81% des évangéliques ont-ils vraiment voté pour Trump ?

Le fait de revendiquer une appellation ne signifie pas automatiquement que l’on correspond à ce qu’elle signifie.

Christianity Today February 25, 2021
Source images: RobinOlimb / Getty

Le soutien des évangéliques américains au président Donald Trump n'a pas suffi à lui faire remporter un nouveau mandat. Mais il a suffi à confirmer la réputation des évangéliques auprès du grand public comme étant peut-être le groupe démographique le plus trumpiste des États-Unis.

Il y a pourtant de quoi se demander si cette perception est juste. L’affirmation plusieurs fois reprise selon laquelle 81% des évangéliques ont voté pour Trump en 2016 n'a jamais vraiment été exacte. Basée sur des sondages effectués à la sortie des bureaux de vote, elle ignorait les millions d'évangéliques qui n'ont pas voté pour Trump tout simplement parce qu'ils n'ont pas voté du tout. Cette soi-disant description de l'ensemble du vote évangélique se fonde sur une statistique ne prenant en compte que les électeurs blancs, alors que l'évangélisme est de plus en plus diversifié sur le plan ethnique.

On y a aussi compté comme évangéliques tous ceux qui revendiquaient simplement cette appellation, bien que l'auto-identification soit une variable délicate à employer car elle inclut les « évangéliques » qui ne suivent ni en paroles ni en actes les principes de l'évangélisme établis depuis longtemps. Et, une fois mentionnées toutes ces réserves, on n’arrive même pas réellement à 81%. Des études plus récentes et de meilleure qualité situent ce chiffre autour des 75%, ce qui correspond finalement au taux très constant de soutien aux candidats républicains observé chez les électeurs s'identifiant comme évangéliques blancs dans les dernières années.

Mais cette clarification suffira-t-elle à renverser l’opinion publique? Ou encore les données des élections de 2020 qui pourraient avoir révélé de nouvelles tendances ? Je ne crois pas. « Les Américains semblent de plus en plus envisager les évangéliques dans une perspective politique », selon les résultats d'un sondage réalisé fin 2019 par le groupe Barna. Pour beaucoup d’entre eux, les « évangéliques » sont d'abord et avant tout un électorat. Un terme autrefois censé signaler certaines positions quant au salut de l'âme, l’autorité des Écritures et le service chrétien, désigne désormais l'alignement politique avec un seul parti et un seul président.

La question de savoir si les évangéliques auraient dû soutenir Trump a déjà été longuement explorée dans les médias et sur Internet. Je ne discuterai pas ici de l’inévitabilité ou de la pertinence de cette association. Je ne plaide pas non plus en faveur de l'abandon du mot « évangélique » ou d’une campagne pour restaurer son sens initial, si cela était possible.

Non, ce qui m'intéresse ici, ce n'est pas de savoir qui obtient nos votes ou comment nous sommes appelés, mais plutôt comment il se fait qu'un groupe de chrétiens puisse si facilement – et si rapidement – devenir aussi fortement associé à une autre personne que le Christ. Qu’est-ce que cela dit de nous si le premier nom qui vient à l'esprit de nos voisins lorsqu’ils entendent « évangélique » n'est pas « Jésus » ?

Certes, s’inquiéter de notre réputation peut sembler frivole. « Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes » (Ac 5.29). Le verdict de Dieu à notre égard passe avant les moqueries ou les éloges des autres. Mais la Bible se préoccupe aussi de la réputation. « Ayez une bonne conduite au milieu des païens. Ainsi, dans les domaines mêmes où ils vous calomnient en vous accusant de faire le mal, ils verront vos bonnes actions et loueront Dieu le jour où il interviendra dans leur vie » (1 P 2.12). Le proverbe dit : « Bon renom vaut mieux que grandes richesses » (Pr 22.1). Et la volonté de Jésus à cet égard est évidente quand il dit que c’est par notre amour les uns pour les autres que « tous connaîtront » qui nous sommes (Jn 13.35).

Le fait que des chrétiens aient acquis une mauvaise réputation n'est pas nécessairement un signe de désobéissance à ces commandements. On se rappellera que l'église primitive a été accusée d'athéisme (pour avoir refusé d'adorer des idoles), de cannibalisme (pour avoir pris la Cène) et d'inceste (pour avoir appelé leur conjoint « frère » ou « sœur » en Christ). Une critique, rapportée par un écrivain chrétien du troisième siècle nommé Minucius Felix, qualifiait l'église de « faction infâme et désespérée » issue de « la lie du peuple » et « s'attaqu[ant] impunément aux dieux ». Mais il y a tout de même un fossé béant entre la mauvaise réputation acquise par des chrétiens s’efforçant simplement d’obéir aux ordonnances de leur foi (c.-à-d. l'adoration, la sainte cène et la communion fraternelle) et la mauvaise réputation acquise par un groupe pour son allégeance manifeste à un politicien. Notre problème de réputation n’a rien à voir avec le leur. L'Empire des Césars soupçonnait que l’insistance des adeptes de cette étrange secte à affirmer que Jésus est Seigneur les rendait incapables d’être de bons citoyens. Les Américains qui considèrent les évangéliques comme un bloc pro-Trump ne sont pas en train de se demander si ceux-ci ne sont pas un peu trop centrés sur Christ.

Malgré cette différence, le remède est le même dans chaque cas. L'Église primitive réfutait ces fausses accusations sur la place publique, et elle a connu une croissance exponentielle parce que les chrétiens avaient « une bonne conduite au milieu des païens » et partageaient cette Bonne Nouvelle si extraordinaire et porteuse d’espérance : Dieu aime toute l'humanité. Notre tâche ne diffère en rien. Peu importe que cela rehausse notre crédibilité ou pas, que cela sauve l’étiquette « évangélique » ou non, nous devrions nous aussi vivre si fidèlement et intégralement que notre allégeance ne fasse plus aucun doute.

Bonnie Kristian est chroniqueuse à Christianity Today.

Traduit par Simon Fournier

Révisé par Léo Lehmann

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Les pasteurs devraient-ils s’exprimer sur le vaccin contre la COVID-19 ?

Les chrétiens sont divisés sur la question : certains préconisent la vaccination par amour pour le prochain, d’autres laissent ce choix à la conscience de chacun.

Christianity Today February 23, 2021
Illustration by Rick Szuecs / Source image: Gchutka / Getty / Product School / Unsplash / Envato

Un sondage mené en janvier par le Washington Post et ABC News révèle que 44% des Américains blancs s’identifiant comme évangéliques seraient réticents à se faire vacciner contre la COVID-19, contre moins d’un tiers dans la population en général.

Pendant des siècles, et même si la relation a parfois été complexe, la religion et la médecine ont collaboré dans les efforts de prévention des maladies, Au cours des dernières années, les professionnels de la santé publique ont compté sur le soutien des dirigeants d’Églises – particulièrement dans certaines communautés culturelles – pour gagner la confiance de ceux qu'ils cherchent à sensibiliser. La pandémie de coronavirus nous offre un exemple de plus de la relation complexe entre la foi et la science.

Compte tenu des divergences entre les chrétiens, comment les pasteurs devraient-ils aborder le sujet du vaccin contre la COVID-19 avec leurs assemblées ? Devraient-ils encourager les gens de leur Église à se faire vacciner ?

Cinq pasteurs ont bien voulu nous décrire comment des facteurs tels que l'origine ethnique, la théologie et la composition de la congrégation influencent leur approche du problème.

Jeff Schultz, pasteur de la Faith Church à Indianapolis

Notre Église a prié pour les efforts de recherche et de développement de vaccins, mais nous n'irions pas jusqu'à inciter les gens à se faire vacciner.

Notre congrégation compte un certain nombre de médecins, d’infirmières, de chercheurs dans le domaine médical et de travailleurs de l'industrie pharmaceutique. Nous croyons que Dieu agit parfois de façon miraculeuse, mais plus communément à travers notre travail, nos dons et notre sagesse exercés au service des autres. Nous avons encouragé les gens à porter des masques et à pratiquer la distanciation sociale. Nous avons aussi des membres qui ne retourneront pas au culte en personne tant qu’un vaccin ne sera pas disponible. Mais je ne pense pas que nous dirions quoi que ce soit formellement sur la prise d’un vaccin (si ce n'est que pour rendre grâce à Dieu pour leur découverte).

Au niveau individuel, je vais encourager les gens à consulter leur médecin pour être guidés dans cette décision. Je vois les masques et la distanciation sociale comme des comportements à très faible risque qui contribuent à notre amour pour nos prochains. Un vaccin contre la COVID-19 est un autre moyen important d’arrêter la propagation d’une maladie mortelle, mais en tant que pasteur je ne crois pas avoir les qualifications pour orienter les gens à propos de traitements médicaux susceptibles d'avoir des effets secondaires ou un impact sur la santé à long terme. Je veux aider les gens à voir le potentiel bénéfique d'un vaccin tout en demandant à chacun de respecter les décisions des autres.

Luke B. Bobo, directeur des partenariats stratégiques chez Made to Flourish, un réseau de pasteurs basé au Kansas, et professeur invité au Covenant Theological Seminary

L’avortement, le cinéma, la musique, les armes à feu, les dessins animés, la médecine – autant de sujets que les pasteurs, en tant qu’exégètes de la culture, doivent aborder, car ils sont importants. Ces artefacts de notre culture véhiculent des messages qui sont souvent contraires à la vision chrétienne du monde. Le vaccin contre la COVID-19 ne fait pas exception et mérite d'être abordé depuis la chaire. Je crois que les pasteurs doivent oser un discours sage, biblique et chrétien à propos des vaccins.

Bien sûr, susciter l'adhésion de leurs fidèles à ce vaccin sera plus compliqué pour les pasteurs afro-américains car de nombreux abus ont été infligés à des personnes noires au nom du progrès médical. Qui peut oublier l’expérience de Tuskegee sur la syphilis et les fameuses cellules HeLa, des cellules cancéreuses volées à Henrietta Lacks sans le consentement de sa famille ? Les pasteurs doivent donc également aborder ce sujet sous un angle historique.

Les pasteurs doivent enseigner aux membres de leur assemblée à réfléchir de manière critique afin qu'ils forment leur propre opinion sur ce vaccin contre la COVID-19. Quand on leur demandera s’ils prévoient eux-mêmes de se faire vacciner, ils devraient répondre simplement en prenant soin de préciser : « C’est ma décision. Vous devez faire le travail et prendre votre propre décision. » En d’autres termes, les pasteurs ne doivent pas penser à la place de leurs fidèles. Ils doivent plutôt équiper leurs membres pour qu’ils soient en mesure de réfléchir et de décider par eux-mêmes.

Mandy Smith, pasteure de la University Christian Church à Cincinnati

Je n’ai aucune objection aux vaccins d'un point de vue philosophique ou théologique et je m’en remettrai aux professionnels de la santé dans ma congrégation qui en savent plus que moi sur le sujet. L’Église que je dirige se situe sur ce qu’on appelle parfois « Pill Hill » (litt. la Colline du Comprimé). Nous avons quatre hôpitaux dans notre voisinage immédiat, et nous comptons donc parmi nous pas mal de professionnels de la santé. En même temps, comme nous sommes dans une communauté diversifiée, nous avons également pas mal de gens intéressés par des modes de vie alternatifs, ce qui les amène à se méfier des vaccins.

En tant que chrétiens, nous avons besoin de laisser de la place pour les divergences d’opinions – l’unité dans les choses essentielles, la liberté dans les non-essentielles et en toutes choses, la charité. D'un point de vue philosophique, notre opinion sur les vaccins n’est pas essentielle : nous ne perdrons pas notre salut et ne devrions pas laisser la question nous diviser entre chrétiens.

En même temps, d'un point de vue pratique, les décisions que nous prenons quant au vaccin auront une influence sur les autres et vice versa. Bien que nous puissions accepter de ne pas être d’accord sur certains enjeux, si nos enfants jouent ensemble et que nous partageons des repas ou la Sainte-Cène, alors notre décision face aux vaccins ne concerne pas seulement notre propre intérêt mais bien celui de toute la communauté. S’il y a une chose que la pandémie nous a montrée, c’est que nos vies et notre santé sont étroitement liées à celles des autres.

Stephen Cook, pasteur principal de la Second Baptist Church à Memphis

La COVID-19 a coûté la vie à plus de 283'000 de nos prochains aux États-Unis, et à plus d'un million et demi de nos prochains dans le monde entier. Avec l’arrivée d'un vaccin qui suscite l'espoir, les pasteurs ont l’opportunité d’appeler le peuple de Jésus-Christ à aimer leur prochain, d’une manière qui incarne le commandement du Christ de nous aimer les uns les autres.

Quand un homme de loi interrogea Jésus pour savoir qui devait être considéré comme son prochain (Luc 10), ce dernier répondit avec l’histoire du Samaritain qui s’est arrêté pour subvenir aux besoins de l'homme qui avait été battu et laissé pour mort. Remarquez que, dans l'exemple de service miséricordieux choisi par Jésus, c'est par un acte de guérison que le Samaritain a manifesté son amour du prochain.

Encourager les croyants à se faire vacciner contre cette maladie qui a fait tant de ravages est une responsabilité pastorale. C’est l’occasion d’inviter les disciples de Jésus-Christ à réfléchir avec nous au rôle que nous avons à jouer pour favoriser la guérison du monde. C’est une opportunité de nous rappeler qu’à la fin de l’histoire, Jésus élève celui qui, en réponse à un besoin désespéré, aura agi comme un prochain.

Stephanie Lobdell, pasteure des étudiants à la Mount Vernon Nazarene University dans l’Ohio

L'instruction de Jésus d’aimer notre prochain a trouvé de nouvelles façons de se manifester dans le quotidien du campus universitaire où j'exerce mon ministère, avec par exemple les masques ou les plexiglas séparant les étudiants dans la cafétéria. Dans les jours à venir, ce commandement devrait également influencer notre attitude vis-à-vis du vaccin. Recevoir le vaccin, si notre condition physique le permet, est une autre façon de pratiquer l’amour du prochain.

En tant qu’université chrétienne de tradition méthodiste, nous apportons un argument supplémentaire à la discussion sur les vaccins. En tant que Wesleyens, nous tenons fermement à la centralité de la grâce coopérative dans la pratique chrétienne. Dieu initie le mouvement dans notre direction, nous invitant à expérimenter avec lui une relation d’amour ainsi qu’un véritable partenariat pour incarner activement la nouvelle création. Nous cherchons à encourager nos étudiants à considérer la vocation pour laquelle ils étudient comme une expression de ce partenariat.

Lorsque des scientifiques décryptent l’ADN d’un virus dangereux, lorsque des médecins travaillent sans relâche pour trouver des traitements plus efficaces, lorsque des chercheurs élaborent un vaccin qui protège les gens contre la contagion, nous ne levons pas un poing arrogant face à la science pour revendiquer que « la foi triomphe de la peur ! » Au contraire, nous nous réjouissons. Nous nous réjouissons devant l'impact vivifiant de ces vocations divinement ordonnées. Nous proclamons « Grâce soit rendue à Dieu », à la fois pour la providence de Dieu et pour le don précieux de l'intelligence humaine.

Traduit par Simon Fournier

Révisé par Léo Lehmann

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Books

France : Les Églises s’inquiètent d’un projet de loi à l’encontre du séparatisme musulman

Alors qu’un ministre demande la reconnaissance que « la loi de la République est supérieure à la loi de Dieu », les évangéliques craignent que la volonté de combattre l’islamisme porte aussi atteinte à la liberté de religion.

Christianity Today February 11, 2021
Abaca Press / AP Images

Exaspéré par des années de terrorisme infligé par les islamistes radicalisés, le parlement français est en débat sur une loi destinée à mettre fin au séparatisme musulman.

Les protestants français, notamment les évangéliques, redoutent que leurs Églises subissent des dommages collatéraux.

« C’est la première fois, en tant que président de la Fédération Protestante de France, que je me retrouve en position de devoir défendre la liberté de culte, déclare François Clavairoly. Je n’aurais jamais imaginé que, dans mon propre pays, quelque chose de ce genre puisse arriver. »

Officiellement dénommé « Projet de loi confortant le respect des principes de la République », le texte de 459 pages a été l’objet de vifs débats ces dernières semaines, avec le dépôt de près de 1 700 amendements. Le but, selon les déclarations du Ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin au parlement, consiste à stopper « une OPA islamiste contre les musulmans », un séparatisme islamiste qui « gangrène notre unité nationale ». Beaucoup de musulmans résident dans les nombreuses banlieues pauvres des grandes villes françaises, et les autorités craignent que l’importation d’idéologies extrémistes ne conduise cette minorité religieuse à vouloir se soustraire à l’intégration au sein de la nation.

De récentes attaques terroristes ont suscité dans l’opinion publique une demande de mesures de sécurité renforcées. Au cours des six dernières années, la France a subi 25 attaques djihadistes qui ont fait en tout 263 morts. Pour mémoire :

  • En janvier 2015, 17 personnes ont été tuées dans l’attaque de Charlie Hebdo.
  • En novembre 2015, 131 personnes ont été tuées dans l’attaque du Bataclan pendant un concert.
  • En juillet 2016, 86 personnes ont été tuées à Nice par un camion qui a foncé dans la foule pendant les festivités du 14 Juillet.
  • En décembre 2018, 5 personnes ont été tuées lors d’une agression sur un marché de Noël.
  • En octobre 2020, 3 personnes ont été poignardées pendant qu’ils priaient à la cathédrale de Nice.

En 2018, le coordinateur de l’Union européenne pour la lutte contre le terrorisme estimait que 17 000 musulmans radicalisés se trouvaient en France.

Parmi les dispositions essentielles de la loi figure un contrôle accru des associations religieuses. De nombreuses mosquées sont en lien avec le monde musulman, conduites par des imams élevés et instruits dans des nations qui ne partagent pas le même héritage en matière de droits humains et de liberté de religion. Selon l’Institut Français d’Études Démographiques (INED), environ 82 % des citoyens musulmans sont issus d’Afrique du Nord – Algérie, Maroc, Tunisie – autrefois sous la domination de la France coloniale. 8 % s’ajoutent en provenance de la Turquie.

La loi empêchera des individus étrangers d’avoir la mainmise sur une association, laquelle sera tenue de signer un « contrat d’engagement républicain » garantissant que ses membres respectent les valeurs de la France. Tout financement étranger supérieur à 10 000 € devra être déclaré aux autorités.

De plus, le projet de loi rend illégaux la polygamie, le mariage forcé et la délivrance de « certificats de virginité » que certains musulmans exigent parfois de la part d’une future mariée.

La loi cherche à combattre la tendance séparatiste qui engendre une « contre-société », selon le Président Emmanuel Macron, qui a promis cette nouvelle loi en octobre dernier. À cet effet, les enfants à partir de l’âge de 3 ans devront être intégrés dans le système scolaire officiel.

Et pour éviter de nouvelles attaques imitant la décapitation d’un professeur qui, en ce même mois d’octobre, avait abordé en classe le sujet des caricatures de Mahomet, la « loi Samuel Paty » créera un nouveau délit de haine visant la mise en ligne d’informations personnelles dans l’intention de nuire.

La proposition de loi est « utile » et « nécessaire », selon le président du Conseil Français du Culte Musulman (CFCM). Le président de la Fondation de l’Islam de France, une association laïque, l’a qualifiée d’« injuste mais nécessaire ».

La France dispose déjà de lois qui sanctionnent les associations religieuses faisant preuve d’activisme extrémiste. Depuis 2018, 159 associations ont été dissoutes, y compris 13 mosquées. Et le port de signes religieux ostentatoires – tels que le hidjab et la croix – est illégal dans les institutions publiques, en particulier pour les fonctionnaires d’État.

Cependant, même avant cette loi, la France étendait déjà la portée des contrôles légaux. En janvier 2021, de nouveaux décrets permettaient aux autorités de collecter des informations sur les opinions politiques et religieuses des individus soupçonnés de représenter une menace contre la sécurité nationale. Auparavant, seules leurs activités pouvaient être surveillées.

« On n’a jamais connu en France une pression de contrôle aussi forte, affirme Franck Meyer, président du Comité Protestant évangélique pour la Dignité Humaine. C’est inquiétant pour tous les défenseurs de droits de l’homme, et le CPDH en fait partie .»

Ces mesures risquent de violer la Déclaration des Droits de l’Homme de 1789, qui est fondatrice de la République Française et a un poids quasiment équivalent à la Constitution française. Mais la nouvelle loi vise à amender deux autres documents historiques qui définissent la laïcité à la française et qui codifient son approche de la religion, notamment dans son combat contre une Église catholique autrefois hégémonique. En réalité, ce sont les protestants qui se sont faits les champions de cette cause. Ce que la France appelle laïcité est en fait assez proche de la notion américaine de « séparation des Églises et de l’État ».

En 1901, la France fit voter une loi pour réglementer les associations, qui pouvaient être religieuses.

En 1905, une autre loi régissait les associations à vocation cultuelle – c’est-à-dire essentiellement les Églises – leur offrant un statut d’exemption fiscale.

[Une loi de 1907 régissait l’Église catholique à part, chargeant l’État d’entretenir ses églises lorsqu’elles étaient classées Monuments Historiques, et exigeant de ses évêques une reconnaissance formelle de l’État. Cette loi n’est pas soumise à révision dans le projet de loi actuel.]

À elles toutes, ces lois fondent la laïcité, c’est-à-dire la neutralité de l’État en matière religieuse, la liberté d’expression religieuse et la relation contractuelle des cultes avec le gouvernement. Parmi les promoteurs de cette laïcité, on trouvait notamment Francis de Pressensé, membre éminent de la Ligue des Droits de l’Homme, et fils d’un célèbre pasteur évangélique.

Mais aujourd’hui, le Conseil National des Évangéliques de France (CNEF) sonne l’alarme. « C’est vraiment une situation grave, déclare Clément Diedrichs, directeur général du CNEF. La laïcité est censée protéger la libre organisation des groupes religieux, mais cette loi autorisera la répression de l’expression religieuse dans la société. » Diedrichs s’est concerté avec des représentants de l’islam, du judaïsme, du bouddhisme et d’autres instances chrétiennes au sein de la Conférence des Responsables de Culte en France (CRCF). « Nous avons une position unanime qui reconnaît les risques potentiels que représente cette loi pour la liberté religieuse, dit-il. Personne n’est satisfait de cette loi. »

Sauf, peut-être, les électeurs non-religieux. Environ un tiers des Français se considèrent comme non-croyants ou athées. « La grande majorité des Français ne s’intéressent guère à cette proposition de loi, déclare Cheryl Cloyd, missionnaire américaine résidant en France depuis vingt-six ans. Ils pensent même qu’elle est très bien parce qu’ils veulent qu’on s’occupe des terroristes. » Du coup, le législateur est hésitant, selon Diedrichs. « Certains de ceux qui seraient peut-être d’accord avec nous choisissent la sécurité, dit-il. Notamment sur le plan électoral, ce choix s’avère payant. »

Des missionnaires des Free Will Baptists en France (des baptistes de tendance arminienne) ont souligné cinq aspects de la proposition de loi :

  • Les Églises devront se faire réenregistrer tous les cinq ans.
  • Des représentants de l’État surveilleront les prédications pour vérifier si elles n’incitent pas à la haine.
  • L’instruction au sein du foyer ne sera pas autorisée pour des motifs religieux.
  • La déclaration de fonds étrangers affectera le personnel missionnaire.
  • Les leaders religieux ne pourront pas être formés hors de France.

« Peut-on parler aujourd’hui en France de "laïcité zombie" ? » se demande Jean-Raymond Stauffacher, président de l’Union nationale des Églises protestantes réformées évangéliques de France. « Tout le monde est d’accord pour tuer dans l’œuf l’islam radical, mais cette loi, telle qu’elle est formulée, est déconnectée de son but avoué. »

Frédéric Baudin, écrivain, et pasteur de l’Église Libre d’Aix-en-Provence, souligne d’autres problèmes. Les restrictions de financement peuvent accroître la difficulté, pour de petites communautés, de construire leur propre bâtiment. Et presque tous les trésoriers d’Église sont des bénévoles. Des contrôles accrus les mettront encore plus sous pression. Baudin affirme que certains en France sont des « laïcistes » [ou des « laïcards »], le suffixe en -iste renforçant l’aspect radical de ces personnes, dans un sens péjoratif. « Il y a un courant séculier dans le sens américain du terme – en France on ne le dit pas comme ça – mais effectivement on dirait plutôt “laïciste” dans le sens d’une laïcité excessive qui veut imposer une sorte de neutralité absolue. Alors que la vraie laïcité c’est de garantir, au contraire, la diversité d’opinions. C’est une neutralité positive. »

Les évangéliques français qui, dans leur immense majorité, financent leurs propres Églises, respectent la loi, et donnent deux fois plus que le Français moyen, estiment que ce n’est pas de la paranoïa de leur part que de s’inquiéter de cette loi. Dans le débat sur les dispositions de la loi, les autorités ont récemment épinglé les protestants. « Les évangéliques sont un problème très important, a déclaré Gérald Darmanin le 2 février. Alors pas de même nature, évidemment, que l’islamisme qui commet des attentats, qui donne des meurtres. » Mais dans une autre interview, il les a mis sur le même plan : « nous ne pouvons plus discuter avec des gens qui refusent d’écrire sur un papier […] que la loi de la République est supérieure à la loi de Dieu », a-t-il déclaré.

Marlène Schiappa, ministre déléguée chargée de la Citoyenneté, a même accusé les évangéliques français d’exiger des certificats de virginité, imitant une soi-disant tendance évangélique américaine.

« La France ne gagnera rien dans sa lutte contre le séparatisme islamique en mettant sur le même plan le christianisme et l’islam, dit Romain Choisnet, directeur de la communication du CNEF. Le premier a façonné cette nation dont la République est l’héritière. Le second veut la remplacer. »

Josias Sarda, ancien de l’Église protestante évangélique de Pau, dans les Pyrénées, explique que la loi passe complètement à côté de son objectif. D’après le CNEF, 90 % des 2 500 Églises sont déclarées sous le régime de la loi de 1905 qui fait maintenant l’objet d’un amendement. Dans le même temps, les musulmans sont presque entièrement déclarés sous le régime de la loi de 1901, y compris le CFCM fondé en 2003.

Le décalage est si fort que Sarda se demande s’il ne proviendrait pas d’une attaque spirituelle. Il a proposé de créer un nouveau mot : évangélicophobie. Les évangéliques se développent rapidement en France, où ils sont maintenant estimés à 1 million de personnes. Pendant ce temps, la population musulmane du pays est estimée entre 3,3 et 5 millions de personnes.

Cependant, l’islam radical est une grave menace pour la France, selon Franck Meyer, le président du CPDH, qui est également maire d’un petit village de Normandie. Il craint que la loi ne l’empêche d’adopter une position chrétienne même à titre privé – par exemple sur la question du mariage homosexuel. Assurément, certains aspects de cette loi sont justifiés, estime Meyer, mais par expérience pratique, il sait que certaines dispositions ne le sont pas. En tant que maire, il est responsable de veiller sur toute famille qui ferait l’école à la maison. S’il y a un problème d’extrémisme, il le saura. « Nous pensons que l’État profite de ce projet de loi de lutte contre le séparatisme pour désigner de mauvais coupables, en disant : finalement, les parents qui instruisent leurs enfants en famille représentent un danger pour la République. »

Mais alors que près de 50 000 enfants sont officiellement scolarisés à la maison en France, on soupçonne qu’il y en a bien davantage dissimulés dans des « écoles clandestines » qui sont endoctrinés dans une idéologie islamiste.

La meilleure forme de laïcité, selon Florent Varak, est celle qui permet aux évangéliques de les atteindre. Près de 4 musulmans sur 10 rapportent avoir souffert de discrimination religieuse. Et alors que les violations de la liberté religieuse contre les chrétiens se maintiennent nettement à un haut niveau en 2019 (1 052 incidents), les actes anti-musulmans ont grimpé de 54 % (154 incidents). « Notre modèle de laïcité est bon ; il permet aux athées, aux musulmans, aux chrétiens de coexister, de ne pas être d’accord et de traiter des problèmes ensemble, dit ce pasteur français et directeur de mission pour Encompass World Partners. Nous pouvons laisser la question de l’intégration aux soins de l’État et nous attacher à aimer notre prochain musulman, à partager l’Évangile sans crainte ni pressions. »

Aussi, malgré le défi que représente ce projet de loi pour l’Église, les évangéliques doivent garder les yeux fixés sur le Christ, rappelle Clément Diedrichs, le directeur général du CNEF. Le temps est venu de prier, plutôt que de se plaindre. « On prie beaucoup en France pour l’Église persécutée, mais quand un petit problème nous arrive en France, on crie au scandale. Justement, peut-être le temps est-il venu pour nous de traverser nous aussi les difficultés et de persévérer, comme le dit l’Apocalypse, et que le Seigneur voie s’il y a vraiment la foi et s’il y a vraiment des témoins pour lui. C’est une question d’attitude. Ne soyons pas des chrétiens râleurs, même si c’est normal de ne pas être d’accord avec ce gouvernement. Il faut avant tout être un chrétien qui soit fier de son Seigneur. »

Reportage complémentaire de Kami Rice et Morgan Lee

Traduction : Philippe Malidor

Révision : Léo Lehmann

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Évangélique, j’appartiens à un corps mondial

Mon identité ecclésiale se rattache au corps du Christ à travers le monde entier.

Christianity Today February 4, 2021
Illustration by Prixel Creative / Lightstock / Edits by Rick Szuecs

L’évêque qui m’a ordonné a été lui-même ordonné par des évêques africains. Ma prêtrise est un don accordé par le corps du Christ dans son ensemble. En conséquence, la progression de l’Église dans le Sud à travers le monde ne m'est jamais apparue comme un fait sociologique lointain. C’est un fait personnel et vital pour mon travail. Je m’identifie davantage à des croyants parlant d’autres langues, ayant des couleurs de peau différentes et vivant à l’autre bout de la planète qu’à certains de mes compatriotes blancs américains vivant dans mon quartier.

C’est un miracle : un acte de grâce permanent qui aurait été impensable avant la venue du Christ. Jésus a créé une nouvelle famille dont la parenté prime sur les liens culturels, nationaux et biologiques. Mais toute miraculeuse qu'elle est, cette famille élargie affecte ma journée ordinaire : la façon dont je prie, adore, vote et pense à mes voisins, à mon Église, à moi-même et au monde.

Au début du 20e siècle, 80% des chrétiens vivaient en Europe et en Amérique du Nord, et seulement 20% dans le monde non occidental. Aujourd'hui, c’est presque l’inverse. Les deux tiers des chrétiens du monde vivent dans le Sud. Ce renversement n’est pas tant dû au déclin de la foi en Occident qu'à la croissance explosive de l’Église dans le reste du monde. Je vois cela dans ma propre communion anglicane, qui décline dans les pays riches occidentaux et s'épanouit dans le Sud.

Cette réalité me donne de l’espoir. L’avant-garde du mouvement chrétien ne se trouve pas sur les côtes américaines. La culture nord-américaine ne détermine donc pas l’avenir de l’Église. La sécularisation occidentale ou même la marginalisation du christianisme en Occident ont à peu près autant de chances de limiter l’épanouissement de l’Église que d'arrêter un ouragan ou changer les saisons. La croissance autochtone et le renouveau du christianisme mondial – qui auraient été inimaginables il y a à peine 100 ans – nous rappellent que nous n’avons pas besoin d’avoir peur. Dieu travaille sans relâche dans le monde.

Cette croissance mondiale façonne également ma perspective sur la façon dont nous parlons de l’Église. Lorsque ma communauté de citadins normalement éduqués critique « l’Église », nous parlons le plus souvent de l’Église américaine voire même de l’Église américaine blanche. Compte tenu de notre contexte, cette simplification excessive a du sens, mais elle se focalise aussi subtilement sur les voix et les expériences des Américains blancs.

De même, lorsque les plus jeunes évangéliques quittent « l’Église » parce qu’ils sont frustrés par certains exemples occidentaux de celle-ci, ils s'éloignent simultanément de tout un corps majoritairement composé de personnes de toutes sortes de couleurs à travers le monde entier. Ces évangéliques du reste du monde préservent souvent l'unité de ce que de nombreux évangéliques américains blancs séparent trop facilement : un engagement équilibré entre une doctrine orthodoxe et le soin des pauvres et des opprimés.

Quand je pense aux évangéliques, je pense aux Singapouriens qui implantent des Églises en Thaïlande, aux familles rwandaises servant des réfugiés en Ouganda, aux séminaristes nigérians, ou aux evangélicos d’Amérique du Sud – une étiquette largement utilisée par les Latinos protestants. Nous devons garder ces voix au premier plan de toute discussion sur l’Église. Ils sont notre avenir, mais aussi notre présent – ceux qui composent la majorité des évangéliques sur terre.

Ces croyants du monde entier me rappellent également de ne pas abandonner ma propre Église. Il y a quelques années, je me suis surprise à penser : « L’Église américaine est en train de mourir et le mérite probablement, alors concentrons-nous seulement sur ce qui se passe ailleurs ». Je nous ai donnés pour perdu. Mais ensuite, mes frères et sœurs à l’étranger m’ont rappelé que bon nombre de ces mouvements maintenant florissants à l’étranger avaient commencé modestement. Des hommes et des femmes ont souffert avec joie pour l’Évangile. Ils continuent de le faire. Au milieu de la souffrance et même de la persécution, leur volonté est de poursuivre la mission de Jésus et d'aimer leur prochain. Nous sommes appelés à faire de même, où que nous soyons.

Pendant la saison de l’Épiphanie, de nombreuses Églises anglicanes utilisent la liturgie kenyane, et chaque année cela me rappelle que l’Église – et même le monde évangélique à lui seul – est plus grande et plus complexe que mon contexte limité. Juste avant de prendre l’Eucharistie, le célébrant dit: « Le Christ est vivant pour toujours ». La congrégation répond : « Nous sommes parce qu’il est ». Parce que Christ est vivant, nous, l’Église mondiale, pouvons prospérer ensemble en tant que nouvelle famille. Je suis une disciple de Jésus, une anglicane évangélique et une prêtresse de l’Église du Christ, parce que nous sommes un corps mondial. Et nous sommes parce qu’il est.

Tish Harrison Warren est prêtresse dans l’Église anglicane d’Amérique du Nord et auteur de Liturgie de la vie ordinaire (Excelsis, 2018, original en anglais) et Prayer in the Night (IVP, 2021).

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Votre livre de méditations n’est pas une bible

La portée de la Parole de Dieu ne se limite pas à l’inspiration et au réconfort. 

Christianity Today January 31, 2021
illustration by Rick Szuecs | Source images: Priscilla Du Preez / Unsplash

Que font ceux qui travaillent à l’enseignement de la Bible pour s'amuser le vendredi soir ? Ils consultent les listes de ventes d’Amazon pour voir quelle traduction biblique occupe la première place.

La dernière fois que j’ai fait cela en ce qui concerne les États-Unis, la nouvelle version internationale était en tête (NIV). La NIV est la traduction la plus vendue aux États-Unis depuis des décennies, mais dans le classement d’Amazon, elle se situait toutefois en cinquième place, battue par deux bibles pour enfants, une bible audio et, en tête, un livre de méditations populaire qui s'était retrouvé je ne sais comment dans la catégorie « Bible ».

Cet ouvrage de piété surpassait nettement les bibles de la liste, avec 5800 avis à cinq étoiles en 18 mois. Sa première place nous rappelle combien nombreux sont les chrétiens qui comptent sur les livres de méditations quotidiennes comme pratique de formation biblique et à quel point ces ouvrages de piété sont devenus une affaire importante.

Mais comment ces ressources nous forment-elles? Un livre de piété produit-il la piété au sens biblique du terme ?

Je suis retourné parcourir les descriptions d’autres livres de méditations populaires sur Amazon. Parmi les 10 plus vendus, l'un offrait 365 jours d’un « enseignement inspirant, inattendu et humble sur la grâce et l’amour qui vous préparera pour la journée à venir ». Un autre fournissait « un verset biblique inspirant sur lequel réfléchir et méditer tout au long de votre semaine ». Un autre encore promettait aux lecteurs qu'ils « seraient inspirés pour commencer à vivre leur vie en mission ». Le point à retenir était clair : la méditation quotidienne implique d’être inspiré.

Mais un autre élément déterminant apparaissait aussi de manière systématique dans les descriptions. Un de ces ouvrages était « conçu pour vous aider à soulager vos inquiétudes tandis que vous apprenez à vivre dans la paix du Dieu Tout-Puissant ». D’autres promettaient « des paroles d’encouragement, de réconfort et de rappel de l’amour éternel de Dieu », ou la capacité d’aborder la vie « avec la sagesse et le réconfort de la Bible ». Autre point à retenir : la méditation quotidienne implique d’être réconforté.

D'après la liste des meilleurs ventes d'ouvrages de piété, la piété vise à être inspiré et réconforté. Mais selon la Bible, c’est bien plus que ça.

En anglais, ces ouvrages sont appelés « devotionals », et on a parfois parlé en français de « livres de dévotion ». Dans la Bible, l'idée de « dévotion », ou de piété, est employée pour parler de consécration, de mise à part pour un service spécial. Tout comme un musée consacre une de ses ailes à une forme d'expression artistique particulière, Dieu nous dévoue à la manifestation de son image. Pourtant, nous faisons parfois l'erreur d'assimiler l'idée de piété ou de dévotion à une émotion. La piété n’est pas un simple sentiment. Elle est une action : elle sert et elle obéit. Jésus a établi ce lien lorsqu’il a enseigné que « Nul ne peut être en même temps au service de deux maîtres, car ou bien il détestera l’un et aimera l’autre, ou bien il sera dévoué au premier et méprisera le second » (Mt 6.24).

Comparez les descriptions de ces ouvrages les plus vendus sur Amazon aux paroles de Paul : « toute l’Ecriture est inspirée de Dieu et utile pour enseigner, réfuter, redresser et apprendre à mener une vie conforme à ce qui est juste. Ainsi, l’homme de Dieu se trouve parfaitement préparé et équipé pour accomplir toute œuvre bonne » (2 Tm 3.16-17).

Alors que les livres de méditation les plus vendus offrent de se laisser former au moyen de paroles inspirantes et réconfortantes, la véritable dévotion chrétienne – la pratique formatrice d’être mis à part pour servir – est fondée sur des paroles inspirées qui nous corrigent.

Les paroles de ces ouvrages de piété sont-elles bénéfiques ? Certaines, mais pas toutes. L’émotion est assurément une expression de la piété, mais n’est pas son tout. Les paroles bibliques de réconfort sont bénéfiques, mais les paroles de correction le sont aussi. Les deux sont des paroles de vie. Si la lecture de guides de méditation est notre outil de formation principal, nous courons le risque de développer des malformations dans notre spiritualité et – pire encore – de faire de Dieu lui-même une idole, un Dieu qui réconforte sans corriger, cherche la relation mais pas la repentance, aime mais ne discipline pas, et est notre compagnon mais pas notre capitaine.

C’est une chose qu'Amazon confonde un livre de méditations avec une bible. Mais qu’il ne soit pas dit des chrétiens que nous en sommes aussi arrivés là.

Les paroles inspirantes des humains sont un substitut dérisoire aux paroles inspirées de Dieu. Ces méditations, lorsqu'elles sont rédigées avec excellence, peuvent compléter notre temps passé dans les Écritures, mais elle ne doivent pas le régir ou le supplanter.

Pierre avait bien saisi toute la valeur de la parole divine dans sa question à Jésus: « Seigneur, vers qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle » (Jn 6.68).

Chrétien, vers qui iras-tu pour recevoir des paroles de vie ? Pour des paroles formatrices, appliquées quotidiennement, pour te consacrer au service saint et à la soumission ? Amazon est heureux de te proposer des auteurs. Mais n’oublie pas l’auteur de toutes choses. Comme les fleurs sur la couverture d’un livre de piété, les mots humains passent. Mais la Parole du Seigneur – sans cesse utile pour le réconfort comme pour la correction – demeure éternellement.

Traduit par Valérie Marie-Agnès Dörrzapf

Révisé par Léo Lehmann

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Books

Les 50 pays où il est le plus difficile d’être chrétien en 2021

Les dernières statistiques sur la persécution contre les chrétiens établissent que 9 martyrs sur 10 se trouvent en Afrique. Pour la première fois, le Nigéria rejoint la liste des 10 pays les plus persécuteurs, alors que le Soudan sort de la liste après certaines réformes.

Christianity Today January 13, 2021
Illustration by Mallory Rentsch / Source Image: Benne Ochs / Getty Images

Note de l'éditeur : Portes Ouvertes a maintenant publié la liste de surveillance mondiale 2023 de la persécution des chrétiens.

Chaque jour, 13 chrétiens dans le monde sont assassinés à cause de leur foi.

Chaque jour, 12 églises ou édifices chrétiens sont attaqués.

Et chaque jour, 12 chrétiens sont injustement arrêtés ou emprisonnés ; et 5 autres sont enlevés.

Tel est le rapport de l’Index Mondial de Persécution 2021, le dernier décompte annuel de Portes Ouvertes sur les 50 pays où les chrétiens sont le plus persécutés pour avoir suivi Jésus.

« On pourrait penser que cette [liste] ne parle que d’oppression… mais en fait, elle parle de résilience », affirme David Curry, Président et Directeur de Open Doors (Portes Ouvertes) USA, qui présente aujourd’hui ce rapport.

« Le nombre de chrétiens qui souffrent devrait signifier que l’Église est en train de mourir – que les chrétiens se tiennent tranquilles, qu’ils perdent la foi, et qu’ils s’éloignent les uns des autres, dit-il. Mais ce n’est pas ce qui se passe. Au contraire, grandeur nature, nous voyons s’accomplir les paroles consignées par le prophète Ésaïe : « Je vais tracer un chemin en plein désert et mettre des fleuves dans les endroits arides » (És 43.19).

Les pays de cette liste englobent 340 millions de chrétiens vivant dans des lieux de persécution très forte à extrême ; ils étaient 206 millions dans la liste de l’an dernier.

On peut en ajouter 31 millions à partir des 24 pays qui tombent juste à côté du top 50 – notamment Cuba, le Sri Lanka et les Émirats Arabes Unis – dans une proportion de 1 chrétien sur 8 devant affronter la persécution dans le monde. La proportion est de 1 chrétien sur 6 en Afrique, et 2 sur 5 en Asie.

L’année dernière, 45 nations se classaient assez haut pour être considérées comme ayant un niveau de persécution « très élevé » sur l’assortiment de 84 questions de Portes Ouvertes. Cette année, pour la première fois en 29 ans de recherches, les 50 premières se classent ainsi – de même que 4 nations supplémentaires qui étaient tombées juste en dehors.

Portes Ouvertes a repéré trois grandes tendances qui expliquent l’aggravation de l’année écoulée :

  • Le Covid-19 a servi de catalyseur de la persécution religieuse, et cela par trois leviers principaux : la discrimination dans les secours, la conversion forcée ; une surveillance et une censure croissantes justifiées par la pandémie (phénomène que nous connaissons tous, mais qui aggrave les oppressions déjà existantes). Ajoutons que les chrétiens sont fréquemment accusés d’être à l’origine du Covid…
  • Les agressions des extrémistes ont bénéficié des restrictions et des diverses formes de confinement pour se répandre davantage en Afrique sud-saharienne, du Nigéria et du Cameroun jusqu’au Burkina Faso, au Mali et au-delà.
  • Les systèmes de censure chinois continuent de se propager et de s’étendre à des conditions de surveillance nouvelles.

Portes Ouvertes étudie la persécution contre les chrétiens dans le monde depuis 1992. Voilà 20 ans que la Corée du Nord se classe n° 1, depuis 2002 au moment où la liste de l’Indice Mondial de Persécution a commencé.

La version 2021 étudie la période qui va du 1er novembre 2019 au 31 octobre 2020, et elle est établie à partir de rapports de terrain remontant d’équipiers de Portes Ouvertes dans plus de 60 pays.

L’objectif du classement annuel de l’Indice Mondial de Persécution – qui a fait l’historique de la manière dont la Corée du Nord a désormais des concurrents, la persécution ne cessant de s’aggraver – est de guider les prières et de susciter une réprobation plus efficace tout en montrant aux croyants persécutés qu’ils ne sont pas oubliés.

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Où y a-t-il le plus de persécution anti-chrétienne aujourd’hui ?

Cette année, les 10 plus grands persécuteurs sont à peu près les mêmes. Après la Corée du Nord, on trouve l’Afghanistan, suivi de la Somalie, de la Libye, du Pakistan, de l’Érythrée, du Yémen, de l’Iran, du Nigéria et de l’Inde.

Le Nigéria est entré parmi les 10 premiers pour la première fois, après avoir atteint le seuil de violence défini par Portes Ouvertes. Ce pays qui compte la plus grande population chrétienne d’Afrique, se classe en 9e position sur l’ensemble mais 2e juste derrière le Pakistan en matière de violence, et 1ère quant au nombre de chrétiens assassinés pour des raisons liées à leur foi.

Le Soudan quitte le top 10 pour la première fois en six ans après avoir aboli la peine de mort pour apostasie et garanti – du moins sur papier – la liberté de religion dans sa nouvelle Constitution après trois décennies de loi islamique. Il demeure néanmoins 13e sur la liste, car les enquêteurs de Portes Ouvertes ont remarqué que les chrétiens d’arrière-plan musulman continuent à subir des agressions, de l’ostracisation et de la discrimination de la part de leurs familles et communautés, les femmes chrétiennes étant soumises à des violences sexuelles.

Là où il est le plus difficile de suivre Jésus :



1. Corée du Nord
2. Afghanistan
3. Somalie
4. Libye
5. Pakistan
6. Érythrée
7. Yémen
8. Iran
9. Nigéria
10. Inde

L’Inde reste dans les 10 premiers pour la troisième année de suite parce qu’« elle continue de connaître une aggravation des violences contre les minorités religieuses à cause de l’extrémisme hindou soutenu par le gouvernement. »

Dans le même temps, la Chine a rejoint le top 20 pour la première fois en dix ans, à cause « d’une surveillance et d’une censure persistantes et croissantes contre les chrétiens et autres minorités religieuses. »

Sur les 50 nations les plus persécutrices :

  • 12 ont des niveaux « extrêmes » de persécution et 38 ont des niveaux « très élevés ». 4 autres en dehors des 50 premières se classent en « très élevé » : Cuba, le Sri Lanka, les Émirats Arabes Unis et le Niger.
  • 19 sont en Afrique (dont 6 en Afrique du Nord), 14 en Asie, 10 au Moyen-Orient, 5 en Asie centrale et 2 en Amérique latine.
  • 34 ont l’islam comme religion principale, 4 le bouddhisme, 2 l’hindouisme, une l’athéisme, une l’agnosticisme – et 10 le christianisme.

La liste 2021 a ajouté 4 nouveaux pays : le Mexique (n° 37), la République démocratique du Congo (RDC ; n° 40), le Mozambique (n° 45) et les Comores (n° 50).

Le Mozambique est monté de 21 points (depuis le 66e rang) « à cause de la violence islamique extrémiste dans la province septentrionale du Cabo Delgado. » La RDC est montée de 17 points (depuis le 57e rang) « surtout en raison des attaques contre les chrétiens de la part du groupe islamique ADF. » Le Mexique est monté de 15 points (depuis le 52e rang) à cause de la violence et de la discrimination anti-chrétienne de la part des trafiquants de drogue, des gangs et des communautés indigènes.

4 pays sont sortis de la liste : le Sri Lanka (ex n° 30), la Russie (ex n° 46), les Émirats Arabes Unis (ex n° 47) et le Niger (ex n° 50).

Là où les chrétiens affrontent le plus de violence :



1. Pakistan
2. Nigéria
3. République démocratique du Congo
4. Mozambique
5. Cameroun
6. République de Centrafrique
7. Inde
8. Mali
9. Sud-Soudan
10. Éthiopie

Période couverte par Portes Ouvertes : novembre 2019 à octobre 2020

Autres changements notables de classement : la Colombie est montée de 11 points, passant du n° 41 au n° 30 à cause des violences perpétrées par les guérilleros, les groupes criminels et les communautés indigènes et aussi à cause de l’intolérance séculière croissante. La Turquie est montée de 11 points depuis le 36e rang jusqu’au 25e rang à cause d’une recrudescence de violence anti-chrétienne. Et le Bangladesh est monté de 7 points depuis le 38e rang pour atteindre le 31e rang à cause des agressions de chrétiens convertis parmi ses réfugiés rohingyas.

Toutefois, d’autres types de persécutions peuvent surpasser la violence [explications à suivre]. Par exemple, la République de Centrafrique est descendue de 10 points, de 25 à 35, quoique la violence contre les chrétiens y demeure extrême. Et le Kenya est descendu de 6 points, de 43 à 49, bien que les agressions s’y soient « singulièrement accrues ».

Pendant ce temps, le Sud-Soudan se classe parmi les 10 pays les plus violents repérés par Portes Ouvertes (9e rang), mais il n’atteint pas le top 50 de l’Indice (au n° 69).

En 2017, pour le 25e anniversaire de la liste, Portes Ouvertes a publié une analyse des tendances de la persécution sur le quart de siècle écoulé. Les 10 premières nations sur une période de 25 ans étaient : la Corée du Nord, l’Arabie Saoudite, l’Iran, la Somalie, l’Afghanistan, les Maldives, le Yémen, le Soudan, le Vietnam et la Chine.

Cinq pays apparaissent à la fois en tête de la liste de ces 25 années et sur la liste de 2021 – signe préoccupant de la stabilité de la persécution, constate Portes Ouvertes.

Enfin, tous les pays de l’Index sont passés au niveau de persécution « très forte » à « extrême ». La persécution des chrétiens dans le monde excède de beaucoup l’Index. Depuis 8 ans, elle ne cesse de monter. On estime qu’entre les Index 2017 et 2021, elle a augmenté de plus de 8%.

Les formes de la persécution contre les chrétiens

Portes Ouvertes enquête sur la persécution en fonction de six catégories – incluant les pressions à la fois sociales et gouvernementales sur les individus, les familles et les assemblées – et s’intéresse particulièrement aux femmes.

Mais dès lors que la violence est prise comme catégorie à part, les 10 premiers pays persécuteurs changent considérablement ; seuls restent le Pakistan, le Nigéria et l’Inde. En réalité, il y a 20 pays qui sont désormais plus mortifères pour les chrétiens que la Corée du Nord.

Les martyres enregistrés dans le monde sont montés à 4 761 dans le rapport 2021, soit 60% de plus par rapport aux 2 983 du chiffre de l’année précédente et plus que les 4 305 morts recensés dans le rapport 2019. (Portes Ouvertes a pour réputation de préférer une estimation plus restreinte que d’autres ONG, qui estiment souvent les martyres à 100 000 par an.)

9 chrétiens sur 10 tués en raison de leur foi se situaient en Afrique, le reste en Asie. Le Nigéria vient en tête avec 3 530 martyrs confirmés par Portes Ouvertes dans sa liste de 2021.

Les enlèvements de chrétiens sont montés à 1 710, à comparer aux 1 052 de l’année précédente où Portes Ouvertes a fait entrer cette catégorie pour la première fois dans ses enquêtes. Le Nigéria vient en tête de liste avec 990 enlèvements.

C’est la Chine qui commet le plus d’exactions dans les deux autres catégories déjà renseignées par Portes Ouvertes.

Pékin a arrêté, emprisonné ou détenu arbitrairement 1 147 chrétiens pour des raisons liées à leur foi, sur un total de 4 277 arrestations dans le monde. Cette évaluation faite par Portes Ouvertes est à comparer au chiffre de 3 711 l’an dernier et 3 150 en 2019.

Pendant ce temps, les attaques contre les églises ou leur fermeture forcée ont atteint 4 488 cas dans le monde. Dans le rapport de l’an dernier, le décompte avait bondi de 1 847 à 9 488, dont 5 576 rien que pour la Chine.

Portes Ouvertes tient à préciser que dans plusieurs pays, les violations ci-dessus sont très difficiles à établir avec précision. Dans ces cas, des chiffres ronds sont présentés, toujours sur la base d’estimations basses.

Ces recherches sont certifiées et examinées par l’Institut International pour la Liberté Religieuse, un réseau basé en Allemagne et soutenu par l’Alliance Évangélique Mondiale.

Pourquoi les chrétiens sont-ils persécutés dans ces pays ?

Le motif principal diffère selon les pays, et le fait de mieux saisir les différences peut aider les chrétiens des autres nations à prier et à intervenir plus efficacement pour leurs frères et sœurs en Christ sous pression.

Par exemple, bien que l’Afghanistan soit le 2e pays le plus persécuteur du monde et une nation officiellement musulmane, le principal motif de persécution – d’après les enquêtes de Portes Ouvertes – n’est pas l’extrémisme islamique mais les rivalités ethniques, ou ce que le rapport appelle « l’oppression clanique ».

Portes Ouvertes répartit les sources essentielles de persécution anti-chrétienne en 8 catégories :

L’oppression islamique (29 pays) : Telle est la source principale de persécution que les chrétiens ont à affronter dans plus de la moitié des pays examinés, y compris 5 des 12 où les chrétiens doivent affronter des niveaux « extrêmes » : la Libye (n°4), le Pakistan (n°5), le Yémen (n°7), l’Iran (n°8) et la Syrie (n°12). La plupart des 29 sont officiellement des nations musulmanes ou bien sont majoritairement musulmanes ; toutefois, certaines sont à majorité chrétienne : le Nigéria (n°9), la République de Centrafrique (n°35), l’Éthiopie (n°36), la République démocratique du Congo (n°40), le Cameroun (n°42), le Mozambique (n°45) et le Kenya (n°49).

L’oppression clanique (6 pays) : C’est la principale source de persécution affrontée par les chrétiens en Afghanistan (n°2), en Somalie (n°3), au Laos (n°22), au Qatar (n°29), au Népal (n°34) et à Oman (n°44).

La paranoïa dictatoriale (5 pays) : C’est la source principale de persécution que les chrétiens doivent affronter dans 5 pays, essentiellement en Asie Centrale à majorité musulmane : l’Ouzbékistan (n°21), le Turkménistan (n°23), le Tadjikistan (n°33), Brunei, n°39) et le Kazakhstan (n°41).

Le nationalisme religieux (3 pays) : C’est la source principale de persécution que les chrétiens doivent affronter dans 3 pays d’Asie. Les chrétiens sont prioritairement ciblés par les nationalistes hindous en Inde (n°10), et par les nationalistes bouddhistes au Myanmar (n°18) et au Bhoutan (n°43).

Oppression communiste et post-communiste (3 pays) : C’est la source principale de persécution que les chrétiens doivent affronter dans 3 pays, tous en Asie : Corée du Nord (n°1), Chine (n°17) et Vietnam (n°19).

Protectionnisme dénominationnel chrétien (2 pays) : C’est la source principale de persécution que les chrétiens doivent affronter en Érythrée (n°6) et en Éthiopie (n°36).

Crime organisé et corruption (2 pays) : C’est la source principale de persécution que les chrétiens doivent affronter en Colombie (n°30) et au Mexique (n°37).

Intolérance séculière (0 pays) : Portes Ouvertes surveille cette source de persécution qui frappe les chrétiens, mais ce n’en pas la source principale dans les 50 pays étudiés.

Les principales tendances de la persécution des chrétiens

Portes Ouvertes a repéré 4 tendances nouvelles ou persistantes sur le pourquoi et le comment des persécutions contre les chrétiens dans l’année écoulée.

Premièrement : la pandémie a ouvert un nouveau boulevard à la persécution ; Portes Ouvertes a pu observer la discrimination contre les chrétiens recevant de l’assistance liée au Covid-19 en Éthiopie, en Malaisie, au Nigéria, au Vietnam et au Moyen-Orient.

En Inde, où plus de 100 000 chrétiens ont reçu de l’aide de la part de partenaires de Portes Ouvertes, on a rapporté que 80% d’entre eux ont « été écartés des points de distribution de nourriture. Certains ont dû faire des kilomètres à pied et dissimuler leur identité chrétienne pour obtenir des aliments ailleurs », observent les enquêteurs. Portes Ouvertes a également rassemblé des rapports sur « des chrétiens de zones rurales à qui on a refusé de l’assistance » au Myanmar, au Népal, au Vietnam, au Bangladesh, au Pakistan, en Asie Centrale, en Malaisie, en Afrique du Nord, au Yémen et au Soudan. « Parfois, ce refus était sous la responsabilité de fonctionnaires gouvernementaux, mais plus fréquemment cela provenait de chefs de villages, de comités ou autres instances dirigeantes locales. »

Portes Ouvertes commente :

« La pandémie mondiale a rendu la persécution plus flagrante que jamais, tout simplement parce que beaucoup de gens ont besoin de secours. La discrimination et l’oppression évidentes endurées par les chrétiens en 2020 ne devra pas être oubliée, même quand la crise du Covid-19 se sera dissipée dans la mémoire collective. »

Les confinements liés à la santé publique ont également accru la vulnérabilité de beaucoup de croyants : « Les chrétiens qui abandonnent une religion majoritaire pour suivre le Christ savent qu’ils risquent de perdre le soutien du conjoint, de la famille, de la tribu et de la communauté, et aussi celui des autorités locales et nationales », constatent les enquêteurs. « S’ils perdent des revenus à cause du Covid-19, ils ne peuvent pas se rabattre sur les réseaux coutumiers pour survivre. » Dans le même temps, les dirigeants d’Églises depuis l’Égypte jusqu’à l’Amérique Latine ont confié à Portes Ouvertes que les interdictions des offices religieux ont fait chuter les dons de 40%, réduisant leurs revenus ainsi que la capacité de leurs congrégations à procurer de l’assistance à la communauté élargie.

Commentaire de Portes Ouvertes :

« La plupart des convertis issus des religions majoritaires disent que le confinement dû à une quarantaine liée au Covid-19 les a confinés en compagnie de ceux qui s’opposaient le plus à leur foi en Jésus. Cela concerne surtout les femmes mineures et les enfants. Pour des millions de chrétiens, le travail, l’instruction et autres éléments extérieurs fournissent une brève période d’accalmie par rapport à la persécution habituelle. Aussi, quand survient le confinement, cela signifie que ce répit n’existe plus.

Nous avons aussi reçu des rapports disant que l’enlèvement, la conversion forcée ainsi que les mariages forcés de femmes et de jeunes filles se sont aggravés pendant la pandémie à cause de leur vulnérabilité accrue. En outre, des endroits d’Amérique Latine qui sont exposés aux gangs de trafiquants de drogue sont devenus encore plus dangereux pour les chrétiens, car la pandémie a diminué la présence des autorités officielles qui sont occupées à maintenir l’ordre. »

Deuxièmement ; la surveillance vidéo et numérique des groupes religieux ainsi que les progrès en matière de technologie de surveillance et la prolifération de celle-ci constitue une autre tendance marquante.

« La Chine affirme qu’elle a agi énergiquement pour contenir le Covid-19 après l’envolée du virus à Wuhan, remarquent les enquêteurs de Portes Ouvertes. Mais pour ses 97 millions de chrétiens, le coût en restrictions lourdes est élevé – surveillance jusque dans leurs maisons, pistage d’interactions en ligne et hors ligne, visages scannés pour la base de données de la Sécurité publique.

D’après le rapport :

« Les rapports de comtés dans les provinces du Henan et du Jiangxi disent que des caméras équipées pour la reconnaissance faciale sont désormais présentes dans toutes les manifestations religieuses approuvées par l’État. Beaucoup de ces caméras auraient été installées à proximité de caméras standard en circuit fermé, mais elles sont reliées au Bureau de la Sécurité publique, ce qui signifie que l’intelligence artificielle peut instantanément se connecter à d’autres bases de données gouvernementales. Le logiciel de reconnaissance faciale est relié au « Système de Conformité sociale » en Chine, qui supervise la loyauté des citoyens selon les critères du communisme. »

Pareillement, en Inde, les enquêteurs de Portes Ouvertes constatent que « les minorités religieuses redoutent que les applis qui détectent les contacts n’aient des ‘fonctions cachées’ et qu’elles ne soient utilisées pour garder l’œil sur elles et sur leurs mouvements. »

Troisièmement : la tendance à la « citoyenneté liée à la religion » a continué à se répandre. « Dans des pays comme l’Inde et la Turquie, l’identité religieuse est de plus en plus liée à l’identité nationale. Cela signifie que pour être un ‘vrai’ Indien ou un bon Turc, il faut être respectivement hindou et musulman, constatent les observateurs. Cela est souvent implicitement – voire explicitement – encouragé par les gouvernements en place. »

Commentaire de Portes Ouvertes :

« Au milieu d’un sursaut de nationalisme hindou, les chrétiens de l’Inde sont constamment sous la pression d’une propagande véhémente. Le message : ‘Pour être Indien, il faut être hindou’ signifie que des émeutiers continuent à attaquer et à harceler les chrétiens, sans oublier les musulmans. La croyance selon laquelle les chrétiens ne sont pas de vrais Indiens entraîne une discrimination et une persécution étendues souvent menées en toute impunité. L’Inde continue aussi à bloquer le flux des fonds étrangers vers de nombreux hôpitaux, écoles et organisations gérés par des chrétiens, tout cela sous le prétexte de protéger l’identité nationale indienne.

En Turquie, le gouvernement turc a également assumé le rôle de protecteur nationaliste de l’islam. À l’origine, Sainte Sophie était une cathédrale chrétienne, puis elle devint une mosquée, jusqu’à ce que la Turquie moderne décide d’en faire un musée. Mais en juillet 2020, le président turc persuada une cour d’en refaire une mosquée, renforçant ainsi le nationalisme turc… L’influence et le nationalisme de la Turquie visent à se développer au-delà de ses frontières, et très notablement dans son soutien apporté à l’Azerbaïdjan dans son conflit avec l’Arménie. »

Quatrièmement : les attaques perpétrées essentiellement pas les musulmans extrémistes se sont accrues malgré les confinements destinés à contenir le coronavirus. « Dans une grande partie du monde, la violence contre les chrétiens a effectivement diminué pendant la pandémie de Covid-19 », constatent les enquêteurs, mais les chrétiens d’Afrique sud-saharienne « ont affronté des niveaux de violence supérieurs de 30% à ce qu’ils étaient l’année précédente. »

Portes Ouvertes commente ainsi :

« Plusieurs villages du Nigéria essentiellement chrétiens ont été soit occupés soit saccagés par des bergers musulmans militants Haousa-Foulani ; parfois, des champs et des récoltes ont également été anéantis. Boko Haram – ainsi que le groupe dissident État islamique de la Province d’Afrique de l’Ouest, affilié à Daech – continuent à ravager le Nigéria et le nord-Cameroun.

Dans la région du Sahel juste au sud du désert du Sahara, l’extrémisme islamique est alimenté par l’injustice et la pauvreté. Ces groupes extrémistes exploitent les failles du gouvernement, et les djihadistes armés exercent de la propagande, font du recrutement et mènent des attaques régulières. Cette année, plusieurs groupes ont juré de faire la guerre contre les ‘infidèles’ comme les chrétiens ; ils prétendent : ‘Allah nous punit tous avec la pandémie à cause des infidèles’.

Au Burkina Faso, connu jusqu’à présent pour son harmonie interreligieuse entre musulmans et chrétiens, un million de personnes –soit 1/20e de la population – sont déplacées (et davantage encore ont faim) à cause de la sécheresse ajoutée à la violence. L’an dernier, le Burkina Faso est hélas entré dans l’Index Mondial de Persécution pour la première fois. Cette année, les extrémistes islamiques continuent à viser les églises (14 morts dans une attaque, 24 dans une autre). »

Points de comparaison entre l’Index Mondial de Persécution et les rapports analogues sur la persécution religieuse.

Portes Ouvertes pense qu’il est raisonnable de qualifier le christianisme de religion la plus gravement persécutée dans le monde. Cependant, elle note qu’il n’existe pas de documentation comparable pour la population musulmane dans le monde.

D’autres évaluations sur la liberté religieuse dans le monde corroborent nombre de constatations faites par Portes Ouvertes. Par exemple, la dernière analyse du Pew Research Center sur les hostilités gouvernementales et sociétales envers les religions a découvert que les chrétiens étaient harcelés dans 145 pays en 2018, davantage que tout autre groupe. Les musulmans étaient harcelés dans 139 pays, suivis des Juifs dans 88 pays.

En examinant les seules hostilités perpétrées par les gouvernements, les musulmans étaient inquiétés dans 126 pays et les chrétiens dans 124 pays, d’après Pew. Quand on observe uniquement l’hostilité au sein de la société, les chrétiens étaient harcelés dans 104 pays et les musulmans dans 103 pays.

Toutes les nations du monde sont scrutées par les enquêteurs de Portes Ouvertes et le personnel sur le terrain, mais une attention approfondie est accordée à 100 pays avec une accentuation particulière sur les 74 qui enregistrent de « hauts » niveaux de persécution (des scores de plus de 40 points sur l’échelle de Portes Ouvertes qui en compte 100).

Le classement de la l’Index Mondial de Persécution 2021:

Classement

Pays

1

Corée du Nord

2

Afghanistan

3

Somalie

4

Libye

5

Pakistan

6

Érythrée

7

Yémen

8

L'Iran

9

Nigeria

10

Inde

11

Irak

12

Syrie

13

Soudan

14

Arabie Saoudite

15

Maldives

16

Egypte

17

Chine

18

Myanmar

19

Vietnam

20

Mauritanie

21

Ouzbékistan

22

Laos

23

Turkménistan

24

Algérie

25

Turquie

26

Tunisie

27

Maroc

28

Mali

29

Qatar

30

Colombie

31

Bangladesh

32

Burkina Faso

33

Tadjikistan

34

Népal

35

République centrafricaine

36

Ethiopie

37

Mexique

38

Jordan

39

Brunei

40

République Démocratique du Congo

41

Kazakhstan

42

Cameroun

43

Bhoutan

44

Oman

45

Mozambique

46

Malaisie

47

Indonésie

48

Koweit

49

Kenya

50

Comores

Traduction : Philippe Malidor

Books

La Bible passe le test de Bechdel. Elle va même au-delà.

En étudiant les données des conversations des femmes dans les Écritures, voici ce que j’ai trouvé.

Christianity Today January 5, 2021
Illustration by Mallory Rentsch / Source Images: Poh Kim Yeoh / EyeEm / ZU_09 / Getty Images

Récemment, un ami demandait sur Twitter si la Bible passait le test de Bechdel-Wallace. Bien que cette question ait déjà été posée sur Internet, le tweet de mon ami m’a amené à me demander si je pouvais utiliser mes compétences en programmation biblique pour fournir une analyse des données plus approfondie que ce que j’ai pu trouver en ligne (L’une des meilleures versions vient d’une prêtresse blogueuse surnommée Paidiske).

Si vous ne le connaissez pas, le test de Bechdel « est une mesure de la représentation des femmes » dans les films et les livres. Il est basé sur une bande dessinée d’Alison Bechdel et stipule qu’une œuvre doit contenir une scène qui répond à trois critères spécifiques : (1) au moins deux femmes pourvues d'un nom qui (2) se parlent (3) à propos d’autre chose que d’un homme.

Les films de la franchise Star Wars peuvent servir d’exemple de l’utilité du test. Le premier film Star Wars a été félicité pour avoir présenté un personnage féminin fort en la personne de la princesse Leia. Cependant, le seul autre personnage féminin nommé dans le film est tante Beru, mais elle et Leia ne se rencontrent ni ne se parlent jamais. Le film échoue donc au test de Bechdel. En revanche, Le Réveil de la Force (épisode VII) comprend une scène dans laquelle Rey et Maz Kanata discutent du destin de Rey, et qui répond donc aux trois critères du test de Bechdel.

La Bible n’a assurément pas besoin de passer le test de Bechdel pour être la Parole de Dieu. Imaginer le contraire serait probablement un bon exemple de présentisme. Mais ce test peut tout de même être un moyen utile de réexaminer les récits bibliques et d'observer l'attention de Dieu à l'égard de tous les porteurs de son image.

Une partie de mon intérêt pour cette question vient du fait que j’aime jouer avec les données bibliques. Mais la raison la plus profonde est que je suis marié à une femme incroyable dont je n'ai que commencé à voir les richesses au cours des 15 dernières années, et que je suis le père d’une jeune femme véritablement remarquable qui aimerait une réponse à cette question : quelle est la place et la valeur des femmes dans le monde ? Et que dit la Bible à ce propos ?

La Bible et ses données

Pour explorer la question du test de Bechdel, j’ai utilisé un incroyable ensemble de données en libre accès, créé par Robert Rouse de viz.bible, qui intègre personnages, lieux et événements issus de la Bible. J’ai utilisé ses données pour trouver tous les passages où des femmes sont citées ensemble (premier critère de Bechdel), tous les passages où ces femmes se parlent (deuxième critère), et plus généralement tous les passages où des femmes parlent. Ensuite, j’ai examiné les recoupements pour trouver les passages qui passent pleinement le test (y compris le troisième critère) et ceux qui le réussissent partiellement pour diverses raisons. (Mon rapport de données complet est disponible sur mon blog).

Voici un résumé de ce que j’ai trouvé. La base de données de Rouse contient 3 070 personnages, dont 202 femmes. (À titre de comparaison, le Coran contient une seule femme nommée, Marie, et d’autres textes religieux comme la Bhagavad Gita n’en ont pas.) Sur les 66 livres du canon protestant, 34 sont des livres narratifs ou principalement narratifs, et 41 contiennent des personnages féminins.

En descendant au niveau des péricopes, on trouve 261 scènes où les femmes parlent, 147 scènes avec deux femmes ou plus (premier critère), 18 où les femmes parlent entre elles (deuxième critère), dont 9 où elles ne parlent pas d'un homme.

Bechdel et au-delà

La Bible passe-t-elle donc le test de Bechdel?

La réponse courte est oui ; plusieurs scènes bibliques font apparaître deux femmes nommées qui ont une conversation à propos d'autre chose que d'un homme.

La réponse longue est plus complexe mais aussi plus riche à mon avis. Bien qu’il y ait moins de personnages féminins que de personnages masculins dans la Bible et très peu de scènes qui passent sans ambiguïté le test de Bechdel, lorsque nous lisons attentivement les passages centrés sur les femmes, nous constatons que le test de Bechdel à lui seul ne raconte pas toute l’histoire. Alors que les hommes sont omniprésents tout au long des pages de l’Écriture, des femmes de foi sont toujours présentes et influentes dans les mouvements clés de l’histoire biblique, lorsque Dieu fait des pas cruciaux pour le salut de l’humanité. C’est presque comme si, dans un monde de patriarcat et de misogynie, la présence des femmes fonctionnait comme un marqueur qui nous dirait : « Faites attention ; c’est important ! »à chaque tournant de l’histoire biblique.

Le commencement

La Genèse commence par rappeler aux lecteurs que « l’homme et la femme » sont créés à l’image de Dieu (1.27). Puis dans Genèse 3, Eve parle au serpent (v. 2) et à Dieu (v. 13), sur un pied d’égalité avec Adam. Bien que ces scènes ne passent pas le test de Bechdel, mon amie et collègue Sandra Glahn suggère qu’un nouveau test serait nécessaire dans lequel un texte faisant intervenir « une femme nommée ayant une conversation avec un être qui surclasse l'homme à propos d’autre chose qu’un homme obtiendrait des points supplémentaires sur l'échelle de représentation ».

En poursuivant notre lecture, le reste de la Genèse paraît être brutal, en particulier pour les femmes qui sont souvent exploitées, sexualisées et maltraitées par les hommes ou entre elles. La Genèse expose également le démarrage du plan de Dieu pour racheter l’humanité à travers une seule famille humaine. Dans cette histoire, une scène puissante tire une partie de sa signification précisément du fait qu’elle ne répond pas au test de Bechdel.

En Genèse 12, Dieu promet qu’il fera des descendants d’Abram et de sa femme, Saraï (tous deux nommés dans Gn 11.29), une grande nation, à travers laquelle il bénira tous les peuples de la terre. Malheureusement, Abram et Saraï ne parviennent pas à croire que Dieu peut leur donner un enfant et, ce faisant, ils abusent de la servante de Saraï, Agar. Le dialogue entre Sarai et Agar n’est pas retranscrit, mais on peut aisément deviner que la conversation a dû être assez désagréable.

Cependant, les paroles ensuite attribuées à Agar font d’elle le premier personnage de l’Écriture à donner un nom à Dieu. « Elle donna à l’Eternel, qui lui avait parlé, le nom d’Atta-El-Roï car elle dit: "Ai-je vu ici la trace de celui qui me voit ?" » (Gn 16. 13).

C’est l’un des premiers cas où l'absence des critères du test de Bechdel fait précisément partie de ce qui donne à la scène toute sa force. Au coeur de la souffrance d’une femme, Dieu voit sa douleur et travaille à la racheter.

Au fur et à mesure que nous continuons à travers le début de l’histoire biblique, nous rencontrons des passages qui échouent au test de Bechdel parce qu’ils ne remplissent que le troisième critère, où des femmes nommées parlent d’autre chose que des hommes, mais parlent à des hommes ou à des foules plutôt qu’à d’autres femmes. Dans l’histoire de la naissance de Moïse, la fille de Pharaon n’est pas nommée, et sa conversation avec Miriam ne passe donc pas entièrement le test de Bechdel (Exode 2.1–10). On trouve d’autres exemples clés avec les filles de Tselophchad, femmes négociatrices, en Nombres 27 (cf. Jos 17) et dans le cantique de Deborah en Juges 5.

Juges 4 et 5 relatent les histoires de Jaël et Deborah, et bien que les deux personnages ne se rencontrent ni ne se parlent jamais, elles représentent les femmes en tant que personnes à part entière, capables d’être des épouses et des mères, mais aussi des leaders, des négociatrices, des prophètesse et des assassins sans pitié.

La bénédiction est accomplie (tout comme le test de Bechdel)

Le prochain tournant majeur de l’histoire biblique est l’établissement de l’alliance davidique et la promesse d’un roi vertueux dont le règne juste sera éternel. Cet événement majeur est précédé par et dépend du cas le plus clair de réussite des trois critères du test de Bechdel dans la Bible.

Dans les premiers chapitres de Ruth, Naomi, Orpah et Ruth parlent des hommes : leurs maris décédés, la perspective d’un futur mariage, et Boaz. Mais Naomi et Ruth échangent également à propos de leur vie, de leurs relations mutuelles et de leur travail (Rt 2.2). Au milieu de ces conversations se trouve l’un des plus beaux passages de toutes les Écritures, un passage qui véhicule la promesse que le peuple élu de Dieu apportera la bonne nouvelle à toutes les nations. Cette histoire est racontée à travers un échange entre deux veuves, toutes deux étrangères et immigrées :

Ruth répondit : « Ne me pousse pas à te laisser, à repartir loin de toi! Où tu iras j'irai, où tu habiteras j'habiterai; ton peuple sera mon peuple et ton Dieu sera mon Dieu; où tu mourras je mourrai et j'y serai enterrée. Que l'Eternel me traite avec la plus grande sévérité si autre chose que la mort me sépare de toi ! » La voyant décidée à l'accompagner, Naomi cessa d'insister auprès d'elle. (1.16-18)

Le le livre de Ruth ressort d'autant plus nettement qu'il est comme pris en sandwich entre la brutalité des Juges et des livres de Samuel, des Rois et des Chroniques. Dans ces livres, les femmes sont rarement vues en train de se parler (1 S 25.18–19), mais les femmes parlent, et une scène en particulier ressort.

En 2 Rois 22 apparaît le roi Josias, qui monte sur le trône à huit ans. Dix-huit ans plus tard, il décide de purifier le temple et, ce faisant, l’un des prêtres s'illustre en retrouvant le « Livre de la Loi » (v. 8). Après avoir été profondément touché en entendant les paroles de l'Écriture pour la première fois, ce ne sont pas les prêtres que Josias consulte. Au lieu de cela, il demande à cinq prêtres de sexe masculin d'aller quérir la sagesse de la prophétesse Hulda.

Nous avons là un autre exemple où l'échec à passer le test de Bechdel renforce la portée de l’histoire :

Le prêtre Hilkija, Achikam, Acbor, Shaphan et Asaja allèrent trouver la prophétesse Hulda. Elle était l'épouse de Shallum, le gardien des habits, le fils de Thikva et petit-fils de Harhas […] Elle leur annonça : […] « vous annoncerez au roi de Juda qui vous a envoyés pour consulter l'Eternel: ‘Voici ce que dit l'Eternel, le Dieu d'Israël, au sujet des paroles que tu as entendues : Ton cœur a été touché, tu t'es humilié devant l'Eternel […] Eh bien, moi aussi, j'ai entendu cela. » (v.14-15, 18–19))

Selon Aimee Byrd, « C’est la première fois que l'on voit la Parole de Dieu authentifiée avec autorité comme canonique, et cela advient par la voix d'une femme. C’est incroyable. »

Le Sauveur arrive

Dans les Évangiles, certains passages comme celui où Marthe dit à Marie que Jésus veut la voir (Jn 11.28) échouent clairement au test de Bechdel. Mais certaines des scènes les plus importantes le réussissent bel et bien.

L’Incarnation elle-même est marquée par une scène qui passe le test de Bechdel: la discussion entre Elizabeth et Marie à propos de leurs grossesses (Lc 1.41-45). Dans le chapitre suivant, lorsque l’enfant Jésus est amené au temple, il rencontre Siméon puis Anne. Après avoir vu Jésus, Anne est l’une des premières à exprimer l'importance théologique de ce petit bébé. On pourrait envisager que la scène passe partiellement le test de Bechdel parce qu’une femme nommée parle à des gens (vraisemblablement d’autres femmes) de la rédemption de Jérusalem :

Il y avait aussi une prophétesse, Anne, fille de Phanuel, de la tribu d'Aser. […] Arrivée elle aussi à la même heure, elle disait publiquement sa reconnaissance envers Dieu et parlait de Jésus à tous ceux qui attendaient la délivrance à Jérusalem. (2.36, 38)

En avancant vers la mort de Jésus, on assiste à une scène dans laquelle Marie-Madeleine, Marie la mère de Jacques et Salomé discutent de la pierre du tombeau qui devait être roulée. La pierre est bien sûr liée à Jésus, mais il est frappant de constater qu'au moment de l’événement le plus significatif de l’histoire de l’humanité, des femmes qui ont été nommées discutent d’un point majeur de l’intrigue :

Le dimanche, elles se rendirent au tombeau de grand matin, au lever du soleil. Elles se disaient entre elles: « Qui nous roulera la pierre qui ferme l'entrée du tombeau ? » (Mc 16.2-3)

Et enfin, dans une scène qui échoue au test de Bechdel mais qui en est d'autant plus significative, Marie-Madeleine devient la première à partager la bonne nouvelle que Jésus est ressuscité d'entre les morts :

Marie de Magdala alla annoncer aux disciples qu'elle avait vu le Seigneur et qu'il lui avait dit cela. (Jn 20.18 ; voir aussi Lc 24.10)

Il est frappant que la naissance, la mort et la résurrection de Jésus et la proclamation de son triomphe soient liées à des scènes qui passent (ou ratent ouvertement) le test de Bechdel.

L’Église primitive

Le livre des Actes raconte l’histoire du développement de l’Église, mais il ne mentionne pas de femmes dialoguant directement entre elles. Pourtant, il relate les histoires de femmes prenant des rôles importants, telle Lydie mettant sa maison à disposition de l’une des premières Églises (Ac 16.11-15) et Priscille et Aquilas donnant des cours de théologie à Apollos (18.26).

Mon algorithme révèle également deux cas de femmes qui sont dotées d'un nom et s'expriment (« saluent ») à la fin des lettres de Paul :

Les Eglises d'Asie vous saluent. Aquilas et Priscille, ainsi que l'Eglise qui se réunit dans leur maison, vous saluent chaleureusement dans le Seigneur. (1 Co 16.19)

Salue Prisca et Aquilas ainsi que la famille d'Onésiphore. […] Eubulus, Pudens, Linus, Claudia et tous les frères et sœurs te saluent. (2 Tm 4.19, 21)

On suppose que Claudia, nommée dans le passage de Timothée, était une femme d'origine britannique vivant à Rome et qu'elle faisait partie des personnes qui ont pris soin de Paul pendant son emprisonnement. Sans dialogue ni personnages nommés recevant les salutations, ces versets ne passent pas le test de Bechdel, mais ils soulignent (encore une fois) les rôles importants que les femmes jouaient dans l’Église primitive.

Un autre passage mérite d’être souligné, qui évoque sans doute deux personnages féminins importants. Dans la première lettre de Paul à Timothée, il écrit quelques-uns des mots les plus controversés de toutes les Écritures concernant les hommes (2.8) et les femmes (v. 9-12), puis il poursuit avec ceci:

En effet, Adam a été formé le premier, Eve ensuite. Et Adam n'a pas été trompé, alors que la femme, trompée, s'est rendue coupable d'une transgression. Cependant, elle sera sauvée à travers sa descendance si elle persévère avec simplicité dans la foi, l'amour et la progression dans la sainteté. (v. 13-15)

La plupart des traductions anglaises modernes rendent ce passage en insérant le pluriel « les femmes » au verset 15. Mais celui-ci n’est pas dans le grec et aucune ponctuation ne sépare ce verset du précédent. Comme dans la version ci-dessus, le verbe « sera sauvée » est au singulier (voir aussi la English Standard Version), ce qui laisse supposer qu’il doit être connecté à la dernière personne mentionnée dans le passage.

De plus, le mot traduit ici par « maternité » n’est utilisé nulle part ailleurs dans le Nouveau Testament, et sa grammaire indique qu’il pourrait ne pas faire référence à la maternité en général mais à une maternité spécifique. Citant quelques pères de l'Église et plusieurs commentateurs modernes, George Knight écrit : « La compréhension la plus vraisemblable de ce verset est qu’il fait référence au salut spirituel par la naissance du Messie ». Cela signifie que le passage doit être traduit : « Mais elle [Ève] sera sauvée par la maternité [de Marie]» (v. 15).

Bien qu’Ève ait été la première à devenir pécheresse, par la grâce de Dieu, l'instrument par lequel la tromperie est entrée dans le monde est le même instrument par lequel viendra la rédemption. Ève, comme nous tous, sera finalement sauvée par l’œuvre de Jésus, qui a démarré par une simple cellule dans le ventre de Marie.

Bien que de nombreux commentateurs rejettent cette interprétation (voir p. ex. les notes de la NET Bible), je la préfère pour deux raisons. Premièrement, cela évite le problème de devoir expliquer comment le fait de porter des enfants confèrerait le salut. Plus important encore, cette interprétation offre l’un des résumés les plus fondamentaux, les plus beaux et les plus concis de toute l’histoire biblique et nous rappelle comment Dieu sauve toute l’humanité, homme et femme, du début à la fin, en manifestant son pouvoir et son amour infinis de la plus vulnérable et intime des manières.

L’Écriture, à mes yeux, passe le test de Bechdel et va aussi bien au-delà. Dans cette scène finale où deux femmes sont rassemblées, elles ne sont pas appréciées pour ce qu’elles disent ou ce qu’elles font mais pour qui elles sont : des enfants de Dieu. Quel que soit l’état de nos conflits actuels sur l’ethnicité, le sexe, le pouvoir et l’économie, du premier pécheur au dernier, un jour, nous serons tous sauvés par Dieu le Fils qui est devenu un homme porté par une femme.

Persévérons donc dans la foi, l’amour et la sainteté.

John Dyer (PhD, Université de Durham) est doyen et professeur au Dallas Theological Seminary. Il enseigne et écrit sur la théologie, la technologie et la sociologie. Vous pouvez le suivre sur twitter @johndyer et le retrouver sur son blog. Cet article une adaptation d'un article de son blog .

Traduit par Valérie Marie-Agnès Dörrzapf Révisé par Léo Lehmann

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Semaine de l’Avent 4: Un Sauveur est né

Méditations quotidiennes pour Christianity Today.

Christianity Today December 19, 2020
Illustration by Jared Boggess

Sauter à la lecture quotidienne : Dimanche | Lundi | Mardi | Mercredi | Jeudi | Vendredi

Dimanche : Couché dans une mangeoire

Lecture du jour : Luc 2.8-20

Les temps étaient mûrs. Depuis des milliers d’années, le peuple de Dieu attendait la venue du fils suprême de David, le Roi-Messie d’Israël. Le Prince de la Paix promis. Et voilà que les rêves les plus fous que leurs prophètes avaient faits sous l’inspiration divine se concrétisaient enfin alors que le chœur des anges annonçait : Le Roi est ici ! Il est né ce jour même.

Pour l’arrivée du Messie, nous nous extasions – mais nous nous y attendons – du fait qu’un ange du Seigneur le proclame. Nous sommes ébahis – mais nous nous y attendons – à l’idée que toute une armée d’anges éclate en louanges. Il se peut même que nous nous attendions à ce que cette proclamation retentisse dans les galeries royales ou dans le temple – partout sauf dans un champ ignoré près de Bethléem… pour des bergers.

La puanteur de leurs vêtements en peaux de bêtes, leur statut social misérable et la crasse sous leurs ongles n’ont pas disqualifié ces bergers pour recevoir la parole du Seigneur. Après tout, cette bonne nouvelle d’une grande joie était « pour tout le peuple » (Lc 2.10) et, ainsi que nous le lisons plus loin, pour les « pauvres » (4.18).

Et que dit l’ange sur ce qui serait le signe de cette hyper bonne nouvelle ? Regardez la pauvreté du Messie : il sera couché dans une étable. Dans une mangeoire. Il aura la même odeur que vous, heureux bergers. Dans une condition humble. Relégué jusqu’aux marges. « Heureux vous qui êtes pauvres, car le royaume de Dieu est à vous ! » (6.20).

Et heureux sommes-nous aussi lorsque, comme les bergers, nous recevons cette bonne nouvelle et que nous nous empressons d’aller voir Jésus nous-mêmes. N’est-ce pas ainsi que nous avons commencé avec le Christ ? Nous ne comprenions pas tout ce qu’il est, tout ce qu’il a fait, et comment tout cela est censé nous transformer radicalement. Nous savions seulement que nous avions besoin de le voir, de le rencontrer. Et quand nous l’avons fait, comment pouvions-nous nous retenir de proclamer la bonne nouvelle, « en célébrant la gloire de Dieu et en lui adressant des louanges » pour tout ce que nous avions vu (Lc 2.20) ?

Cet enchaînement – entendre l’Évangile, nous empresser de rencontrer Jésus, puis proclamer l’Évangile et louer Dieu –, n’est-ce pas aussi de cette façon que nous persévérons dans la foi ? N’est-ce pas là la recette de l’adoration qui alimente notre persévérance ? N’est-ce pas le terreau où fleurit l’espérance ?

Le royaume de Dieu est rempli de récits semblables : d’humbles bergers qui deviennent des hérauts du salut respectés ; des collecteurs d’impôts et des prostituées qui deviennent amis de Dieu ; les fous et les faibles qui deviennent les sages et les forts. Jusqu’à Celui qui est notre espérance, « le Messie, le Seigneur » (2.11) qui jadis reposait dans une mangeoire.

—Quina Aragon

Méditez sur Luc 2.8-20

. Ces humbles individus choisis pour entendre l’annonce angélique, qu’est-ce qu’ils font ressortir au sujet du Christ et de son projet ? En quoi êtes-vous stimulé par la réaction des bergers envers Jésus ?

Lundi : La joie de nos désirs

Lecture du jour : Luc 2.22-38

C’est au crépuscule de la vie de Siméon et d’Anne, là où la plupart des autres auraient pu croire que la barque de leurs espérances et de leurs rêves avait mis les voiles depuis longtemps, que Dieu a fait son apparition la plus spectaculaire. C’est dans ce genre de moment où, d’un point de vue humain, tout espoir semblait perdu, que Marie et Joseph ont délicatement mis l’enfant Jésus – le Messie, réalisation de leurs espoirs et de leurs rêves – dans leurs bras. Dieu est comme ça. De manière répétée, Dieu fait des apparitions dans l’histoire et dans nos vies, quand tout semble perdu.

Peut-être, à l’instar de Siméon, avons-nous joyeusement servi et adoré Dieu pendant toute notre vie. Et peut-être aussi avons-nous ressenti que Dieu dit que ce que nous vivons avec lui n’est pas encore achevé – qu’il y a encore quelque chose à attendre.

Il se peut que, comme Anne la prophétesse, nous ayons passé toute notre vie très proches de Dieu et aussi proches que possible de son peuple. Nous avons été là où Dieu se trouve – en nous donnant aux gens avec amour – et cependant nous avons eu notre ration d’épreuves et de souffrances en cours de route. Peut-être que tous les matins nous nous levons avec de fortes attentes, mais que nous sommes constamment déçus. Peut-être que les jours s’écoulent sans que rien ne change. La vie se résume peut-être même à une longue déception. Il se peut que nous allions jusqu’à nous demander si vraiment nous avons entendu quelque chose de la part de Dieu.

Pour Siméon et Anne, en un jour ordinaire qui a démarré comme tous les autres, quelque chose a soudainement changé. Marie et Joseph sont allés au temple pour remplir les obligations de la loi de Moïse en consacrant à Dieu leur fils premier-né, Jésus. Dans ce temps qui était mûr, dans ce kairos, le Saint-Esprit a discrètement aiguillé Siméon puis Anne en direction de la sainte famille. Bien qu’ils aient été tous les deux au seuil de la mort – leur peau fripée avec les stigmates de la vieillesse, leur corps voûté, leurs mouvements ralentis et plus mesurés – Dieu s’est montré à eux avec un visage renouvelé, plein de vie, avec les yeux pétillants et une peau toute douce, sous la forme d’un nouveau-né. Imprévisible, carrément inattendu.

Le témoignage de Siméon et d’Anne nous parle, nous rappelant que Dieu continue à se montrer dans nos vies, souvent de manière inattendue. Il fait irruption, apportant une joie inimaginable dans nos jours ordinaires.

Et pas seulement dans cette vie mais aussi dans la vie à venir. Là où toutes nos espérances seront définitivement réalisées en Dieu lui-même.

Aussi, avec Siméon et Anne, puissions-nous faire retentir le sentiment exprimé dans un cantique : « Jésus, joie de notre désir ! » Toutes nos aspirations sont – et seront constamment – rendues manifestes dans le Christ, aujourd’hui et à jamais.

—Marlena Graves

Lisez Luc 2.22-38

. Attardez-vous sur l’expérience de Siméon et d’Anne en ce jour et dans les nombreuses années qui y ont conduit. En quoi leur histoire vous stimule-t-elle ? Comment leur témoignage vous inspire-t-il ?

Mardi : Une joie dérangeante

Lecture du jour : Matthieu 2.1-12

Le grand récit de la rédemption offerte par Dieu ne manque pas d’ironie. Alors même que Matthieu souligne que Jésus est le Messie promis en vertu de son lieu de naissance selon la prédiction de l’Écriture, il présente aussi à son lectorat juif un mystérieux groupe d’étrangers : des mages venus d’Orient. Immédiatement, nous voyons l’enfant Jésus qui amène les nations à venir vers lui (cf. És 11.10 ; 60.1-6).

Cette caravane de païens entre dans la Cité sainte – cœur de la vie religieuse juive et résidence d’Hérode, le soi-disant « roi des Juifs » – avec l’intention de trouver et d’adorer le véritable « roi des Juifs » (Mt 2.2). Ici, l’ironie suscite presque le rire jusqu’à ce qu’on remarque l’apparente indifférence des prêtres et des scribes à la naissance du Christ. Et jusqu’à ce qu’on voie le résultat de l’adoration mensongère d’Hérode aboutir au massacre des petits enfants.

Loin d’être anodine, l’ironie est convaincante. L’ambition des mages contraste radicalement avec celle d’Hérode. Bien que les deux parties aient été informées par les Écritures et que les deux se soient renseignées sur l’endroit où se trouve le Christ, Hérode recourt à des manipulations de couloir pour tenter d’éliminer la menace tandis que les mages se contentent de suivre l’étoile pour leur plus grande joie.

On constate aussi un contraste problématique entre la réaction d’adoration des mages et l’apparente inaction des chefs des prêtres et des scribes. Clairement, être proche de la vérité ne suffit pas. Était-il gênant pour ces spécialistes du Messie de n’avoir pas reconnu sa venue avant ces païens ? Pourquoi toute leur érudition théologique ne les a-t-elle pas mis en marche comme nous le voyons chez ces mages attentifs ? Leur capacité de réaction spirituelle était-elle obscurcie par un appétit de pouvoir et une soif de privilèges du fait qu’ils s’alliaient à un monarque tyrannique ?

« Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils seront rassasiés ! » (Mt 5.6). Telle est la réalité qui s’incarne dans ces mages païens. Leur joie a débordé en adoration quand ils ont vu ce signe d’espoir scintillant suspendu au-dessus de la maison de l’Espoir incarné (cf. Nb 24.17). Ils sont venus de loin pour s’agenouiller très volontiers devant le « roi des Juifs » qui, ainsi qu’on le verra, est aussi le « roi des nations » (Ap 15.2-4).

L’amour de Dieu est un scandale – trop massif pour être contenu, trop surprenant pour être prédit. Il fait des païens des adorateurs du Christ, et des étrangers des héros de la foi. Est-ce que nous sommes disposés à tirer enseignement de ces chefs imprévus et de leur adoration humble et généreuse ? Si c’est le cas, peut-être que nous aussi nous incarnerons une magnifique ironie – une joie dérangeante, une espérance lumineuse, qui crève les ténèbres de notre temps.

—Quina Aragon

Réfléchissez à partir de Matthieu 2.1-12

. (On peut lire aussi Ésaïe 11.10 et 60.1-10.) Qu’est-ce qui, pour vous, ressort de la réaction des mages à la naissance du Christ ? Comment l’adoration joyeuse des mages souligne-t-elle la vocation du Christ ?

Mercredi : Le combat de Noël

Lectures du jour : Matthieu 2.1-18 ; 1 Jean 3.8

Jusqu’à maintenant dans le récit de la Nativité, tout n’a été que chants et réjouissances. Des chœurs angéliques, des bergers qui se hâtent vers la crèche, et des sages qui cherchent à venir l’adorer. Mais ici, en Matthieu 2.16-18, nous recevons le rappel brutal, massif, de la raison première pour laquelle Jésus est venu dans le monde : « Quand Hérode vit que les mages l’avaient trompé, il se mit dans une grande colère, et il envoya tuer tous les enfants de deux ans et au-dessous qui étaient à Bethléhem et dans tout son territoire, selon la date qu’il s’était fait préciser par les mages » (v.16).

Dans ce passage, nous sommes confrontés à une réalité rude et dérangeante : il y a du mal et de la cruauté dans le monde. Il y a la terreur engendrée par le péché qui fait la loi dans le cœur des hommes et des femmes. Livrés à nos propres manigances et à l’influence du Malin, nous les humains, nous pouvons être adonnés au mensonge meurtrier et à la trahison. On le voit clairement dans les actions d’Hérode : ça ne pouvait guère être pire. Exactement là, en plein dans le récit de la Nativité, alors que nous sommes en train d’écouter les anges qui chantent, Satan et ses acolytes assassinent des nourrissons innombrables.

La frustration d’Hérode cède la place à la fureur, et il déchaîne cette rage impie. On ne peut qu’imaginer l’horreur qui a saisi Bethléem quand Hérode y a envoyé ses escadrons de la mort pour massacrer des petits garçons. C’est l’acte brutal et monstrueux d’un potentat sadique sous l’influence de Satan. Cette atrocité de l’histoire de Noël est un rappel cinglant qui nous est adressé, au milieu de nos chants, pour nous dire que Jésus est venu afin de mener un combat. Il y a une guerre, et Jésus est venu pour vaincre notre péché.

Noël, ce n’est pas les guirlandes et les décorations. Ça n’a rien à voir avec les paquets-cadeaux en tous genres. Noël relève de la guerre spirituelle. 1 Jean 3.8 nous dit qu’il s’agit du Fils de Dieu qui est né pour triompher de notre péché et pour détruire les œuvres du mal.

Puissions-nous célébrer la paix et la beauté de Noël. Oui, faisons la fête en chantant : « Joie pour le monde ! Le Seigneur vient. » Mais souvenons-nous aussi de cet épisode sombre dans le récit de Noël, parce que le massacre des petits enfants de Bethléem nous rappelle pourquoi Jésus est né. Oui, le Christ est venu dans le monde pour vaincre notre péché et détruire les œuvres du Malin.

—Anthony Carter

Cet article est adapté d’une prédication qu’Anthony Carter a donnée le 24 décembre 2017. Avec autorisation.

Attardez-vous sur Matthieu 2.1-18 et 1 Jean 3.8

. De votre point de vue, en quoi l’aboutissement terrible de l’histoire d’Hérode et des mages souligne-t-il la vocation du Christ et renvoie-t-il à l’Évangile ? Comment peut-il approfondir notre compréhension de l’espérance ?

Jeudi : L’Avent nouveau

Lecture du jour : Jean 1.1-18

La Parole – la source de la création, la lumière véritable – est entrée dans l’humanité sous la forme d’un bébé sans ressources né dans d’humbles circonstances. D’un point de vue humain, la naissance de Jésus est étonnante. Pourquoi lui, l’homme-Dieu, n’est-il pas apparu comme un jeune homme costaud exerçant ses muscles divins pour exécuter des actions spectaculaires à la vue de tous ? Les anges auraient pu claironner sa venue dans le monde entier ! Mais non : un chœur angélique n’a illuminé la nuit que pour une poignée de bergers isolés.

La manière dont Jésus est arrivé, sa vie parmi des Juifs du terroir et son exécution finale comme un criminel ont toutes les apparences d’un mauvais plan pour persuader le monde que c’est lui le Messie. Pourtant, Jean affirme : « la Parole s’est faite homme, elle a habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité, et nous avons contemplé sa gloire, une gloire comme celle du Fils unique venu du Père » (Jn 1.14).

La gloire dont Jean témoigne ne cadre pas avec nos conceptions humaines de la puissance et de la gloire. Quand les disciples assistent à beaucoup d’exemples miraculeux de la puissance du Christ, dans l’Évangile de Jean la plus grande démonstration de la gloire de Jésus est la croix. Jésus lui-même le dit sans détour : « ‘L’heure où le Fils de l’homme va être élevé dans sa gloire est venue… Et moi, quand j’aurai été élevé de la terre, j’attirerai tous les hommes à moi.’ Par ces paroles, il indiquait de quelle mort il allait mourir » (Jn 12.23, 32-33).

Le dépouillement stupéfiant de la crèche nous dirige vers l’humiliation de la croix. Telle est notre étrange espérance, elle est d’un autre monde : la Parole qui est née comme un enfant désarmé est le Sauveur qui est venu subir la mort d’un criminel – pour nous. Quand nous le recevons, dit Jean, nous entrons dans sa vie et dans sa lumière.

Parfois, je me retrouve parmi ces disciples de Jésus qui se débattent encore avec des questions (p.ex. Mt 28.17 ; Mc 9.24 ; Jn 20.24-29). Quand c’est le cas, je reviens à Jean 1.14. Les disciples avaient vu et côtoyé Jésus. Ils avaient mangé avec lui, voyagé avec lui, pêché avec lui, ri avec lui, pleuré avec lui – avec Dieu, face à face. Dans sa vie, sa mort et sa résurrection, Jésus les a si profondément transformés qu’ils étaient prêts à tout abandonner pour souffrir et même mourir pour lui. Cette réalité dissipe mes doutes.

Je pense aussi au miracle que nous célébrons le soir de Noël : Jésus, ce nouveau-né dans une crèche qui était « de condition divine » et qui « s’est dépouillé lui-même » pour nous (Ph 2.6-7). Je pense à l’enfant Jésus qui a grandi et qui est mort, et qui s’est relevé pour mes péchés, pour m’offrir l’espoir véritable, et tout renouveler. Dans ces moments, Jésus, fidèle et authentique, le chemin, la vérité et la vie, m’apparaît sous un jour nouveau (Ap 19.11 ; Jn 14.6). L’Avent nouveau.

—Marlena Graves

Méditez sur Jean 1.1-18

. (On peut aussi aller lire Jean 12.23-36 et Philippiens 2.6-11.) Méditez sur le mystère et la splendeur de l’incarnation. Quelles réactions d’ordre spirituel – comme l’adoration, la confiance, l’espérance – sont éveillées en vous ?

Vendredi : Le dernier Noël

Lectures du jour : Ésaïe 9.5-6 ; Luc 2.4-7 ; 1 Pierre 1.3-5, 13

Hérode et le diable ont essayé d’empêcher Noël d’avoir lieu : l’arrivée de celui qui est le Roi des rois est une perspective effrayante pour eux. Mais Noël est venu quand même. Satan n’a pas pu entraver les plans de Dieu qui étaient décidés de toute éternité. Il n’a pas pu empêcher le Christ de naître. Il n’a pas pu empêcher Jésus de mourir sur la croix. Il n’a pas pu empêcher le Christ d’être relevé d’entre les morts. Il n’a pas pu empêcher le Christ de bâtir son Église. Il n’a pas pu empêcher le Christ de vous sauver. Et Satan ne peut pas empêcher le Christ de vous ramener dans la maison du Père. Vous avez placé votre confiance dans le Roi qui non seulement est venu mais qui reviendra un jour.

En ce jour de Noël, alors que nous fêtons la naissance du Christ, nous nous intéressons au motif de sa venue. Et nous nous rappelons aussi qu’il y a un autre Noël à venir. Le Seigneur notre Dieu n’en a pas encore fini.

Quoi qu’en disent les contradicteurs, Jésus va revenir. Quoi qu’en disent ceux qui doutent, Jésus va revenir. Quoi qu’en disent les sceptiques, Jésus reviendra. Comme le dit l’Écriture : « Le voici qui vient avec les nuées. Tout œil le verra » (Ap 1.7).

Chers amis, souvenons-nous : chaque Noël est un Noël plus proche de ce dernier Noël où le Seigneur lui-même descendra du ciel avec une voix forte et avec les voix des anges et les trompettes de Dieu (1 Th 4.16). Si vous pensez que c’était retentissant et glorieux lorsque les anges ont annoncé sa naissance aux bergers, attendez donc sa Seconde Venue !

Pour ceux qui ne croient pas, la venue du Christ sera terrible. Mais pour ceux qui mettent leur confiance dans le Christ, sa venue sera un bonheur. Nous disons : « Viens, Seigneur ! » Maranatha ! (1 Co 16.22). Même si nous ne savons ni quand ni comment il viendra, nous prions : Viens, Seigneur Jésus, viens. Nous, ton peuple, nous t’attendons. Nous voulons être trouvés fidèles. Nous voulons persévérer. Viens, Seigneur Jésus.

En ce jour de Noël, nous célébrons le mystère de l’incarnation. Nous nous unissons aux bergers qui se sont empressés d’aller voir le petit enfant dans la crèche, glorifiant et louant Dieu. Nous adorons avec les mages qui se sont prosternés devant l’enfant Jésus. Nous nous réjouissons de la bonne nouvelle de la grâce pour laquelle Jésus est venu, est mort, est ressuscité. Nous vivons dans l’espérance. Et nous nous rappelons que ce Noël nous rapproche de ce glorieux Noël ultime que nous attendons. Avec tout ce qui nous est donné, nous chantons : « Viens, Seigneur Jésus, viens. »

—Anthony Carter

Cet article est adapté d’un sermon donné par Anthony Carter le 24 décembre 2017. Avec autorisation.

Reparcourez Ésaïe 9.5-6 ; Luc 2.4-7 et 1 Pierre 1.3-5, 13.

Méditez sur la prophétie d’Ésaïe à la lumière de la première venue et de la Seconde Venue que nous attendons. En quoi votre espérance du retour et du règne éternel du Christ approfondit-elle votre compréhension de sa naissance ? Comment peut-elle enrichir votre célébration de Noël ?

Auteurs :

Quina Aragon est une auteure est une artiste orale. Parmi ses livres pour enfants, signalons Love Made et, à paraître, Love Gave (février 2021).

Anthony Carter est premier pasteur de East Point Church à East Point, en Georgie. Ses deux livres sont Running for Mercy et Black and Reformed.

Marlena Graves est auteure et professeure adjointe. Elle est l’auteure de The Way Up Is Down et de A Beautiful Disaster.

Traduit par Philippe Malidor

Semaine de l’Avent 3: Emmanuel, Dieu avec nous

Méditations quotidiennes pour Christianity Today.

Christianity Today December 12, 2020
Illustration by Jared Boggess

Sauter à la lecture quotidienne : Dimanche | Lundi | Mardi | Mercredi | Jeudi | Vendredi | Samedi

Dimanche: La grandeur et la grâce

Lecture du jour : Matthieu 1.1-17

Au cours de l’Avent, alors que nous cherchons à rencontrer le Christ et à l’adorer, nous le cherchons souvent dans l’étoile brillante qui a conduit les mages vers le miracle de la mangeoire. Nous recherchons le Christ dans les présents que sont l’or, l’encens et la myrrhe. Nous le cherchons dans la cohorte céleste des anges qui chantent pour les bergers veillant sur leurs troupeaux pendant la nuit.

On ne pense pas souvent à rechercher Jésus dans sa généalogie. C’est là qu’on voit figurer de grands hommes comme Abraham, le père des croyants, le roi David, le guerrier et l’homme pieux. Pourtant, la généalogie du Messie ne fait pas seulement ressortir la grandeur mais aussi la grâce. Son ascendance ne donne pas seulement les noms des grands chefs mais aussi ceux auxquels on s’attend le moins : des gens improbables comme Tamar, une femme impure ; Ruth, une étrangère de Moab ; et Rahab, qui travaillait surtout la nuit…

Une généalogie n’est pas simplement une liste de noms qu’on survole et qu’on zappe. Les généalogies sont des paragraphes de paradoxes qui renvoient au Dieu de l’impossible. Un Dieu qui, pour notre Messie, avait eu l’idée de le faire descendre d’une lignée de rois et de têtes couronnées mais aussi de criminels et d’exclus.

La généalogie de « Jésus-Christ, fils de David, fils d’Abraham » nous invite non seulement à méditer sur le fait que Dieu a choisi des gens, des lieux et des procédés parmi les plus invraisemblables afin d’accomplir ses projets pour son peuple ; elle nous donne aussi une récapitulation des promesses et des prophéties venant du cœur d’un Dieu fidèle qui a accompli l’avenir même qu’il avait annoncé. Plus qu’un simple résumé rempli de noms, la généalogie de Matthieu révèle la prophétie réalisée d’un Messie qui « poussera de la souche d’Isaï » (ou Jessé ; És 11.1) et l’accomplissement de la promesse de Dieu faite à Abraham : « Toutes les nations de la terre seront bénies en ta descendance », et celle-ci « sera aussi nombreuse que les étoiles du ciel » (Gn 22.16, 17).

Alors, attardez-vous sur cette liste de noms. Laissez-la vous conduire dans la sanctification, là où il faut persévérer entre la naissance du Christ et son retour. Qu’elle vous rappelle que nous pouvons avoir confiance en la Parole de Dieu et en sa promesse de tirer du bien de nos vies improbables et, ultimement, de tirer du bien de ce monde improbable. Alors, prenez le temps de regarder la lignée du Christ, de remercier Dieu pour tout ce qu’il a fait, tout en attendant ce qui est à venir, dans une espérance ardente et persévérante.

Rachel Kang

Méditez sur Matthieu 1.1-17

. Prenez le temps de réfléchir aux histoires de Tamar (Gn 38), Ruth (Rt 1.1-5 ; 4.13-22), Rahab (Jos 2), David (2 S 23.1-4) et Abraham (Gn 22 ; Rm 4.1-3). En quoi la généalogie de Jésus renvoie-t-elle à son projet ? Comment augmente-t-elle votre confiance en Dieu ?

Lundi: Tenir bon

Lecture du jour : Luc 1.5-25v

Dans une société de l’instantané où on peut commander quelque chose sur Internet et l’avoir dans l’heure qui suit, on a souvent du mal à attendre. Pourtant, comme l’a dit Simone Weil, « L’attente patiente dans l’espérance est le fondement de la vie spirituelle. »

Zacharie et sa femme, Elizabeth, avaient attendu pendant très longtemps. « Ils n’avaient pas d’enfant, parce qu’Elisabeth était stérile, et ils étaient l’un et l’autre d’un âge avancé » (Lc 1.7). « Zacharie » évoque celui dont le Seigneur se souvient. L’ironie est amère ici, car bien que son nom signifie le Seigneur se souvient, dans toutes ces longues années d’attente, on avait plutôt l’impression que le Seigneur l’avait oublié.

Mais en Luc 1.5-25, tout change. L’ange Gabriel apparaît à Zacharie et dit : Tu vas avoir un fils. Cette annonce est si incroyable, si stupéfiante, que la réponse de Zacharie est : Ce n’est pas possible. C’est difficile pour Zacharie de croire que cela va arriver. Et parce qu’il ne croit pas, Zacharie attrape une sorte de laryngite angélique pour les neuf mois qui suivent jusqu’à la naissance de son fils.

L’histoire de Zacharie et Elizabeth nous rappelle qu’une attitude fidèle dans l’attente, c’est la prière. Gabriel dit à Zacharie : « ta prière a été exaucée » (v.13). Cette affirmation nous permet d’imaginer comment Zacharie et Elizabeth se sont comportés pendant ces longues années de déception : ils ont persévéré dans la prière. Ils ont prié même quand les choses ne se déroulaient pas comme ils l’attendaient. Ils se sont accrochés à Dieu, même dans un contexte de mépris social, de déception et de désespérance.

Certes, leur attente n’a pas été parfaite. Il suffit de lire le verset 20 : « tu n’as pas cru à mes paroles qui s’accompliront au moment voulu » (c’est moi qui souligne). Malgré le manque de foi de Zacharie, Dieu a quand même accompli le miracle. L’Avent nous rappelle que même si notre foi n’est pas toujours forte, Dieu est assez fidèle pour intervenir. Nous pouvons douter, déprimer, être découragés, ou avoir envie de laisser tomber, pourtant Dieu fait grâce et il intervient.

L’histoire de Zacharie et Elizabeth est belle mais elle nous laisse sur notre faim. Elle est belle parce que leur attente interminable… se termine, avec une prière exaucée. Mais elle nous laisse sur notre faim parce que nous savons que nos prières ne sont pas toutes exaucées de la même manière. Telle est la complexité de l’Avent – souffrance humaine et grâce divine – et il faut tenir les deux ensemble. Que ce soit dans cette vie ou dans la vie à venir, nous savons que Dieu fera toutes choses nouvelles. Alors, avec Zacharie et Elizabeth, on tient bon.

Rich Villodas

Cet article est adapté d’une prédication de Rich Villodas donnée le 8 décembre 2019. Avec autorisation.

Méditez sur Luc 1.5-25.

Sur quels modes pourriez-vous vous mettre dans la peau de Zacharie ou sympathiser avec sa situation ? Ce récit, que vous révèle-t-il sur Dieu, sur la souffrance, sur l’attente ?

Mardi: Une partie de l’histoire

Lecture du jour : Luc 1.26-38

Aujourd’hui, Marie est formidablement célèbre, mais il fut un temps où elle était totalement inconnue. C’était juste une paysanne adolescente de Nazareth, une localité dont certains spécialistes disent qu’elle comptait peut-être moins de 100 habitants. Comme ses camarades, Marie était probablement illettrée. Compte tenu de son statut social, elle avait toutes les chances de faire un mariage modeste, avec un ouvrier pauvre. Leur famille était vouée à connaître parfois la faim, du fait qu’il n’y aurait pas assez pour joindre les deux bouts.

Quand le Dieu de l’univers décida de prendre contact avec [PhM1] , il n’a pas abordé une jeune femme de haut rang. Au contraire, il s’est approché d’une paysanne illettrée dans un tout petit village. La généalogie de Jésus (Mt 1.1-17) nous montre que nous n’avons pas à faire partie d’une race particulière ni à être « du sérail » pour être intégrés à l’histoire de Dieu. Et quand on considère Marie, on voit qu’il n’y a pas besoin d’être riche, citadin, très cultivé ou très bien placé dans la société. On peut être tout à fait modeste et faire partie de cette histoire éternelle.

Quelle est la seule qualification que Dieu paraît exiger ? Quand l’ange Gabriel s’est présenté à Marie pour lui dire : Tu vas bientôt être la [PhM2] , Marie ouvrit son cœur et dit : Oui, qu’il en soit pour moi comme tu l’as dit. Pour être intégré à cette histoire et connaître la vie que Dieu fait naître en nous, tout ce qu’il faut, c’est dire oui. Nous devons accepter l’action du Saint-Esprit en nous.

Récemment, j’ai prononcé ce que j’appelle la Prière d’Acceptation. Je la formule ainsi : Saint-Esprit, j’accepte que tu agisses en moi, et je lâche prise sur mon désir de sécurité, d’affection et de reconnaissance, de puissance et de maîtrise. Telle était l’essence du oui de Marie à Dieu. Elle a lâché prise sur la sécurité, l’affection et la reconnaissance, la puissance et la maîtrise. La conséquence, c’est que sa réputation allait être entachée pendant le reste de son existence. Un jour, elle verrait qu’on se moquerait de son fils, qu’on lui cracherait dessus, qu’on le battrait et qu’on l’attacherait à une croix romaine. Ce serait comme une épée qui lui transpercerait l’âme (Lc 2.35). Et pourtant, elle dit oui.

Comme Marie, puissions-nous prier ainsi : « Saint-Esprit, je dis oui à ton action en moi. » Que la vie de Dieu puisse naître en nous. Puissions-nous jouer notre rôle dans le grand récit divin, pour l’éternité.

Ken Shigematsu

Cet article est une adaptation d’une prédication que Ken Shigematsu a prononcée le 25 décembre 2019. Avec autorisation.

Méditez sur Luc 1.26-38

. Si vous disiez oui comme Marie, quelle forme cela pourrait-il prendre ? Consentir à l’action de l’Esprit en vous ? Priez, accueillez l’œuvre de Dieu dans votre vie.

Mercredi: Espérer quand l’avenir s’effondre

Lecture du jour : Matthieu 1.18-24

Qu’est-ce que Joseph attendait de la vie ? Nous ne savons pas grand-chose de ce charpentier qui a vécu il y a si longtemps. Matthieu nous dit qu’il était juste et fidèle. Nous voyons d’emblée qu’il était compatissant, cherchant à protéger Marie alors même que son avenir s’effondrait. Joseph savait faire des sacrifices quand il s’agissait du devoir : devenir l’époux de Marie et le père de Jésus dans des circonstances inquiétantes. Par la suite, il dut fuir en Égypte, laissant derrière lui la famille et la maison, et travailler pour protéger ce tout petit garçon qui n’était pas le sien (Mt 2.13-15).

Nous avons un aperçu de Joseph au travers de ses choix, mais j’aurais aimé en savoir davantage. Les étranges nouvelles données par l’ange, que signifiaient-elles pour lui, et comment a-t-il pu s’y retrouver ? Joseph avait-il espéré se marier et fonder une famille ? Était-il amoureux de Marie, ou bien les fiançailles avaient-elles été arrangées par ses parents ? Le jour où il apprit qu’elle était enceinte, est-ce qu’il était consterné ? ou irrité ? ou écœuré par le retard et les complications entraînées par un divorce ?

On ne saura jamais avec certitude ce que Joseph attendait de la vie, mais ce n’était certainement par ceci : une fiancée qui tombe enceinte, un enfant à naître qui n’était pas le sien, toute une vie de commérages et d’insultes en perspective. Qui allait croire à l’histoire de l’ange ? Vous l’auriez crue ? Et lui, alors ?

Peut-être qu’il n’y croyait pas, ou pas totalement. La plupart d’entre nous n’y auraient pas cru, n’auraient pas voulu y croire, même en faisant de gros efforts. On faisait des enfants exactement comme aujourd’hui. Peut-être que Joseph luttait contre des doutes récurrents, faisant éventuellement la même prière qu’un autre père de la Bible : « Je crois, [Seigneur], viens au secours de mon incrédulité ! » (Mc 9.24).

Quoi que Joseph ait attendu de la vie, du mariage et de la paternité, nous savons que la marche à escalader était plus haute que prévu. Et pourtant, il est allé de l’avant. Joseph sut se tourner résolument vers l’espérance à long-terme selon laquelle Dieu se révélerait fidèle et véritable, qu’une rédemption lointaine serait assez puissante pour retourner toute cette souffrance et toute cette noirceur, toute cette énorme déception.

Ils donnèrent au fils de Marie le nom de Jésus, un nom courant, croyant aussi qu’il portait un autre nom : Emmanuel, et croyant que cette scandaleuse histoire de naissance serait rachetée par le scandale divin, « Dieu avec nous ». Joseph pariait sa vie, son avenir et son identité sur l’hypothèse que Dieu serait fidèle ; et que ce garçon ordinaire, source de tant de déception initiale et de bouleversements dans sa vie, était véritablement l’espérance du monde.

Catherine McNiel

Lire Matthieu 1.18-24

, en faisant travailler, dans la prière, votre imagination pour entrer dans l’histoire de Joseph. Qu’a-t-il pu penser ou éprouver ? Que nous montre-t-il sur la fidélité et l’espérance ?

Jeudi: Un chant de miséricorde et de justice

Lecture du jour : Luc 1.39-56

En Luc 1.39-56, Marie quitte sa localité d’origine pour passer du temps avec sa parente, Elizabeth. Quand elle arrive chez elle, elle apprend qu’Elizabeth est enceinte elle aussi. Et quand Elizabeth voit Marie, l’enfant qui est dans son ventre remue de joie. Elizabeth dit : « Marie, tu es bénie par Dieu. » Elle proclame et confirme les paroles de Dieu à Marie.

Et, tellement heureuse de cette rencontre, Marie se met à chanter. Elle éclate de joie sans retenue. Elle chante la bonté de Dieu, puis s’attarde sur la miséricorde de Dieu. Elle dit : « sa bonté s’étend sur ceux qui le craignent » (v.50). Elle chante : « Il a secouru Israël, son serviteur, et il s’est souvenu de sa bonté » (v.54).

Nous avons tendance à penser à la miséricorde d’une manière limitée, comme d’apporter quelque soulagement à quelqu’un qui souffre. Mais dans l’Écriture, la miséricorde va plus profond et plus loin que cela. Certes, elle parle de compassion, mais elle parle aussi de la loyauté de Dieu envers son peuple et de son amour acharné pour lui.

Le cantique de Marie est aussi un chant de justice. Elle chante : « il a dispersé ceux qui avaient dans le cœur des pensées orgueilleuses… Il a rassasié de biens les affamés et il a renvoyé les riches les mains vides (v.51, 53). Quand Marie chante, ce qu’elle dit pour l’essentiel, c’est : La justice de Dieu arrive.

Bibliquement parlant, la notion de justice évoque Dieu qui prend tout ce qui va mal dans le monde et qui le redresse. Dans le royaume de Dieu, tout est renversé. Les petits sont désormais les plus grands. Les derniers sont désormais les premiers. La justice, c’est Dieu qui prend tout ce qui est brisé et qui recolle les morceaux. Au cours de l’Avent, une période d’attente ardente, nous attendons que Dieu remette tout d’aplomb. Et cela, c’est un thème capital du cantique de Marie : Seigneur, remets tout en place.

Le cantique de Marie nous rappelle qu’il n’est pas de péché assez profond pour que Dieu n’aille pas encore plus profond. La bonne nouvelle de l’Avent, c’est que Dieu est venu et que Dieu vient en la personne de Jésus – et il propose une miséricorde qui va plus profond que notre péché. Le cantique de Marie nous rappelle aussi qu’il n’y a rien de si tordu dans le monde que la justice de Dieu ne puisse aller le redresser. Voilà pourquoi nous chantons : à cause de la miséricorde de Dieu, à cause de sa justice. Voilà pourquoi nous attendons que Jésus revienne : parce que, quand il reviendra, il rendra toutes choses nouvelles.

Rich Villodas

Cet article est adapté d’une prédication donnée par Rich Villodas le 5 décembre 2019. Avec autorisation.

Méditez sur Luc 1.39-56

. Comment le cantique de Marie, dans son accent marqué sur la miséricorde et la justice de Dieu, parle-t-il aujourd’hui dans votre vie ? En quoi apporte-t-il une espérance à notre monde qui souffre ?

Vendredi: La lumière et le roi

Lectures du jour : Ésaïe 9.1-6 ; 40.1-5 ; Luc 1.57-80 ; 3.1-6

Zacharie et Elizabeth ont appelé leur enfant Jean, ce qui signifie : « Dieu a fait grâce, il nous a témoigné sa faveur ». Rempli du Saint-Esprit, Zacharie prophétise sur son propre fils : « …tu marcheras sous le regard du Seigneur pour préparer ses chemins et pour donner à son peuple la connaissance du salut par le pardon de ses péchés, à cause de la profonde bonté de notre Dieu. Grâce à elle, le soleil levant nous a visités d’en haut pour éclairer ceux qui sont assis dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort, pour diriger nos pas sur le chemin de la paix » (1.76-79).

Quand on se transporte en avant vers la vie adulte de Jean le Baptiste, nous voyons que c’est exactement ce qu’il fait. Luc rapporte ceci :

…Jean parcourut toute la région du Jourdain ; il prêchait le baptême de repentance pour le pardon des péchés, conformément à ce qui est écrit dans le livre des paroles du prophète Ésaïe : C’est la voix de celui qui crie dans le désert : ‘Préparez le chemin du Seigneur, rendez ses sentiers droits.’ Toute vallée sera comblée, toute montagne et toute colline seront abaissées ; ce qui est tortueux sera redressé et les chemins rocailleux seront aplanis. Et tout homme verra le salut de Dieu. (3.3-6)

Ces notions reprises d’Ésaïe sur les vallées, les collines et les routes reprofilées pour préparer le chemin étaient, dans le monde antique, associées à l’arrivée d’un personnage royal. Et, de fait, le ministère de Jean était tendu vers une seule chose : affirmer qu’un roi était sur le point d’arriver.

La prophétie de Zacharie sur son nouveau-né intègre une paraphrase d’un autre passage d’Ésaïe : « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu une grande lumière, sur ceux qui habitaient le pays de l’ombre de la mort une lumière a brillé » (9.1). Les gens qui ont entendu Zacharie prophétiser en ces termes savaient exactement de quoi parlait le passage d’Ésaïe : la promesse de l’arrivée d’un roi. Cela fait partie du même passage bien connu qui annonce : « En effet, un enfant nous est né, un fils nous a été donné, et la souveraineté reposera sur son épaule… [pour le] trône de David » (v.5-6).

C’est là une immense espérance qui nous est offerte. Nous aimerions bien croire que nous pouvons fabriquer par nos propres efforts la paix et la joie auxquelles nous aspirons, mais l’histoire de Jean le Baptiste et les paroles de Zacharie et Ésaïe affirment solennellement que la paix et la joie que chaque humain attend ne seront pas réalisées avant l’arrivée du roi. Jean le Baptiste a littéralement donné sa vie pour proclamer cette vérité, afin d’aider les gens à voir une lumière qui s’apprête à briller dans les ténèbres.

Jay Y. Kim

Cet article est adapté d’une prédication de Jay Y. Kim prononcée le 9 décembre 2018. Avec autorisation.

Examinez Luc 1.57-80

en rapport avec

Ésaïe 9.1-6 ; 40.1-5

et

Luc 3.1-6.

Quelles parties de la prophétie de Zacharie ressortent le plus pour vous ? Comment ces passages font-ils passer l’espérance de l’Avent ?

Samedi: Un Dieu tangible

Lecture du jour : Luc 2.1-7

On a dit que les dieux du monde antique vivaient en dehors de l’espace et du temps, sur un registre différent de notre existence mortelle, inatteignables. Sur terre, dans l’espoir d’entr’apercevoir la divinité, les anciens avaient établi des sanctuaires – un arbre ou une montagne sacrée, un temple ou une cité sainte – qui, croyaient-ils, existaient dans les deux domaines, tels une fenêtre sur le ciel. Les gens se déplaçaient vers ces lieux saints les jours consacrés, croyant que le divin et le terrestre pourraient presque se recouper en un moment sanctifié.

Luc a bien du mal à faire comprendre que cette histoire, ce Dieu, ce mélange de divin et d’humain n’ont rien à voir avec ça. Le Créateur arrive ici, dans notre monde boueux, poussiéreux, matériel, tourmenté, terrible. Comme une sage-femme qui note soigneusement la date et le lieu de naissance, Luc dit explicitement que la naissance [PhM3] de Dieu interrompt un événement particulier, le recensement romain, dans un lieu particulier, la ville de Bethléem, dans une famille particulière, la maison de David. Jésus est né dans l’histoire, d’une femme bien précise, exactement à telle date et en tel lieu. On pourrait vite passer sur ces détails locaux, mais pour des lecteurs issus du monde païen, ce que Luc énonce pourrait prêter à confusion.

En cette nuit, Dieu ne vient pas comme les dieux anciens, sur un nuage ou dans une tempête, son pouvoir intouchable à peine aperçu au travers d’un miroir sacré. Au contraire, [PhM4] Dieu tombe dans les bras de sa mère, débarquant sur cette terre comme chacun de nous. Pendant des mois elle l’a porté, pendant des heures elle a été en travail, avec la souffrance, le sang, les douleurs, poussant jusqu’à ce que le Fils de Dieu vienne parmi nous ; c’est un nourrisson, vulnérable, fripé, et humide. Épuisé par l’épreuve et maintenant endormi mais bientôt réveillé et criant de faim.

Voilà l’incroyable nouvelle de Luc : le vrai Dieu s’est approché de nous physiquement, tangiblement, de manière à ce que nous puissions voir de nos yeux et toucher de nos mains. Dieu est arrivé dans un village où nous pourrions aller, en une année dont nous pouvons nous souvenir. La divinité a pris chair dans le ventre d’une femme, faisant irruption dans un couple, dans une nuit et dans un village, comme toute autre naissance. Dieu, nous ne le rencontrons plus dans des endroits sacrés et dans des domaines spirituels mais ici, sur la terre ferme, dans la crasse, dans nos familles de chair et de sang.

Cette idée choque, même pour nous des siècles plus tard. Il n’y a plus de séparation entre le sacré et ce monde. Nos vies quotidiennes tourmentées sont exactement le lieu où Dieu se trouve, là où il agit. C’est un Dieu que nous pouvons toucher.

Catherine McNiel

Réfléchissez à partir de Luc 2.1-7

, en examinant les détails utilisés par Luc pour situer cet événement dans l’espace et le temps. Pourquoi est-ce significatif ? Qu’est-ce que cela fait ressortir pour vous quant à Dieu ? Quant à l’Avent ?

Les auteurs :

Rachel Kang a écrit de la prose, des poèmes et autres œuvres ; elle a créé Indelible Ink Writers, une communauté de créateurs en ligne.

Jay Y. Kim est pasteur responsable de la formation à WestGate Church, professeur en poste à Vintage Faith Church et auteur de Analog Church. Il vit avec sa famille dans la Silicon Valley.

Catherine McNiel est auteure et conférencière. Elle est l’auteure de All Shall Be Well et Long Days of Small Things.

Ken Shigematsu est pasteur principal de Tenth Church à Vancouver, en Colombie Britannique, au Canada, et l’auteur de God in My Everything et de Survival Guide for the Soul.

Rich Villodas est pasteur principal de New Life Fellowship, une Église multiraciale du Queens, à New York. Il est l’auteur de The Deeply Formed Life.

Traduit par Philippe Malidor

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