitre 65 d’Ésaïe, Dieu s’énerve et dit, en gros : Tu es gonflé ! Dieu semble réagir avec colère à l’effronterie de ce que les gens de Juda ont dit en Ésaïe 63.19 et 64.

Quand Jésus est venu, oui, Dieu a déchiré les cieux et il est venu mettre les choses en ordre. Les Évangiles n’utilisent pas ce registre en rapport avec l’Incarnation, même s’ils y recourent en rapport avec la venue du Saint-Esprit sur Jésus lors de son baptême (Mc 1.10), lors de sa Transfiguration (Mc 9.7) et dans sa prière lorsqu’il est sur le point d’être exécuté (Jn 12.28-29).

Puis, quelques décennies plus tard, certains de ceux qui croient en Jésus posent une question analogue aux Judéens : Pourquoi est-ce que les choses ne bougent pas ? (2 P 3.4). En effet, eux aussi ils prient : Nous voudrions que tu déchires les cieux et que tu descendes ! Pierre leur répond lui aussi d’une manière conflictuelle. Il rappelle à ses destinataires que le monde a déjà été ébranlé, par l’eau, et qu’il le sera encore, mais par le feu (v. 5-7).

Aussi bien les gens de Juda que les premiers chrétiens étaient essentiellement de petites gens sous la coupe d’un énorme empire. Ce n’est pas le cas de la plupart d’entre nous. À bien des égards, l’empire, c’est nous. Quand nous prions ainsi, comme dans le texte cité : « nous aimerions que tu ouvres les cieux et que tu descendes, que tu viennes corriger les pouvoirs impériaux, que tu viennes remédier à l’injustice », la réponse de Dieu pourrait nous effrayer. On pourrait bien s’apercevoir que Dieu fait du tri dans nos vies à nous. Quand nous demandons : descends, Seigneur !, nous l’invitons à se confronter à nous et à nous remettre en question.

John Goldingay

Lire Ésaïe 63.19 – 64.8.

(On peut aussi lire 65.1-12.) Quand avez-vous ressenti l’impatience exprimée en 63.19 ? En quoi le contexte de Dieu confronté au péché vous éclaire-t-il sur 63.19 – 64.8 ? Comment souhaitez-vous répondre à Dieu ?

Vendredi : Vie et lumière

Lectures du jour : Ésaïe 9.1 ; Jean 1.4-5, 9

Certains d’entre nous ont grandi dans les villes, et donc nous ne savons pas vraiment ce que sont les ténèbres. Dans les villes, il y a toujours une lumière allumée quelque part, et c’est cette lumière qui nous permet de voir. Mais certains d’entre nous ont été élevés à la campagne, bien loin des lumières de la ville, là où la nuit est vraiment la nuit. Là où il fait si noir qu’on ne voit même pas sa propre main devant son visage.

Telle est l’image d’Ésaïe 9.1 : la noirceur du péché est si profonde et si totale qu’elle paralyse et immobilise. On ne peut pas faire un pas devant l’autre sans prendre de risque. On ne sait pas où on va. On est perdu. Ici, les ténèbres symbolisent l’aveuglement et la mort qui proviennent du péché.

Mais Dieu résout ce problème du péché et de la mort avec Noël. Ce sont les gens qui marchent dans les ténèbres qui ont « vu une grande lumière ». Ils n’ont pas allumé la lumière ; disons plutôt qu’on a allumé la lumière sur eux. Dieu fait irruption dans la nuit du péché avec une espérance nouvelle, une vision nouvelle et une vie nouvelle dans la justice.

On ne devrait pas être surpris de voir que presque tous les Évangiles reviennent à cette prophétie d’Ésaïe pour expliquer comment Jésus est venu dans ce monde. Par exemple, quand Jean nous parle de la naissance de Jésus – l’Incarnation –, il fait appel à ce symbole de la lumière. « En elle il y avait la vie, et cette vie était la lumière des êtres humains. La lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont pas accueillie… Cette lumière était la vraie lumière qui, en venant dans le monde, éclaire tout être humain » (Jn 1.4-5, 9).

Jésus est la lumière véritable. Cette saison évoque Dieu qui envoie cette lumière dans le monde pour donner le salut à tous ceux qui voudront bien croire en lui. Noël n’a rien à voir avec les guirlandes lumineuses sur le sapin ni avec les ampoules qui décorent la maison. Dans le meilleur des cas, ce ne sont que de piètres symboles d’une lumière bien plus puissante qui donne la vie au monde.

Cela, Ésaïe l’a vu 700 ans avant la naissance de Jésus. Il y a 2 000 ans, les apôtres ont vu de leurs yeux cette lumière dans le visage du Seigneur Jésus-Christ. Et aujourd’hui, il nous a donné cette lumière dans le message de l’Évangile. Quiconque se trouve dans l’obscurité doit se repentir du péché et croire à cette lumière afin d’entrer dans le royaume de Dieu. Voilà comment le Seigneur nous change. Voilà le message de la lumière qui donne la vie.

Thabiti Anyabwile

Cet article est adapté d’un sermon que Thabiti Anyabwile a prononcé le 17 décembre 2017. Avec autorisation.

Méditez sur Ésaïe 9.1 et Jean 1.4-5, 9.

Dans un esprit de prière, réfléchissez sur les

ténèbres,

la

lumière

et la

vie

dans ces passages. Comment la prophétie d’Ésaïe vous aide-t-elle à saisir l’espérance véritable apportée par le Christ ?

Samedi : Un Fils nous est donné

Lectures du jour : Ésaïe 7.14 ; 9.5-6

Ésaïe 9.5-6 est une splendide biographie prophétique de Jésus. Le fils que décrit Ésaïe est le « merveilleux conseiller ». Le mot merveilleux est le même mot souvent employé dans l’Ancien Testament pour désigner les miracles – les « merveilles » que Dieu a faites dans le monde. Et conseiller fait penser à la sagesse de Dieu. C’est Jésus, notre conseiller merveilleux, miraculeux, qui nous parle et nous guide afin que nous marchions dans les sentiers de la justice.

Ce fils est le « Dieu puissant ». Il est l’enfant exceptionnel dont Ésaïe 7.14 a dit qu’il naîtrait d’une vierge et qu’il serait appelé « Emmanuel », qui signifie « Dieu avec nous ». Puissance et force : il n’y a pas la moindre faiblesse en Dieu. Même quand il était un nourrisson dans une mangeoire, Jésus soutenait l’univers par sa parole faite de puissance.

Ce fils est le « Père éternel ». Cela ne signifie pas qu’il se confonde avec Dieu le Père ; le Père et le Fils sont deux personnes différentes dans la Trinité. On pourrait plutôt traduire cela en disant qu’il est le père de tous les siècles, extérieur au temps ; et dans son attitude envers son peuple, il est toujours paternel. Le Psaume 103.13 le formule ainsi : « Comme un père a compassion de ses enfants, l’Éternel a compassion de ceux qui le craignent. » Constamment dans les Évangiles, il nous est rapporté que Jésus voyait les gens et qu’il avait de la compassion pour eux. C’est un sauveur avec la tendresse d’un papa envers ses enfants.

Et ce fils est le « Prince de la paix ». Sur Jésus, Matthew Henry écrit : « En tant que Prince de la paix, il nous réconcilie avec Dieu. Il est le Dispensateur de la paix du cœur et de la conscience ; et lorsque son royaume sera pleinement établi, les hommes n’apprendront plus la guerre. »

Jésus est une merveille. Quand il nous conseille, il n’est jamais défaillant. Il est le Dieu puissant. Il a le cœur d’un père. Il apporte une paix royale à tous ceux qui croient en lui. Il est bien davantage qu’un petit enfant de plus. Il est Dieu qui vient dans le monde. Et ne passez pas à côté de cette expression importante : il nous a été donné.

Il est pour nous, si nous l’acceptons. Dans toute sa sagesse, toute sa puissance et tout son amour paternel, ce même Jésus vient dans le cœur de ceux qui lui font confiance. C’est le Fils que le monde attendait. Et il est venu dans le monde pour se donner à nous.

Cet article est adapté d’un sermon que Thabiti Anyabwile a prononcé le 17 décembre 2017. Avec autorisation.

Tabithi Anyabwile

Prenez le temps de méditer Ésaïe 7.14 et 9.5-6.

Quelles sont les expressions ou les notions qui vous parlent le plus ? Quelle espérance pensez-vous qu’elles ont apportées aux premiers destinataires d’Ésaïe ? En quoi suscitent-elles de l’espérance en vous, aujourd’hui ?

Les auteurs :

Tabithi Anyabwile est pasteur de Anacostia River Church à Washington DC. Il est l’auteur de plusieurs livres, notamment Exalting Jesus in Luke.

John Goldingay est professeur principal d’Ancien Testament au Fuller Theological Seminary. Sa traduction de tout l’Ancien Testament s’intitule The First Testament.

Carmen Joy Imes est professeure d’Ancien Testament au Prairie College et l’auteure de Bearing God’s Name : Why Sinai Still Matters.

Traduit par Philippe Malidor

20 prières supplémentaires face à la pandémie

Implorer Dieu est toujours le moyen le plus efficace de réagir en temps de crise.

Christianity Today December 4, 2020
Illustration by Mallory Rentsch / Source Images: The New York Public Library / Igor Rodrigues / CDC / Unsplash

La semaine dernière, des ambulanciers sont venus chercher notre voisin âgé de l’autre côté de la rue alors que mes enfants et moi regardions impuissants depuis notre fenêtre de devant. Ils ont revêtu des masques et ont noué les uns pour les autres leurs longues blouses bleues. « Pourquoi le camion de pompiers est-il là aussi ? » a demandé mon fils.

« Je pense qu'il vient toujours quand on appelle une ambulance », dis-je, essayant de me rendre utile malgré mon sentiment présent d'inutilité.

Alors que plus de la moitié du monde vit sous l'injonction de se confiner à la maison, nous sommes nombreux à éprouver ce sentiment d’impuissance face à la souffrance d'autrui. En temps normal, il y aurait des repas à préparer et des malades à visiter à l’hôpital. Mais ces jours ne sont pas normaux.

Et pourtant, nous ne sommes pas impuissants. Loin de là. L’une des choses les plus efficaces que nous puissions faire pour nos voisins partout à travers le monde est de nous mettre à genoux et de tendre les mains vers Dieu, la source de tout secours.

J’ai écrit « 20 prières pour prier pendant cette pandémie » pour nous rappeler que Dieu est bien celui qu’il déclare être : « Voyez donc que c’est moi qui suis Dieu et qu’il n’y a pas d’autre dieu que moi. » (Dt 32:39).

Dans les semaines qui ont suivi la publication de cet article, des gens du monde entier ont lu, prié (vraisemblablement) et partagé ces prières en grand nombre. Ce grand nombre fait honneur à la facon dont l’Église se rassemble en cas de crise.

Pour ceux qui continueront avec nous à unir leurs mains malgré la distance, voici 20 prières supplémentaires pour les personnes qui nous entourent dans le monde entier :

1. Pour l’Église, luttant avec foi au milieu de la souffrance mondiale : notre Dieu, nous croyons en ta volonté de guérir et en ton pouvoir de le faire. Viens au secours de notre incrédulité.

2. Pour ceux qui se sont tournés vers la foi en Jésus pour la toute première fois durant cette pandémie : notre Dieu, aide nos nouveaux frères et sœurs à grandir dans la grâce et la connaissance de notre Sauveur.

3. Pour ceux qui ne connaissent pas encore Jésus mais dont le cœur est animé de curiosité spirituelle et d'aspiration à l'éternité : notre Dieu, dans ta bonté, conduis en beaucoup à la repentance et à une foi obéissante en ton Fils.

4. Pour les secouristes et les membres du personnel soignant qui sont en première ligne, en particulier dans les épicentres de l’infection : notre Dieu, renforce leurs rangs et fortifie-les d'une énergie surnaturelle.

5. Pour les entreprises ayant la capacité (et la mission) de fabriquer des équipements de protection indispensables pour les travailleurs de la santé qui sont en première ligne : notre Dieu, affermis l'ouvrage de leurs mains.

6. Pour ceux qui travaillent dans les transports en commun, les policiers et les autres fonctionnaires qui sont à l'œuvre sans relâche et souvent sans protection adéquate : notre Dieu, donne-leur de l’endurance pour chaque jour et préserve-les de tomber malade.

7. Pour les maisons de retraite, les centres de réadaptation et les autres établissements de soins de longue durée : notre Dieu, encourage les résidents isolés et fortifie les membres du personnel qui les aident. Empêche la propagation du virus et réconforte les familles qui ne peuvent plus rendre visite à leurs proches.

8. Pour les personnes incarcérées, qui sont particulièrement vulnérables à la propagation de ce virus : notre Dieu, donne la sagesse aux responsables de leurs prisons. Protége les détenus et le personnel de la violence et de la maladie. Délivre-les tous de la peur.

9. Pour les femmes et les enfants exposés à la violence et aux abus : notre Dieu, retiens ceux qui leur font du tort. Assure la protection et le secours des victimes et réconforte-les dans leur vulnérabilité.

10. Pour les pays en voie de développement : notre Dieu, contiens la propagation de l’épidémie dans les villes les plus densément peuplées et les plus pauvres du monde. Epargne les pays déjà accablés par la maladie et les problèmes de santé chroniques.

11. Pour les personnes d'origine asiatique en Occident, les Africains en Chine et les autres personnes partout dans le monde qui sont victimes de racisme en lien avec le COVID : notre Dieu, confronte ce mal à une prompte justice et délivre nos frères et sœurs de la méchanceté.

12. Pour tous ceux qui s’inquiètent de leur avenir économique, de comment payer leur logement, leur nourriture et les médicaments essentiels : notre Dieu, donne-leur accès à des sources de soutien dans l’Église, auprès de leur gouvernement et dans leur entourage. Permets-leur de se tourner vers toi pour subvenir à leurs besoins.

13. Pour les petites Églises sans réserves financières : notre Dieu, garde leurs portes ouvertes et exhorte ton peuple à donner généreusement.

14. Pour les enseignants, contraints d’adapter leurs programmes à l’apprentissage en ligne, et pour les étudiants, contraints de développer plus d’autonomie : notre Dieu, fais des foyers des lieux de curiosité, de recherche et d’étude. Accorde une aide particulière aux enfants qui n'ont pas d'accès régulier à Internet et aux autres outils numériques.

15. Pour ceux qui sont déçus par l’annulation de célébrations marquantes comme des remises de diplômes, des mariages ou des fêtes prénatales (baby showers) : notre Dieu, réconforte-les dans leur déception et rends possible pour eux de futures retrouvailles entre amis et en famille.

16. Pour les femmes enceintes, qui font face à la perspective de vivre le travail et l'accouchement sans l’équipe de soutien qu'elles avaient espérée : notre Dieu, délivre-les de la peur et remplis-les de joie alors qu'elles assistent à l'éclosion d'une nouvelle vie.

17. Pour les femmes confrontées à une grossesse inattendue en cette période de crise économique : notre Dieu, aide-les à trouver le soutien pratique et émotionnel dont elles ont besoin pour accueillir cet enfant.

18. Pour les Églises, les ministères para-ecclésiaux et les organisations chrétiennes qui font de l’évangélisation en ligne et de la formation de disciples : notre Dieu, bénis nos efforts numériques imparfaits et continue à faire progresser le royaume de Jésus par l'intermédiaire de ton peuple.

19. Pour ceux qui meurent seuls dans les hôpitaux et pour leurs proches : notre Dieu, approche-toi d’eux et, dans ta miséricorde, permets-leur de rencontrer Christ, l’ami qui ne nous quitte ni ne nous abandonne jamais.

20. Pour ceux qui s'investissent dans la politique à tous les niveaux : notre Dieu, aide nos dirigeants à travailler en bonne intelligence et à communiquer efficacement, en mettant de côté leurs intérêts personnels pour rechercher le bien commun.

Notre Dieu, nous reconnaissons que tu as créé le monde par ta Parole, et que par elle tu continues à le soutenir. Nous nous confions en ta sagesse, ta puissance et ta bonté. Aide-nous en toute occasion à aimer comme tu as aimé et à servir comme tu sers. Donne-nous le courage de parler de notre espérance en Jésus, qui a souffert pour nous, qui est ressuscité d'entre les morts et qui reviendra. Amen.

Jen Pollock Michel est l’auteur de Teach Us to Want , Keeping Place et Surprised by Paradox . Elle vit avec son mari et leurs cinq enfants à Toronto.

Traduit par Valérie Marie-Agnès Dörrzapf Révisé par Léo Lehmann

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L’Avent : Une espérance vivante

Méditations quotidiennes pour Christianity Today.

Christianity Today November 28, 2020
Jared Boggess

Que signifie avoir l’espérance par temps d’épreuves ? L’espérance, c’est plus qu’un ressenti : il ne s’agit pas simplement d’être perpétuellement optimiste ni d’avoir une attitude « espérante ». L’Écriture nous offre une approche de l’espérance qui est beaucoup plus solide. L’espérance chrétienne a de la robustesse, de l’endurance et un projet. Et c’est Dieu qui en est la source.

« Conformément à sa grande bonté, [Dieu] nous a fait naître de nouveau… pour une espérance vivante » (1 P 1.3). Et c’est notre « Dieu de l’espérance » qui nous rend capables de « déborder d’espérance, par la puissance du Saint-Esprit » (Rm 15.13). Cette réalité n’est pas vraie uniquement dans les bons moments ; en vérité, c’est dans les périodes obscures er difficiles que l’espérance manifeste véritablement sa fougue.

Comme Jay Y. Kim l’écrit dans « L’espérance : un saut pour l’avenir »,

Voilà à quoi ressemble l’espérance chrétienne. Elle n’esquive par la peur, l’inquiétude ou le doute ; elle leur fait face. Elle tient ferme, elle se cramponne à la paix au milieu du chaos. Au travers des nombreuses tempêtes traîtresses de la vie… l’espérance chrétienne s’ancre dans quelque chose de plus grand qui est arrivé et dans quelque chose de plus grand qui va arriver encore.

Le projet de l’Avent 2020 de Christianity Today explore le thème de l’espérance au fil de son déroulement dans tout le récit biblique. Dans ces méditations quotidiennes, nous réfléchissons sur l’espérance du peuple de Dieu dans l’Ancien Testament quand il se reposait entièrement sur Dieu dans la difficulté et dans l’épreuve [Semaine 1]. Nous considérons les prophéties et les promesses d’espérance qui renvoient vers le Premier Avent : la venue du Messie [Semaine 2]. Nous méditons sur le miracle de l’espérance qui fait irruption dans l’Incarnation, lorsque « la Parole s’est faite homme, [et qu’]elle a habité parmi nous » sous forme d’un petit enfant, enveloppé de langes et couché dans une mangeoire (Jn 1.14 ; Lc 2.12). Et nous réfléchissons sur notre espérance relative à la future venue du Christ – le Second Avent que nous attendons – qui nous donne persévérance, confiance et joie dans nos vies quotidiennes, quelles que soient les difficultés que nous avons à traverser [Semaine 3 et Semaine 4].

Telle est notre « espérance vivante », que certaines traductions rendent par notre « grande attente ». Notre espérance est animée par notre attente confiante selon laquelle l’enfant qui est né va un jour revenir dans la gloire pour redresser tout ce qui est tordu, et son royaume n’aura pas de fin.

Kelli B. Trujillo, Rédactrice

Traduit par Philippe Malidor

Semaine de l’Avent 1 : Il reviendra dans la gloire

Méditations quotidiennes pour Christianity Today.

Christianity Today November 28, 2020
Illustration by Jared Boggess

Sauter à la lecture quotidienne : Dimanche | Lundi | Mardi | Mercredi | Jeudi | Vendredi | Samedi

Dimanche : Entre-deux

Lectures du jour : Apocalypse 1.4-9 ; 19.11-16 ; 21.1-5, 22-27 ; 22.1-5

Presque d’emblée, le chapitre qui ouvre l’Apocalypse élève notre regard afin qu’il contemple une gloire qui surpasse radicalement notre condition terrestre : « Je suis l’Alpha et l’Oméga… celui qui est, qui était et qui vient… » (1.8). Notre Sauveur, « celui qui nous aime, qui nous a lavés de nos péchés », reviendra : « Le voici qui vient avec les nuées. Tout œil le verra » (1.5, 7-8). Jean poursuit en décrivant une merveilleuse vision du Christ lui-même – une rencontre si intimidante que, dit Jean, « je tombai à ses pieds comme mort » (v.17).

Mais en plein milieu de ces deux passages resplendissants, il y a une ligne que l’on pourrait facilement rater : la brève description que fait Jean de sa vie et de celles des destinataires de sa lettre. Jean écrit : « Moi Jean, votre frère et votre compagnon dans la persécution, le royaume et la persévérance en Jésus-Christ » (v.9). Jean a écrit l’Apocalypse en exil ; le livre fut diffusé au sein d’une Église souffrante en butte à des pressions et à des persécutions qui allaient constamment s’aggraver dans les décennies à venir. Les destinataires initiaux de l’Apocalypse vivaient dans deux réalités qui se superposaient : leur assurance quant au règne souverain et au retour glorieux du Christ, et leur expérience quotidienne sur terre, d’attente et de souffrance.

Quelque deux mille ans plus tard, nous vivons encore dans ces deux réalités qui se superposent. Ici, entre la première venue du Christ et son retour en gloire, nos vies peuvent être ressenties comme un mélange de royaume et de confiance parallèlement à l’attente et à la souffrance.

Il n’est pas étonnant que les paroles franches de Jean sur la souffrance et sur la nécessité de la patience persévérante soient entremêlées dans ses visions de gloire, car c’est cette vision de ce qui est à venir qui permet et enhardit cette persévérance. Il faut considérer les réalités décrites dans le grand finale de l’Apocalypse : le Christ victorieux, monté sur un cheval blanc, et triomphant du mal ; « un nouveau ciel et une nouvelle terre » sans tristesse ni deuil ; il « habitera avec eux, ils seront son peuple et Dieu lui-même sera avec eux » (21.1, 3) ; et une Cité sainte où des gens de toutes les nations sont rassemblés dans la lumière de la gloire de Dieu. Avec la perspective de cette réalité dernière et éternelle, toutes les circonstances de ce monde, aussi dures soient-elles, perdent de leur importance.

La notion de persévérance est répétée plusieurs fois en Apocalypse 1 à 3, souvent associée au registre du triomphe et de la conquête. La résistance n’est pas faite uniquement de patience, mais aussi de ténacité, de courage et de force. Et c’est ce que Dieu nous donne alors que nous vivons dans l’entre-deux. Dans le Christ, nous trouvons, comme le dit un vieux cantique, de la force pour aujourd’hui et une lumineuse espérance pour demain.

Kelli B. Trujillo

Méditez sur Apocalypse 1.4-9 ; 19.11-16 ; 21.1-5, 22-27 et 22.1-5.

Comment la méditation sur cet avenir affecte-t-elle votre regard sur votre situation actuelle ? Priez, invitez Dieu à renforcer votre persévérance et à faire vivre votre espérance pour l’avenir.

Lundi : Espérance prophétique

Lectures du jour : Zacharie 9.9-17 ; Romains 5.3-5, 8.18-30

« L’espérance commence dans le noir… » Je n’ai jamais pu me défaire complètement de ces mots d’Anne Lamott dans son livre Bird by Bird. Cette façon de parler de l’espérance est récemment devenue un leitmotiv de ma vie – non pas dans l’abstrait, mais comme une action vivante, une lutte, un engagement, une discipline.

Le théologien Jürgen Moltmann enracine le registre de l’espérance dans la résurrection de Jésus et dans la pratique de la protestation. Parfois, l’espérance paraît être le seul langage assez fort pour contrer le désespoir. À moins que ce ne soit, pour le dire comme Anne Lamott, une sorte de « patience révolutionnaire ».

Quelle que soit la nature de l’espérance, il y a un élément au plus profond de chacun de nous qui attend ardemment quelque chose. Parfois, c’est comme un chuchotement, mais c’est là. Néanmoins, si l’espérance surgit des profondeurs de l’âme, elle provient souvent de l’obscurité. L’espérance commence dans le chaos.

Certains jours, on a l’impression que l’on n’a jamais échappé à ce nuage qui a recouvert la surface de la terre pendant la crucifixion de Jésus. Notre monde disloqué et pesant semble tellement ténébreux qu’Élie Wiesel, en retraçant les horreurs d’Auschwitz et de la Shoah, ne pouvait que les appeler Nuit. Nous avons à dire la vérité de la souffrance et même de la souffrance de l’espérance.

J’étais avec ma grand-mère il y a quelque temps et je lui ai demandé de me raconter sa vie. Au début, elle ne voulait pas. On ne peut qu’imaginer les cicatrices profondes que son âme a endurées sur plus de 80 ans. Ses récits étaient durs. Il est difficile de décrire ce que ça signifiait pour elle d’exister en tant que femme noire dans le Sud des États-Unis. Un seul mot semblait résumer l’ardeur à survivre au milieu d’un monde cruel : amour. « Le Seigneur ne m’a jamais laissée tomber », me disait-elle.

Radical, capable de changer la vie, les communautés et le monde, l’amour n’est-il pas la voie de Jésus ? Il est venu prêcher la bonne nouvelle du royaume et guérir toutes sortes de maladies et de détresses. Prophétiser l’espérance, c’est un amour dangereux.

Martin Luther-King a dit : « La puissance dans ce qu’elle a de meilleur, c’est l’amour qui fait prévaloir les exigences de la justice, et la justice dans ce qu’elle a de meilleur, c’est l’amour qui rectifie tout ce qui se dresse contre l’amour. » Voilà ce que signifie se tenir dans le monde comme des prophètes de l’amour, de la puissance et de la justice ou, pour reprendre le vocabulaire biblique de Zacharie, être des « prisonniers pleins d’espérance » (9.12). Comme l’a dit quelqu’un : « Je ne sais ce que réserve le lendemain, mais je sais qui a en réserve le lendemain. » Alors que demain s’approche, je vais prophétiser l’amour aujourd’hui.

Danté Stewart

Ceci est une adaptation d’un article plus long intitulé “Why We Still Prophesy Hope,” (« Pourquoi nous continuons à prophétiser l’amour »), publié le 21 octobre 2019 sur ChristianityToday.com.

Lisez Zacharie 9.9-17 et Romains 5.3-5 ; 8.18-30.

Réfléchissez à ce à quoi ressemble l’espérance « dans le noir ». Comment la souffrance produit-elle espérance et amour ? Comment la première venue du Christ et son retour à venir vous permettent-ils de prophétiser l’espérance aujourd’hui ?

Mardi : Viens, Seigneur Jésus

Lectures du jour : Jean 1.1-5, 14 ; Apocalypse 22.12-13, 20

Dans son Évangile, Jean dit : « Au commencement, la Parole existait déjà. La Parole était avec Dieu et la Parole était Dieu… Et la Parole s’est faite homme, elle a habité parmi nous » (Jn 1.1, 14). Nous avons un Dieu qui est venu. Il est venu pour rendre tangible l’intangible et visible l’invisible. Il est venu pour se rendre connaissable. Mais notre espérance ne tient pas seulement en ce qu’il est venu, mais en ce qu’il vient.

Il est de retour. Cette promesse, c’est que nous pouvons trouver du sens à ce dont nous souffrons et manquons aujourd’hui sur cette planète. Quand il reviendra, les justes seront justifiés. Quand il reviendra, il apportera avec lui votre justification pour les moqueries auxquelles vous vous êtes exposé pour avoir cru en un Dieu que vous ne voyiez pas. Quand il reviendra, tous les humains qui auront essayé de devenir des potentats et des maîtres seront jetés à terre, et nous verrons qu’il y a toujours eu un seul maître des maîtres et un seul Roi des rois. D’un seul coup, notre foi deviendra la vue. Celui dont nous aurons parlé et à qui nous aurons parlé, nous le verrons.

En Apocalypse 22, Jésus dit : « Voici, je viens bientôt et j’apporte avec moi ma récompense pour traiter chacun conformément à son œuvre. Je suis l’Alpha et l’Oméga, le premier et le dernier, le commencement et la fin » (v.12-13). Jean témoigne : « Celui qui atteste ces choses dit : ‘Oui, je viens bientôt’ » et c’est comme si Jean n’avait plus rien d’autre à dire au moment de terminer sa lettre : « Amen ! Viens, Seigneur Jésus ! » (v.20).

Quand nous regardons vers l’avenir, les choses n’iront peut-être pas dans le sens de ce que nous voudrions pour notre pays. L’économie ne prendra peut-être pas la tournure que nous aimerions. Il y aura encore des enfants qui seront blessés par balles dans la rue, pris dans l’esclavage sexuel, ou par la drogue. Des couples battront de l’aile, nous aurons peut-être à affronter la maladie, ou à nous faire du souci pour nos petits-enfants. Dans tout cela, il y a cette espérance : Malgré tout, viens, Seigneur Jésus.

Quoi que nous ayons à affronter, nous savons qu’il reviendra. Un de ces jours, le ciel va se fissurer, l’ange va sonner de la trompette, et le monde entier le verra en même temps. Toute la création répondra quand notre Seigneur descendra du balcon du ciel pour dire : Voici le temps où je vais racheter mon Église. Amen, Viens, Seigneur Jésus.

Charlie Dates

Cet article est adapté d’un sermon prononcé par Charlie Dates le 22 décembre 2019. Avec autorisation.

Méditez sur Jean 1.1-5, 14 et Apocalypse 22.12-13, 20

, en considérant la double optique de l’Avent : Jésus est venu et il revient. Que signifie pour vous : « Malgré tout, viens, Seigneur Jésus » ?

Mercredi : Avent et Apocalypse

Lectures du jour : Marc 13.24-37 ; Luc 21.25-28

Pendant l’Avent, nous entendons des passages de l’Écriture qui résonnent sur le registre des ténèbres, de la tribulation et de l’apocalypse. Matthieu, Marc et Luc ont tous un chapitre entièrement apocalyptique. En Marc 13, Jésus dit : « Une nation se dressera contre une nation et un royaume contre un royaume » (v.8). Et ce passage devient de plus en plus sinistre : « ces jours-là, après ce temps de détresse, le soleil s’obscurcira, la lune ne donnera plus sa lumière, les étoiles tomberont du ciel et les puissances célestes seront ébranlées » (v.24-25).

Pourquoi Jésus parle-t-il ainsi de mort et de ruine au lieu de parler de moutons, de bergers et d’êtres célestes ?

Dans l’Écriture, les écrits apocalyptiques émergent de la catastrophe. Les Israélites étaient un peuple favorisé ; Dieu leur avait promis un avenir de paix et de prospérité. Mais par la suite, ils furent envahis et contraints à l’exil dans l’empire babylonien. Humainement parlant, il n’y avait plus d’espoir pour eux. Quand les Israélites se retrouvèrent dans l’épreuve, c’était une « urgence théologique ». C’est à partir de cette urgence qu’une nouvelle manière de penser, apocalyptique, prit forme. Elle commença avec la deuxième moitié d’Ésaïe (chapitres 50 à 55) – écrite pendant la captivité à Babylone, alors que tout semblait perdu – et elle s’est épanouie à partir de là. À l’époque de Jésus, le vocabulaire apocalyptique était partout.

La théologie apocalyptique est, avant tout, la théologie de l’espérance – et l’espérance est aux antipodes de l’optimisme. L’optimisme flanche quand il est englouti dans les ténèbres. Au contraire, l’espérance se trouve dans quelque chose qui est au-delà de l’humanité. Elle se trouve dans le Dieu incarné.

Dans l’Évangile de Luc, quand Jésus tient des propos apocalyptiques sur « des signes dans le soleil, dans la lune et dans les étoiles » et sur « l’angoisse chez les nations », il termine en disant qu’« on verra le Fils de l’homme venant sur une nuée avec puissance et une grande gloire » (21.25-27). Il évoque ainsi sa seconde venue. Il nous dit que notre grande espérance provient non d’un progrès de l’humanité mais de lui-même. Il détient la puissance souveraine qui est indépendante de l’histoire humaine. Malgré les apparences ténébreuses, Dieu en Christ façonne notre histoire en fonction de ses projets divins.

L’Avent nous dit de plonger le regard dans les ténèbres et de les appeler par leur nom. Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Jésus dit : « redressez-vous et relevez la tête, parce que votre délivrance est proche » (v.28).

Fleming Rutledge

Ceci est une adaptation d’un article plus long intitulé “Why Apocalypse Is Essential to Advent,” (“Pourquoi l’Apocalypse est fondamentale pour l’Avent”) publié le 18 décembre 2018 sur ChristianityToday.com.

Lisez Marc 13.24-37 et Luc 21.25-28.

Quels aspects de l’enseignement de Jésus vous attirent le plus ? Quels sont les plus difficiles à aborder ? En quoi ces descriptions de la puissance souveraine de Dieu sur l’histoire approfondissent-elles votre espérance ?

Jeudi : Une question plus importante

Lecture du jour : 2 Pierre 3.8-15

Pourquoi est-ce que ça traîne à ce point ? Pourquoi Jésus n’est-il pas revenu comme il l’a promis ? Les destinataires de la deuxième lettre de Pierre ont pu se poser ce genre de questions – des questions qui continuent à résonner dans notre temps. Pierre les a abordées avec une étrange assurance ; premièrement : le fait que Dieu temporise reflète sa patience et son amour salvateur (3.8-9) et, deuxièmement : le jour du Seigneur sera épouvantable et il comportera la destruction par le feu.

Le langage apocalyptique qui est celui de Pierre (semblable à celui de Jésus en Marc 13 et Luc 21) nous donne à réfléchir. Que signifie « détruit par le feu » et « destruction des cieux par le feu » ? Est-ce quelque chose que nous avons à redouter ?

Certains versets que l’on trouve plus haut en 2 Pierre nous donnent du recul pour comprendre le langage de la destruction employé au chapitre 3. En 2.5, nous est donné un parallèle avec l’époque de Noé où Dieu détruisit la terre par l’eau. Ce jugement du passé ne signifie pas que Dieu ait entièrement emporté toute la création ; de même, le jugement final par le feu ne signifie sans doute pas que Dieu va incinérer la terre afin de faire place au nouveau ciel et à la nouvelle terre. Ainsi que Pierre l’énonce dans les Actes, le Christ est dans le ciel « jusqu’au moment de la restauration totale dont Dieu a parlé depuis longtemps par la bouche de [tous] ses saints prophètes » (3.21). Le monde nouveau viendra avec la grande restauration de Dieu et la réforme complète du monde que nous connaissons aujourd’hui.

En rapport avec cette problématique, Pierre pose une question importante qui mérite une attention encore plus grande que nos questionnements sur le moment prévu par Dieu ou sur la manière dont se fera le retour du Christ. À la lumière de la venue du jour du Seigneur, Pierre demande : comment devriez-vous vous comporter ? (cf. 2 P 3.11). Pierre appelle à une réponse qui soit faite de vie sainte et d’attente pleine d’espérance : « Attendez » le nouveau ciel et la nouvelle terre (v.11-14). Nous voyons ces thèmes soulignés dans la première lettre de Pierre, lorsqu’il incite les croyants à vivre dans une confiance joyeuse, l’attention fixée sur la venue du Christ, dans l’espérance et la vigilance constante (1 P 1.3-5, 13).

Nous sommes des êtres d’espérance, comme ceux à qui on a déjà dévoilé le dénouement d’un roman plein de rebondissements, de contretemps et d’événements inattendus. Nous connaissons la fin de l’histoire ; notre connaissance de l’extraordinaire dénouement qui nous attend influe sur notre manière d’appréhender le présent. On ne comprend pas forcément quand ni comment cela se produira, mais on peut être assuré que la fin comporte à la fois le jugement et la justification du peuple de Dieu. En quoi la nouvelle du jugement final est-elle un motif d’encouragement plutôt que de frayeur ? De ce qu’il y a même de meilleur dans ce monde, Dieu va faire quelque chose d’encore meilleur que ce que nous imaginons. Le jugement, la justification et la transformation arrivent. La véritable Terre promise nous attend.

Vincent Bacote

Méditez 2 Pierre 3.8-15

(vous pouvez aussi lire 1 Pierre 1.3-5, 13). Quelles questions ce passage soulève-t-il pour vous ? Quelles émotions remue-t-il ? Comment votre espérance du « jour du Seigneur » qui vient affecte-t-elle votre consécration quotidienne ?

Vendredi : En attendant que la fête commence

Lecture du jour : 1 Thessaloniciens 4.13 – 5.11

En tant que professeur, l’une des choses que j’aime le mieux faire consiste à passer des films qu’on pourrait qualifier de « cinéma eschatologique ». Nombre de ces films tournent autour de l’Enlèvement de l’Église, une interprétation de 1 Thessaloniciens 4.17 où « enlevés » est compris comme le retour invisible du Christ quand il vient chercher son Église pour l’emmener avec lui au ciel au moment où commence la Tribulation. Le but de ces films est de rendre conscient que Jésus peut revenir à tout moment.

La diversité des opinions relatives à l’Enlèvement et autres questions tournant autour de la fin des temps est étendue, et quand nous en venons à 1 Thessaloniciens 4 – 5, nous pouvons facilement nous retrouver obnubilés uniquement par ce passage. Mais il y a ici beaucoup d’autres points importants sur le retour du Christ, et qui méritent notre attention, y compris ce qui semble être l’accent principal de Paul : comment encourager les chrétiens qui sont actuellement en vie en considérant le statut de ceux qui sont déjà morts. Seront-ils « laissés en arrière » et vont-ils rater le retour de Jésus ?

Paul encourage les Thessaloniciens (et nous) en nous disant que nous n’avons pas à avoir peur que Dieu oublie ceux qui sont morts. La résurrection du Christ est la garantie que la mort n’est nullement un obstacle à la participation au monde nouveau qui arrive avec la seconde venue du Christ. Que nous soyons vivants ou morts, notre relation au Christ est tout ce qui est indispensable pour figurer sur la liste des invités quand viendra le Jour du Seigneur.

Quand le Christ arrivera, ce sera une entrée majestueuse, avec la fanfare et tout. Elle comportera le « son de la trompette de Dieu » (4.16), vocabulaire que les Thessaloniciens auront compris comme le retour du chef le plus victorieux de tous. Contrairement à toute autre sonnerie de clairon, celle-ci relèvera les morts dans le Christ, qui rejoindront les vivants pour l’accueillir.

On trouve des thèmes semblables dans la Première Lettre de Paul aux Corinthiens où il traite aussi des inquiétudes relatives à la mort, « le dernier ennemi » que le Christ anéantira (15.26). Paul assure les Corinthiens de ceci : « La trompette sonnera, alors les morts ressusciteront incorruptibles et nous, nous serons transformés » (15.52). L’« aiguillon » de la mort sera neutralisé par la victoire définitive du Christ.

Alors que nous attendons le Jour, nous sommes appelés à nous tenir prêts : « enfilons la cuirasse de la foi et de l’amour et ayons pour casque l’espérance du salut » (1 Th 5.8). L’arrivée de ce « voleur dans la nuit » viendra comme une surprise parce que nul autre que Dieu ne sait quand cela se produira – mais ce sera la plus grande fête que nous aurons jamais vue, nous qui attendons ardemment sa venue.

Vincent Bacote

Réfléchissons à 1 Thessaloniciens 4.13 – 5.11.

(On peut également lire 1 Corinthiens 15.51-58). Comment décririez-vous l’accentuation et le ton de Paul ici ? En quoi l’espérance entre-t-elle en jeu ? Pourquoi n’est-ce pas anodin que la Seconde Venue survienne « comme un voleur dans la nuit » ?

Samedi : L’espérance pour ceux qui ne tournent pas rond

Lecture du jour : 1 Corinthiens 1.1-9

Quand on lit ce qui est écrit sur le retour du Christ en 1 Corinthiens, il est important de se rappeler le contexte de la lettre de Paul. L’Église de Corinthe était une communauté qui fonctionnait très mal. Dans l’épître de Paul, on entend parler dans l’Église de factions affiliées à différents leaders, de pratiques sexuelles scandaleuses, de controverses sur les viandes sacrifiées aux idoles, et ainsi de suite. Même si cette communauté était gravement dysfonctionnelle, en 1 Corinthiens 1.1-9 Paul qualifie ses membres de « saints » (v.2). Il poursuit en leur rappelant que Dieu s’est montré généreux envers eux en leur dispensant des dons spirituels et il dit d’eux qu’ils « attendent » ardemment le retour du Christ. Paul insiste sur la grâce de Dieu (v.4) et sur son engagement envers eux : il « vous affermira jusqu’à la fin » (v.8). En dépit des manières par lesquelles se manifeste la faiblesse de leur foi dans des comportements et des dispositions corrompues, la fidélité de Dieu envers eux (et nous) suppose l’implication de Dieu pour aider son peuple à croître et à se laisser transformer à la ressemblance du Christ.

Alors que le chapitre 1 souligne que Dieu, par sa grâce, « affermira [les croyants] jusqu’à la fin », dans la même lettre Paul décrit le retour du Christ et exhorte les Corinthiens : « Ainsi, mes frères et sœurs bien-aimés, soyez fermes, inébranlables » (15.58, c’est moi qui souligne). Il les appelle à une ferme résolution qui fait partie intégrante de l’attente du retour du Christ. Malgré leurs défaillances et leurs échecs, Paul les appelle à la fois à être transformés et à être déterminés.

On voit une image semblable de détermination dans une autre lettre de Paul : « en attendant notre bienheureuse espérance, la manifestation de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ », « la grâce de Dieu… nous enseigne à renoncer à un mode de vie impie et aux convoitises de ce monde » (Tt 2.11-14).

On ne peut pas lire 1 Corinthiens ni les autres lettres de Paul sans remarquer à quel point il récuse le péché et les errements mais, ainsi que le révèle 1 Corinthiens 1.8-9, Paul se confronte à ces graves préoccupations sur fond de grande espérance. Nous sommes appelés à faire notre part tandis que Dieu, dans sa grâce, fait son œuvre dans nos vies.

C’est un exemple et un encouragement pour nous. À l’évidence, la plupart d’entre nous ont eu leurs moments d’errements spirituels, mais nos échecs ne devraient pas être au cœur de nos préoccupations. Au contraire, regardons vers Jésus qui non seulement a rendu possible la réconciliation avec Dieu mais qui en outre, s’est engagé envers nous de sorte que nous serons présentés à Dieu sans reproche lorsque son royaume viendra. Grâce à Dieu, sa fidélité est plus grande que nos défections.

Vincent Bacote

Relisez 1 Corinthiens 1.1-9

à la lumière des dysfonctionnements de cette Église. (Vous pouvez aussi reparcourir 1 Corinthiens 15.51-58 et lire Tite 2.11-14.) Que souligne Paul quand il parle de Dieu ? de la formation spirituelle ? du retour du Christ ? En quoi cela nourrit-il votre espérance ?

Avec la participation de :

Vincent Bacote, professeur associé de théologie à Wheaton College. Il est l’auteur de The Political Disciple : A Theology of Public Life.

Charlie Dates, pasteur senior à la Progressive Baptist Church de Chicago. Il a un doctorat de Philosophie en théologie historique obtenu à la Trinity Evangelical Divinity School.

Fleming Rutledge, prêtresse épiscopalienne, a passé vingt et un ans en paroisse avant de devenir conférencière, auteure et formatrice de nouveaux prédicateurs. Elle est l’auteure de The Crucifixion et de.

Danté Stewart est auteur et prédicateur, étudiant à la Candler School of Theology à l’Université d’Emory.

Traduit par Philippe Malidor

L’espérance : un saut pour l’avenir

L’Avent nous rappelle que l’espérance chrétienne repose sur ce qui est arrivé et sur ce qui va arriver encore.

Christianity Today November 28, 2020
Fabrizio Conti / Unsplash

Ma mère, Young Kim, est née en Corée en 1948 alors que le pays était au bord de la guerre civile. Alors qu’elle avait 5 ans, le pays avait été coupé en deux, le Nord et le Sud. Sa famille, autrefois prospère, avait tout perdu. Ses deux parents moururent quand elle était tout juste adolescente. Elle perdit ses deux frères aînés à peine quelques années plus tard. Ma mère finit par se retrouver engagée dans un mariage à problèmes. Elle se sépara de mon père et, alors qu’elle avait une petite trentaine d’années, elle émigra aux États-Unis comme mère isolée avec un sac de vêtements, quelques dollars en poche et moi, qui étais tout petit à l’époque. Sa vie est une histoire de luttes, de chagrin et de privations. Et pourtant, malgré les obstacles, elle a toujours été la personne la plus remplie d’espérance que j’aie connue.

Si vous aviez l’occasion de lui poser la question, elle vous dirait sans le moindre doute ni la moindre hésitation que Jésus est l’unique source de son espérance. Elle vous dirait que depuis qu’elle a rencontré le Christ ressuscité il y a bientôt quarante ans, les circonstances sont toujours passées derrière quelque chose de bien plus immuable. Mais ce quelque chose n’est pas le conte de fée immaculé, sophistiqué ou utopique reposant sur des pensées mirifiques ou sur des rêves d’une vie sans problèmes. Son espérance est une prise obstinée et souvent épuisante sur quelque chose de beaucoup plus consistant. C’est le fait de saisir fermement, sans hésiter, quelque chose qui est arrivé et qui arrivera encore.

En 1 Pierre 1.13, on lit ceci : « C’est pourquoi, tenez votre intelligence en éveil, soyez sobres et mettez toute votre espérance dans la grâce qui vous sera apportée lorsque Jésus-Christ apparaîtra. » Dans le texte originel grec, l’expression rendue par « en éveil » est un terme qui évoque la préparation physique. Elle provient d’une pratique courante dans le Proche-Orient ancien : les gens qui relèvent leur long vêtement et qui l’attachent afin de se préparer au travail, que ce soient les cultivateurs qui partent pour les champs, les soldats qui partent au combat ou les athlètes qui remontent leurs habits afin de pouvoir courir sans être entravés.

Je me demande si Pierre repensait à l’une de ses premières rencontres avec le Christ ressuscité quand il rédigea ces mots dans sa première lettre. À la fin de l’Évangile de Jean, nous lisons le récit de Jésus ressuscité apparaissant à ses disciples au bord du Lac de Galilée. Pierre et les autres étaient à la pêche, mais dès qu’ils reconnurent Jésus qui les appelait depuis le rivage, Pierre « remit son vêtement et sa ceinture, car il s’était déshabillé, et se jeta dans le lac » (Jn 21.7). Remettre son vêtement. C’est le même vocabulaire et la même image qu’il utilise en 1 Pierre 1.13. Quand Pierre aperçut Jésus qui se manifestait sur les rives du Lac de Galilée, il attacha immédiatement son vêtement et. Plusieurs décennies plus tard, Pierre invite les premiers disciples de Jésus à prendre la même initiative par rapport à l’espérance qu’eux – et nous – avons « dans la grâce qui [nous] sera apportée lorsque Jésus-Christ apparaîtra. »

Espérance et action

Peut-on lier « espérance » et « saut » ? En anglais, certains linguistes voient un lien étymologique entre hope (« espérance ») et hop (« saut », « sautillement »). D’où l’idée que l’espérance de quelque chose est un saut dans l’attente, un bond vers le possible. Que ce rapprochement linguistique soit ou non pertinent, la notion soulève une question intéressante. À notre époque, l’idée d’espérance a été connotée avec la passivité, dépouillée de sa nature orientée vers l’action. Nous espérons que les délais ne seront pas trop longs. Nous espérons un bon diagnostic. Nous espérons que tout marchera bien.

Aujourd’hui, l’espérance est surtout conçue comme une version amplifiée du souhait. C’est pourquoi, quand nos espérances paraissent un peu folles, on les appelle parfois des « vœux pieux ». Mais l’espérance chrétienne n’est pas un vœu pieux. L’espérance chrétienne est un bond en avant, qui vise quelque chose. On décide d’agir. On se met en mouvement. Dans The Message® (une version de la Bible en anglais courant), Eugene Peterson rend ainsi le début de 1 Pierre 1.13 : « Retroussez-vous les manches. » L’espérance chrétienne, c’est se retrousser les manches et se mettre au travail. C’est une espérance de « prolétaire », qui nous rend disposés à plonger les mains dans le cambouis, à travailler et à peiner vers ce qui est promis, vers ce qui est à attendre.

Cette nature de l’espérance chrétienne tout à fait à contre-courant est forgée par une résilience et une vaillance qui est malheureusement absente de ce que la mentalité ambiante entend par « espérance ». L’espérance chrétienne ne se défile pas devant la souffrance et la douleur de notre monde ; au contraire, elle court au-devant d’elle. Tim Keller écrit : « Là où d’autres conceptions du monde nous amènent à nous installer au milieu des joies de la vie en prévision des malheurs à venir, le christianisme donne à ses adeptes de se tenir au milieu des malheurs de ce monde en goûtant la joie à venir. » L’espérance chrétienne ne se laisse pas tromper par le monde et ses promesses de confort et de bien-être en cette vie tout en attendant anxieusement de passer à autre chose. Au contraire, l’espérance chrétienne se cale dans le combat de l’expérience humaine avec force et détermination. C’est vrai, il y a de la souffrance et de la douleur en cette vie, mais l’espérance chrétienne permet à ceux qu’elles frappent de tenir debout sans perdre le moindre atome de la dignité de l’imago Dei.

Je pense à mes amis Landon et Sarah Baker. Notre communauté s’est réjouie quand ils nous ont annoncé qu’ils attendaient un enfant. Mais à la naissance du bébé, il y a eu des complications. En pleine période de pandémie mondiale, je suis allé à l’hôpital au service de néonatalité en soins intensifs avec un masque sur le visage, afin de présenter à Dieu la belle petite fille dont la vie sur terre n’allait même pas durer trois jours. En larmes, les jeunes parents ont prié pour leur fille et l’ont tenue contre eux alors qu’elle rendait son dernier souffle avant d’entrer dans l’éternité. Ils ont lu des Psaumes pour elle et ont chanté leur amour pour Jésus. Du fond de leur douleur, leur espérance n’a jamais flanché.

Je pense à mon ami Darren Johnson, qui a passé plus d’un an au chômage. Avec une famille à nourrir et des factures à payer, la situation était tendue. Ce n’était pas faute d’avoir essayé de trouver du travail. Tout simplement, ça ne marchait pas et il ne savait pas pourquoi. Mais malgré son incompréhension, il continua à prier, à louer Dieu, à conduire sa famille avec courage et à servir sa communauté. Il était convaincu que Dieu continuait à travailler et à bouger jusque dans les plus petits détails de sa situation déroutante, même s’il ne savait pas comment. Dans son incertitude, il donnait l’exemple d’une foi monumentale. Son espérance ne flancha jamais.

Je pense à mon amie Christina Tang. Quand elle avait une vingtaine d’années, c’était une compositrice de chansons talentueuse, et elle avait travaillé sur un assortiment de chansons lorsqu’elle apprit qu’elle avait un cancer de l’estomac – et un cancer virulent. Tout le monde autour d’elle était dans la tristesse et l’incompréhension. Mais la résolution était là. Même avec le corps affaibli, Christina continua à écrire et à enregistrer. Elle trouva la force de conduire la louange de temps en temps à l’église. Quand ses mains ne pouvaient plus gratter la guitare, elle recrutait des amis musiciens pour continuer de jouer. Deux semaines après sa mort, nous avons distribué à tous les gens de l’église un exemplaire de son nouvel album : six chansons originales écrites et enregistrées dans ses derniers mois. Son espérance ne flancha jamais.

Voilà à quoi ressemble l’espérance chrétienne. Elle n’esquive pas la peur, l’inquiétude ou le doute ; elle leur fait face. Elle tient ferme, elle se cramponne à la paix au milieu de la confusion. Au travers des nombreuses tempêtes traîtresses de la vie – qu’il s’agisse de la pandémie, des divisions politiques, des troubles sociaux ou des combats personnels – l’espérance chrétienne s’ancre dans quelque chose de plus grand qui est arrivé et dans quelque chose de plus grand qui va arriver encore.

Il va revenir, alors retroussez-vous les manches

L’Avent nous sert de rappel fort à cet égard. Vers la fin novembre, on commence à voir les jardins décorés pour Noël, parfois avec des crèches. Mais cette saison dans laquelle nous entrons est moins un voyage dans l’histoire qu’un voyage vers l’avenir. L’Avent, qui vient du latin adventus, « venue », c’est notre vue à longue portée qui s’obstine à regarder l’avenir, avec l’éclairage de l’histoire. La lumière de l’histoire de Noël surgit dans l’obscurité de notre culpabilité passée, de notre souffrance présente et de nos inquiétudes pour l’avenir, nous orientant vers les jours meilleurs à venir.

En Actes 1.11, au moment où les premiers disciples de Jésus assistent à son ascension au ciel, il leur est rappelé ceci : « Ce Jésus qui a été enlevé au ciel du milieu de vous reviendra de la même manière que vous l’avez vu aller au ciel. » Il reviendra. C’est la promesse que nous fêtons et dont nous faisons mémoire pendant l’Avent, et c’est le socle de l’espérance chrétienne. Rappelons-nous les paroles de Pierre : « mettez toute votre espérance dans la grâce qui vous sera apportée lorsque Jésus-Christ apparaîtra. » On peut affronter absolument tout avec de la résilience, du courage et de la patience parce que l’Avent nous redit comment l’histoire se termine. Voilà pourquoi Paul écrit : « J’estime que les souffrances du moment présent ne sont pas dignes d’être comparées à la gloire qui va être révélée pour nous. […] En effet, c’est en espérance que nous avons été sauvés. Or l’espérance qu’on voit n’est plus de l’espérance : ce que l’on voit, peut-on l’espérer encore ? Mais si nous espérons ce que nous ne voyons pas, nous l’attendons avec persévérance. » (Rm 8.18, 24-25)

Ma mère a eu 70 ans il y a deux ans. Visiter Hawaï, c’était une des choses qu’elle voulait avoir faites une fois dans sa vie. Nous y sommes donc allés. Nous étions près de la plage de Waikiki, et depuis la fenêtre de notre hôtel nous pouvions voir Diamond Head, l’un des parcours les plus réputés et les plus exigeants de l’île. J’ai demandé à ma mère si elle voulait essayer. Sans hésitation, elle a dit oui. Le sentier de Diamond Trail fait un peu plus de deux kilomètres aller-retour, presque tout en montée, avec 200 m de dénivelé. J’ai immédiatement regretté de lui avoir posé la question ; je n’étais pas sûr qu’elle pouvait le faire à son âge.

Le lendemain matin, nous avons fait le petit bout de route jusqu’au début du parcours. Je lui ai encore demandé si vraiment elle voulait le faire, je l’ai rassurée en lui disant que nous pourrions toujours faire demi-tour et aller sur la plage manger un plat hawaïen à la place. Elle a souri et elle a commencé à aller de l’avant. À peu près à mi-parcours, voyant qu’elle était fatiguée, et moi aussi, je lui ai redemandé si elle voulait revenir. Elle m’a regardé, m’a souri, et elle a retroussé ses manches. Nous avons continué et, pour finir, nous avons profité de la vue depuis le sommet. C’était évident. C’est comme ça que fonctionne l’espérance pour ma mère. Et c’est comme ça que fonctionne l’espérance de Noël. On se retrousse les manches et, en peinant, on fait un pas après l’autre jusqu’à ce qu’on soit arrivé.

Une fois rentrés à l’hôtel pour nous reposer, nous avons utilisé Face Time pour appeler mes enfants – ses petits-enfants – restés à la maison. Ma mère rayonnait en racontant à son petit-fils qu’elle avait réussi à monter à Diamond Head. Il était né exactement trois mois plus tôt, et elle lui avait donné son nom coréen : So-Mahng, qui signifie espérance. Naturellement.

Jay Y. Kim est premier pasteur enseignant à WestGate Church, enseignant en poste à Vintage Faith Church, et l’auteur de Analog Church. Il vit avec sa famille à Silicon Valley.

Traduit par Philippe Malidor

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« Pourquoi nous ? »

Le pasteur français Samuel Peterschmitt réfléchit sur la foi et la providence suite à une conférence de la Porte Ouverte transformée en un événement spectaculaire de propagation du coronavirus.

Christianity Today November 23, 2020
CAPMAN Vincent / Getty Images

L’une des plus importantes méga-Églises de France s’est rassemblée cet automne pour se souvenir de ceux qui étaient décédés à cause de la COVID-19. Ce culte, en hommage à ceux qui sont partis, fut « personnellement très éprouvant » et a représenté « un vrai déchirement » pour le pasteur principal Samuel Peterschmitt, tant la communauté avait été atteinte tragiquement par le virus.

A peine neuf mois plus tôt, l’Église Porte Ouverte Chrétienne de Mulhouse, en France, avait tenu sa conférence d’adoration annuelle, au cours de laquelle les participants avaient prié pour les malades, vu de belles guérisons et loué Dieu avec l’ensemble des 2 200 personnes présentes, la plupart venant d’Europe, mais aussi certaines d’aussi loin que d’Afrique et d’Amérique Latine.

Mais l’événement de quatre jours, qui a eu lieu des semaines avant que la France n’entre en confinement, a contribué à l’une des premières avancées du coronavirus dans la région. Au moins 500 personnes de la Porte Ouverte furent contaminées, 82 furent hospitalisées – y inclus Samuel Peterschmitt lui-même – et 32 en sont décédées.

L’assemblée pentecôtiste a dû faire face alors au traumatisme à la fois spirituel et physique qui s’en est suivi. Pire, la Porte Ouverte fut rapidement rendue responsable par des voisins et les médias pour leur imprudence supposée, bien que la conférence de février ait débuté alors qu’aucune directive sanitaire sérieuse n’avait été communiquée. Isolés et endeuillés, des membres de l’Église durent, de plus, faire face à des insultes et à des menaces de mort ; des responsables ont, par ailleurs, eu besoin de protection lorsqu’ils retournèrent dans leur bâtiment pour des cultes diffusés en direct par internet.

Samuel Peterschmitt, dont le père a fondé la communauté, il y a 54 ans, dans le Nord-Est de la France, a ressenti le poids du ministère qu’il a poursuivi pendant la pandémie. De son lit de malade, il priait par téléphone avec les membres de sa communauté, notamment avec une soeur en Christ hospitalisée comme lui, dont le mari est décédé aux soins intensifs. Ce fut « une maigre consolation » d’être juste capable de lui offrir de suivre en viséo les obsèques de son mari, alors qu’elle était toujours hospitalisée. « C’est pour vous dire à quel point la situation était difficile, mais en même temps à quel point la relation fraternelle a été importante dans ces moments-là » a précisé le pasteur.

La Porte Ouverte ne sera plus la même après cette irruption de la pandémie en son sein. Samuel Peterschmitt, comme beaucoup dans sa communauté, s’est demandé pourquoi Dieu avait permis que ce fléau atteigne leur communauté et pourquoi il en avait épargné certains mais pas d’autres. « Mes amis qui sont décédés » a-t-il dit « avaient une foi aussi ferme que la mienne ».

Alors que la Porte Ouverte s’approche de la fin d’année la plus difficile de son histoire, le pasteur Samuel Peterschmitt s’est entretenu avec Jean-Paul Rempp, un collègue pasteur français, également directeur régional du Mouvement de Lausanne pour l’Europe, à propos de l’impact de la contamination de la COVID-19 sur son Église. Ses membres ont, en effet, été amenés à une compréhension plus profonde de la providence de Dieu, à une plus grande estime de l’humilité et à un désir plus fervent de rechercher Dieu dans l’affliction.

Alors même que vous aviez vu des guérisons lors de cette conférence, quelles ont été vos premières pensées lorsque vous avez soudainement réalisé que certains des participants avaient été contaminés par la COVID-19 ?

Il y a eu dans un premier temps un questionnement puisque je disais au Seigneur : « D'un côté, nous avons vu la gloire du Seigneur, et de l'autre côté, nous avons vu également ton peuple être touché par la maladie. » Et ce qui est finalement essentiel pour moi, c'est, dans ce moment-là, d'accepter le fait que Dieu, dans sa souveraineté, ne fait pas d'erreur, même lorsqu’il semble que ce soit un paradoxe : d'un côté, des guérisons et d’un autre, la maladie. Nous croyons, et je crois profondément, que même cette situation pénible et difficile contribuera à la gloire de Dieu.

Évidemment, je ne peux aujourd’hui encore qu’avoir une pensée très forte pour toutes les familles qui ont perdu un être cher… J’ai perdu plusieurs de mes amis. En tant que frères et soeurs, nous avons servi le Seigneur ensemble pendant de longues années et je l'ai vécu réellement comme un vrai déchirement. Mais en même temps, il y a eu cette consolation de la part du Seigneur par rapport à cette espérance que nous avons tous de nous revoir un jour.

Quels ont été vos plus grands défis lorsque, dans cette situation de contamination personnelle, vous avez cherché à exercer un ministère auprès de personnes malades, souffrantes et en situation de quarantaine ?

J’ai été isolé à l'hôpital, puis j'ai été ré-isolé à la maison, ce qui fait qu’il était difficile, justement, d'accomplir ce ministère à l'égard des malades puisqu’il n'était pas possible d'aller les visiter. Il n'était pas possible de leur imposer les mains, comme l'Écriture nous l'enseigne.

Lorsque j’étais hospitalisé, j’étais évidemment également sous oxygène, donc j’étais essouflé. Mais j'avais des membres de l'Église qui étaient hospitalisés en même temps que moi. Certains étaient au même étage que moi, d'autres deux étages en dessous. D'autres étaient en réanimation ou au sous-sol. Et ce que je faisais, c’est qu’autant que je le pouvais, je prenais mon téléphone. J'essayais de les joindre. Cela ne durait pas longtemps. Nous prenions le temps – même courtement – de prier les uns pour les autres.

Quels sont les passages des Écritures, quels sont les cantiques ou alors les exercices spirituels qui vous ont particulièrement aidé ?

Je dois dire que lorsque j'étais au plus bas, j'ai vraiment vécu des visitations de la part du Seigneur, comme je n'en ai que rarement vécues dans ma vie. Et ce furent des temps autant par son Esprit que par sa Parole où Dieu a parlé à mon âme. Il m’a amené à une repentance extrêmement profonde. Ce furent des temps de repentance, en particulier lorsque je lisais les psaumes. Et ceux-ci dans cette période-là se sont révélés d'une aide extraordinaire. J'avais le sentiment que David les avait écrits pour moi. Ils étaient devenus littéralement personnels.

Et il y a eu un chant qui m'a beaucoup accompagné, que nos amis américains connaissent certainement, c’est Show me your face de Don Potter, et qui était un chant qui m'a fait énormément de bien, dans lequel je disais moi aussi : « Seigneur, révèle-moi encore plus ta face, montre moi qui Tu es dans cette période où, finalement, mon âme est passée au scanner. »

Dans ces moments, j'ai réalisé que finalement, Dieu n'avait pas besoin de me dire quoi que ce soit ou de me reprocher quoi que ce soit. Sa seule présence, eh bien m'a amené à me juger moi-même. Et c'est sa présence qui m'a amené à avoir un regard sur moi qui finalement me donnait une telle conviction de péché que je disais : « Est-ce possible que j'ai été cet homme-là ? Est-ce possible que j'ai pu avoir ces attitudes-là ? » Ce fut un moment, paradoxalement d'une grande tristesse et en même temps d'une grande espérance, des moments de profonde désolation quant à moi-même et en même temps des moments de changement dans mon cœur et dans mon âme que je ne regrette à aucun moment.

Y a-t-il eu des moments où vous-même ou votre Église avez questionné le plan de Dieu qui a permis la contamination de votre Église par le virus ?

Oui, évidemment. Je pense que le contraire n'aurait pas été normal. Je crois que si nous ne nous étions pas arrêtés pour nous poser la question, cela aurait été anormal. Je me suis mis, mais pas seulement moi, les pasteurs, et chacun dans la communauté, à me poser des questions comme : « Mais pourquoi est-ce que ça nous est arrivé ? Pourquoi nous ? ». Je ne vais pas vous dire que j'ai toutes les réponses aujourd'hui. J'ai vu tout ce que cela a amené, comme le changement dans mon propre coeur. Je l'ai exprimé tout à l'heure, et je bénis Dieu pour cela.

Cela nous a aussi amenés à beaucoup d'humilité, puisque cette contamination nous a, bien-sûr, rappelé la souveraineté de Dieu de laquelle nous étions déjà conscients auparavant, mais cela nous a aussi rappelé que Dieu agit tantôt d'une manière et tantôt d’une autre. Nous en avions déjà la conscience, mais là, nous avons été communautairement amenés à accepter tous ensemble cette réalité. Donc, pas en acceptant sa souveraineté dans la vie d'une personne individuelle que nous aurions accompagnée, pour laquelle nous aurions prié, et, qui serait quand-même décédée, mais plutôt en acceptant sa souveraineté comme communauté. Car soudainement, c’est en tant que communauté que nous la vivons, et nous la vivons à une échelle quand-même relativement importante puisque nous avons beaucoup de nos paroissiens qui ont été contaminés par la COVID, et puis, un nombre élevé qui en est décédé.

Une dernière chose que je voudrais dire, c'est que lorsque j'ai posé cette question au Seigneur : « Pourquoi nous ? », une des réponses qui m'est venue a été la suivante : « Mais comment aurais-tu réagi si ça s'était passé dans un autre milieu ? Oui, je prends l'exemple. Si ça s'était passé dans une mosquée. Comment aurais-tu réagi ? ». Il est évident, et je dois le dire avec tristesse, certainement que j'aurais vécu ou j'aurais interprété cela comme un jugement de Dieu. Et le Seigneur m'a montré là que finalement, nous jugeons très vite, en particulier quand cela arrive chez les autres.

Cela a amené à un changement de regard pas fondamentalement sur l'islam, mais un changement de regard sur le jugement que l'on pouvait rapidement avoir lorsqu'un malheur arrivait, surtout lorsqu'il arrivait aux autres en cherchant toujours à conclure par une explication, par une cause.

Si c'était intervenu dans un autre milieu, probablement que j'aurais réagi malheureusement, comme certains ont réagi à notre égard, puisque nous avons été immédiatement jugés de la part même des chrétiens, nous avons été mis à l'index. Certains ont tout de suite essayé d'expliquer spirituellement pourquoi ces choses nous sont arrivées, en disant que nous ne faisons pas assez ceci ou trop cela, etc. Mais je dois dire avec humilité que finalement, aujourd'hui, je ne peux que leur pardonner parce que, peut-être, que je n'aurais pas été meilleur qu’eux.

Vous avez parlé sur la façon dont vous avez mis en pratique le pardon à l’égard de ceux, médias compris, qui rejetaient la responsabilité sur votre Église.

Nous avons, dès le départ, décidé simplement de nous rallier à ce que Jésus disait lui-même lorsqu'il dira que vous serez tous haïs à cause de mon nom.

Nous avons réalisé que – au-delà de la pandémie qui avait pris place, de la maladie dont on nous accusait d'être les porteurs – il y avait une vague réellement anti-chrétienne, et c'est face à cela que nous avons décidé de pardonner et de rester dans une attitude de pardon. Nous l'avons eue dès le début, et je crois pouvoir dire que l'ensemble de la communauté a eu cette attitude-là. Nous avons exprimé le pardon également dans les médias, qu'ils soient télévisés ou qu'ils soient écrits.

Qu’en est-il aujourd’hui de la vie de votre Église, la Porte Ouverte ? Y a-t-il des différences que vous voyez par rapport à avant la pandémie ?

Il y a, bien-sûr, une différence qui est flagrante, c'est que le nombre de personnes présentes est très limité, puisque nous devons respecter la distanciation sociale, nous devons respecter les règles sanitaires. Ce qui fait que dans une église dans laquelle on pouvait mettre 2 400 personnes, aujourd'hui nous mettons entre 600 et 700 personnes. La deuxième chose, c'est que, évidemment, certains de nos paroissiens ont aussi éprouvé une certaine crainte, ce que je peux aisément comprendre. Mais parallèlement à cela, ce que je dois dire, c'est que, dans cette même période, j'ai découvert également notre assemblée avec un visage peut-être différent, dans ce sens où j’ai vu une solidarité se mettre en place que je n'aurais pas soupçonnée.

Même si je savais que les frères et sœurs étaient solidaires : une manifestation d'amour et de soutien dans la prière qui était pour moi extraordinaire.

C'est, par exemple, la mise en place d’une chaîne de prière 24 heures sur 24, spontanément, et depuis, elle existe et n'a plus jamais arrêtée. Nous avons vu spontanément nos jeunes gens pendant la pandémie – alors que nous étions tous confinés – les jeunes gens prendre à cœur d'appeler. Nous avons plusieurs centaines de personnes âgées, eh bien, ils appelaient les personnes âgées, voire allaient leur faire les courses, etc.

Nous avons vu l'importance de nos groupes de maisons. Plus que jamais, nous pensons que l'Église de Christ doit vraiment arriver à cette maturité où ceux qui la composent soient vraiment des disciples. Il faut que ce ne soient pas seulement des paroissiens et des membres. Il faut que ce soient des disciples.

Et nous, nous prions pour cela. Et je sens qu'il y a un profond désir d'aller dans cette direction-là. D’ailleurs, après le déconfinement, notre premier culte a été extrêmement fort au niveau de la communion fraternelle. Il y a eu une joie, une explosion de joie, nous n’avions pas commencé le culte que les gens se sont mis à applaudir. Et cela a duré, je ne pourrais pas vous dire combien de temps ça a duré, mais c’était juste une fête de se retrouver, une vraie fête !

Quels sont les effets spirituels persistants, engendrés par la pandémie, visibles au niveau de votre Église ?

Il y a, et je le sens profondément et je le vois, un mouvement de sainteté. Nombreux ont été les témoignages de ceux qui m’ont dit : « Mais cela a bouleversé mon regard sur ma vie spirituelle. Cela m'a rapproché du Seigneur. Il y a des choses que je ne peux plus faire aujourd'hui. Je ne veux plus perdre de temps avec ce que le monde m'a volé pendant un temps. » Il y a vraiment un retour vers une consécration et un élan d'amour pour le Seigneur, qui est extraordinaire.

Évidemment, parallèlement à cela, vous avez des personnes qui, elles, ayant peu de racines, un peu comme dans la parabole du semeur, eh bien, certains se dessèchent, d'autres ont la peur un peu d’étouffer. Mais pour moi, il est encore trop tôt pour faire un bilan. Cependant, cet élan de sainteté, le désir de la présence de Dieu, a été flagrant, vraiment flagrant.

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Les Arméniens se battent pour préserver une ancienne patrie en Azerbaïdjan

Le conflit du Haut-Karabakh est-il un affrontement entre chrétiens et musulmans, ou simplement de la politique?

Christianity Today October 29, 2020
Sergei Bobylev / Getty Images

Mise à jour (oct. 9): La cathédrale symbolique des Ghazanchetsots (Saint-Sauveur) a été endommagée par les bombardements.

Des combats féroces ont éclaté dans les montagnes du Caucase entre la mer Caspienne et la mer Noire, opposant les Arméniens chrétiens aux Azéris musulmans.

Mais est-il juste d’employer leurs étiquettes religieuses?

«Tôt dimanche matin [sept. 27], j’ai reçu un appel téléphonique de notre représentant dans la capitale [Stepanakert] », a déclaré Harout Nercessian, le représentant de l’Arménie pour l’Association des missionnaires arméniens d’Amérique (AMAA).

«Il a dit qu’ils bombardaient Stepanakert. C’est une guerre.»

Une semaine plus tard, les combats se poursuivent. L’enjeu est le contrôle de l’enclave à majorité arménienne du Haut-Karabakh, qui abrite 170 000 personnes dans une région montagneuse de la taille du Delaware en Azerbaïdjan.

Plus de 200 personnes seraient mortes , bien que l’Azerbaïdjan n’ait pas communiqué le nombre de victimes.

Administrée par des Arméniens de souche depuis la déclaration d’un cessez-le-feu en 1994, les habitants appellent la région la République d’Artsakh. Les escarmouches militaires n’ont pas été inhabituelles. Il y a eu plus de 300 incidents depuis 2015, selon l’International Crisis Group.

Cette escalade est la plus grave depuis 2016, les forces azerbaïdjanaises attaquant plusieurs positions le long de la «ligne de contact» de près de 190 kilomètres.

Mais le bombardement des villes civiles représente une évolution inquiétante.

Est également inquiétant le rôle de la Turquie – et des militants syriens qu’elle aurait recrutés – qui s’est engagée à soutenir pleinement l’Azerbaïdjan.

La Russie, la France et les États-Unis – partenaires du «Groupe de Minsk» qui supervise les négociations entre les deux nations depuis 1992 – ont appelé à un cessez-le-feu immédiat.

Mais la Turquie a encouragé le refus du président azerbaïdjanais Ilham Aliyev, ce qui rend un cessez-le-feu conditionnel au retrait total de toutes les forces arméniennes afin de rétablir l’ intégrité territoriale de la nation Caspienne.

Le déploiement contesté de militants syriens a encore compliqué les choses. Bien que nié par l’ Azerbaïdjan et la Turquie, plusieurs médias ont cependant laisser fuir l'information et (https://www.al-monitor.com/pulse/originals/2020/09/armenia-azerbaijan-conflict-plot-turkey.html) ont signalé leur recrutement dans les zones tenues par les Turcs , ainsi que leur déploiement – et même le [décès] de plusieurs d'entre eux(https://amp.theguardian.com/world/2020/oct/02/syrian-recruit-describes-role-of-foreign-fighters-in-nagorno-karabakh) – à la la ligne de contact.

Cela légitime les efforts arméniens pour nettoyer l’Azerbaïdjan des «terroristes», a déclaré un responsable du Haut-Karabakh, même en dehors de la région contestée.

L’implication de la Turquie a éveillé les pires craintes – ou peut-être la rhétorique habituelle – parmi les Arméniens.

“L’État turc, qui continue de nier le passé”, a déclaré le Premier ministre arménien Nikol Pashinyan, “s’aventure à nouveau sur la voie du génocide.”

La rhétorique du président turc Recep Erdogan n’aide pas. Il a qualifié l’ Arménie de «la plus grande menace à la paix» dans la région. Dans le passé, il avait même qualifié les Arméniens et les autres chrétiens de Turquie de «restes de l’épée», se référant à ceux qui ont survécu au génocide – un terme qu’il rejette cependant.

Les Azerbaïdjanais, bien que majoritairement chiites de religion, sont le deuxième groupe ethnique turc du monde après les Turcs sunnites, majoritaires en Turquie. Ces groupes caractérisent mutuellement leur relation comme une « entité constituée de deux États, mais d'une nation».

La dernière escalade a mis les Arméniens à bout.

«Nous comprenons qu'il s'agit d'une question existentielle, pas seulement d'une guerre», a déclaré Hovhannes Hovsepian, pasteur de l’Église évangélique d’Arménie à Erevan, la capitale de l’Arménie.

«Nous ne faisons jamais rien pour aggraver la situation ou prendre la terre de nos voisins. Nous sommes pour la paix, mais parfois il faut se battre pour elle.»

Le conflit remonte à plus de 30 ans – ou peut-être 100.

Selon le consensus international, le Haut-Karabakh est un territoire azerbaïdjanais. Les résolutions de l’ONU ont appelé toutes les «forces d’occupation» à se retirer.

En 1987, les Arméniens du Haut-Karabakh ont demandé à l’URSS d’ajouter la région à la République soviétique arménienne. Tout en consolidant le Caucase dans les années 1920, Staline l’avait en effet placée sous contrôle azerbaïdjanais, pour apaiser la Turquie.

Tant avant qu’après l’indépendance de 1991, les Arméniens et les Azéris se sont engagés dans des batailles démographiques. Plus de 30 000 personnes ont été tuées et un million d'entre elles déplacées. Les deux pays ont échangé environ 250 000 personnes tandis que des groupes minoritaires ont été expulsés ou ont fui vers leurs pays de même majorité ethnique et religieuse.

Des milliers d’Azéris minoritaires ont quitté le Haut-Karabakh. Sa population arménienne a déclaré son indépendance en 1992, tandis que l’Arménie occupe les terres intermédiaires pour se connecter ainsi avec son propre territoire.

«Toutes les guerres ont un côté pervers», a déclaré Paul Haidostian, président de l’Université évangélique arménienne haigazienne de Beyrouth, au Liban.

«Mais spirituellement, aussi importantes que soient les frontières légales pour l’ordre mondial, elles ne sont qu’une norme, parmi d'autres. L’autodétermination, la dignité et le témoignage chrétien d'une terre durant plus de 1700 ans sont également très importants.»

Dans un pays autrefois détenu par les Arméniens, l’Azerbaïdjan a, selon les rapports, détruit des khatchkars du VIe siècle ainsi que des pierres tombales richement sculptées dans un cimetière chrétien. (https://www.christianitytoday.com/ct/2019/november/azeris-armenians-clash-heritage-grave-khachkars.html?share=UExx%25252bPnlkCc11elvE96e8RGcu5jxa9eP). Le patrimoine culturel musulman a également été détruit pendant le conflit, bien que certaines mosquées aient été reconstruites, de manière controversée, par les Arméniens.

Bien que l’Azerbaïdjan nie la destruction du khachkar, Haidostian craint aussi pour le patrimoine des anciennes églises et monastères du Haut-Karabakh – et même un massacre, si les Azéris reprennent le contrôle de la région.

En même temps, il a déclaré que la diaspora arménienne du Levant était unie dans son soutien et son intérêt.

«Les Arméniens pensent que c’est une continuation des politiques anéantissantes du pan-turquisme», a déclaré Haidostian.

«Chaque centimètre carré doit être protégé.»

Mais le chevauchement de la religion, de l’ethnicité et de la politique rend certains mal à l’aise.

«Les Arméniens ont appris qu’ils obtiennent le soutien de l’Occident lorsqu'ils font de ce conflit un conflit entre chrétiens et musulmans», a déclaré Johnnie Moore, membre de la Commission américaine sur la liberté religieuse internationale qui s’est personnellement rendu fréquemment en Azerbaïdjan avec un rabbin juif.

«L’Arménie est alliée à la Russie et à l’Iran. Ce n’est pas aussi simple que ce les gens finissent par en faire. »

Moore, président du Congrès des dirigeants chrétiens, a déclaré qu’il avait souligné avec ses contacts locaux la nécessité d’un cessez-le-feu immédiat et d’un règlement négocié avant que la situation ne devienne incontrôlable.

Mais il a également fait l’éloge de l’Azerbaïdjan comme modèle de coexistence pacifique entre les religions. Sa minorité musulmane sunnite, qui compose 15 pour cent de la population de 10 millions d’habitants, coopère avec la majorité chiite, tandis que les chrétiens représentent 3 pour cent de la population. En même temps, 12 000 Juifs y poursuivent la longue présence de leur communauté.

Et politiquement, l’Azerbaïdjan représente le lien essentiel pour le commerce et l’énergie entre l’Europe et l’Asie,en contournant la Russie et l’Iran, a déclaré Moore. Une brève flambée militaire cet été a eu lieu non pas le long de la «ligne de contact», mais à plus de 300 km de distance dans le Nord de l’Arménie, la région la plus proche des oléoducs et des gazoducs.

Certains analystes affirment que la Russie – qui vend des armes aux deux parties – permet à cette escalade de se prolonger afin de faire pression sur le gouvernement de libéralisation de l’Arménie. D’autres disent que la Turquie joue dans l’arrière-cour de la Russie, comme un message à Moscou pour qu’il cède en Syrie.

L’Azerbaïdjan, quant à lui, a vu sa puissance régionale croître depuis l’acceptation du règlement du Groupe de Minsk en 1994 qui a laissé les Arméniens sous le contrôle du Haut-Karabakh. Ses revenus pétroliers et gaziers correspondent à une multiplication par 20 des dépenses militaires entre 2004 et 2014, soit deux fois la totalité du budget de l’État arménien.

De nombreuses armes de la nation chiite sont importées d’Israël, y compris les drones « kamikaze » qui ont ainsi introduit la guerre de haute technologie dans ce conflit. L’Arménie a rappelé (https://www.timesofisrael.com/armenia-recalls-ambassador-from-israel-to-protest-sale-of-weapons-to-azerbaijan/) son ambassadeur de Tel Aviv en signe de protestation.

Dans ce contexte de réalités géopolitiques compliquées, les évangéliques devraient-ils simplement soutenir les chrétiens?

«Absolument», dit Nercessian.

Le pipeline n'est qu'un problème mineur, a-t-il déclaré. L’Arménie doit s'allier à la Russie car elle est le courtier régional en matière de pouvoir. Et au début des années 1990, alors que les frontières étaient fermées par la Géorgie chrétienne et la Turquie sunnite, c’est bien l’Iran chiite qui a fourni à l’Arménie le carburant dont elle avait besoin.

«La politique concerne les intérêts et les calculs nationaux, pas les principes moraux ou spirituels», a-t-il déclaré.

«Mais si l'Église en Amérique ne soutiend pas la nation chrétienne, aussi nominale soit-elle, qui soutiendra-t-elle?»

Personne, dit Moore. Comme il s’agit d’un conflit foncier ( qui concerne la terre) – et non religieux -, il vaut mieux rester neutre et exhorter les deux parties à négocier.

L’Azerbaïdjan serait prête, pense-t-il.

«Les chrétiens ne devraient pas soutenir instinctivement l’Arménie simplement parce que c’est un pays à majorité chrétienne», a-t-il dit. Cela pourrait renforcer l’Iran, tandis que l’Azerbaïdjan est allié à Israël.

«Ce conflit doit être rejeté et ne pas être oxygéné par les passions religieuses.»

Il y a beaucoup de cela au Liban, avec son importante minorité arménienne, a déclaré Martin Accad, directeur des études au séminaire théologique baptiste arabe de Beyrouth. Ses médias sociaux ont été inondés de déclarations de soutien.

Accad a déclaré qu’il n’avait pas suffisamment étudié la question pour peser le pour et le contre entre les deux nations.Il est cependant très préoccupé de ce que des militants syriens auraient été embauchés par la Turquie.

Mais il conseille une autre mesure de jugement.

«Nous sommes appelés à soutenir la juste cause, pas simplement une appartenance religieuse ou culturelle commune», a-t-il déclaré. «Sinon, ce n’est que du sectarisme tribal.

« Je ne peux cependant qu’imaginer le considérable impact psychologique que peut avoir sur les Arméniens un tel conflit, étant donné leur histoire [de génocide,] il y a un siècle.»

L’Arménie a été la première nation à accepter le christianisme, en 301 de notre ère.

Alors qu'il y a aujourd'hui seulement 1% d'évangéliques en Arménie, 93% de sa population de 3 millions appartiennent à l’Église orthodoxe arménienne.

L’AMAA, créée en 1918 pour aider les survivants du génocide dans l’Empire ottoman, est à l'oeuvre aujourd’hui dans 24 pays. Son plus grand rayonnement missionnaire est en Arménie, où l'AMAA a commencé à travailler après le tremblement de terre de 1988 qui a tué 60 000 personnes.

Mais le mouvement évangélique a commencé bien plus tôt, lorsque le réveil des années 1860 s’est répandu à travers l’Anatolie pour atteindre même les montagnes du Haut-Karabakh. Aujourd’hui, la région compte une Église évangélique arménienne et trois centres d’éducation chrétienne, sans compter les 22 Églises évangéliques en Arménie proprement dite.

«Notre mission principale est d’atteindre les gens et de répandre l’Évangile», a déclaré Hovsepian. Son Église d’Erevan dessert plus de 200 familles.

Ces derniers temps, les relations sont bonnes avec l ‘«Église mère» orthodoxe, avec laquelle ils coopèrent au sein de la Société biblique. Mais alors que la nation a connu un certain renouveau avec une préoccupation renouvelée pour l’éducation chrétienne, il demeure un manque évident d'accentuation des Écritures.

Ainsi, pendant que le jeune Hovsepian attend un appel téléphonique envue de le recruter dans l’armée, Nercessian se démène pour répondre aux appels téléphoniques pour demander de l’aide. Qu’il s’agisse d’un conflit politique ou religieux, celui-ci frappe une nation chrétienne.

«Nous sommes une petite enclave de lumière spirituelle dans une région sombre», a déclaré le missionnaire AMAA. «Nous y étions, nous y sommes et nous y demeurerons encore.»

Correction: Un renouveau anatolien a commencé déjà dans les années 1860, pas dans les années 1920, comme cet article le déclarait initialement.

Traduit par Jean-Paul Rempp

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Books

Dieu savait ce qu’il faisait quand il a donné à Jésus deux arbres généalogiques

Que faire des nombreuses divergences entre les généalogies de Matthieu et de Luc.

Christianity Today October 2, 2020
WikiMedia Commons

Les difficultés dans les Écritures fonctionnent comme des ralentisseurs : elles peuvent être frustrantes et nuire aux imprudents, mais elles nous aident à ralentir et à être plus attentifs. Les tensions provoquent la réflexion. Des contradictions apparentes nous obligent à lutter plus en détail avec les textes. Quand Dieu a inspiré ces choses, il savait ce qu’il faisait.

En étudiant les Évangiles, nous sommes immédiatement confrontés au problème des différences majeures qui existent entre les généalogies de Jésus dans Matthieu et Luc. Le chapitre premier de Matthieu énumère 42 générations remontant à Abraham ; le chapitre 3 de Luc indique 77 générations qui remontent jusqu'à Adam. Parmi les dizaines de noms que l'on trouve entre la mention de David et celle de Jésus, seuls cinq figurent sur les deux listes. Pire encore, Jésus a deux grands-pères paternels différents : Jacob (Mt 1.16) et Héli (Lc 3.23).

Les efforts pour faire sens de ces différences se concentrent souvent du côté de Matthieu, en partie parce que sa généalogie semble plus théologiquement motivée : de nombreuses omissions, l’apparition de certaines femmes, trois groupes de 14, etc. Luc, suppose-t-on, nous donne « les simples faits », tandis que Matthieu les retravaille pour mettre certaines choses en évidence. Mais cette approche rabaisse à la fois l’historien en Matthieu et le théologien en Luc. Je suis convaincu que la généalogie de Luc a un contenu théologique tout aussi puissant que celui de Matthieu, voire plus.

Observez de quelle façon il énumère 77 générations depuis Adam jusqu'à Christ. Le nombre nous renvoie au sabbat. Il nous rappelle Lémek qui se voulait vengé 77 fois (Ge 4.24) et Jésus qui invite à pardonner 77 fois (Matthieu 18.22). Il évoque l’année du Jubilé (Lv 25.8-55), observé une fois toutes les sept séries de sept ans. Jésus proclamera l’accomplissement de la promesse du Jubilé en Luc 4.16-21, un développement comme annoncé deux chapitres plus tôt, lorsque l’appel à se rendre à son lieu d’origine pour un recensement rappelle le commandement du Jubilé de retourner dans sa « propriété familiale » (Lv 25.10).

Il faut également noter que Luc place sa généalogie non pas au début de la vie de Jésus mais au début de son ministère, alors qu’il a « environ trente ans » (3.23). Le chiffre trente est significatif. Les prêtres commençaient leur ministère à cet âge (Nb 4.3), l’âge qu'avait David lorsqu'il est devenu roi (2 S 5.4) et celui d’Ézéchiel au moment où il a reçu des visions prophétiques de la part de Dieu (Ez 1.1). En insérant sa généalogie à ce stade, Luc relie l’ascendance de Jésus à son ministère de prophète, de prêtre et de roi. En remontant à Adam, et pas seulement à Abraham, il dépeint Jésus comme un prophète pour les nations, un prêtre pour tous les peuples et un roi de la terre entière.

Ensuite, il y a la question du (des) grand-père(s) paternel(s) de Jésus. Dès les débuts du troisième siècle, certains ont émis l’hypothèse que Joseph avait deux pères, soit parce qu’il avait été légalement adopté, soit parce qu’il était l’enfant d’un mariage en lévirat. (Selon cette coutume juive, si un homme mourait sans enfants, son frère devait épouser la veuve pour préserver la lignée familiale.) Si c'était effectivement le cas, alors Joseph était bien le fils d’Héli et de Jacob. Dans un premier temps, l’idée m’est apparue comme une tentative apologétique désespérée. Mais j’ai par la suite pris conscience de toutes les autres références de Luc 3 au lévirat, au mariage et à l'adoption légale.

L’une concerne Hérode et son frère Philippe (Lc 3.1). Hérode avait épousé la femme de Philippe, mettant en colère les Juifs pratiquants, ce qui finalement conduisit à la décapitation de Jean-Baptiste (Mc 6.17). Ainsi, le récit de Luc à propos de la vie d'adulte de Jésus commence avec l'histoire d'un homme qui a contracté un « mariage de lévirat » adultère alors que son frère était encore vivant.

Un autre récit touche à Jésus lui-même puisqu'il est écrit qu'« il était, pensait-t-on, le fils de Joseph » (Lc 3.23). Légalement, Jésus était bien fils de Joseph, mais Joseph n’était pas son père biologique. Comme Gabriel l’avait expliqué à Marie, Jésus serait appelé « Fils du Très-Haut » et « Fils de Dieu » (1.32, 35).

On trouve même un dernier exemple dans la bouche de Jean-Baptiste qui, dans cette formule bien connue, se distingue de celui « dont [il n’est] pas digne de délier la courroie des sandales » (3.16). Délier la courroie de la sandale correspondait au moment clé de la halizah, le processus dans lequel un homme était libéré de l’obligation du lévirat (Dt 25.9 ; Rt 4.7). Peut-être, comme l’a soutenu Grégoire le Grand, Jean déclarait-il non seulement sa soumission à l'autorité du Christ, mais aussi son indignité pour le remplacer en tant que véritable époux d’Israël. Jean était le meilleur ami de l'époux, mais pas l’époux (Jn 3.29).

Dans ce contexte plus large, l’énigme d’Héli et de Jacob n’est pas une coïncidence mais s’intègre à un motif, motif que nous pourrions négliger si nous ne prenions pas la peine de ralentir, presque jusqu’à l’arrêt. Merci Seigneur pour les ralentisseurs.

Andrew Wilson est pasteur enseignant à la King’s Church de Londres et est l’auteur de Spirit and Sacrament « Esprit et sacrement ») (Zondervan). Suivez-le sur Twitter @AJWTheology.

Traduit par Jean-Paul Rempp Révisé par Léo Lehmann

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Les racines de la voix prophétique noire

Pourquoi l’Exode doit rester centrale pour l’Église afro-américaine.

Christianity Today September 14, 2020
Illustration by Matt Chinworth

Cet article est le dernier d’une série d’essais en six parties rédigés par un panel représentatif d’éminents chercheurs revisitant la place du « Premier Testament » dans la foi chrétienne contemporaine.

J’avais 11 ans quand j’ai visionné le documentaire sur Martin Luther King Jr. et le mouvement des droits civiques intitulé Eyes on the Prize. Des images de femmes noires jetées au sol par des lances à incendie à Birmingham défilaient devant mes yeux. Les chiens policiers chargeaient les gens. Des visages de blancs en colère criaient des insultes raciales à des enfants noirs cherchant à entrer dans une école qui ne suivait pas la loi de la ségrégation..

En grandissant dans la Hatchie Street Church of Christ (l’Église de Christ de la rue Hatchie), une petite Église noire au Sud-ouest du Tennessee, j’ai entendu des sermons et et des leçons d’école du dimanche sur l’esclavage israélite en Égypte. Après avoir regardé Eyes on the Prize, il m’est apparu clairement que le sort des Noirs en Amérique était le même que celui des Israélites en Égypte. Cette prise de conscience m’a inspiré le désir de poursuivre dans la tradition de Moïse, des prophètes de l’Ancien Testament et des juges (que nous pourrions considérer comme des « combattants de la liberté »), ainsi que dans l’héritage de Martin Luther King Jr. L’Ancien Testament dénonce la souffrance et l’oppression que vivent les Noirs en Amérique aujourd’hui, et l’Église noire – de plus en plus tentée par un évangile de prospérité et de confort caractéristique de la classe moyenne ­– se doit de rester enracinée dans cet héritage.

La puissance de l’Exode

L’histoire de l’Exode a eu un impact durable au sein de l’Église afro-américaine parce que le récit parle de façon très juste des problèmes rencontrés par ceux qui en font partie. Les Afro-Américains de toutes les générations ont trouvé dans l’Exode un Dieu qui s’occupe des opprimés qui crient vers lui :

J’ai bien vu la misère de mon peuple qui est en Égypte. J'ai entendu son cri à cause de ses oppresseurs/conducteurs d’esclaves, et je suis préoccupé par ses souffrances. Je suis donc descendu pour le délivrer de la main des Égyptiens et pour le faire monter de ce pays dans un bon et vaste pays, dans un pays où coulent le lait et le miel. (Exode 3.7–8)

Les Afro-Américains ont lu dans l'Exode l'histoire d'un Dieu qui s’oppose aux puissants qui déshumanisent les enfants de Dieu. Ils en sont venus à croire que Dieu entendait leurs prières tout comme il entendait les prières des Israélites : « J’ai vraiment vu la misère de mon peuple en Égypte ». Il y a là le langage de l’élection qui indique que les opprimés sont la propriété de Dieu. Il y a là le Dieu, maître de l’histoire, qui non seulement sait où se trouve ses élus, mais connaît aussi la qualité de leur existence et considère leur esclavage comme divinement illégal.

Les congrégations afro-américaines prennent en compte le fait que Dieu ne voit pas seulement la misère de ses élus, mais aussi qu'il entend le cri du peuple : « J’ai entendu son cri à cause de ses chefs d'ouvrage ». Voir et entendre conduit Dieu à agir : « Je suis descendu pour les délivrer ». Le livre de l’Exode nous rappelle que l’action libératrice est la réponse naturelle de Dieu lorsque les opprimés souffrent. Parce que Dieu connaît la douleur des esclaves israélites, Dieu descend pour juger les oppresseurs et délivrer les opprimés. L’importance de l’Ancien Testament – et en particulier du livre de l’Exode – pour l’Église afro-américaine correspond à son affirmation que notre Dieu est un Dieu qui voit, entend et agit en faveur des affligés.

Bien sûr, les propriétaires d’esclaves avant la guerre de sécession avaient compris que les esclaves qui découvriraient l’histoire de l’Exode trouveraient en elle une ressource théologique puissante pour imaginer une légitimité divine à leur propre émancipation. Par conséquent, en plus d’empêcher de nombreux esclaves de recevoir une instruction, certains maîtres chrétiens qui s’intéressaient à la conversion de leurs esclaves utilisaient la soi-disant « Bible des esclaves » intitulée Parts of the Holy Bible, selected for the use of the Negro Slaves, in the British West-India Islands (« Extraits de la Sainte Bible, sélectionnés pour l’usage des esclaves nègres dans les Îles britanniques d’Inde occidentale »). Cette Bible excluait près de 50% du Nouveau Testament et 90% de l’Ancien Testament. Sans surprise, presque tout le livre de l’Exode en avait été supprimé. Il ne fallait pas beaucoup d’imagination pour donner le rôle de Pharaon aux propriétaires de plantations, tandis que les esclaves afro-américains pouvaient facilement s’identifier aux Juifs réduits en esclavage en Égypte. Les maîtres d’esclaves blancs avaient compris la puissance que pouvait avoir ce livre – et il l’a eue – parmi les communautés afro-américaines.

Un héritage de libération

King, que de nombreux Afro-Américains ont considéré comme le Moïse noir, connaissait bien la souffrance et la misère des Noirs. Il n’a jamais laissé son éducation exceptionnelle dans un système éducatif suprémaciste blanc l’aveugler sur la misère noire. Comme Moïse, la rencontre authentique de King avec le Dieu de la libération l’a poussé à agir pour délivrer son peuple mis à genoux devant le trône intimidant de la brutalité blanche dans le Sud.

Dans Never to Leave Us Alone: The Prayer Life of Martin Luther King Jr., (« Ne nous laisse jamais seuls : La vie de prière de Martin Luther King Jr. ») Lewis Baldwin note l’influence de l’Ancien Testament sur King, qui croyait que les psalmistes et les prophètes incarnaient l’idéal biblique d’une action audacieuse soutenue par une prière persistante. Baldwin écrit : « Le leader des droits civiques avait manifestement une conception de la prière marquée par les Écritures, et il a trouvé, dans ces sources et dans d’autres sources de la Bible hébraïque, des références sur l’essence de la prière et le fondement de sa vision de la prière considérée comme une conversation et une marche quotidiennes avec Dieu ». Comme le dit plus loin Baldwin, « Pour King, l’impératif de prier ne venait pas seulement d’un sentiment de finitude personnelle devant Dieu, mais aussi d’une conscience profonde ancrée dans l’expérience religieuse afro-américaine, et en particulier dans les traditions de l’Église noire ».

Le profond enracinement de King dans la tradition prophétique de l’Ancien Testament l'a notamment conduit à prêter attention aux masses d’Afro-Américains pauvres que l'on laissait se noyer au milieu de l’océan de richesse des Blancs. Au lieu que son éducation de classe moyenne dans des institutions blanches l’insensibilise au sort de ceux qui étaient pris au piège de la misère et de la pauvreté, King utilisa sa formation pour libérer le pouvoir de sa pensée, et l’esprit des prophètes pour libérer sa langue en vue de défendre les exploités.

Cette même sensibilité à la souffrance des déshérités était profondément présente chez le mentor et confident de King, Howard Thurman. Dans Jesus and the Disinherited (« Jésus et les déshérités »), Thurman raconte une histoire survenue la nuit où sa mère l’a réveillé pour voir la comète de Halley, alors qu'il n'était qu'un petit garçon. De leur jardin ils regardèrent, silencieux, ce grand faisceau de lumière se répandre dans le ciel. Quand Howard exprima la crainte que la comète ne frappe la terre, sa mère rompit son silence et dit : « Rien ne nous arrivera, Howard ; Dieu prendra soin de nous ». Il poursuit en écrivant : « J’ai vu beaucoup de choses depuis cette nuit. À d’innombrables reprises, j’ai appris que la vie est dure, aussi dure que le métal du creuset ; mais au fil des années, le pouvoir majestueux des mots lumineux de ma mère m'est revenu encore et encore en mémoire, battant son chant rythmique dans mon propre esprit. Voici la foi et la conscience qui surmontent la peur et la transforment en puissance pour lutter, pour réussir… et ne pas céder. »

Cette conviction profonde que Thurman a héritée de sa mère et de sa grand-mère était une profondément enracinée dans l’Exode et la tradition prophétique. Les opprimés n’avaient pas d’autre recours auquel faire appel au milieu de leurs souffrances. Lever les yeux au ciel représente l’attente implicite que le Dieu de la libération descendra pour faire face à la misère des déshérités.

Des Égyptiens aux Chrétiens blancs

Bien sûr, l’histoire de l’Exode n’aide pas seulement les chrétiens afro-américains à interpréter leur histoire et leur expérience de l’oppression. Cela les aide également à interpréter leurs oppresseurs blancs, dont beaucoup se présentent comme des chrétiens. Souvent, les Afro-Américains disent des chrétiens blancs qu’ils ne peuvent pas comprendre l’expérience des Noirs. Les chrétiens blancs ne pourraient pas comprendre la souffrance des Noirs parce qu’ils n’ont pas connu la servitude et l’exploitation perpétuelles. Si les chrétiens blancs veulent comprendre l’expérience de l’oppression noire, cela nécessite un désir intentionnel.

L'Exode enseigne à l’Église noire que leurs sœurs et frères chrétiens blancs sont comme Moïse alors qu’il vivait dans la maison de Pharaon en tant qu’héritier privilégié. Le récit de l’Exode donne peu d’indications laissant penser que Moïse se serait intéressé à la libération de ses compatriotes israélites avant sa mystérieuse rencontre avec Dieu. Certes, l’éducation d’un prince égyptien n’incluait pas le souci des esclaves qui avaient construit les palais et les pyramides égyptiens. Tout comme Moïse était conditionné à ignorer les souffrances de son propre peuple, de nombreux chrétiens blancs ont été conditionnés à ignorer l’histoire de l’oppression des Afro-Américains. Même l’éducation des Blancs à son meilleur niveau ne produit souvent que des personnes se prétendant indifférentes à la couleur de peau (« colorblind »), ce qui revient à être historiquement indifférents à la longue histoire de l’oppression des Noirs.

Ce que les Afro-Américains apprennent de l’Exode (et des prophètes, des œuvres exiliques et de la littérature post-exilique), c’est que Dieu n’est pas indifférent. Dieu entend les cris des opprimés, il voit l’oppression et il agit. Quand Moïse en vient à reconnaître les souffrances de son peuple, il agit de manière décisive pour leur salut. La vraie compassion conduit les gens à agir en faveur des opprimés, même jusqu’à mettre leur propre vie en danger. Peut-être les chrétiens blancs ont-ils volontairement ignoré la souffrance de leurs sœurs et frères noirs parce qu’ils ne veulent pas mettre leur propre vie en danger, ni même risquer de perdre la sympathie, l’acceptation ou l’amour des autres Blancs.

Revenir aux racines de l’Exode

La dissociation des chrétiens blancs de la souffrance noire leur a rendu difficile la compréhension de l’Église noire imprégnée de ce récit de l’Ancien Testament, et qui lutte pour la liberté dans l'ensemble du mouvement des droits civiques. L’Exode a été l’histoire la plus influente pour aiguiser l’appétit de liberté des Noirs subissant l’oppression. Cependant, lorsque le mouvement des droits civiques a perdu en King son chef spirituel, la génération suivante a commencé à chercher une entrée politique à l’intérieur même des systèmes d’oppression encore sous le contrôle de la domination blanche. King opérait comme un prophète en marge du système oppressif. Mais après sa mort, l’Église noire a perdu quelque chose de cette voix prophétique.

Au lieu de continuer à conduire l’Église noire vers la terre promise, de nombreux disciples de King ont ramené l’Église noire à l’intérieur même du palais de la politique sécurisée de Pharaon, même si c’était avec un statut amélioré. La recherche du simple pouvoir politique et de la richesse matérielle a compromis l’intégrité du lien de l’Église noire avec le pouvoir spirituel divin qui a inspiré King et les prophètes de l’Ancien Testament à risquer leur vie en résistant aux systèmes politiques d’oppression. Les prédicateurs noirs ont alors trouvé plus attrayant de fonctionner comme des politiciens que comme des prophètes osant exprimer une vérité audacieuse face aux systèmes de contrôle politique dominants.

Ces prophètes devenus politiciens n’ont pas réalisé que le pouvoir blanc n’avait ni la compassion ni le souci d’alléger la souffrance des Noirs. De nombreux dirigeants de l’Église noire ont, certes, découvert qu’opérer en tant que politiciens plutôt qu’en tant que prophètes leur avait valu l’aide de bons Blancs. Des voix prophétiques noires potentielles ont, effectivement, été acceptées dans les séminaires blancs grâce à des bourses d’études à trente deniers pour personnes issues d’une minorité. Celles-ci ont finalement dompté l’esprit prophétique qui avait donné naissance au mouvement des droits civiques. La tradition de prédication prophétique qui fournissait autrefois un leadership courageux à l’Église noire a été blanchie à la chaux.

De nombreux Noirs ont connu une ascension dans des Églises de la classe moyenne noire dirigées par des pasteurs formés dans des institutions académiques de la classe moyenne blanche. Certaines Églises noires de la classe moyenne ont commencé à sélectionner des prédicateurs qui s’abstiendraient d’offenser les sentiments de la classe moyenne noire. Pendant tout ce temps, l’Église de la classe moyenne noire s’est faite moins en lien avec la classe inférieure noire. Peu à peu, l’Église de la classe moyenne noire a connu moins de critiques prophétiques de la structure du pouvoir blanc et est devenue plus associée à l’agenda de la suprématie blanche sous son déguisement religieux.

Néanmoins, d’autres chrétiens noirs de la classe moyenne ont utilisé leurs positions d’influence pour la libération des masses noires appauvries. Sans surprise, les sermons dans ces Églises se sont enracinés dans la vaste étendue des récits de l’Ancien Testament relatifs à la délivrance par Dieu des opprimés de l’esclavage. Les petites filles et petits garçons noirs ont entendu des sermons sur Moïse, Esther, Josué, Samson, Déborah, Daniel, Néhémie, David, Vashti, Gédéon, Ruth, Esaïe, Jérémie, Amos et Michée : des figures héroïques luttant contre des systèmes oppressifs asservissant leur peuple.

L’Église noire, autrefois enracinée dans une riche tradition de prédication et de prière en lien avec l’Ancien Testament, montre des signes de tiraillement entre la classe moyenne noire et les Noirs les plus défavorisés. Comme l’émission spéciale de la chaîne PBS, « Les deux nations de l’Amérique noire », l’a clairement montré il y a plus de deux décennies, nous avons à la fois la plus grande classe moyenne noire de l’histoire et la plus grande sous-classe noire de l’histoire. Les Afro-Américains doivent maintenant prêter attention à l’autre face du racisme blanc que l’on voit apparaître dans la division des noirs en classes.

Marvin McMickle, dans son livre Preaching to the Black Middle Class (« Prêcher à la classe moyenne noire »), considère cette division entre la classe moyenne noire et la classe inférieure noire comme peut-être le plus grand défi pour le prédicateur dans l’Église noire actuelle. Certaines Églises de la classe moyenne noire sont davantage engagées dans le système de richesse blanc qu’avec la classe inférieure noire. « Malheur à ceux qui sont à l’aise dans Sion », écrit McMickle, citant Amos 6.1. Pour que l’Église de la classe moyenne noire ait de la crédibilité dans les rues, la chaire noire doit à nouveau répondre aux besoins des masses noires.

King n’avait assurément pas peur d’utiliser toute chaire qui se présentait à lui et de s’inspirer des images des livres de l'Exode, d’Esaïe et d’Amos. Avec une histoire de prédicateurs tels que King et ses ancêtres, la question aujourd’hui est la suivante : l’Église de la classe moyenne noire se consacrera-t-elle à nouveau à prendre en compte la misère de la sous-classe noire opprimée ? La classe moyenne entendra-t-elle les cris des opprimés et développera-t-elle des stratégies pour délivrer leurs sœurs et frères qui souffrent ?

L’Ancien Testament nous oblige à être, aujourd’hui encore, émus d'une compassion divine lorsque nous observons les masses souffrantes de Noirs dans cette nation. L’Église de la classe moyenne noire doit retrouver sa voix prophétique et retourner dans des lieux de servitude pour proclamer la liberté aux captifs. Dieu est un Dieu de liberté, et il entre toujours dans des systèmes oppressifs pour en faire sortir les victimes, qu’il appelle son peuple. En avançant, puissions-nous laisser des esprits libérés exprimer à travers notre bouche libérée les mots qui ébranleront les fondements de la tyrannie et transformeront les systèmes construits sur le dos de la souffrance humaine. L’Église noire doit perpétuer son héritage de l’Ancien Testament, comme une force libératrice au sein d’un projet divin, si elle veut retrouver un rôle d’institution libératrice au sein de systèmes humains injustes qui cherchent encore à asservir.

Jerry Taylor est professeur agrégé de Bible, de missions et de ministère et est le directeur fondateur du Carl Spain Center on Race Studies and Spiritual Action à la Abilene Christian University .

Traduit par Jean-Paul Rempp

Révisé par Léo Lehmann

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